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La découverte du monde > Le ciel
Histoire de l'astronomie
De Copernic à Newton
La révolution de l'astronomie aux XVIe et XVIIe siècles
Depuis la fin de l'Antiquité et pendant tout le Moyen âge, le système de Ptolémée qui plaçait la Terre au centre du mouvement de tous les astres avait régné en maître. Ce n'est pas dire que l'astronomie n'avait pas progressé pendant cette longue période. Du moins, l'astronomie médiévale s'était-elle achevée sous l'impulsion qui avait été donnée par Purbach et Regiomontanus. Au début de la Renaissance, les observations devinrent plus nombreuses, et les perfectionnements apportés dans la construction des instruments anciens permettaient de les faire plus exactes. Il restait encore à détruire les théories que les siècles avaient consacrées. 

C'est Copernic qui déclencha cette révolution. Copernic retrouva dans les anciens philosophes que le centre du monde devait être le Soleil, et non la Terre; en rapportant tous les mouvements au Soleil, il simplifia considérablement le système de Ptolémée en diminuant le nombre des cercles indispensables. 

La plus grave objection à faire au système de Copernic résultait du mouvement de la Lune, tout d'abord autour de la Terre, puis entraînée autour du Soleil dans un mouvement général; la découverte, en 1610, par Galilée des quatre lunes ou satellites de Jupiter devait faire triompher le système de Copernic.

Mais, avant Galilée, le plus grand observateur qui ait jamais existé fut Tycho-Brahé; ses observations, si nombreuses et si précises, quand on pense qu'elles furent faites à l'oeil nu, permirent à son élève Képler de découvrir les trois lois du mouvement elliptique des planètes autour du soleil. 

Avec Newton, la mécanique analytique intervient dans l'explication des mouvements planétaires; les lois de Képler sont mathématiquement établies. Parallèlement à ces développements théoriques, l'astronomie d'observation faisait des progrès considérables avec Huygens, Roemer, Dominique Cassini (le premier directeur de l'Observatoire de Paris), Flamsteed, etc.

Copernic.
Né en 1473, Nicolas Copernic (1473-1543) avait entendu parler dans sa jeunesse de la célébrité que Regiomontanus avait acquise par ses travaux astronomiques, et conçut le désir de l'égaler : il commença, comme ses maîtres, par faire le voyage classique de l'Italie, et, de retour dans son pays, ayant été pourvu d'un canonicat, il se livra tout entier à son étude favorite. 
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Copernic.
Nicolas Copernic.

Le système de Ptolémée lui paraît trop compliqué; la nature procède par des voies plus simples, estime-t-il.  En outre, il est frappé par le manque de symétrie de ce système, par la faiblesse des raisons données en faveur du mouvement de tous les astres autour de la Terre immobile, par l'inconcevable vitesse que la sphère céleste devait avoir pour tourner autour de son axe en 24 heures. Il consulte les ouvrages des philosophes anciens. Dans Cicéron, il trouve qu'Hicetas, de Syracuse, pythagoricien antérieur à Philolaüs, croyait que la Terre seule est en mouvement dans l'Univers, qu'elle tourne sur son axe. Il lit dans le Satyricon de Capella que Vénus et Mercure tournent autour du Soleil. Alors Copernic s'aperçoit qu'en admettant la rotation de la Terre et des planètes autour du Soleil les mouvements directs et rétrogrades des planètes ne sont que des apparences résultant de la combinaison des mouvements de la Terre et des planètes. Remarquant que Mars, Jupiter et Saturne ont leur plus grand éclat à l'époque de leurs oppositions, il pense que la Terre n'est pas le centre de leurs mouvements, et, en les faisant tourner autour du Soleil, il trouve que leurs changements de luminosité sont une conséquence de cette révolution.
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Le système du monde de Copernic.
Le Système du monde de Copernic,
d'après Ch. Scheiner, Disquisitiones mathematicae, 1614.

Des méditations et des observations qu'il fit pendant 36 ans, Copernic conclut que les phénomènes célestes s'expliquent facilement et avec symétrie en supposant que le Soleil est fixe au centre de l'Univers, que les planètes tournent autour du Soleil d'Occident en Orient, ces planètes étant rangées dans l'ordre suivant par rapport à leurs distances croissantes au Soleil : Mercure, Vénus, la Terre, Mars, Jupiter et Saturne; enfin que la Lune est un satellite de la Terre et qu'elle tourne autour d'elle aussi d'Occident en Orient. Ainsi il rend compte d'une manière simple des phénomènes célestes, et d'une façon satisfaisante de la diversité des saisons et de l'inégalité des jours. Il conclut du déplacement des points équinoxiaux que l'axe de la Terre ne reste pas parallèle à lui-même, et qu'à la fin de l'année sa position n'est pas celle qu'il avait au commencement. Il explique la précession des équinoxes par un mouvement des pôles de la Terre autour des pôles de l'écliptique, mais sans donner la raison même de la précession.

Copernic eut de longues hésitations au sujet de la publication de son ouvrage, intitulé De Revolutionibus orbium coelestium. Il ne reçut que quelques heures avant sa mort le premier exemplaire de cette oeuvre, imprimée à Nuremberg, par les soins de son disciple Rheticus. Dans la dédicace qu'il fit de son livre au pape Paul III, Copernic, en présentant son système du Monde comme une hypothèse, expose qu'il le publie à la sollicitation de ses amis, afin de n'être pas accusé de fuir le jugement des personnes éclairées, et espère que l'autorité du pape le garantira des attaques de ses ennemis.

Le Système de Copernic, que Rheticus soutint dès 1540, non plus comme une hypothèse, mais en l'affirmant, eut d'abord peu de partisans, beaucoup de détracteurs, et ne fut universellement adopté qu'un siècle après la mort du profond penseur qui l'avait proposé. 

Laissant de côté les noms de quelques excellents observateurs, en exceptant toutefois celui du landgrave de Hesse-Cassel Guillaume IV, qui fit bâtir à Cassel un Observatoire en 1561
et le pourvut de bons instruments avec lesquels il travailla, nous sommes amené à parler du réformateur de l'astronomie pratique :

Tycho Brahé.
A peine Copernic était-il mort, que la ville de Knudsturp, en Scanie, donnait le jour à un homme qui devait également s'immortaliser par ses travaux sur l'astronomie : Tycho Brahé (1546-1601). Destiné par ses parents à la jurisprudence, il avait été envoyé à Copenhague pour y étudier la philosophie. Ce fut là que se détermina sa vocation; il y fut témoin d'une éclipse de Soleil qui arriva au moment précis pour lequel un astronome l'avait annoncée, et, saisi d'admiration, il conçut le désir d'apprendre l'astronomie. Étant allé terminer ses études à Leipzig, il se mit à étudier en secret sa science favorite, et, de retour dans son pays, voyant que sa famille la méprisait, il se réfugia chez un oncle qui sut l'apprécier, et il put dès lors se livrer sans contrainte aux études de son choix.

Un soir, avant le souper, comme il regardait le ciel pour voir s'il pourrait continuer ses observations après le repas, il aperçoit une nouvelle étoile; il remonte aussitôt chez lui , observe le nouvel astre (La Supernova de Tycho, dans Cassiopée), et détermine sa position, qui resta la même jusqu'en 1574 son éclat, d'abord comparable à celui de Vénus lorsqu'elle est à son maximum, diminua peu à peu, et elle finit par disparaître. Ce phénomène n'avait encore été observé que par Hipparque. (Les  Novae et les Supernovae)

Tycho, ayant conçu l'idée de refaire toutes les observations de ses prédécesseurs, fut aidé dans son projet par le roi du Danemark, qui le rappela et lui offrit l'île d'Huène (Hven), où il fit bâtir un château qui reçut le nom d'Uraniborg, et qui fut doté d'une magnifique collection d'instruments. C'est là que Tycho entreprit le travail qu'il avait projeté. Sa première opération fut de déterminer avec exactitude la latitude d'Uraniborg, et dans cette opération il fut conduit à mesurer l'influence de la réfraction. Il s'appliqua ensuite particulièrement à l'étude du mouvement du Soleil et de la Lune.
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Le système du monde de Tycho Brahé.
Le Système du monde de Tycho Brahé,
d'après Ch. Scheiner, Disquisitiones mathematicae, 1614.

Le système de Copernic n'avait pas été généralement admis, et Tycho est compté au nombre des adversaires de ce sytème; il n'adopta cependant pas celui de Ptolémée, et, forcé de donner le sien, il supposa la Terre immobile au centre du monde; les cinq planètes et les comètes tournaient autour du soleil et étaient entraînées avec lui. Le Soleil ainsi escorté et la Lune étaient eux-mêmes emportés avec la sphère des étoiles, qui accomplissait une révolution entière en vingt-quatre heures. 

A la mort du roi du Danemark, Tycho, ayant été l'objet de persécutions, se réfugia dans le Holstein, où l'empereur Rodolphe lui donna une pension considérable et lui adjoignit Longomontanus et Képler. Il mourut en 1601, âgé de cinquante-cinq ans. Tycho ne fut ni philosophe ni phycicien : son système le prouve; il avait tous les préjugés de son époque, puisqu'il croyait à l'astrologie et qu'il la défendit; mais il fut grand observateur, et il fit faire un pas immense à l'astronomie, en perfectionnant les méthodes d'observation.

Le calendrier grégorien.
C'est ici le moment de parler d'un fait aussi important dans l'histoire de l'astronomie que dans celle des institutions civiles : de la réforme du calendrier qui fut impulsée par Grégoire XIII, et dont le principal maître d'oeuvre fut Clavius. On sait que l'année julienne avait 365 jours, avec des années bissextiles tous les quatre ans. Depuis l'époque où cette année avait été adoptée, l'équinoxe de printemps ne correspondait plus à la même époque de l'année civile; et en 1582 il tomba au 11 mars, au lieu du 21. Cette variation avait été reconnue depuis longtemps; Grégoire XIII, pour corriger l'erreur, ordonna de supprimer dix jours dans l'année et de passer du 4 octobre au 15 ; il décida en outre pour l'avenir que, sur quatre années séculaires, une seule serait bissextile. Cette réforme fut adoptée dès l'origine par tous les catholiques de l'Europe, et plus tard par les protestants. (Les Jésuites et l'astronomie).
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Tycho Brahé et Kepler.
Tycho Brahé et Kepler.

Kepler.
L'opinion d'un homme tel que Tycho était de nature à ébranler l'édifice que Copernic avait élevé avec tant de peine, s'il ne s'était pas trouvé à cette époque un homme de génie pour le consolider et le continuer : cet homme fut Johannes Képler (1571-1630)  qui, non content d'admettre le système de Copernic, voulut aller plus loin. Imbu d'idées astrologiques et pythagoriciennes, il était convaincu que les mouvements des astres possédaient une signification cachée et étaient soumis à des lois régulières dont les polyèdres réguliers auraient pu être la clé, et il se mit à travailler avec une constance infatigable pour découvrir ces lois qu'il avait soupçonnées. Vingt-quatre ans de sa vie furent consacrés à cette recherche, dont les résultat ne correspondit pas à ses attentes. Mais il n'en découvrit pas moins des régularités restées jusqu'alors inconnues, et auxquelles  il donna le nom de lois. Ce sont les trois lois de Képler :

C'est l'observation d'une opposition de Mars qui amena Képler à étudier le mouvement de cette planète; après avoir remarqué que celle-ci ne se meut pas sur un cercle excentrique au Soleil, après avoir cherché pendant longtemps si elle ne se mouvait pas sur une certaine ovale, Képler a l'idée de prendre pour son orbite une ellipse ayant le Soleil à l'un de ses foyers, et il reconnaît que Mars suit l'ellipse qu'il a déterminée, et que les aires des secteurs limités par un arc d'ellipse et par deux rayons vecteurs sont proportionnelles aux temps que Mars emploie à parcourir ces arcs. Il vérifie qu'il en est de même pour les autres planètes, et il établit ainsi la loi de la forme des orbites des planètes et une des lois de leur mouvement :

1° Les orbites planétaires sont des ellipses dont le soleil occupe le foyer.

2° Les aires décrites par le rayon vecteur sont proportionnelles au temps.

Ce n'est qu'après 17 ans de méditations, de comparaisons, de calculs qu'il parvient à découvrir, le 15 mai 1618, une autre loi du mouvement des planètes : 
3° Les carrés des temps des révolutions planétaires sont entre eux comme les cubes des grands axes des orbites.
Képler fit connaître ces lois dans un ouvrage qu'il intitula Harmonique du Monde, et dans la préface duquel on lit :
« Le sort en est  jeté; je livre au public mon ouvrage; il sera Iu par l'âge présent ou par la postérité, peu m'importe; il pourra attendre son lecteur. Dieu n'a-t-il pas attendu six mille ans un contemplateur de ses oeuvres ? »
Ces lois ne sont pas la seule contribution de Kepler : il aborda les questions les plus élevées de la mécanique et de la physique, et se trouva souvent bien près du but qui devait être atteint plus tard par Newton. Ainsi Képler est-il le premier qui ait indiqué l'attraction que la Lune exerce sur la Terre comme la cause du flux et du reflux de la mer (Les marées), et pensé que les irrégularités du mouvement de la Lune proviennent de ce que le Soleil et la Terre l'attirent. Il rechercha la cause des lois du mouvement des planètes, et les idées qu'il émit sur la gravité conduisirent Newton à la découverte de la loi de l'attraction universelle. Par ailleurs, il rechercha les lois de la réfraction, dont il étudia l'influence d'abord dans l'eau et ensuite dans l'air.
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Tycho Brahé.
Képler.
Galilée.
Tycho Brahé. Johannes Kepler. Galileo Galilei.

Galilée.
Dans le même temps que Képler, vivait Galilée (Galileo Galilei, 1564-1642), qui fut aussi bon physicien qu'astronome. La science lui est redevable sinon de l'invention du moins d'une utilisation nouvelle de deux instruments qui hâtèrent singulièrement les progrès de l'astronomie : le pendule, à l'aide duquel on est parvenu à mesurer le temps si exactement, et les lunettes, qui, en agrandissant les objets, ont permis de donner plus de précision aux recherches de l'astronome, et ont agrandi l'espace dans lequel ces recherches s'exercent. 

En juillet 1609, Galilée, se trouvant à Venise, apprend qu'en Hollande on avait présenté au prince Maurice une lunette faisant paraître proches les objets éloignés; il étudie la cause de ce fait, et parvient à construire une lunette astronomique, qu'aussitôt il emploie à étudier le ciel. Dix mois après, dans le Sidereus Nuncius (Le Messager céleste), il fait connaître ses nombreuses découvertes célestes.
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Galilée : Sidereus Nuncius.
Page de garde du Sidereus Nuncius de Galilée.

Sa première découverte est celle de montagnes et de cratères circulaires dans la Lune, et il parvient même à mesurer géométriquement la hauteur de ces montagnes.

Ensuite il s'aperçoit que la Voie Lactée est formée d'une quantité innombrable d'étoiles.

Puis il constate que le Soleil a des taches mobiles, dont il décrit le cours. La découverte des taches du Soleil détruisit la croyance ancienne à l'incorruptibilité des cieux et à l'élément, dit sidéral, constituant les astres. Du mouvement des taches du Soleil, il conclut que cet astre tourne en 25 jours environ d'Occident en Orient autour d'un axe passant par son centre. La recherche du temps de cette rotation a été faite d'abord par Scheiner, puis par Castelli.
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Le 7 janvier 1610, Galilée découvre trois satellites de Jupiter et le 14 un quatrième; quelque temps après, ayant trouvé les périodes de leur marche, il signale les avantages que la géographie, la navigation et l'optique peuvent retirer de la connaissance des époques des éclipses de ces satellites

Examinant Vénus, il voit le phénomène, deviné par Castelli, des phases que présente cette planète, comme la Lune, et il en conclut, ce qu'il pensait déjà, que Vénus tourne autour du Soleil. Il est amené à croire que Mercure a aussi des phases, mais la trop faible distance de cette planète au Soleil l'empêche de les voir. 

Au sujet de Mars, Galilée dit lui-même qu'à l'opposition, cette planète se montre 6 fois plus grande qu'à la conjonction; il s'aperçoit que Saturne est accompagné de deux globes, qui, au bout de quelques mois, disparurent, mais dont il prédit le retour, et qui revinrent en effet, toutefois sous des formes différentes.

Après avoir constaté que la Lune nous présente toujours la même face, Galilée remarque qu'elle est soumise à une oscillation, appelée par lui libration; mais la cécité qui l'atteint alors, quatre ans avant sa mort, l'empêche d'étudier ce phénomène.

Ses découvertes sur les planètes lui fournissent les explications, si conformes à la raison et aux lois de la nature, de la rotation de la Terre autour de son axe en un jour et autour du Soleil en un an. Mais son opinion en faveur du système de Copernic, bien qu'appuyée sur des raisonnements irréfutables, est, dès 1616, condamnée par la Congrégation de l'index qui, en même temps qu'elle suspend l'ouvrage de Copernic, prohibe tous les écrits soutenant le mouvement de la Terre.

Cependant Galilée publie en 1632 son ouvrage intitulé Dialogo sopra i due massimi Sistemi del Mondo, où deux défenseurs du système de Copernic et un péripatéticien, partisan de celui de Ptolémée, exposent avec clarté les raisons favorables à leurs idées. Peu de temps après la publication de lo sfortunato Dialogo (c'est ainsi que Galilée lui-même le qualifie), son auteur est appelé à Rome, retenu dans le palais de l'Inquisition et forcé, le 22 juin 1633, de se rétracter en jurant que soutenir que le Soleil est immobile et occupe le centre du Monde et que la Terre n'est pas immobile au centre du Monde, ce sont là des doctrines fausses et hérétiques. Une légende veut qu'en se relevant il ait dit à mi-voix : e pur si muove.

Les adversaires de Copernic de Kepler et de Galilée.
La condamnation de Galilée n'empêcha pas la science de marcher. Mais elle eut pour effet d'arrêter dans la voie du progrès beaucoup d'esprits timorés ou indécis ; et dans ce nombre on est affligé de voir le nom de Descartes

Descartes.
René Descartes (1596-1650), grand philosophe et grand mathématicien s'était épris de l'étude de l'astronomie pendant son séjour en Hollande, et il allait, en 1633, mettre au jour un Traité du monde, lorsqu'il apprit la condamnation de Galilée. Cette condamnation lui fit abandonner l'impression du traité où il devait, lui aussi, affirmer le mouvement de la Terre. Sa correspondance avec Mersenne ne laisse aucun doute sur la défaillance de l'auteur du Discours de la méthode.

« Je m'étais proposé, dit Descartes dans une de ses lettres, de vous envoyer mon Monde pour vos étrennes; il n'y a pas plus de quinze jours que j'étais encore tout résolu de vous en envoyer au moins une partie, si le tout ne pouvait être transcrit pour ce temps-là. Mais je vous dirai que, m'étant fait enquérir ces jours passés à Leyde et à Amsterdam si le Système du monde (les Dialogues) de Galilée ne s'y trouverait point, parce que j'avais appris qu'il avait été imprimé en Italie l'année dernière, on m'a mandé qu'il était vrai que le livre avait été imprimé, mais que tous les exemplaires en avaient été brûlés à Rome dans le même temps, et l'auteur condamné à quelque amende ; ce qui m'a si fort étonné, que je me suis presque résolu de brûler tous mes papiers, ou du moins de ne les laisser voir à personne. Car je n'ai pu m'imaginer qu'un homme qui est Italien et, qui plus est, très bien venu du pape, à ce que j'apprends, ait pu être criminalisé pour autre chose que parce qu'il aura voulu établir .le mouvement de la Terre, que je sais avoir été contesté - autrefois par quelques cardinaux. Mais je croyais avoir ouï dire que depuis ce temps-là on ne laissait pas de l'enseigner publiquement, même dans Rome; et j'avoue que si ce sentiment du mouvement de la Terre est faux, tous les fondements de ma philosophie le sont aussi, parce qu'il se démontre par eux évidemment; il est tellement lié avec toutes les parties de mon Traité, que je ne l'en saurais détacher sans rendre le reste tout défectueux. Mais, comme je ne voudrais pour rien au monde qu'il sortit de moi un discours où il se trouverait le moindre mot qui fût désapprouvé par l'Église; aussi aimé-je mieux le supprimer que de le faire paraître estropié. »
On voit que Descartes, confronté au totalitarisme religieux, n'eut pas le courage de ses idées.

Riccioli.
En tête des anticoperniciens se trouve le P. Giovanni Battista Riccioli (1598 -1671). Ce jésuite passionné composa un gros ouvrage, moins par l'amour de astronomie que par l'envie de plaider la cause des théologiens contre Copernic et Galilée. Cet ouvrage, qui contient (t. II, liv. ix) l'arrêt qui condamna Galilée, a pour titre : Almagestum Novum, astronomiam velerem novamque complectens; etc. (Bologne, 1651, 2 vol. in-fol.). A la fin du second volume, l'auteur a développé, dans une série de chapitres (De systemate Terrae motae), tous les arguments qu'on avait imaginés pour combattre le système de Copernic. Ces arguments sont au nombre de plus de cent. Mais s'ils sont imposants par leur quantité, ils ne brillent pas par leur valeur.

Après s'être fait croire à lui-même qu'il a réfuté tous les arguments de Copernic, Riccioli prétend prouver directement que la Terre est immobile. A cet effet, il commence par rappeler les objections de Ptolémée sur le vol des oiseaux, sur le mouvement des nuages, etc.; puis il ajoute avec un imperturbable esprit dogmatique : 

« La Terre est de tous les corps le plus grave. L'éclipse de Soleil, à la mort de Jésus-Christ, fut totale pendant trois heures, l'Évangile le dit. Si la Terre tournait, l'éclipse aurait duré beaucoup moins. »
Les autres objections sont à l'avenant.
« Au reste, dit Riccioli, il n'est pas encore de foi que le Soleil tourne autour de la Terre immobile. Il faudrait pour cela un bref du pape ou le décret d'un concile. » 
Mais pourquoi alors, nous le demandons, le tribunal de l'Inquisition avait-il condamné Galilée comme suspect d'hérésie?

Scheiner.
Le P. Christoph Scheiner (1575-1650) professa successivement les mathématiques à Ingolstadt, à Graz et à Rome. Il écrivit tout un volume (De controversiis et novitatibus mathematicis; Ingolstadt, 1614, in-4°), aujourd'hui oublié, pour défendre l'immobilité de la Terre contre Copernic, Kepler et Galilée. Son principal mérite est d'avoir inventé le pantographe, instrument fort utile aux artistes, dont il a décrit la construction et les usages dans Pantographice, seu ars delineandi (Rome, 1631, in-4°). On s'en sert encore pour copier un dessin quelconque, pour en augmenter ou réduire les dimensions, sans savoir même dessiner. Nous parlerons plus loin de ses observations des taches du Soleil.

Longomontanus.
Christian Sörensen, dit Longomontanus, (1562-1647), fut ami et collaborateur de Tycho, dont il défendit le système contre les coperniciens, dans son Astronomia danica (Amsterdam, 1622, in-4,). Il va jusqu'à se faire le champion de la théorie erronée de Tycho sur les réfractions, qui seraient nulles au-dessus de 45° de hauteur. Il n'admet pas la loi de Kepler, d'après laquelle les planètes décrivent des ellipses, et il croit que la Voie Lactée est en partie composée d'une certaine matière propre à donner naissance aux comètes. Il observa particulièrement la comète qui parut en 1618, au commencement de la guerre de Trente ans, et qu'il appelle stupendum et fatalem; sa queue, qui n'était d'abord que de la taille d'un homme, grandit si rapidement, que le 30 novembre elle occupait dans le ciel un espace de 104 degrés (plus de la moitié de l'hémisphère céleste).

Liceti.
Fortunio Liceti (1577-1656), essaya, dans son traité De novis astris et cometis (Gênes, 1623), de concilier l'astronomie moderne avec la doctrine d'Aristote. Contrairement aux opinions de Maestlin, de Léonard de Vinci et de Galilée, il n'admettait pas que la lumière cendrée de la Lune fût produite par la lumière réfléchie de la Terre; « parce que, dit-il, la Terre est impropre à réfléchir la lumière. » Mais il n'en donna aucune raison plausible dans son De Lunae subobscura luce, etc. Udine, 1642.

Boulliaud.
Ismaël Boulliaud, aussi connu sous le nom latinisé de Bulliarius (1605-1694), est l'auteur d'un ouvrage intitulé Astronomia Philolaïca, opus novum, in quo motus planetarum per novam ac veram hypothesim demonstratur, etc. (Paris, 1645, in-folio) où il se montre attaché au mouvement uniforme et circulaire des Anciens. Il adopta, il est vrai, les orbites elliptiques des planètes; mais pour sauver les mouvements moyens, qu'il regardait, contrairement à Kepler, comme réels, il supposait, avec Curtius, que les planètes se mouvaient inégalement autour du foyer qu'occupe le Soleil, et uniformément autour du second foyer. Ce second foyer rappelait le centre de l'équant de Ptolémée. On sait qu'en coupant un cône suivant une certaine inclinaison à l'axe, on a une ellipse par le contour de la section. Or Boulliaud imagina une section telle que l'un des foyers de l'ellipse, celui autour duquel le mouvement est égal, se trouve dans cet axe. Il suit de là que, quelle que soit l'inégalité de la marche d'une planète dans son orbite elliptique, un oeil placé au sommet du cône, au terme de l'axe autour duquel les mouvements sont uniformes, voyant cette orbite de côté, rapporterait tous ces mouvements dans la base circulaire du cône et les verrait s'accomplir uniformément dans un cercle.

Tel est ce que Boulliaud appelle son Hypothesis nova et vera. Cette singulière hypothèse a inspiré à Bailly les réflexions suivantes :

« L'espèce humaine, prise en masse depuis son origine, est attachée aux idées de sa jeunesse [....] Ni Boulliaud, ni Riccioli n'entendaient Kepler. Ils ne parlent point des aires décrites autour du foyer et proportionnelles au temps. C'est donc en vain qu'on découvre des vérités; on parle à ses contemporains, ils n'écoutent pas. » 
En expliquant les principales inégalités de la Lune, Boulliaud se mit en contradiction avec Kepler. Ainsi, il suppose que le foyer de l'orbite lunaire, où est placée la Terre, se dérange pour décrire un certain circuit par lequel le foyer et le centre de l'ellipse se déplacent. Par suite de cette altération de la courbe, la Lune ne resterait pas constamment, au foyer de l'ellipse de la Terre, comme le Soleil au foyer des ellipses des planètes.

Ces idées de Boulliaud provoquèrent une vive polémique de la part d'un astronome anglais, Seth Ward, auteur de l'Astronomia geometrica, qua primariorum planetarum astronomia sive elliptica, sive circularis possit geometrice absolvi, etc.; Londres, 1656. 

Deusing.
Antoine Deusing (1612-1666) se proposa, dans son De vero systemate mundi dissertatio mathematica (Amsterdam, 1643), de replacer la Terre au centre du monde et de faire disparaître toute la complication du système de Ptolémée. De ses démonstrations prolixes, il conclut que ce n'est guère la peine de faire mouvoir la Terre et de placer les étoiles à une si grande distance. 

« Nous dirons à notre tour, ajoute Delambre, que ce n'est pas trop la peine, après toutes les concessions que l'auteur fait à Copernic, et toutes les explications qu'il lui emprunte, de supprimer le mouvement annuel. »
Morin.
Jean-Baptiste Morin (1583-1656) s'adonna à l'astrologie, ce qui le mit en rapport avec de grands personnages, et succéda, en 1630, à Sinclair, dans la chaire de mathématiques, au collège Royal de France. Adversaire déclaré du système de Copernic, il soutenait, avec une vivacité extrême, contre Gassendi et Bernier, l'immobilité de la Terre, dans son Famosi problematis de telluris motu vel quiete hactenus optata solutio; Paris, 1631, in-4°. Cet écrit provoqua de vives critiques. Morin y répondit par Responsio pro telluris motu (1634), et par Tycho Braheus in Philolaum pro telluris quiete (1642). Gassendi entra en lice, suivi de près par ses amis Bernier et Laurent de Mesmes; la discussion dégénéra en une querelle violente, qui fit beaucoup de bruit. Poussé dans ses derniers retranchements, Morin lança contre Gassendi un grand nombre de diatribes, telles que Ala telluris fracta (1643); De atomis et vacuo (1650); Panurgi Epistola de tribus impostoribus (1654), etc.
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Page de garde du Tycho Braheus in Philolaum
pro telluris quiete, de Morin.

Morin suscita une querelle non moins vive au sujet de la détermination des longitudes. Mais cette fois ses adversaires (parmi lesquels on remarque Mydorge et Beaugrand) eurent les torts de leur côté. La méthode de Morin consistait à observer en même temps ou dans des temps très rapprochés la hauteur de la Lune, celle d'une étoile dont la position était suffisamment connue, ainsi que la distance de l'une à l'autre. 

« Au moyen de ces éléments, ajoute Montucla, il montrait comment, à une heure quelconque, en mer , on pouvait déterminer la déclinaison et l'ascension droite de la Lune, conséquemment sa latitude et sa longitude, ou son lieu dans le ciel. Il fallait calculer ensuite, d'après les meilleures tables, celles de Kepler par exemple, l'heure à laquelle la Lune avait cette même position dans le ciel, pour le lieu auquel ces Tables étaient destinées, et dont la longitude était connue. La différence des temps convertie en degrés devait donner la longitude du vaisseau pour le moment de l'observation. »
L'ouvrage où Morin a exposé sa méthode a pour titre Astronomia jam a fundamentis integra restituta, complectens IX partes hactenus optate scientiae longitudinum coelestium ; Paris, 1640, in-4°. En 1634, le cardinal Richelieu, qui protégeait Morin, nomma une commission de savants pour examiner sa méthode des longitudes. Les commissaires rendirent d'abord un rapport favorable; puis ils se ravisèrent, et, dans un nouveau rapport, ils traitèrent Morin avec une sévérité regrettable. Ce qu'il y a de certain, c'est que sa méthode laisse beaucoup à désirer, et qu'il est loin d'avoir résolu le problème qu'il s'était proposé.

Schyrle de Rheita.
Le P. Schyrle de Rheita (1597-1660), de l'ordre des capucins, fut un anti-copernicien décidé. Dans la préface de son livre qui porte le singulier titre de Oculus Enoch et Eliae, sive Radius sidero-mysticus (Anvers, 1645, avec une dédicace à Jésus-Christ, et une autre à l'empereur Ferdinand III), il déclare hardiment «-qu'après avoir longtemps médité sur les systèmes de Ptolémée, de Copernic, de Tycho et d'autres astronomes, il s'est convaincu que tous ont avancé des choses superflues, déplaisantes et peu conformes aux phénomènes. » 

Il s'est borné à retourner le système de Tycho, à peu près comme Tycho avait retourné celui de Copernic; en supprimant les épicycles, il les remplace par des hypocycles; au lieu de faire tourner sur l'excentrique le centre d'un petit épicycle, il fait tourner le cercle de l'excentrique sur la circonférence d'un petit cercle auquel il ne donne pas de nom. Toutes ces hypothèses ne sont accompagnées d'aucune démonstration, ni d'aucun calcul. Il faut les mettre sur la même ligne que ses huit satellites de Jupiter, qu'il dédia au pape Urbain VIII, sous le nom d'Astres Urbanoctaviens.

Voici cependant quelques idées qui méritent d'être signalées. Rheita pense que les étoiles ont des mouvements propres que l'énormité de leur distance nous empêche de distinguer; que les étoiles changeantes ou périodiques  (Les étoiles variables) pourraient bien avoir de grandes orbites et de longues révolutions; enfin, que dans le système de Copernic la chaleur devrait être proportionnelle au rayon du parallèle terrestre; elle serait absolument nulle aux pôles, où le parallèle se réduit à un point; car, ajoute-t-il, c'est le mouvement qui produit la chaleur.

Rheita construisit le premier une lunette astronomique d'après les données de Kepler. Les termes d'oculaire et d'objectif, appliqués aux deux verres dont le dernier est tourné vers l'objet et le premier vers l'oeil de l'observateur, viennent de lui. Il raconte qu'en 1642 il vit, à Cologne, passer devant le Soleil une troupe (turmam) de points sombres qui se succédèrent pendant quatorze jours, et que l'éclat du Soleil en était considérablement affaibli.

Ce capucin astronome n'est pas éloigné de croire que les planètes sont habitées. 

« Si Jupiter a, dit-il, des habitants, ils doivent être plus grands et plus beaux que les habitants de la Terre, dans la proportion des deux globes. » 
Mais il n'ose affirmer leur existence, à cause de certaines difficultés théologiques; il se demande, par exemple, s'ils ont su se maintenir dans leur état primitif d'innocence, ou s'ils sont déchus comme nous.

C'est dans son Oculus Enoch, à propos de son binocle astronomique (oculus astronomicus), qui était une lunette à deux oculaires, que Rheita rapporte, le premier, l'histoire de Jean Lippens de Zélande, qui, ayant par hasard combiné un verre convexe avec un verre concave, vit les objets à la fois plus gros et plus rapprochés. Avec ces deux lentilles placées dans un tube, il faisait voir aux passants le coq du clocher. Le bruit de cette invention s'étant répandu, les curieux venaient en foule pour admirer ce prodige. Le marquis de Spinola acheta la lunette et en fit présent à l'archiduc Albert d'Autriche. Les magistrats de la localité mandèrent l'opticien et lui payèrent chèrement une lunette pareille, mais à la condition qu'il en garderait le secret. C'est ainsi que l'invention fut tenue secrète jusqu'au moment où Galilée en eut connaissance. Tel est le récit de Schyrle de Rheita. Nous ne dirons rien de sa Theo-astronomia, opus theologis utile et jucundum, dédiée à la Vierge Marie. Delambre l'appelle, en propres termes, une capucinade.

Argoli.
Andolo Argoli (1570 - ca. 1650) se posa, dans son Pandosium sphericum (Padoue, 1644), comme l'auteur d'un système qui a beaucoup d'analogie avec celui qu'on trouve dans Vitruve et Martianus Capella. D'après ce système, la Terre occuperait le centre du Monde; la Lune et le Soleil, ainsi que les trois planètes supérieures (Mars, Jupiter et Saturne) tourneraient autour de la Terre, tandis que le Soleil aurait pour satellites les deux planètes inférieures (Mercure et Vénus). On cite d'Argoli, comme une chose très remarquable, qu'il avait réduit toutes les opérations trigonométriques à une simple addition, et cela dix ans (en 1604) avant la découverte des logarithmes.
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Le système du monde de Copernic.
Le Système du monde d'Argoli (1644),

Levera.
Francesco Levera, auteur du Prodromus uni versa astronomiae restitutae (Rome, 1663, dedié à la reine Christine de Suède), enseignait, contrairement à tout ce qui avait été établi par Kepler, que tous les mouvements des corps célestes sont circulaires et uniformes, que l'année solaire a invariablement la même durée, et que l'apogée reste immobile. Il se montre aussi grand partisan de l'immobilité de la Terre.

Billy.
Le P. Jacques de Billy (1602-1679 ) rejette, dans son Opus astronomicum, les lois de Kepler et se montre attaché à l'ancien système. Il ne donne de cette préférence aucune raison valable.

Les taches du Soleil.
C'est vainement que le P. Scheiner se donna beaucoup de peine pour revendiquer contre Galilée la priorité de la découverte des taches du Soleil. Ce savant jésuite parla pour la première fois, dans une lettre adressée le 12 novembre 1611 à Marc Velser, sénateur d'Augsbourg, de taches noirâtres, qu'il prenait d'abord pour non adhérentes au Soleil, ou pour de petites planètes. Or Galilée, qui les avait observées en avril 1611, regardait ces taches comme adhérentes au Soleil. Il est vrai que dans la même lettre du 12 novembre le P. Scheiner dit qu'il les avait aperçues sept à huit mois auparavant, et qu'il y avait d'abord fait peu attention. Mais pourquoi s'est-il ravisé si tard pour en écrire à ses amis? Et pourquoi avait-il pris un pseudonyme dans la dissertation qu'il fit imprimer en 1612 à Augsbourg sous le titre de : De Maculis in Sole animadversis et tanquam ab Apelle in Tabula spectandum in publica luce expositis Batavis dissertatiuncula?

Le P. Scheiner prit un pseudonyme probablement pour ne pas heurter l'idée aristotélique de l'incorruptibilité des cieux. On raconte qu'ayant demandé au provincial de son ordre, au P. Budée, l'autorisation de publier ses découvertes, celui-ci lui aurait dit : 
« Bah! j'ai lu et relu Aristote, et je n'y ai rien trouvé de pareil. Tranquillisez-vous, mon fils, il n'y a de taches dans le Soleil que celles qu'y mettent vos yeux ou les verres de votre nouvel instrument. » 
Dans cette dissertation on trouve indiqué l'emploi des verres bleus pour regarder le Soleil; ce moyen avait été déjà recommandé par Apian. Du reste, l'auteur revint sur l'observation des taches du Soleil, distingua les taches des facules, et en fit, avec un zèle louable, l'objet d'observations multipliées, comme l'atteste sa Rosa Ursina, sine Sol ex admirando faculorum et macularum suarum, etc. (Bracciano, 1626, in-fol.).
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Galilée : taches observées sur le Soleil.
Taches observées par Galilée sur le Soleil, le 25 juin 1612.
Ci-dessous, la vision plus imaginative de Kircher (1664),
qui pensait que les taches du soleil étaient de la fumée évacuée depuis
les profondeurs de l'astre par des sortes de volcans.
Kircher : taches du Soleil.

Si les questions de priorité, où les sentiments de l'amour-propre et de vanité jouent un si grand rôle, ne sauraient être résolues que par des documents imprimés ayant date certaine, l'astronome qui découvrit les taches du Soleil et leur mouvement concomitant avec la rotation de cet astre, ce n'est ni Galilée ni Scheiner; c'est Johann Fabricius. L'écrit où Fabricius rend compte de sa découverte parut au mois de juin 1611 à Wittemberg, sous le titre : De maculis in Sole visis et earum cum Sole revolutione narratio (in-4°). La date de l'impression de cet écrit reporte celle de la découverte au moins à la fin de 1610 ou au commencement de 1611.

Kepler ne pouvait pas rester étranger à la question des taches solaires. Voici, en effet, ce qu'il écrivit, dès 1613, au P. Malcot : 

« Non seulement les taches ne se meuvent pas parallèlement à l'écliptique, mais elles n'ont pas toutes exactement la même vitesse. Conséquemment elles ne tiennent pas à la surface du Soleil, sans en être pourtant séparées par un intervalle sensible. Par ces raisons et parce que ces taches tantôt apparaissent sur le Soleil, tantôt s'évanouissent, qu'elles s'étendent et se raréfient çà et là en changeant sensiblement de figure, il est aisé de conclure qu'elles doivent être quelque chose d'analogue aux nuages de notre propre globe terrestre, nuages qui ont dans l'atmosphère un mouvement particulier, différant plus ou moins de la rotation terrestre. Ces fumées opaques sortent-elles des corps incandescents du Soleil? Dieu seul le sait; car le raisonnement par analogie ne peut pas s'étendre jusque-là avec sécurité. »
Faye (Annuaire du Bureau des longitudes pour l'an 1873, p. 453) fait remarquer avec justesse que ce passage de Kepler contient le fond même des idées qui ont eu un instant le plus de crédit auprès d'un grand nombre des astronomes du XIXe siècle sur la nature et le rôle des taches solaires.

L'observation des taches du Soleil fut continuée par Tarde et Malaperluis. L'un et l'autre les prenaient pour de véritables planètes. Le premier, chanoine de Sarlat, les appelait Astres bourboniens (Borbonia sidera, id est planetae qui Solis lumina circumvolitant motu proprio et regulari, falso hactenus ab helioscopis maculae Solis nuncupati; Paris, 1620). Le second, jésuite belge, les nommait Astres austriens, les considérant aussi comme de petites planètes, très voisines du Soleil (Austriaca sidera heliocyclica astronomicis hypothesibus illigata; 1633). Il se servait, comme le P. Scheiner, d'un fil à plomb pour marquer le vertical du Soleil.

Plus tard, le P. Kircher (né en 1602, à Geisa, près de, Fulda, mort à Rome en 1680), qui a écrit sur presque toutes les sciences, a traité de la gnomonique dans son Ars magna lucis et umbrae; Amsterdam, 1675, in-fol. Il y parle aussi des taches du Soleil, qu'il compare aux scories qui se forment sur un métal en fusion; et il rapporte, d'après les chroniques, des périodes où le Soleil, par un ciel serein, n'émettait qu'une lumière comparativement très faible. Au milieu des controverses d'alors, le savant jésuite allemand laissa prudemment à l'écart la question du mouvement de la Terre.

Découverte des étoiles variables.
David Fabricius (1564-1617), le père de Johann Fabricius, découvrit le premier une étoile variable. Ce fut le 13 août 1596 que David Fabricius aperçut au col de la Baleine (constellation méridionale, au sud d'Andromède) une étoile de 3e grandeur ( = magnitude 3) qui disparut en octobre de la même année. Cette disparition lui fit assimiler cette étoile à l'étoile nouvelle de 1572, observée par Tycho. Il en parle dans sa correspondance avec Kepler.

En 1603, Bayer dessina, dans son Uranometria, au col de la Baleine, à la place même où avait disparu l'étoile de D. Fabricius, une étoile de 4e grandeur, qu'il appela o (Omicron). J.-Ph. Holwarda, professeur à Franeker, vit la même étoile, au commencement de décembre 1638, pendant une éclipse de Lune; elle surpassait alors en éclat les étoiles de 3e grandeur. Elle descendit rapidement à la 4e grandeur et n'était plus visible vers le milieu de l'été de 1639. -


Omicron Ceti, répertoriée comme étoile de quatrième 
magnitude dans l'Uranometria de Bayer.

Les observations d'Holwarda, suivies de celles de Fullenius et de Jungius (de 1641 à 1648), et plus tard des observations plus détaillées d'Hévélius (de 1646 et 1682), mirent hors de doute un fait décisif contre la théorie de l'inaltérabilité des corps célestes, à savoir qu'il y a des étoiles soumises à des alternatives périodiques de disparition et de réapparition. Hevélius publia, ses observations sous le titre d'Historiola mirae Stellae, etc. C'est de là que l'étoile périodique du col de la Baleine a pris le nom de Mira Ceti (= l'admirable de la Baleine). Ce ne fut qu'en 1667 que Boulliaud, l'auteur de l'Astronomie Philolaïque, parvint, en discutant les diverses observations faites depuis une cinquantaine d'années, à déterminer l'intervalle qui s'écoule entre deux disparitions consécutives d'Omicron de la Baleine : cet intervalle est de 333 jours, et la durée de la plus grande clarté d'environ 15 jours.

Simon Marius. 
Simon Marius (1570-1624), mathématicien et astronome de l'électeur de Brandebourg, parle de la découverte des satellites de Jupiter, dans son Mundus Jovialis anno 1609 detectus ope perspicilli Belgici, etc. (Nuremberg, 1614); et à juger par la date qui s'y trouve (28 décembre 1609), on pourrait croire que Marius a la priorité sur Galilée. Il n'en est cependant rien; car il dit lui-même qu'il ne veut porter aucune atteinte aux droits de Galilée. La date indiquée est donc fausse.

Découverte des premières nébuleuses.
Mais si ses droits sont ici fort contestables, Marius a découvert la première nébuleuse dont il soit fait mention dans les annales de l'astronomie, la nébuleuse de la ceinture d'Andromède, située près de Nu d'Andromède (la galaxie M 31). 

« Le 15 décembre de l'an 1612, j'aperçus, dit-il, une étoile fixe, telle que le n'en avais jamais vu; elle est voisine de la troisième et de la plus boréale de la ceinture d'Andromède. A l'oeil nu, elle paraît comme un petit nuage. Avec la lunette on n'y voit aucune étoile; on n'y distingue que des rayons blanchâtres, qui sont plus brillants vers le centre, et la lumière s'affaiblit vers les bords; elle a un quart de degré de diamètre; elle ressemble à une chandelle vue de loin et de nuit dans une lanterne de corne. »
Ce ne fut qu'après un intervalle de près d'un demi-siècle que Huygens découvrit, en 1656, la seconde nébuleuse, près de la garde de l'Épée d'Orion, autour de l'étoile marquée Thêta. Voici comment Huygens s'exprime sur la nébuleuse d'Orion  (M 42) dans son Systema Saturninum, publié en 1659 : 
« Les astronomes ont compté dans l'Épée d'Orion trois étoiles très voisines l'une de l'autre. Lorsque, en 1656, j'observai par hasard celle de ces étoiles qui occupe le centre du groupe, au lieu d'une j'en découvris douze, résultat que d'ailleurs il n'est pas rare d'obtenir avec les télescopes. De ces étoiles, il y en avait trois qui, comme les premières, se touchaient presque, et quatre autres semblaient briller à travers un nuage, de telle façon que l'espace qui les environnait paraissait beaucoup plus lumineux que le reste du ciel, qui était entièrement noir. On eût cru volontiers qu'il y avait une ouverture dans le ciel qui donnait jour sur une région plus éclairée. »
En 1665, Hévélius découvrit la troisième nébuleuse; elle est située entre la tête et l'arc du Sagittaire (l'amas globulaire M 22).

Halley, pendant qu'il travaillait au Catalogue des étoiles du ciel austral, découvrit, en 1681, la quatrième nébuleuse (encore un amas globulaire, Omega Centauri), située Centaure; et Godefroy Kirch en aperçut une autre, dans la même année, dans la constellation du Serpent, près du pied droit ou boréal d'Antinoüs (auj. constellation de l'Aigle), l'amas globulaire M 5.

Il n'y eut donc, en tout, que cinq nébuleuses de découvertes durant le XVIIe siècle. Ces singulières lueurs, « ces cieux vus à travers des ouvertures de notre ciel », avaient été pour la première fois aperçues à l'aide du nouveau et puissant levier de découvertes employé par Galilée. Cet instrument n'était pas, pour le répéter, un télescope proprement dit (où les images ne se voient que par réflexion), mais une véritable lunette (où les images se voient par réfraction). Voici ce qu'on lit dans le Mundus Jovialis sur la lunette dont s'était servi Simon Marius :

«  En 1608, pendant la foire d'automme de Francfort-sur-le-Mein, le général Fuchs de Bienbach, grand amateur de mathématiques, apprit d'un marchand belge qu'on venait d'inventer un instrument qui grossissait les objets en les montrant rapprochés. Le général voulut acheter une de ces lunettes; mais le marchand y mit un prix trop élevé, et le marché ne fut pas conclu. De retour chez lui, à Onolzbach, l'amateur en parla à Marius, et lui dit que l'instrument avait deux verres, l'un concave et l'autre convexe, dont il lui dessina même la figure. Marius se mit dès lors à assortir des verres de cette forme et s'assura de la possibilité de ce qu'on lui avait raconté; mais son oculaire étant trop convexe, il en demanda un autre aux opticiens de Nuremberg, qui ne purent lui fournir ce qu'il désirait. L'été suivant (1609), le général Fuchs reçut de la Belgique une lunette assez bonne, dont il se servit avec Marius pour explorer le ciel. » 
Ce fut dans la même année de 1609 que Galilée avait, pour la première fois, entendu parler des lunettes belges.

Gassendi. 
Pierre Gassendi (1592 -1655) fut du nombre de ces philosophes de haut vol qui cultivent avec succès en même temps l'astronomie et les mathématiques. Fils de modestes cultivateurs, il était destiné à la vie paisible des champs; mais son intelligence précoce lui ouvrit une autre carrière. Il entra dans les ordres, et fit ses premières études à Digne et à Aix-en-Provence, où il obtint, au concours, en 1616, la chaire de philosophie. Il entra l'année suivante dans les ordres. Peiresc, que Bayle appelle le procureur général des sciences, lui donna le goût des observations astronomiques. 

Ses hésitations pusillanimes à se prononcer franchement pour le système de Copernic illustre bien sous quel règne de terreur l'Eglise plaçait les intelligences. Comme Descartes, ce n'est que dans l'intimité ou dans sa correspondance privée que Gassendi osait se déclarer copernicien. Mais dans ses ouvrages imprimés qui, tel que son Institutio astronomica, devaient passer sous les yeux de la congrégation de l'Index, il se montrait beaucoup moins affirmatif. Il préférait sans doute le système de Copernic à tout autre; « mais, ajoute-t-il, il est contraire à l'Ecriture; en conséquence, et pour obéir, je me vois contraint de donner la palme à Tycho ». On voit que la soumission du prêtre avait pris le pas sur le discernement du philosophe.

Gassendi avait reçu les Dialogues de Galilée par l'intermédiaire de son ami Diodati. Il ne put s'empêcher d'en manifester librement son admiration. 

« Nulle objection, écrivit-il à Galilée, ne tient devant vos principes; les démonstrations et les hypothèses de tous les anciens sont des puérilités et des rêveries, quand on les compare à vos arguments. » 
Mais cet enthousiasme se refroidit singulièrement à la première nouvelle de la condamnation de Galilée. Les paroles de consolation que Gassendi transmit à Galilée, dans une lettre du mois de février 1634, sont loin de respirer le courage du génie : il lui conseille, avec Horace, la patience et la résignation : Durum, sed levius fit patientia. Plusieurs lettres de Descartes, qui, comme nous avons vu, ne fut guère plus courageux, attestent la profonde impression que fit sur Gassendi la sentence de l'Inquisition. Son imagination s'exalta; il vit son repos troublé, sa chère liberté compromise, et pensa à brûler tous ses papiers. Le P. Mersenne, publiant, en 1634, un livre intitulé : Questions théologiques, physiques, morales et mathématiques, fit supprimer au plus vite l'analyse du premier dialogue de Galilée, qu'il avait donnée dans les premiers exemplaires.

Première observation du passage de Mercure devant le disque du Soleil.
Ce qui assigne à Gassendi une place distinguée dans l'histoire de l'astronomie, c'est d'avoir le premier observe le passage de Mercure sur le disque du Soleil. Il en a publié les détails dans un opuscule intitulé : Mercurius in Sole visus, Parisiis, pro voto et admonitione Kepleri
« Le rusé Mercure, écrivait-il joyeusement à Schickhardt, professeur d'hébreu à Tubingen, voulait passer sans être aperçu : il était entré (dans le Soleil) plus tôt qu'on ne s'y attendait; mais il n'a pu échapper sans être découvert, eurêka kai eôraka; je l'ai trouvé et je l'ai vu, ce qui n'était arrivé à personne avant moi, le matin du 7 novembre 1631. » 
Par les mots eurêka kai eôraka ( = j'ai trouvé et j'ai vu), Gassendi faisait allusion aux travaux des alchimistes qui cherchaient à marier (combiner) le vif-argent (Mercure) avec l'or (Soleil).
Gassendi : lettre sur le passage de Mercure devant le Soleil.
Début de la lettre de Gassendi à Schickhardt 
sur le passage de Mercure devant le Soleil.

La date du passage de Mercure et de celui de Vénus avait été annoncée par Kepler. Gassendi s'était préparé à l'observer. A cet effet, il avait divisé en 60 parties le diamètre d'un cercle tracé sur un papier blanc qui devait recevoir l'image du Soleil par le tuyau d'une lunette; la circonférence de ce cercle était divisée en 360 degrés. Un aide placé dans un étage supérieur, avec un quart, de cercle de dix pieds de rayon, était chargé de lui donner le signal quand il verrait Mercure, et de saisir avec son quart de cercle les mouvements du Soleil, pour avoir les hauteurs pour chacun des instants d'observation. Le 7 novembre, dans la matinée, le ciel était couvert de nuages; il s'éclaircit un peu vers 9 heures, et l'observateur put recevoir l'image du Soleil sur le carton; il y, aperçut, à la distance d'environ un quart de diamètre du bord inférieur, un point noir qui avait un peu passé le vertical. Il le prit d'abord pour une simple tache du Soleil; mais il changea d'opinion, quand il vit le point noir se déplacer : il put ainsi se convaincre que c'était Mercure; seulement il se l'était imaginé beaucoup plus gros. Il donna le signal convenu; mais l'aide n'était plus à sa place; Gassendi l'appela, et l'aide eut le temps de s'installer avec son quart de cercle avant que Mercure eût quitté le disque du Soleil. Mercure lui parut noir au milieu, rougeâtre au bord et d'un diamètre d'environ 20". Au moment où Mercure quitta le disque lumineux, le Soleil était à 21° 42' de hauteur, correction faite de la réfraction; d'où Gassendi conclut la sortie de Mercure à 32° ou 33° du vertical, à 10 heures 28 minutes du matin.

« Qui pourrait, s'écrie ici Gassendi, s'imaginer que ce Mercure, qu'on appelle trismegiste (trois fois très grand), fût si petit? On devrait plutôt le nommer trisélachiste (trois fois très petit). » 
De fait, un objet rond et obscur, d'une telle petitesse, n'est pas visible à l'oeil nu, lors même qu'il se projeterait sur le Soleil. Pour l'apercevoir, il fallait l'artifice employé par Gassendi, et imaginé par le P. Scheiner : recevoir l'image agrandie du Soleil sur une feuille de papier blanc. Aussi n'est-il guère probable qu'Averroès ait, comme on l'a dit, le premier aperçu Mercure sur le Soleil.

La seconde observation de ce remarquable phénomène, d'une si grande utilité pour calculer exactement l'orbite de la planète, fut faite en 1651 par Skakerlaeus, qui, pour en être témoin, se rendit tout exprès à Surate, en Inde.

La troisième observation fut faite en 1661 par Hévélius, qui, comme Gassendi, se contentait d'examiner l'image agrandie du Soleil dans une chambre obscure.

Huygens.
Christian Huygens (1629-1695) fabriqua une grande lunette dont il tailla et polit lui-même les verres. Avec cette lunette plus puissante que celles qui existaient, il reconnut en 1655 que Saturne est entouré, non de globes comme l'avait cru Galilée, mais d'un anneau, et en même temps aperçut un satellite de cette planète; on l'a nommé plus tard Titan. Dans son Systema Saturnium (1659), il explique que cet anneau est un corps plat, incliné sur le plan de l'orbite de Saturne, entraîné par cette planète parallèlement à lui-même. Il a observé en 1659 avec quelque sûreté les taches de Mars, dont le premier dessin a été fait à Naples en 1636 par Francesco Fontana.
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Huygens : angle d'observation de l'anneau de Saturne.
Figure du Systema Saturnium dont Huygens se sert pour expliquer
les aspects changeants de l'anneau de Saturne à différents moments
de la révolution de la planète autour du Soleil.

Il accepta l'invitation que Louis XIV et Colbert lui firent de se fixer à Paris. Dans cette ville, pendant l'année 1673, il publia son ouvrage le plus renommé, Horologium oscillatorium, dans lequel il donne la théorie de la force centrifuge et celle du pendule, puis propose et explique l'application du pendule aux horloges pour en régulariser le mouvement. L'Académie des Sciences avait délégué Richer en 1672 à Cayenne, afin d'y observer Mars à l'instant où cette planète serait observée à Paris, pour déduire de ces observations la parallaxe de Mars et par suite la distance de la Terre au Soleil. Mais on trouva un nombre incertain pour cette parallaxe. Ce pénible voyage eut cependant un résultat scientifique, car Huygens, d'après ses théories sur la force centrifuge, montra que la Terre est renflée à l'équateur, en s'appuyant sur cette observation de Richer que le pendule battant la seconde est plus court à Cayenne qu'à Paris. Contraint à quitter la France après la révocation de l'édit de Nantes, Huygens retourna en 1685 aux Pays-Bas, où il publia en français son Traité de la Lumière (1691).

Römer
Ole Römer (1644-1710), qui a été professeur de mathématiques de Dauphin, à Paris (de 1672 à 1681), avant d'occuper la chaire de mathématiques de l'Université de Copenhague, est l'inventeur, en 1700, la lunette méridienne. Il est surtout connu pour sa découverte et la première mesure de la vitesse de la lumière. Ce fut pendant son séjour à Paris, en 1676, que Römer fit cette grande découverte que la lumière met 7 à 8 minutes pour parcourir la distance du Soleil à la Terre. Sa théorie, déduite de ses observations des éclipses des satellites de Jupiter, était contraire aux idées reçues, et il ne parvint à la faire triompher qu'en la défendant énergiquement, car son adversaire était D. Cassini, qui aussi avait eu, mais ensuite abandonné, l'idée du mouvement de la lumière.
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Huygens.
Roemer.
Cassini.
Christiaan Huygens. Ole Roemer. J.-Dominique Cassini.

Cassini.
Jean-Dominique Cassini (1625-1712), ayant étudié la marche de la comète de 1652, pensa que les mouvements de ces corps sont irréguliers seulement en apparence et assujettis aux mêmes lois que les planètes. Grâce à ses recherches approfondies sur les comètes, il parvint à décrire le cours de celle qu'il observa à Rome en 1664. Lorsqu'il habita la France, l'observation de la comète de 1680 lui permit de compléter sa théorie de la marche de ces astres.

Dans l'église de Sainte-Pétronille, à Bologne, Cassini, avec un soin tout particulier, a établi de 1653 à 1655, le plus grand gnomon et tracé la plus longue méridienne qui existaient, et avec lesquels d'autres astronomes ont après lui fait d'utiles découvertes. Ce gnomon et cette méridienne lui ont permis de montrer que le mouvement apparent du Soleil n'est pas uniforme, et de construire en 1662 des Tables du Soleil plus parfaites que celles que l'on avait, car il tint compte des réfractions astronomiques, après avoir reconnu qu'elles se manifestent jusqu'au zénith. 

Cassini commença en 1665 l'étude approfondie des satellites de Jupiter, puis détermina l'inclinaison du plan de leurs orbites et les périodes de leurs mouvements; mais ce n'est qu'en 1693 qu'il publia de bonnes tables de ces satellites. Au moyen des ombres portées par les satellites de Jupiter sur cette planète, il découvrit en 1665 que Jupiter tourne autour d'un axe passant par son centre et est aplati aux pôles. Il a constaté une rotation analogue pour Mars en 1666 et pour Vénus en 1667, et il a donné la durée presque exacte de la rotation de Mars. En 1675, il trouva que Saturne est entouré de deux anneaux; de là le nom de division de Cassini. Il découvrit trois satellites autres que Titan, un en 1671, un en 1672 et deux en 1684; il assigna les orbites de tous ces satellites, dont le plus petit a été plus tard nommé Japet.
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Dessins de saturne et de son anneau par Huygens et par Cassini.
Dessins de Saturne et de son anneau par Huygens et par Cassini (à droite).

Cassini a proposé en 1679 un Règlement des Temps par une méthode facile et nouvelle; cette réforme du calendrier, qui est la même que celle d'Omar Al-Khayyam, est regardée comme plus exacte que la réforme grégorienne.

En 1683, Cassini découvrit et décrivit la lumière zodiacale. On lui doit aussi la découverte des lois du mouvement de rotation de la Lune autour de son axe (1666-1699).

Mesure du rayon terrestre.
Le rayon terrestre étant en quelque sorte le mètre avec lequel les astronomes évaluent les distances des globes constitutifs de notre Système solaire, on comprend de quelle importance est sa détermination exacte. Mais pour y arriver il fallait employer des méthodes plus rigoureuses que celles dont on avait fait jusqu'alors usage. D'après un procédé dont l'idée première remonte à Eratosthène, on est parvenu à connaître le rayon de la Terre par la mesure d'un arc du méridien. Cette mesure implique deux opérations distinctes, celle de la détermination du déplacement du zénith lorsqu'on passe d'une première station à la seconde, et l'opération destinée à fournir l'intervalle géodésique compris entre le point de départ et le point d'arrivée. 

Pour exécuter cette dernière opération, Willebrod Snell, dit Snellius (1591- 1626), découvreur de la loi de la réfraction, élève de Kepler et de Tycho, imagina une méthode qui consiste à choisir, de part et d'autre de la ligne méridienne passant par le point de départ, des points situés de manière à être aperçus de loin, par exemple des sommets d'édifices élevés ou des signaux artificiels placés sur le haut des collines. Si l'on mesure ensuite les angles que font entre eux les plans verticaux qui passent par ces divers points et les angles qu'ils font avec la méridienne, et si l'on détermine les distances angulaires elles-mêmes des diverses stations, on aura un réseau de triangles dans lesquels tous les angles sont connus. Conséquemment, à la condition qu'on mesure directement un des côtés de ces triangles, pris pour base, on pourra par le calcul obtenir tous les autres côtés et déterminer la grandeur de l'arc de la méridienne traversant la série des triangles. C'est la méthode de triangulation qui sera employée par la suite. Si l'opération qu'entreprit Snellius pour mesurer un degré terrestre entre les villes d'Alkmaer et Berg-op-Zoom manque d'exactitude, ce fut à cause de l'imperfection des instruments dont on se servait alors. Les détails de cette opération, qui lui donna 330 432 pieds pour le degré du méridien, se trouvent consignés dans Eratosthenes Batavus, 1617.

Le P. Riccioli et son compagnon le P. Grimaldi furent moins heureux qu'aucun de leurs prédécesseurs dans la mesure du degré du méridien. Snellius s'était trompé d'environ 4000 mètres; mais Riccioli se trompa de plus de 10 000 mètres.

Richard Norwood eut, en 1635, la patience de mesurer la distance itinéraire de Londres à York une chaîne à la main, en conservant autant que possible toujours la même direction; il eut en même temps soin de déterminer, au moyen de la boussole, l'angle que la ligne du chemin mesurée faisait avec le méridien, aussi bien que les angles d'inclinaison à l'horizon à chaque fois qu'il montait ou descendait; après quoi, il réduisait les longueurs trouvées au plan horizontal et au méridien; enfin il mesura, en deux jours du solstice d'été, les hauteurs du Soleil à Londres et à York avec un secteur de cinq pieds de rayon, et, trouvant que ces deux villes différaient en latitude de 2°20' il en conclut que le degré était de 367 176 pieds (environ 115 000 mètres). Norwood reconnut lui-même combien son procédé devait laisser à désirer pour l'exactitude.

Jean Picard (1620-1682) fut chargé de la mesure d'un degré terrestre par l'Académie des sciences, dont il faisait partie depuis sa fondation. A cet effet, il fit construire des instruments d'une précision jusqu'alors inconnue, imagina des procédés nouveaux, et consacra une grande partie des années 1669 et 1670 à l'opération géodésique, dont il a donné les détails dans sa Mesure de la Terre; Paris, 1671, in-fol. Il trouva que la distance itinéraire, comprise entre les parallèles d'Amiens et de Malvoisine, est de 78 850 toises, ce qui donnait 57 000 toises pour la longueur d'un degré du méridien terrestre. C'est cette mesure qui porta Newton à reprendre le travail qu'il avait abandonné, et qui le conduisit finalement à la découverte de la loi qui porte son nom.

Picard rendit par ailleurs de grands services à l'astronomie pratique en appliquant les lunettes aux instruments gradués et en faisant servir à la détermination des ascensions droites l'heure du passage des astres au méridien. Et c'est aux plans et à l'influence de l'abbé Picard qu'est due la promoteur de la construction de l'Observatoire de Paris. Il composa les cinq premiers volumes de la Connaissance des Temps (1681-1683).

La mesure de la méridienne de France fut continuée en 1683 par Cassini vers le Midi et par P. de La Hire vers le Nord; mais leurs travaux furent interrompus par la guerre de 1688. Cassini reprit les opérations en 1700.

Newton.
Copernic avait découvert comment s'organisent les mouvements des corps du Système solaire, Képler était parvenu à déterminer les lois générales qui régissent ces mouvements : il était réservé à Newton (1642-1727) d'en assigner la cause

Encore étudiant à Cambridge, et pendant un séjour à Woolsthorpe, où il se retira en 1666 à cause de la peste, Isaac Newton eut la première conception de l'identité de la pesanteur et de la force qui retient les planètes dans leurs orbites, et il fit ses premiers calculs d'essai; mais, partant de la donnée erronée que l'on avait alors touchant la masse de la Terre, il ne put vérifier son heureuse conjecture, et ce ne fut que 13 ou 14 ans plus tard qu'il reprit l'étude de ce problème. A la fin de la peste, il retourna à Cambridge et se fit recevoir maître ès arts en 1668. 

Au cours de l''automne de cette année, il termina un télescope de 6 pouces de longueur focale, grossissant 40 fois, et qui lui permit de voir les satellites de Jupiter et les phases de Vénus. Ce tut le premier télescope à réflecteur qu'on eût jamais dressé vers le ciel; car James Gregory, qui l'avait inventé, n'avait pas construit l'instrument complet. Au cours de l'automne de 1611, Newton en fit un autre que l'on a conservé dans la bibliothèque de la Royal Society de Londres.
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Newton.
Isaac Newton.

En 1679, après avoir travaillé sur l'optique, son attention fut ramenée sur le sujet de l'attraction universelle. Il vit que les masses des corps planétaires pouvaient être déterminées par l'observation des effets de leur attraction mutuelle, et que cette cause troublait leurs différents mouvements. Il fut ainsi conduit à élucider le sujet embarrassant des mouvements de la Lune; et il déduisit théoriquement les deux inégalités lunaires connues sous le nom de variation et d'équation annuelle, ainsi que la progression de l'apogée et la régression des noeuds

En avril 1686, il communiqua à la Roya Society le premier livre des Principia; en juin, Edmund Halley entreprit à ses frais la publication de cette oeuvre, qui parut l'année suivante, sous le titre de Philosophiae naturalis Principia mathematica. L'ouvrage se divise en 3 livres. Le premier traite du mouvement dans l'espace libre; le second traite surtout du mouvement et de la résistance; et le troisième déduit des deux premiers le système du monde. Après la publication des Principia, Newton se contenta d'étendre et de développer les principes de sa philosophie sans s'avancer dans de nouveaux champs de la science.

Képler avait dit que les courbes décrites par les planètes sont des ellipses; cela serait vrai pour une planète qui se mouvrait seule autour du Soleil; mais la présence d'une autre planète ou d'un satellite apporte une légère perturbation à ce mouvement et détruit la simplicité des lois de Képler. Newton aborda sans la résoudre la question des perturbations des planètes. Euler, d'Alembert, Clairaut, Lagrange et Laplace, complèteront au XVIIIe siècle son oeuvre sur ce point et sur d'autres. (Ddt / F. Hoefer / E. Lebon).

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