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Jean Le Rond d'Alembert

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Jean Le Rond d' Alembert est un philosophe, écrivain et mathématicien,  un des hommes les plus illustres du XVIIIe siècle, né à Paris le 16 novembre 1717, mort dans la même ville, le 29 octobre 1783.

C'était un enfant très chétif lorsqu'il fut trouvé par des ouvriers, le matin du 17 novembre 1717, sur les marches de l'église, aujourd'hui démolie, Saint-Jean-Lerond, près de Notre-Dame. Le commissaire, chez qui ils portèrent cet enfant, au lieu de l'envoyer selon l'habitude à l'hospice des enfants trouvés, le fit baptiser sous le nom de Jean-Baptiste Lerond, et le confia, rue Michel-Le-Comte, à l'épouse d'un vitrier nommé Rousseau. Celle-ci éleva avec beaucoup de soin l'enfant auquel son père, le chevalier Destouches-Canon, qui veillait sur lui, laissa à sa mort, en 1726, une rente de 1200 livres, Le jeune Lerond (ou Le Rond), recommandé par la famille Destouches, fut admis à 12 ans au Collège des Quatre-Nations, fit de brillantes études et obtint en 1735 le titre de maître ès-arts sous le nom de Daremberg; trois ans après, il le modifia en celui de D'Alembert.

Après de brillantes études classiques, il étudia le droit, la médecine, puis et surtout les mathématiques. Un Mémoire sur le calcul intégral (1739), un autre sur la Réfraction des corps solides (1741) lui valurent dès 1742 la fonction d'astronome-adjoint à l'Académie des Sciences, dont il devint membre associé en 1746 et membre titulaire en 1765.

En 1743, il publia son principal ouvrage, son Traité de dynamique où l'on trouve une méthode générale pour mettre en équations les problèmes de dynamique, qui repose sur le théorème suivant, connu sous le nom de Principe de d'Alembert

"Si l'on considère un système de points matériels liés entre eux de manière que leurs masses acquièrent des vitesses respectives différentes, selon qu'elles se meuvent librement ou solidairenment, les quantités de mouvement. gagnées ou perdues dans le système, sont égales."
D'Alembert mit fin ainsi aux difficultés que l'on rencontrait en mécanique dès que l'on sortait de la statique. Ses idées amenèrent une révolution dans la science du mouvement. 

Il publia ensuite : Mémoire sur la cause générale des vents (1756); Recherches sur la précession des équinoxes  et sur la Nutation (Précession et nutation) (1719), où l'on trouve la première solution générale servant à déterminer le mouvement de rotation d'un corps de figure quelconque; Essai sur la résistance des fluides (1752); Recherches sur différents points importants du système du monde (1751); enfin, un nombre considérable d'opuscules mathématiques regroupés en  8 volumes contenant, sur les parties les plus compliquées de l'astronomie théorique, des méthodes et des calculs que les mathématiciens, après lui, n'ont eu qu'à perfectionner et à étendre. Il y démontre qu'il existe au moins deux ellipsoïdes de révolution formant des figures d'équilibre. 
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D'Alembert.
J.-B. Le Rond d'Alembert (1717 -1783), par Quentin de la Tour, 1755.

Associé par Diderot à la publication de l'Encyclopédie, D'Alembert en écrivit une préface remarquable intitulée Discours préliminaire (1749), où il montrait l'esprit humain marchant à la conquête successive de toutes les connaissances et esquissait le progrès des sciences. Il y donna un grand nombre d'articles et se chargea d'en revoir toute la partie mathématique. Philosophe sceptique, il garda une prudente réserve. Cependant, ses idées lui suscitèrent de nombreux ennemis, en même temps que sa renommée grandissait dans toute l'Europe. Il fut au premier rang parmi les mathématiciens de son siècle; il ne s'est élevé qu'au second en littérature et en philosophie, mais on trouve dans ses écrits des pensées ingénieuses et souvent élevées, un style sobre, limpide et précis.

Ses principaux ouvrages en ce genre sont : Mélanges de philosophie et de littérature; Essai sur les gens de lettres, vigoureuse attaque contre les littérateurs qui se font les familiers des grands; Eléments de philosophie, où il cherchait à appuyer la morale sur la certitude géométrique : des Mémoires sur Christine de Suède, sur la Suppression des jésuites, des Eléments de musique, des Recherches sur les cordes vibrantes (1748) où se  trouve son importante découverte de l'intégration des équations aux différentielles partielles, etc. Entré en 1754 à l'Académie française, il en fut nommé secrétaire perpétuel en 1772, et écrivit alors ces Eloges historiques des académiciens décédés, qui forment une suite naturelle à l'ouvrage de Pellison et d'Olivet.

Le caractère de d'Alembert était honorable, indépendant et droit. Malgré la médiocrité de ses revenus, il ne se lassa jamais de venir au secours de toutes les infortunes. Parvenu au faîte de la célébrité, il continuait de vivre avec la même simplicité. D'Alembert entra en relation avec Frédéric II en 1746; malgré les instances de ce roi, il refusa deux fois, en 1751 et en 1759, d'accepter la présidence de l'Académie le Berlin. A la fin de 1762, D'Alembert déclina la proposition que lui fit Catherine II de diriger l'instruction de son fils. L'étude et l'amitié suffisaient à sa vie. Il eut avec Mlle de l'Espinasse une longue liaison, qui fut pour lui la source de cruelles souffrances. Il mourut de la pierre, dont il n'avait pas voulu se laisser opérer. (NLI).

Son successeur à l'Académie française fut le comte de Choiseul-Gouffier. Condorcet, sans sa réponse au récipiendaire et lors de la séance publique annuelle de l'Académie des sciences (avril 1784), paya un large tribut à la mémoire de son protecteur, tandis qu'un anonyme (M. de Saint-Rémy, officier d'artillerie) offrait à l'Académie française une médaille d'or de la valeur de 600 livres destinée à l'auteur du meilleur éloge en prose de son ancien secrétaire perpétuel. Ce prix ne fut jamais décerné, ni même, semble-t-il, disputé.

Ce n'est pas toutefois à ces témoignages officiels et par cela même un peu suspects qu'il faut demander la véritable opinion des contemporains sur d'Alembert, mais bien plutôt aux écrivains qui n'avaient pas à redouter le grand jour de la publicité, ou que la reconnaissance n'égarait pas sur sa valeur réelle. Les pages qui nous le font le mieux connaître sont assurément celles que Meister lui a consacrées dans la Correspondance littéraire, où il avait repris la succession de Grimm. Elles ont toujours été citées d'ailleurs sous la nom de ce dernier jusqu'à ce qu'un examen plus attentif ait rendu à chacun sa part légitime dans cette vaste entreprise. Ce sont elles qui nous fourniront quelques traits et quelques anecdotes sans lesquels cette biographie serait incomplète. 

« Nous n'avons vu aucun portrait de M. d'Alembert qui fût bien ressemblant, dit Meister (janvier 1784), et cette resemblance n'était pas facile à saisir; la forme de ses traits avait quelque chose de fort commun, et sa physionomie un caractère passablement indécis. Un Lavater eût cependant aperçu dans les replis de son front, dans la mouvement inquiet de ses sourcils, dans la partie inférieure d'un nez tout à la fois gros et pointu, plusieurs traces d'une expression assez fortement prononcée. Il avait les yeux petits, mais le regard vif; la bouche grande, mais son sourire avait de la finesse, de l'amertume et je ne sais quoi d'impérieux. Ce qu'il était le plus aisé de démêler dans l'ensemble de sa figure, c'était l'habitude d'une attention pénétrante, l'originalité naïve d'une humeur moins triste qu'irascible et chagrine. Sa nature était petite et fluette; le son de sa voix si clair, si perçant, qu'on le soupçonnait beaucoup d'avoir été dispensé par la nature de faire à la philosophie le sacrifice cruel qu'Origène crut lui devoir. Tout Paris sut dans le temps la réponse d'un homme du monde à qui sa maîtresse s'efforçait de donner de la jalousie en faisant l'éloge le plus pompeux de toutes les qualités de notre philosophe; ne trouvant plus d'exagération assez forte, elle finit par lui dire:
« Oui, c'est un dieu. - Ah s'il était dieu, madame, il commencerait par se faire homme... »
Son extérieur était de la plus extrême simplicité; il était presque toujours habillé, comme Jean-Jacques, de la tête aux pieds, d'une couleur; mais les jours de cérémonie et de représentations académiques il affectait de s'habiller, comme tout le monde, avec une perruque à bourse et un noeud de ruban à la Soubise [...].

La société de d'Alembert fut plusieurs années une des sociétés les plus brillantes qu'il fât possible de réunir; elle fut infiniment plus mêlée, et par là même infiniment moins agréable après la perte de son amie. Sa conversation particulière offrait tout ce qui peut instruire et délasser l'esprit. Il sa prêtait avec autant de facilité que de complaisance au sujet qui pouvait plaire le plus généralement; il y portait de la bonhomie et de la naïveté, avec un fonds presque inépuisable d'idées et d'anecdotes et de souvenirs curieux : il n'est pour ainsi dire point de matière, quelque sèche ou quelque frivole qu'elle fût en elle-même, qu'il n'eût le secret de rendre intéressante. Il parlait très bien, contait avec beaucoup de précision, et faisait jaillir le trait avec une grâce et une prestesse qui lui étaient particulières. Tous ses mots d'humeur ont un caractère d'originalité fine et profonde : Qui est-ce qui est heureux? quelque misérable! est un trait dont Diogène eût été jaloux. Le même sentiment lui faisait dire souvent que le seul bonheur pur de la vie était de satisfaire pleinement tous les matins le plus grossier de nos besoins, celui qui faisait souvenir à Alexandre qu'il n'était pas dieu ; et qu'un état de vapeur était bien fâcheux, parce qu'il nous faisait voir les choses comme elles sont. Il n'avait que vingt-et-un ans lorsqu'il se présenta pour être reçu à l'Académie des sciences. Il eut pour concurrent un nommé Mayeu, pauvre géomètre, mais protégé depuis longtemps par Fontenelle. Fontenelle dit à M. d'Alembert : 

« Monsieur, lorsque quelqu'un se présente pour être reçu à l'Académie, nous faisons une raison composée de l'âge et du mérite. - Cela est très juste, répondit M. d'Alembert, pourvu que la raison soit composée de la directe du mérite et de l'inverse de l'âge. »
A cet esprit de répartie dont il a donné mainte preuve, il joignait un véritable talent d'imitation qui ne lui servait pas seulement à divertir quelques intimes sur le compte de Buffon ou de tel autre de ses adversaires, mais qu'il ne craignait pas de montrer parfois jusque dans les séances publiques de l'Académie française; Meister le lui reproche en termes singulièrement durs-:
« Homme assurément très supérieur dans une partie où ses succès ne pouvaient avoir que peu de témoins, encore moins de juges, il a peut-être attaché trop de prix à la petite gloire que pouvaient lui offrir les suffrages et les applaudissements de cette multitude frivole qui suit depuis quelques années les tréteaux académiques avec autant d'empressement que ceux de la Foire on des boulevards. »
Si l'on oublie ces légers travers dont la postérité n'a point à se soucier, sur quels titres jugera-t-elle L'écrivain? Ici encore Meister nous semble avoir très judicieusement caractérisé quelques-uns des ouvrages qui avaient fondé sa réputation : après avoir, reconnu que la préface de l'Encyclopédie « embrassant l'étendue d'idées la plus vaste, suppose l'esprit le plus lumineux », il ajoute : 
« On a trouvé dans ses morceaux d'histoire le ton et la tournure de l'historiette; dans ses traductions une érudition très superficielle, avec une manière d'écrire pénible et quelquefois précieuse; en général, dans la plupart de ses, essais de morale ou de philosophie, et surtout dans ses éloges, une inégalité de ton extrême, des disparates peu dignes d'un grand écrivain, la morgue, le ridicule et la charlatanerie d'un chef de parti, avec une affectation fatigante à courir après la pensée vaudeville, après le mot plaisant, ne fût-ce qu'un calembour. Son style, presque toujours sec et froid, n'eut jamais que l'élégance de la clarté. II était également dépourvu d'âme et d'imagination; mais, dans l'expression des vérités même les plus hardies, on était forcé d'admirer l'art qu'il possédait au suprême degré, l'art de conserver toujours beaucoup d'égards et de mesure. ».

Puis, comme effrayé de sa propre sévérité, il insiste un peu plus bas sur les parties vraiment louables et durables de son talent : 
« En ne voyant dans les opuscules de M. d'Alembert que les essais d'un homme qui, après avoir approfondi les hautes sciences, se plaisait encore à effleurer les sujets les plus piquants d'une philosophie plus commune et d'une littérature plus légère, on sentira qu'on lui doit plus d'indulgence que ne lui en ont accordé ses ennemis. Maître dans un genre, ne lui devait-on pas savoir beaucoup de gré d'être encore un amateur très éclairé dans tous les autres? Jugé sous ce point de vue, il est bien peu de ses écrits, même les moins propres à justifier sa renommée, où l'on ne puisse remarquer des vues fines, des traits d'une érudition aimable, des observations vraiment instructives, souvent même une grâce originale et spirituelle. Aucun de ses éloges n'est un ouvrage de grand goût, mais plusieurs sont d'excellents morceaux de littérature. L'Éloge de Montesquieu est un chef-d'oeuvre d'analyse; celui de Bossuet est d'un ton plus soutenu que les autres; il y a dans ceux de Fénelon et de Louis de Sacy plusieurs traits d'une sensibilité douce et touchante. »
A cette énumération on peut ajouter aujourd'hui la correspondance avec Voltaire et avec Frédéric II, alors ignorée de tous. 
« Cette correspondance de Voltaire avec d'Alembert, a dit Sainte-Beuve, est essentielle pour avoir la clé de sa vie; il faut la lire à part et dans toute sa suite, telle qu'elle a été donnée dans les anciennes éditions et non pas telle qu'elle a été publiée dans l'édition Beuchot où elle est fondue dans la correspondance générale. La vie de Voltaire est une comédie; la correspondance avec d'Alembert nous en fait voir les coulisses et le fond; le reste n'est plus ou moins que de l'avant-scène. »
La division préconisée par Sainte-Beuve a été adoptée pour la première fois dans l'édition de Kehl; elle a été abandonnée depuis, en effet, par Beuchot et par ses successeurs comme trop incommode pour les recherches. Beuchot se flattait d'avoir rétabli les passages violents ou irréligieux supprimés par Condorcet et par Decroix et nommément le fameux « Écrasez l'infâme » ou « Ecr. l'inf. », devenu une sorte de mot d'ordre entre Voltaire et ses fidèles; mais Étienne Charavay, possesseur des originaux, a pu constater que les omissions volontaires des premiers éditeurs étaient beaucoup plus importantes qu'on ne croyait. Un mathématicien et un érudit bien connu, Charles Henry, a préparé un autre recueil de lettres entièrement inédites, mais il a volontairement négligé celles qui sont enfouies dans l'Observateur littéraire de l'abbé de la Porte, dans le Journal encyclopédique et dans d'autres recueils. 

Les portraits originaux de d'Alembert sont en petit  nombre : un pastel de La Tour (ci-dessus), qualifié par Grimm de « surprenant  », a été exposé au salon de 1753 où il inspira ce distique à Marmontel :

A ce front riant, dirait-on
Que c'est là Tacite ou Newton!
La « préparation » de ce portrait est conservée au musée de Saint-Quentin; c'est une des plus belles de la galerie. Le portrait définitif appartenait en 1878 à Walfordin. Il figurait à l'exposition rétrospective du Trocadéro en même temps qu'un portrait à l'huile, attribué à Chardin, appartenant au duc d'Aumale. Le pastel de La Tour a été gravé par Dagoty, Maviez, Hopwood. C'est sans doute sur une épreuve d'une de ces planches que d'Alembert écrivit ce quatrain mélancolique adressé à Mlle de Lespinasse :
De ma tendre amitié ce portrait est le gage;
Qu'il soit dans tous vos maux votre plus ferme appui;
Et dites quelquefois, en voyant cette image
De tous ceux que j'aimai, qui m'aima comme lui?
Parmi les autres portraits gravés dont les originaux nous sont inconnus, on peut citer ceux de Watelet, d'après Cochin; de Dupin et de Maleuvre, d'après Pujos (1774); de Savart, d'après Mlle Luzurier. Un autre portrait anonyme et non reproduit, provenant de la collection de l'ancienne Académie française, fait partie du musée de Versailles. Watelet avait demandé à Félix Lecomte une statue en marbre de son ami; elle est placée aujourd'hui à l'Institut. La tête servit de modèle au buste qu'Alexandre Lenoir commanda en 1798 à Guillaume Francin et qui, du Musée des monuments français, a été transféré à Versailles. Antérieurement, Houdon avait modelé un autre buste dont le marbre n'a figuré qu'au salon de l'an X (1802) comme appartenant à l'auteur et dont des épreuves en plâtre et en terre cuite ont passé dans les ventes de l'artiste en 1795 et en 1828. Il a été gravé par A. de Saint-Aubin et par Maleuvre. C'est sans doute à lui que d'Alembert faisait allusion en repoussant les offres du statuaire Poncet recommandé par Voltaire (25 avril 1776). Enfin, il existe des épreuves en argent et en bronze de la médaille ciselée par N.-M. Gatteaux peur le prix fondé par Saint-Rémy à l'Académie française. (Maurice Tourneux).


D'Alembert, Discours préliminaire des éditeurs de 1751 et articles de l'Encyclopédie (prés. Martine Groult), Honoré Champion, 1999. -Traité de dynamique, Jacques Gabay, 1990. - Essais sur les éléments de philosophie (1759), Fayard, 1986. - Eléments de musique théorique et pratique, Slatkine. - Avec Diderot, Une Suisse heureuse, Zoé, 2002. 

G. Chaussinand-Nogaret, D'Alembert, une vie d'intellectuel au siècle des Lumières, Fayard, 2007.- Fils naturel d'une nonne libertine, condamné au sort des enfants trouvés, Jean Le Rond dit d'Alembert acquiert très jeune la réputation de plus grand géomètre d'Europe ; esprit facétieux, il enchante les salons par ses saillies burlesques et ses dons d'imitateur. Mais c'est la littérature qui fait de lui la grande figure du siècle des Lumières. Le "Discours préliminaire" de l'Encyclopédie, entreprise dont il assure la direction avec Diderot, lui vaut une gloire comparable à celle de Voltaire et l'amitié des "despotes éclairés", Catherine de Russie, Frédéric le Grand, qui tentent même de l'attirer chez eux. Après avoir investi les salons parisiens et les académies, d'Alembert devint le fédérateur du "parti philosophique", soutint avec ardeur la lutte contre les dévots s'engagea sur tous les fronts et dans toutes les querelles qui opposaient les gens de lettres et souvent leur valaient les foudres de l'autorité.

Peu apprécié à la cour, il avait aussi des ennemis dans son propre camp. Ceux-ci réprouvaient ses idées radicales, ceux-là enviaient la position acquise par ses seuls mérites qui lui donnait le magistère sur le monde des sciences et des lettres, la quasi-totalité de ses pairs lui rendaient justice, mais ceux qu'il avait blessés lui vouaient une haine féroce, le qualifiaient d'usurpateur et le condamnaient pour son charlatanisme supposé : sa prétendue supériorité en géométrie lui aurait valu son triomphe dans la littérature, alors que sa renommée d'homme de lettres en aurait imposé aux mathématiciens... On lui reprochait aussi son despotisme et son esprit vindicatif. Ce dernier reproche était parfois justifié; mais si d'Alembert intrigua parfois, ce fut pour la cause, celle des Lumières, et nullement par ambition ou intérêt. 

Discret sur sa vie intime, il connut une passion publique qui ne s'éteignit qu'avec lui. Le couple d'Alembert-Julie de Lespinasse compte au nombre des idylles qui n'ont pas encore révélé tous leurs secrets. Au-delà des querelles, il reste son oeuvre : inséparable du caractère de l'homme partagé entre ironie et fureur, elle a suscité générosité et passion partisane et reste, à côté de celle de Voltaire, la manifestation la plus éloquente, le procès-verbal le plus explicite de l'exceptionnelle fermentation intellectuelle d'un siècle qui a voulu s'aventurer hors des territoires connus et labourer les terres vierges que son optimisme disputait aux fanatismes et au fatalisme. (couv.).

A. Michel et al., Analyse et dynamique, études sur l'oeuvre de d'Alembert, Presses de l'université de Laval, 2003. 

Collectif, Ordre et production des savoirs dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert, Presses universitaires du Mirail, 2001.

Goubier, D'Alembert et Diderot, Belin, 2000. 

Martine Groulet, D'Alembert et la mécanique de la vérité dans l'Encyclopédie, Honoré Champion, 1999. 

Véronique Le Ru, D'Alembert philosophe, Vrin, 1994. 

Collectif,Jean d'Alembert, savant et philosophe, Les Archives contemporaines, 1989.

Diderot, Le rêve de d'Alembert, Flammarion, 2002. 

H. Prollongeau, Le cauchemar de d'Alembert, Champs Elysées / Le Masque, 1998. 




Les Œuvres Complètes de D'Alembert. (site de l'Observatoire de Paris).
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