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La découverte du monde > Le ciel |
De Copernic à Newton La révolution de l'astronomie aux XVIe et XVIIe siècles |
Depuis la fin de
l'Antiquité et pendant tout le
Moyen âge, le système de
Ptolémée qui plaçait la
Terre
au centre du mouvement de tous les astres avait régné en
maître. Ce n'est pas dire que l'astronomie n'avait pas progressé
pendant cette longue période. Du moins, l'astronomie
médiévale s'était-elle achevée sous l'impulsion
qui avait été donnée par Purbach
et Regiomontanus. Au début de la
Renaissance, les observations devinrent
plus nombreuses, et les perfectionnements apportés dans la construction
des instruments anciens permettaient de les faire plus exactes. Il restait
encore à détruire les théories que les siècles
avaient consacrées.
C'est Copernic qui déclencha cette révolution. Copernic retrouva dans les anciens philosophes que le centre du monde devait être le Soleil, et non la Terre; en rapportant tous les mouvements au Soleil, il simplifia considérablement le système de Ptolémée en diminuant le nombre des cercles indispensables. La plus grave objection à faire au système de Copernic résultait du mouvement de la Lune, tout d'abord autour de la Terre, puis entraînée autour du Soleil dans un mouvement général; la découverte, en 1610, par Galilée des quatre lunes ou satellites de Jupiter devait faire triompher le système de Copernic. Mais, avant Galilée, le plus grand observateur qui ait jamais existé fut Tycho-Brahé; ses observations, si nombreuses et si précises, quand on pense qu'elles furent faites à l'oeil nu, permirent à son élève Képler de découvrir les trois lois du mouvement elliptique des planètes autour du soleil. Avec Newton, la mécanique analytique intervient dans l'explication des mouvements planétaires; les lois de Képler sont mathématiquement établies. Parallèlement à ces développements théoriques, l'astronomie d'observation faisait des progrès considérables avec Huygens, Roemer, Dominique Cassini (le premier directeur de l'Observatoire de Paris), Flamsteed, etc. Copernic.
Nicolas Copernic. Le système de Ptolémée
lui paraît trop compliqué; la nature procède par des
voies plus simples, estime-t-il. En outre, il est frappé par
le manque de symétrie de ce système, par la faiblesse des
raisons données en faveur du mouvement de tous les astres autour
de la Terre
immobile, par l'inconcevable vitesse que la sphère céleste
devait avoir pour tourner autour de son axe en 24 heures. Il consulte les
ouvrages des philosophes anciens. Dans
Cicéron, il trouve qu'Hicetas,
de Syracuse, pythagoricien antérieur
à Philolaüs, croyait que la Terre
seule est en mouvement dans l'Univers, qu'elle tourne sur son axe. Il lit
dans le Satyricon de Capella que Vénus
et Mercure
tournent autour du Soleil.
Alors Copernic s'aperçoit qu'en admettant la rotation de la Terre
et des planètes
autour du Soleil les mouvements directs et rétrogrades des planètes
ne sont que des apparences résultant de la combinaison des mouvements
de la Terre et des planètes. Remarquant que Mars,
Jupiter
et Saturne
ont leur plus grand éclat à l'époque de leurs oppositions,
il pense que la Terre n'est pas le centre de leurs mouvements, et, en les
faisant tourner autour du Soleil, il trouve que leurs changements de luminosité
sont une conséquence de cette révolution.
Le Système du monde de Copernic, d'après Ch. Scheiner, Disquisitiones mathematicae, 1614. Des méditations et des observations qu'il fit pendant 36 ans, Copernic conclut que les phénomènes célestes s'expliquent facilement et avec symétrie en supposant que le Soleil est fixe au centre de l'Univers, que les planètes tournent autour du Soleil d'Occident en Orient, ces planètes étant rangées dans l'ordre suivant par rapport à leurs distances croissantes au Soleil : Mercure, Vénus, la Terre, Mars, Jupiter et Saturne; enfin que la Lune est un satellite de la Terre et qu'elle tourne autour d'elle aussi d'Occident en Orient. Ainsi il rend compte d'une manière simple des phénomènes célestes, et d'une façon satisfaisante de la diversité des saisons et de l'inégalité des jours. Il conclut du déplacement des points équinoxiaux que l'axe de la Terre ne reste pas parallèle à lui-même, et qu'à la fin de l'année sa position n'est pas celle qu'il avait au commencement. Il explique la précession des équinoxes par un mouvement des pôles de la Terre autour des pôles de l'écliptique, mais sans donner la raison même de la précession. Copernic eut de longues hésitations au sujet de la publication de son ouvrage, intitulé De Revolutionibus orbium coelestium. Il ne reçut que quelques heures avant sa mort le premier exemplaire de cette oeuvre, imprimée à Nuremberg, par les soins de son disciple Rheticus. Dans la dédicace qu'il fit de son livre au pape Paul III, Copernic, en présentant son système du Monde comme une hypothèse, expose qu'il le publie à la sollicitation de ses amis, afin de n'être pas accusé de fuir le jugement des personnes éclairées, et espère que l'autorité du pape le garantira des attaques de ses ennemis. Le Système de Copernic, que Rheticus soutint dès 1540, non plus comme une hypothèse, mais en l'affirmant, eut d'abord peu de partisans, beaucoup de détracteurs, et ne fut universellement adopté qu'un siècle après la mort du profond penseur qui l'avait proposé. Laissant de côté les noms
de quelques excellents observateurs, en exceptant toutefois celui du landgrave
de Hesse-Cassel Guillaume IV, qui fit
bâtir à Cassel un Observatoire en 1561
Tycho Brahé.
Un soir, avant le souper, comme il regardait le ciel pour voir s'il pourrait continuer ses observations après le repas, il aperçoit une nouvelle étoile; il remonte aussitôt chez lui , observe le nouvel astre (La Supernova de Tycho, dans Cassiopée), et détermine sa position, qui resta la même jusqu'en 1574 son éclat, d'abord comparable à celui de Vénus lorsqu'elle est à son maximum, diminua peu à peu, et elle finit par disparaître. Ce phénomène n'avait encore été observé que par Hipparque. (Les Novae et les Supernovae) Tycho, ayant conçu l'idée
de refaire toutes les observations de ses prédécesseurs,
fut aidé dans son projet par le roi du Danemark,
qui le rappela et lui offrit l'île d'Huène (Hven), où
il fit bâtir un château qui reçut le nom d'Uraniborg,
et qui fut doté d'une magnifique collection d'instruments. C'est
là que Tycho entreprit le travail qu'il avait projeté. Sa
première opération fut de déterminer avec exactitude
la latitude d'Uraniborg, et dans cette opération
il fut conduit à mesurer l'influence de la réfraction.
Il s'appliqua ensuite particulièrement à l'étude du
mouvement du Soleil et de la Lune.
Le Système du monde de Tycho Brahé, d'après Ch. Scheiner, Disquisitiones mathematicae, 1614. Le système de Copernic n'avait pas été généralement admis, et Tycho est compté au nombre des adversaires de ce sytème; il n'adopta cependant pas celui de Ptolémée, et, forcé de donner le sien, il supposa la Terre immobile au centre du monde; les cinq planètes et les comètes tournaient autour du soleil et étaient entraînées avec lui. Le Soleil ainsi escorté et la Lune étaient eux-mêmes emportés avec la sphère des étoiles, qui accomplissait une révolution entière en vingt-quatre heures. A la mort du roi du Danemark, Tycho, ayant été l'objet de persécutions, se réfugia dans le Holstein, où l'empereur Rodolphe lui donna une pension considérable et lui adjoignit Longomontanus et Képler. Il mourut en 1601, âgé de cinquante-cinq ans. Tycho ne fut ni philosophe ni phycicien : son système le prouve; il avait tous les préjugés de son époque, puisqu'il croyait à l'astrologie et qu'il la défendit; mais il fut grand observateur, et il fit faire un pas immense à l'astronomie, en perfectionnant les méthodes d'observation. Le calendrier
grégorien.
Tycho Brahé et Kepler. Kepler.
C'est l'observation d'une opposition de Mars qui amena Képler à étudier le mouvement de cette planète; après avoir remarqué que celle-ci ne se meut pas sur un cercle excentrique au Soleil, après avoir cherché pendant longtemps si elle ne se mouvait pas sur une certaine ovale, Képler a l'idée de prendre pour son orbite une ellipse ayant le Soleil à l'un de ses foyers, et il reconnaît que Mars suit l'ellipse qu'il a déterminée, et que les aires des secteurs limités par un arc d'ellipse et par deux rayons vecteurs sont proportionnelles aux temps que Mars emploie à parcourir ces arcs. Il vérifie qu'il en est de même pour les autres planètes, et il établit ainsi la loi de la forme des orbites des planètes et une des lois de leur mouvement : 1° Les orbites planétaires sont des ellipses dont le soleil occupe le foyer.Ce n'est qu'après 17 ans de méditations, de comparaisons, de calculs qu'il parvient à découvrir, le 15 mai 1618, une autre loi du mouvement des planètes : 3° Les carrés des temps des révolutions planétaires sont entre eux comme les cubes des grands axes des orbites.Képler fit connaître ces lois dans un ouvrage qu'il intitula Harmonique du Monde, et dans la préface duquel on lit : « Le sort en est jeté; je livre au public mon ouvrage; il sera Iu par l'âge présent ou par la postérité, peu m'importe; il pourra attendre son lecteur. Dieu n'a-t-il pas attendu six mille ans un contemplateur de ses oeuvres ? »Ces lois ne sont pas la seule contribution de Kepler : il aborda les questions les plus élevées de la mécanique et de la physique, et se trouva souvent bien près du but qui devait être atteint plus tard par Newton. Ainsi Képler est-il le premier qui ait indiqué l'attraction que la Lune exerce sur la Terre comme la cause du flux et du reflux de la mer (Les marées), et pensé que les irrégularités du mouvement de la Lune proviennent de ce que le Soleil et la Terre l'attirent. Il rechercha la cause des lois du mouvement des planètes, et les idées qu'il émit sur la gravité conduisirent Newton à la découverte de la loi de l'attraction universelle. Par ailleurs, il rechercha les lois de la réfraction, dont il étudia l'influence d'abord dans l'eau et ensuite dans l'air. -
Galilée.
En juillet 1609, Galilée, se trouvant
à Venise, apprend qu'en Hollande
on avait présenté au prince Maurice une lunette faisant paraître
proches les objets éloignés; il étudie la cause de
ce fait, et parvient à construire une lunette astronomique, qu'aussitôt
il emploie à étudier le ciel. Dix mois après, dans
le Sidereus Nuncius (Le Messager céleste), il fait
connaître ses nombreuses découvertes célestes.
Page de garde du Sidereus Nuncius de Galilée. Sa première découverte est celle de montagnes et de cratères circulaires dans la Lune, et il parvient même à mesurer géométriquement la hauteur de ces montagnes. Ensuite il s'aperçoit que la Voie Lactée est formée d'une quantité innombrable d'étoiles. Puis il constate que le Soleil
a des taches
mobiles, dont il décrit le cours. La découverte des taches
du Soleil détruisit la croyance ancienne à l'incorruptibilité
des cieux et à l'élément, dit sidéral, constituant
les astres. Du mouvement des taches du Soleil, il conclut que cet astre
tourne en 25 jours environ d'Occident en Orient autour d'un axe passant
par son centre. La recherche du temps de cette rotation a été
faite d'abord par Scheiner, puis par Castelli.
Examinant Vénus, il voit le phénomène, deviné par Castelli, des phases que présente cette planète, comme la Lune, et il en conclut, ce qu'il pensait déjà, que Vénus tourne autour du Soleil. Il est amené à croire que Mercure a aussi des phases, mais la trop faible distance de cette planète au Soleil l'empêche de les voir. Au sujet de Mars, Galilée dit lui-même qu'à l'opposition, cette planète se montre 6 fois plus grande qu'à la conjonction; il s'aperçoit que Saturne est accompagné de deux globes, qui, au bout de quelques mois, disparurent, mais dont il prédit le retour, et qui revinrent en effet, toutefois sous des formes différentes. Après avoir constaté que la Lune nous présente toujours la même face, Galilée remarque qu'elle est soumise à une oscillation, appelée par lui libration; mais la cécité qui l'atteint alors, quatre ans avant sa mort, l'empêche d'étudier ce phénomène. Ses découvertes sur les planètes lui fournissent les explications, si conformes à la raison et aux lois de la nature, de la rotation de la Terre autour de son axe en un jour et autour du Soleil en un an. Mais son opinion en faveur du système de Copernic, bien qu'appuyée sur des raisonnements irréfutables, est, dès 1616, condamnée par la Congrégation de l'index qui, en même temps qu'elle suspend l'ouvrage de Copernic, prohibe tous les écrits soutenant le mouvement de la Terre. Cependant Galilée
publie en 1632 son ouvrage intitulé Dialogo sopra i due massimi
Sistemi del Mondo, où deux défenseurs du système
de Copernic et un péripatéticien, partisan de celui de Ptolémée,
exposent avec clarté les raisons favorables à leurs idées.
Peu de temps après la publication de lo sfortunato Dialogo
(c'est ainsi que Galilée lui-même le qualifie), son auteur
est appelé à Rome, retenu dans
le palais de l'Inquisition et forcé,
le 22 juin 1633, de se rétracter en jurant que soutenir que le Soleil
est immobile et occupe le centre du Monde et que la Terre n'est pas immobile
au centre du Monde, ce sont là des doctrines fausses et hérétiques.
Une légende veut qu'en se relevant il ait dit à mi-voix :
e pur si muove.
Descartes.
« Je m'étais proposé, dit Descartes dans une de ses lettres, de vous envoyer mon Monde pour vos étrennes; il n'y a pas plus de quinze jours que j'étais encore tout résolu de vous en envoyer au moins une partie, si le tout ne pouvait être transcrit pour ce temps-là. Mais je vous dirai que, m'étant fait enquérir ces jours passés à Leyde et à Amsterdam si le Système du monde (les Dialogues) de Galilée ne s'y trouverait point, parce que j'avais appris qu'il avait été imprimé en Italie l'année dernière, on m'a mandé qu'il était vrai que le livre avait été imprimé, mais que tous les exemplaires en avaient été brûlés à Rome dans le même temps, et l'auteur condamné à quelque amende ; ce qui m'a si fort étonné, que je me suis presque résolu de brûler tous mes papiers, ou du moins de ne les laisser voir à personne. Car je n'ai pu m'imaginer qu'un homme qui est Italien et, qui plus est, très bien venu du pape, à ce que j'apprends, ait pu être criminalisé pour autre chose que parce qu'il aura voulu établir .le mouvement de la Terre, que je sais avoir été contesté - autrefois par quelques cardinaux. Mais je croyais avoir ouï dire que depuis ce temps-là on ne laissait pas de l'enseigner publiquement, même dans Rome; et j'avoue que si ce sentiment du mouvement de la Terre est faux, tous les fondements de ma philosophie le sont aussi, parce qu'il se démontre par eux évidemment; il est tellement lié avec toutes les parties de mon Traité, que je ne l'en saurais détacher sans rendre le reste tout défectueux. Mais, comme je ne voudrais pour rien au monde qu'il sortit de moi un discours où il se trouverait le moindre mot qui fût désapprouvé par l'Église; aussi aimé-je mieux le supprimer que de le faire paraître estropié. »On voit que Descartes, confronté au totalitarisme religieux, n'eut pas le courage de ses idées. Riccioli.
Après s'être fait croire à lui-même qu'il a réfuté tous les arguments de Copernic, Riccioli prétend prouver directement que la Terre est immobile. A cet effet, il commence par rappeler les objections de Ptolémée sur le vol des oiseaux, sur le mouvement des nuages, etc.; puis il ajoute avec un imperturbable esprit dogmatique : « La Terre est de tous les corps le plus grave. L'éclipse de Soleil, à la mort de Jésus-Christ, fut totale pendant trois heures, l'Évangile le dit. Si la Terre tournait, l'éclipse aurait duré beaucoup moins. »Les autres objections sont à l'avenant. « Au reste, dit Riccioli, il n'est pas encore de foi que le Soleil tourne autour de la Terre immobile. Il faudrait pour cela un bref du pape ou le décret d'un concile. »Mais pourquoi alors, nous le demandons, le tribunal de l'Inquisition avait-il condamné Galilée comme suspect d'hérésie? Scheiner.
Longomontanus.
Liceti.
Boulliaud.
Tel est ce que Boulliaud appelle son Hypothesis nova et vera. Cette singulière hypothèse a inspiré à Bailly les réflexions suivantes : « L'espèce humaine, prise en masse depuis son origine, est attachée aux idées de sa jeunesse [....] Ni Boulliaud, ni Riccioli n'entendaient Kepler. Ils ne parlent point des aires décrites autour du foyer et proportionnelles au temps. C'est donc en vain qu'on découvre des vérités; on parle à ses contemporains, ils n'écoutent pas. »En expliquant les principales inégalités de la Lune, Boulliaud se mit en contradiction avec Kepler. Ainsi, il suppose que le foyer de l'orbite lunaire, où est placée la Terre, se dérange pour décrire un certain circuit par lequel le foyer et le centre de l'ellipse se déplacent. Par suite de cette altération de la courbe, la Lune ne resterait pas constamment, au foyer de l'ellipse de la Terre, comme le Soleil au foyer des ellipses des planètes. Ces idées de Boulliaud provoquèrent une vive polémique de la part d'un astronome anglais, Seth Ward, auteur de l'Astronomia geometrica, qua primariorum planetarum astronomia sive elliptica, sive circularis possit geometrice absolvi, etc.; Londres, 1656. Deusing.
« Nous dirons à notre tour, ajoute Delambre, que ce n'est pas trop la peine, après toutes les concessions que l'auteur fait à Copernic, et toutes les explications qu'il lui emprunte, de supprimer le mouvement annuel. »Morin. Jean-Baptiste Morin (1583-1656) s'adonna à l'astrologie, ce qui le mit en rapport avec de grands personnages, et succéda, en 1630, à Sinclair, dans la chaire de mathématiques, au collège Royal de France. Adversaire déclaré du système de Copernic, il soutenait, avec une vivacité extrême, contre Gassendi et Bernier, l'immobilité de la Terre, dans son Famosi problematis de telluris motu vel quiete hactenus optata solutio; Paris, 1631, in-4°. Cet écrit provoqua de vives critiques. Morin y répondit par Responsio pro telluris motu (1634), et par Tycho Braheus in Philolaum pro telluris quiete (1642). Gassendi entra en lice, suivi de près par ses amis Bernier et Laurent de Mesmes; la discussion dégénéra en une querelle violente, qui fit beaucoup de bruit. Poussé dans ses derniers retranchements, Morin lança contre Gassendi un grand nombre de diatribes, telles que Ala telluris fracta (1643); De atomis et vacuo (1650); Panurgi Epistola de tribus impostoribus (1654), etc. - Page de garde du Tycho Braheus in Philolaum pro telluris quiete, de Morin. Morin suscita une querelle non moins vive au sujet de la détermination des longitudes. Mais cette fois ses adversaires (parmi lesquels on remarque Mydorge et Beaugrand) eurent les torts de leur côté. La méthode de Morin consistait à observer en même temps ou dans des temps très rapprochés la hauteur de la Lune, celle d'une étoile dont la position était suffisamment connue, ainsi que la distance de l'une à l'autre. « Au moyen de ces éléments, ajoute Montucla, il montrait comment, à une heure quelconque, en mer , on pouvait déterminer la déclinaison et l'ascension droite de la Lune, conséquemment sa latitude et sa longitude, ou son lieu dans le ciel. Il fallait calculer ensuite, d'après les meilleures tables, celles de Kepler par exemple, l'heure à laquelle la Lune avait cette même position dans le ciel, pour le lieu auquel ces Tables étaient destinées, et dont la longitude était connue. La différence des temps convertie en degrés devait donner la longitude du vaisseau pour le moment de l'observation. »L'ouvrage où Morin a exposé sa méthode a pour titre Astronomia jam a fundamentis integra restituta, complectens IX partes hactenus optate scientiae longitudinum coelestium ; Paris, 1640, in-4°. En 1634, le cardinal Richelieu, qui protégeait Morin, nomma une commission de savants pour examiner sa méthode des longitudes. Les commissaires rendirent d'abord un rapport favorable; puis ils se ravisèrent, et, dans un nouveau rapport, ils traitèrent Morin avec une sévérité regrettable. Ce qu'il y a de certain, c'est que sa méthode laisse beaucoup à désirer, et qu'il est loin d'avoir résolu le problème qu'il s'était proposé. Schyrle
de Rheita.
Il s'est borné à retourner le système de Tycho, à peu près comme Tycho avait retourné celui de Copernic; en supprimant les épicycles, il les remplace par des hypocycles; au lieu de faire tourner sur l'excentrique le centre d'un petit épicycle, il fait tourner le cercle de l'excentrique sur la circonférence d'un petit cercle auquel il ne donne pas de nom. Toutes ces hypothèses ne sont accompagnées d'aucune démonstration, ni d'aucun calcul. Il faut les mettre sur la même ligne que ses huit satellites de Jupiter, qu'il dédia au pape Urbain VIII, sous le nom d'Astres Urbanoctaviens. Voici cependant quelques idées qui méritent d'être signalées. Rheita pense que les étoiles ont des mouvements propres que l'énormité de leur distance nous empêche de distinguer; que les étoiles changeantes ou périodiques (Les étoiles variables) pourraient bien avoir de grandes orbites et de longues révolutions; enfin, que dans le système de Copernic la chaleur devrait être proportionnelle au rayon du parallèle terrestre; elle serait absolument nulle aux pôles, où le parallèle se réduit à un point; car, ajoute-t-il, c'est le mouvement qui produit la chaleur. Rheita construisit le premier une lunette astronomique d'après les données de Kepler. Les termes d'oculaire et d'objectif, appliqués aux deux verres dont le dernier est tourné vers l'objet et le premier vers l'oeil de l'observateur, viennent de lui. Il raconte qu'en 1642 il vit, à Cologne, passer devant le Soleil une troupe (turmam) de points sombres qui se succédèrent pendant quatorze jours, et que l'éclat du Soleil en était considérablement affaibli. Ce capucin astronome n'est pas éloigné de croire que les planètes sont habitées. « Si Jupiter a, dit-il, des habitants, ils doivent être plus grands et plus beaux que les habitants de la Terre, dans la proportion des deux globes. »Mais il n'ose affirmer leur existence, à cause de certaines difficultés théologiques; il se demande, par exemple, s'ils ont su se maintenir dans leur état primitif d'innocence, ou s'ils sont déchus comme nous. C'est dans son Oculus Enoch, à propos de son binocle astronomique (oculus astronomicus), qui était une lunette à deux oculaires, que Rheita rapporte, le premier, l'histoire de Jean Lippens de Zélande, qui, ayant par hasard combiné un verre convexe avec un verre concave, vit les objets à la fois plus gros et plus rapprochés. Avec ces deux lentilles placées dans un tube, il faisait voir aux passants le coq du clocher. Le bruit de cette invention s'étant répandu, les curieux venaient en foule pour admirer ce prodige. Le marquis de Spinola acheta la lunette et en fit présent à l'archiduc Albert d'Autriche. Les magistrats de la localité mandèrent l'opticien et lui payèrent chèrement une lunette pareille, mais à la condition qu'il en garderait le secret. C'est ainsi que l'invention fut tenue secrète jusqu'au moment où Galilée en eut connaissance. Tel est le récit de Schyrle de Rheita. Nous ne dirons rien de sa Theo-astronomia, opus theologis utile et jucundum, dédiée à la Vierge Marie. Delambre l'appelle, en propres termes, une capucinade. Argoli.
Le Système du monde d'Argoli (1644), Levera.
Billy.
Les taches du
Soleil.
Le P. Scheiner prit un pseudonyme probablement pour ne pas heurter l'idée aristotélique de l'incorruptibilité des cieux. On raconte qu'ayant demandé au provincial de son ordre, au P. Budée, l'autorisation de publier ses découvertes, celui-ci lui aurait dit :Dans cette dissertation on trouve indiqué l'emploi des verres bleus pour regarder le Soleil; ce moyen avait été déjà recommandé par Apian. Du reste, l'auteur revint sur l'observation des taches du Soleil, distingua les taches des facules, et en fit, avec un zèle louable, l'objet d'observations multipliées, comme l'atteste sa Rosa Ursina, sine Sol ex admirando faculorum et macularum suarum, etc. (Bracciano, 1626, in-fol.).« Bah! j'ai lu et relu Aristote, et je n'y ai rien trouvé de pareil. Tranquillisez-vous, mon fils, il n'y a de taches dans le Soleil que celles qu'y mettent vos yeux ou les verres de votre nouvel instrument. » - Taches observées par Galilée sur le Soleil, le 25 juin 1612. Ci-dessous, la vision plus imaginative de Kircher (1664), qui pensait que les taches du soleil étaient de la fumée évacuée depuis les profondeurs de l'astre par des sortes de volcans. Si les questions de priorité, où les sentiments de l'amour-propre et de vanité jouent un si grand rôle, ne sauraient être résolues que par des documents imprimés ayant date certaine, l'astronome qui découvrit les taches du Soleil et leur mouvement concomitant avec la rotation de cet astre, ce n'est ni Galilée ni Scheiner; c'est Johann Fabricius. L'écrit où Fabricius rend compte de sa découverte parut au mois de juin 1611 à Wittemberg, sous le titre : De maculis in Sole visis et earum cum Sole revolutione narratio (in-4°). La date de l'impression de cet écrit reporte celle de la découverte au moins à la fin de 1610 ou au commencement de 1611. Kepler ne pouvait pas rester étranger à la question des taches solaires. Voici, en effet, ce qu'il écrivit, dès 1613, au P. Malcot : « Non seulement les taches ne se meuvent pas parallèlement à l'écliptique, mais elles n'ont pas toutes exactement la même vitesse. Conséquemment elles ne tiennent pas à la surface du Soleil, sans en être pourtant séparées par un intervalle sensible. Par ces raisons et parce que ces taches tantôt apparaissent sur le Soleil, tantôt s'évanouissent, qu'elles s'étendent et se raréfient çà et là en changeant sensiblement de figure, il est aisé de conclure qu'elles doivent être quelque chose d'analogue aux nuages de notre propre globe terrestre, nuages qui ont dans l'atmosphère un mouvement particulier, différant plus ou moins de la rotation terrestre. Ces fumées opaques sortent-elles des corps incandescents du Soleil? Dieu seul le sait; car le raisonnement par analogie ne peut pas s'étendre jusque-là avec sécurité. »Faye (Annuaire du Bureau des longitudes pour l'an 1873, p. 453) fait remarquer avec justesse que ce passage de Kepler contient le fond même des idées qui ont eu un instant le plus de crédit auprès d'un grand nombre des astronomes du XIXe siècle sur la nature et le rôle des taches solaires. L'observation des taches du Soleil fut continuée par Tarde et Malaperluis. L'un et l'autre les prenaient pour de véritables planètes. Le premier, chanoine de Sarlat, les appelait Astres bourboniens (Borbonia sidera, id est planetae qui Solis lumina circumvolitant motu proprio et regulari, falso hactenus ab helioscopis maculae Solis nuncupati; Paris, 1620). Le second, jésuite belge, les nommait Astres austriens, les considérant aussi comme de petites planètes, très voisines du Soleil (Austriaca sidera heliocyclica astronomicis hypothesibus illigata; 1633). Il se servait, comme le P. Scheiner, d'un fil à plomb pour marquer le vertical du Soleil. Plus tard, le P. Kircher (né en 1602, à Geisa, près de, Fulda, mort à Rome en 1680), qui a écrit sur presque toutes les sciences, a traité de la gnomonique dans son Ars magna lucis et umbrae; Amsterdam, 1675, in-fol. Il y parle aussi des taches du Soleil, qu'il compare aux scories qui se forment sur un métal en fusion; et il rapporte, d'après les chroniques, des périodes où le Soleil, par un ciel serein, n'émettait qu'une lumière comparativement très faible. Au milieu des controverses d'alors, le savant jésuite allemand laissa prudemment à l'écart la question du mouvement de la Terre. Découverte
des étoiles variables.
En 1603, Bayer dessina, dans son Uranometria, au col de la Baleine, à la place même où avait disparu l'étoile de D. Fabricius, une étoile de 4e grandeur, qu'il appela o (Omicron). J.-Ph. Holwarda, professeur à Franeker, vit la même étoile, au commencement de décembre 1638, pendant une éclipse de Lune; elle surpassait alors en éclat les étoiles de 3e grandeur. Elle descendit rapidement à la 4e grandeur et n'était plus visible vers le milieu de l'été de 1639. - Omicron Ceti, répertoriée comme étoile de quatrième magnitude dans l'Uranometria de Bayer. Les observations d'Holwarda, suivies de celles de Fullenius et de Jungius (de 1641 à 1648), et plus tard des observations plus détaillées d'Hévélius (de 1646 et 1682), mirent hors de doute un fait décisif contre la théorie de l'inaltérabilité des corps célestes, à savoir qu'il y a des étoiles soumises à des alternatives périodiques de disparition et de réapparition. Hevélius publia, ses observations sous le titre d'Historiola mirae Stellae, etc. C'est de là que l'étoile périodique du col de la Baleine a pris le nom de Mira Ceti (= l'admirable de la Baleine). Ce ne fut qu'en 1667 que Boulliaud, l'auteur de l'Astronomie Philolaïque, parvint, en discutant les diverses observations faites depuis une cinquantaine d'années, à déterminer l'intervalle qui s'écoule entre deux disparitions consécutives d'Omicron de la Baleine : cet intervalle est de 333 jours, et la durée de la plus grande clarté d'environ 15 jours. Simon Marius.
Découverte
des premières nébuleuses.
« Le 15 décembre de l'an 1612, j'aperçus, dit-il, une étoile fixe, telle que le n'en avais jamais vu; elle est voisine de la troisième et de la plus boréale de la ceinture d'Andromède. A l'oeil nu, elle paraît comme un petit nuage. Avec la lunette on n'y voit aucune étoile; on n'y distingue que des rayons blanchâtres, qui sont plus brillants vers le centre, et la lumière s'affaiblit vers les bords; elle a un quart de degré de diamètre; elle ressemble à une chandelle vue de loin et de nuit dans une lanterne de corne. »Ce ne fut qu'après un intervalle de près d'un demi-siècle que Huygens découvrit, en 1656, la seconde nébuleuse, près de la garde de l'Épée d'Orion, autour de l'étoile marquée Thêta. Voici comment Huygens s'exprime sur la nébuleuse d'Orion (M 42) dans son Systema Saturninum, publié en 1659 : « Les astronomes ont compté dans l'Épée d'Orion trois étoiles très voisines l'une de l'autre. Lorsque, en 1656, j'observai par hasard celle de ces étoiles qui occupe le centre du groupe, au lieu d'une j'en découvris douze, résultat que d'ailleurs il n'est pas rare d'obtenir avec les télescopes. De ces étoiles, il y en avait trois qui, comme les premières, se touchaient presque, et quatre autres semblaient briller à travers un nuage, de telle façon que l'espace qui les environnait paraissait beaucoup plus lumineux que le reste du ciel, qui était entièrement noir. On eût cru volontiers qu'il y avait une ouverture dans le ciel qui donnait jour sur une région plus éclairée. »En 1665, Hévélius découvrit la troisième nébuleuse; elle est située entre la tête et l'arc du Sagittaire (l'amas globulaire M 22). Halley, pendant qu'il travaillait au Catalogue des étoiles du ciel austral, découvrit, en 1681, la quatrième nébuleuse (encore un amas globulaire, Omega Centauri), située Centaure; et Godefroy Kirch en aperçut une autre, dans la même année, dans la constellation du Serpent, près du pied droit ou boréal d'Antinoüs (auj. constellation de l'Aigle), l'amas globulaire M 5. Il n'y eut donc, en tout, que cinq nébuleuses de découvertes durant le XVIIe siècle. Ces singulières lueurs, « ces cieux vus à travers des ouvertures de notre ciel », avaient été pour la première fois aperçues à l'aide du nouveau et puissant levier de découvertes employé par Galilée. Cet instrument n'était pas, pour le répéter, un télescope proprement dit (où les images ne se voient que par réflexion), mais une véritable lunette (où les images se voient par réfraction). Voici ce qu'on lit dans le Mundus Jovialis sur la lunette dont s'était servi Simon Marius : « En 1608, pendant la foire d'automme de Francfort-sur-le-Mein, le général Fuchs de Bienbach, grand amateur de mathématiques, apprit d'un marchand belge qu'on venait d'inventer un instrument qui grossissait les objets en les montrant rapprochés. Le général voulut acheter une de ces lunettes; mais le marchand y mit un prix trop élevé, et le marché ne fut pas conclu. De retour chez lui, à Onolzbach, l'amateur en parla à Marius, et lui dit que l'instrument avait deux verres, l'un concave et l'autre convexe, dont il lui dessina même la figure. Marius se mit dès lors à assortir des verres de cette forme et s'assura de la possibilité de ce qu'on lui avait raconté; mais son oculaire étant trop convexe, il en demanda un autre aux opticiens de Nuremberg, qui ne purent lui fournir ce qu'il désirait. L'été suivant (1609), le général Fuchs reçut de la Belgique une lunette assez bonne, dont il se servit avec Marius pour explorer le ciel. »Ce fut dans la même année de 1609 que Galilée avait, pour la première fois, entendu parler des lunettes belges. Gassendi.
Ses hésitations pusillanimes à se prononcer franchement pour le système de Copernic illustre bien sous quel règne de terreur l'Eglise plaçait les intelligences. Comme Descartes, ce n'est que dans l'intimité ou dans sa correspondance privée que Gassendi osait se déclarer copernicien. Mais dans ses ouvrages imprimés qui, tel que son Institutio astronomica, devaient passer sous les yeux de la congrégation de l'Index, il se montrait beaucoup moins affirmatif. Il préférait sans doute le système de Copernic à tout autre; « mais, ajoute-t-il, il est contraire à l'Ecriture; en conséquence, et pour obéir, je me vois contraint de donner la palme à Tycho ». On voit que la soumission du prêtre avait pris le pas sur le discernement du philosophe. Gassendi avait reçu les Dialogues de Galilée par l'intermédiaire de son ami Diodati. Il ne put s'empêcher d'en manifester librement son admiration. « Nulle objection, écrivit-il à Galilée, ne tient devant vos principes; les démonstrations et les hypothèses de tous les anciens sont des puérilités et des rêveries, quand on les compare à vos arguments. »Mais cet enthousiasme se refroidit singulièrement à la première nouvelle de la condamnation de Galilée. Les paroles de consolation que Gassendi transmit à Galilée, dans une lettre du mois de février 1634, sont loin de respirer le courage du génie : il lui conseille, avec Horace, la patience et la résignation : Durum, sed levius fit patientia. Plusieurs lettres de Descartes, qui, comme nous avons vu, ne fut guère plus courageux, attestent la profonde impression que fit sur Gassendi la sentence de l'Inquisition. Son imagination s'exalta; il vit son repos troublé, sa chère liberté compromise, et pensa à brûler tous ses papiers. Le P. Mersenne, publiant, en 1634, un livre intitulé : Questions théologiques, physiques, morales et mathématiques, fit supprimer au plus vite l'analyse du premier dialogue de Galilée, qu'il avait donnée dans les premiers exemplaires. Première observation du passage de Mercure devant le disque du Soleil. Ce qui assigne à Gassendi une place distinguée dans l'histoire de l'astronomie, c'est d'avoir le premier observe le passage de Mercure sur le disque du Soleil. Il en a publié les détails dans un opuscule intitulé : Mercurius in Sole visus, Parisiis, pro voto et admonitione Kepleri. « Le rusé Mercure, écrivait-il joyeusement à Schickhardt, professeur d'hébreu à Tubingen, voulait passer sans être aperçu : il était entré (dans le Soleil) plus tôt qu'on ne s'y attendait; mais il n'a pu échapper sans être découvert, eurêka kai eôraka; je l'ai trouvé et je l'ai vu, ce qui n'était arrivé à personne avant moi, le matin du 7 novembre 1631. » Par les mots eurêka kai eôraka ( = j'ai trouvé et j'ai vu), Gassendi faisait allusion aux travaux des alchimistes qui cherchaient à marier (combiner) le vif-argent (Mercure) avec l'or (Soleil). Début de la lettre de Gassendi à Schickhardt sur le passage de Mercure devant le Soleil. La date du passage de Mercure et de celui de Vénus avait été annoncée par Kepler. Gassendi s'était préparé à l'observer. A cet effet, il avait divisé en 60 parties le diamètre d'un cercle tracé sur un papier blanc qui devait recevoir l'image du Soleil par le tuyau d'une lunette; la circonférence de ce cercle était divisée en 360 degrés. Un aide placé dans un étage supérieur, avec un quart, de cercle de dix pieds de rayon, était chargé de lui donner le signal quand il verrait Mercure, et de saisir avec son quart de cercle les mouvements du Soleil, pour avoir les hauteurs pour chacun des instants d'observation. Le 7 novembre, dans la matinée, le ciel était couvert de nuages; il s'éclaircit un peu vers 9 heures, et l'observateur put recevoir l'image du Soleil sur le carton; il y, aperçut, à la distance d'environ un quart de diamètre du bord inférieur, un point noir qui avait un peu passé le vertical. Il le prit d'abord pour une simple tache du Soleil; mais il changea d'opinion, quand il vit le point noir se déplacer : il put ainsi se convaincre que c'était Mercure; seulement il se l'était imaginé beaucoup plus gros. Il donna le signal convenu; mais l'aide n'était plus à sa place; Gassendi l'appela, et l'aide eut le temps de s'installer avec son quart de cercle avant que Mercure eût quitté le disque du Soleil. Mercure lui parut noir au milieu, rougeâtre au bord et d'un diamètre d'environ 20". Au moment où Mercure quitta le disque lumineux, le Soleil était à 21° 42' de hauteur, correction faite de la réfraction; d'où Gassendi conclut la sortie de Mercure à 32° ou 33° du vertical, à 10 heures 28 minutes du matin. « Qui pourrait, s'écrie ici Gassendi, s'imaginer que ce Mercure, qu'on appelle trismegiste (trois fois très grand), fût si petit? On devrait plutôt le nommer trisélachiste (trois fois très petit). »De fait, un objet rond et obscur, d'une telle petitesse, n'est pas visible à l'oeil nu, lors même qu'il se projeterait sur le Soleil. Pour l'apercevoir, il fallait l'artifice employé par Gassendi, et imaginé par le P. Scheiner : recevoir l'image agrandie du Soleil sur une feuille de papier blanc. Aussi n'est-il guère probable qu'Averroès ait, comme on l'a dit, le premier aperçu Mercure sur le Soleil. La seconde observation de ce remarquable phénomène, d'une si grande utilité pour calculer exactement l'orbite de la planète, fut faite en 1651 par Skakerlaeus, qui, pour en être témoin, se rendit tout exprès à Surate, en Inde. La troisième observation fut faite en 1661 par Hévélius, qui, comme Gassendi, se contentait d'examiner l'image agrandie du Soleil dans une chambre obscure. Huygens.
Figure du Systema Saturnium dont Huygens se sert pour expliquer les aspects changeants de l'anneau de Saturne à différents moments de la révolution de la planète autour du Soleil. Il accepta l'invitation que Louis XIV et Colbert lui firent de se fixer à Paris. Dans cette ville, pendant l'année 1673, il publia son ouvrage le plus renommé, Horologium oscillatorium, dans lequel il donne la théorie de la force centrifuge et celle du pendule, puis propose et explique l'application du pendule aux horloges pour en régulariser le mouvement. L'Académie des Sciences avait délégué Richer en 1672 à Cayenne, afin d'y observer Mars à l'instant où cette planète serait observée à Paris, pour déduire de ces observations la parallaxe de Mars et par suite la distance de la Terre au Soleil. Mais on trouva un nombre incertain pour cette parallaxe. Ce pénible voyage eut cependant un résultat scientifique, car Huygens, d'après ses théories sur la force centrifuge, montra que la Terre est renflée à l'équateur, en s'appuyant sur cette observation de Richer que le pendule battant la seconde est plus court à Cayenne qu'à Paris. Contraint à quitter la France après la révocation de l'édit de Nantes, Huygens retourna en 1685 aux Pays-Bas, où il publia en français son Traité de la Lumière (1691). Römer
Cassini.
Dans l'église de Sainte-Pétronille, à Bologne, Cassini, avec un soin tout particulier, a établi de 1653 à 1655, le plus grand gnomon et tracé la plus longue méridienne qui existaient, et avec lesquels d'autres astronomes ont après lui fait d'utiles découvertes. Ce gnomon et cette méridienne lui ont permis de montrer que le mouvement apparent du Soleil n'est pas uniforme, et de construire en 1662 des Tables du Soleil plus parfaites que celles que l'on avait, car il tint compte des réfractions astronomiques, après avoir reconnu qu'elles se manifestent jusqu'au zénith. Cassini commença en 1665 l'étude
approfondie des satellites de Jupiter, puis détermina l'inclinaison
du plan de leurs orbites et les périodes de leurs mouvements; mais
ce n'est qu'en 1693 qu'il publia de bonnes tables de ces satellites. Au
moyen des ombres portées par les satellites de Jupiter sur cette
planète, il découvrit en 1665 que Jupiter tourne autour d'un
axe passant par son centre et est aplati aux pôles. Il a constaté
une rotation analogue pour Mars en 1666 et pour Vénus en 1667, et
il a donné la durée presque exacte de la rotation de Mars.
En 1675, il trouva que Saturne est entouré de deux anneaux; de là
le nom de division de Cassini. Il découvrit trois satellites autres
que Titan, un en 1671, un en 1672 et deux en 1684; il assigna les orbites
de tous ces satellites, dont le plus petit a été plus tard
nommé Japet.
Dessins de Saturne et de son anneau par Huygens et par Cassini (à droite). Cassini a proposé en 1679 un Règlement des Temps par une méthode facile et nouvelle; cette réforme du calendrier, qui est la même que celle d'Omar Al-Khayyam, est regardée comme plus exacte que la réforme grégorienne. En 1683, Cassini découvrit et décrivit la lumière zodiacale. On lui doit aussi la découverte des lois du mouvement de rotation de la Lune autour de son axe (1666-1699). Mesure du rayon
terrestre.
Pour exécuter cette dernière opération, Willebrod Snell, dit Snellius (1591- 1626), découvreur de la loi de la réfraction, élève de Kepler et de Tycho, imagina une méthode qui consiste à choisir, de part et d'autre de la ligne méridienne passant par le point de départ, des points situés de manière à être aperçus de loin, par exemple des sommets d'édifices élevés ou des signaux artificiels placés sur le haut des collines. Si l'on mesure ensuite les angles que font entre eux les plans verticaux qui passent par ces divers points et les angles qu'ils font avec la méridienne, et si l'on détermine les distances angulaires elles-mêmes des diverses stations, on aura un réseau de triangles dans lesquels tous les angles sont connus. Conséquemment, à la condition qu'on mesure directement un des côtés de ces triangles, pris pour base, on pourra par le calcul obtenir tous les autres côtés et déterminer la grandeur de l'arc de la méridienne traversant la série des triangles. C'est la méthode de triangulation qui sera employée par la suite. Si l'opération qu'entreprit Snellius pour mesurer un degré terrestre entre les villes d'Alkmaer et Berg-op-Zoom manque d'exactitude, ce fut à cause de l'imperfection des instruments dont on se servait alors. Les détails de cette opération, qui lui donna 330 432 pieds pour le degré du méridien, se trouvent consignés dans Eratosthenes Batavus, 1617. Le P. Riccioli et son compagnon le P. Grimaldi furent moins heureux qu'aucun de leurs prédécesseurs dans la mesure du degré du méridien. Snellius s'était trompé d'environ 4000 mètres; mais Riccioli se trompa de plus de 10 000 mètres. Richard Norwood eut, en 1635, la patience de mesurer la distance itinéraire de Londres à York une chaîne à la main, en conservant autant que possible toujours la même direction; il eut en même temps soin de déterminer, au moyen de la boussole, l'angle que la ligne du chemin mesurée faisait avec le méridien, aussi bien que les angles d'inclinaison à l'horizon à chaque fois qu'il montait ou descendait; après quoi, il réduisait les longueurs trouvées au plan horizontal et au méridien; enfin il mesura, en deux jours du solstice d'été, les hauteurs du Soleil à Londres et à York avec un secteur de cinq pieds de rayon, et, trouvant que ces deux villes différaient en latitude de 2°20' il en conclut que le degré était de 367 176 pieds (environ 115 000 mètres). Norwood reconnut lui-même combien son procédé devait laisser à désirer pour l'exactitude. Jean Picard (1620-1682) fut chargé de la mesure d'un degré terrestre par l'Académie des sciences, dont il faisait partie depuis sa fondation. A cet effet, il fit construire des instruments d'une précision jusqu'alors inconnue, imagina des procédés nouveaux, et consacra une grande partie des années 1669 et 1670 à l'opération géodésique, dont il a donné les détails dans sa Mesure de la Terre; Paris, 1671, in-fol. Il trouva que la distance itinéraire, comprise entre les parallèles d'Amiens et de Malvoisine, est de 78 850 toises, ce qui donnait 57 000 toises pour la longueur d'un degré du méridien terrestre. C'est cette mesure qui porta Newton à reprendre le travail qu'il avait abandonné, et qui le conduisit finalement à la découverte de la loi qui porte son nom. Picard rendit par ailleurs de grands services à l'astronomie pratique en appliquant les lunettes aux instruments gradués et en faisant servir à la détermination des ascensions droites l'heure du passage des astres au méridien. Et c'est aux plans et à l'influence de l'abbé Picard qu'est due la promoteur de la construction de l'Observatoire de Paris. Il composa les cinq premiers volumes de la Connaissance des Temps (1681-1683). La mesure de la méridienne de France fut continuée en 1683 par Cassini vers le Midi et par P. de La Hire vers le Nord; mais leurs travaux furent interrompus par la guerre de 1688. Cassini reprit les opérations en 1700. Newton.
Encore étudiant à Cambridge, et pendant un séjour à Woolsthorpe, où il se retira en 1666 à cause de la peste, Isaac Newton eut la première conception de l'identité de la pesanteur et de la force qui retient les planètes dans leurs orbites, et il fit ses premiers calculs d'essai; mais, partant de la donnée erronée que l'on avait alors touchant la masse de la Terre, il ne put vérifier son heureuse conjecture, et ce ne fut que 13 ou 14 ans plus tard qu'il reprit l'étude de ce problème. A la fin de la peste, il retourna à Cambridge et se fit recevoir maître ès arts en 1668. Au cours de l''automne
de cette année, il termina un télescope de 6 pouces de longueur
focale, grossissant 40 fois, et qui lui permit de voir les satellites de
Jupiter et les phases de Vénus. Ce tut le premier télescope
à réflecteur qu'on eût jamais dressé vers le
ciel; car James Gregory, qui l'avait inventé,
n'avait pas construit l'instrument complet. Au cours de l'automne de 1611,
Newton en fit un autre que l'on a conservé dans la bibliothèque
de la Royal Society de Londres.
Isaac Newton. En 1679, après avoir travaillé sur l'optique, son attention fut ramenée sur le sujet de l'attraction universelle. Il vit que les masses des corps planétaires pouvaient être déterminées par l'observation des effets de leur attraction mutuelle, et que cette cause troublait leurs différents mouvements. Il fut ainsi conduit à élucider le sujet embarrassant des mouvements de la Lune; et il déduisit théoriquement les deux inégalités lunaires connues sous le nom de variation et d'équation annuelle, ainsi que la progression de l'apogée et la régression des noeuds. En avril 1686, il communiqua à la Roya Society le premier livre des Principia; en juin, Edmund Halley entreprit à ses frais la publication de cette oeuvre, qui parut l'année suivante, sous le titre de Philosophiae naturalis Principia mathematica. L'ouvrage se divise en 3 livres. Le premier traite du mouvement dans l'espace libre; le second traite surtout du mouvement et de la résistance; et le troisième déduit des deux premiers le système du monde. Après la publication des Principia, Newton se contenta d'étendre et de développer les principes de sa philosophie sans s'avancer dans de nouveaux champs de la science. Képler avait dit que les courbes décrites par les planètes sont des ellipses; cela serait vrai pour une planète qui se mouvrait seule autour du Soleil; mais la présence d'une autre planète ou d'un satellite apporte une légère perturbation à ce mouvement et détruit la simplicité des lois de Képler. Newton aborda sans la résoudre la question des perturbations des planètes. Euler, d'Alembert, Clairaut, Lagrange et Laplace, complèteront au XVIIIe siècle son oeuvre sur ce point et sur d'autres. (Ddt / F. Hoefer / E. Lebon). |
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