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Histoire de l'Europe > La France > Géographie historique de la France
L'histoire de la Normandie
Aperçu
Jalons chronologiques
• Jusqu'à la bataille de Tinchebray
Les Normands en Italie
Guillaume le Conquérant
• La Normandie, entre France et Angleterre
• De 1461 à la Révolution

Civilisation
Le dialecte normand
La littérature normande
Les beaux-arts en Normandie

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La Normandie, Normannia et Neustria, est une ancienne province et grand gouvernement de France, bornée au Nord et à l'Ouest par la Manche, au Nord-Est par la Picardie, à l'Est par l'lle-de-France, au Sud par le Maine, et au Sud-Ouest par la Bretagne. Capitale : Rouen

Elle se divisait en Haute-Normandie à l'Est, et Basse-Normandie à l'Ouest (des divisions et des noms qu'ont repris les deux régions administratives actuelles créées en 1956). La première avait pour chef-lieu Rouen et comprenait les pays de Caux et de Bray, le Vexin normand, le Roumois, le Lieuvin et les pays d'Auge et d'Ouche; la seconde, dont le chef-lieu était Caen, renfermait les campagnes d'Alençon et de Caen, les Marches, le pays d'Houlme, le Bessin, le Bocage, le Cotentin et l'Avranchin.
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La bannière des ducs de Normandie flotte toujours sur les ruines du château de Fécamp.

La Normandie est arrosée par la Seine, l'Eure, l'Orne, etc. Cette contrée fertile produit en abondance les céréales, le lin, le chanvre, le colza et les pommes avec lesquelles on fait une grande quantité de cidre. Elle a d'excellents pâturages, qui nourrissent des chevaux, des boeufs et des moutons très recherchés. Ses côtes offrent un grand nombre de ports, et sont très poissonneuses. L'Avranchin a des salines importantes.

Histoire

Quelques monuments mégalithiques sont les seuls vestiges de la préhistoire normande. Lorsque César fit la conquête des Gaules, le pays qui fut désigné dans la suite sous le nom de Normandie faisait partie de l'Armorique ou Gaule Armoricaine; il comprenait alors plusieurs peuplades, dont les principales étaient les Calètes (dans le pays de Caux), les Vélocasses (Vexin Normand), les Aulerces Eburoviques (pays d'Évreux), les Lexoviens (pays de Lisieux), les Essuens (pays de Sées), les Viducasses (pays de Caen), les Bajocasses (pays de Bayeux ), les Unelliens (pays de Coutances), enfin les Abrincates dans l'Avranchin. 

De l'époque gallo-romaine à la bataille de Tinchebray.
Sous l'Empire romain cette province fut la seconde Lyonnaise. Elle reçut de de Rome une  civilisation, une administration, une langue nouvelles. Des voies romaines furent établies à travers le pays pour le mettre en communication avec les autres parties des Gaules. Une voie romaine longeait l'océan, de Boulogne à l'embouchure de la Seine; une autre traversait le pays des Véliocasses et des Calètes, et aboutissait à Caracolicum, près d'Harfleur. Alors furent fondées ou agrandies Rouen, Bayeux, Évreux, Lisieux, et quelques-unes de ces villes furent embellies de monuments dont il ne nous est parvenu que de faibles vestiges. Au IIIe et au IVe siècle le christianisme se propagea dans ce pays sous l'impulsion notamment de saint Nicaise et de saint Mellon. 

Quand, au Ve siècle, les Francs eurent envahi une partie des Gaules, la même province fut conquise par Clovis. Elle fit partie du royaume de Soissons, puis de celui de Neustrie (par opposition à l'Austrasie ou partie orientale de la France), laquelle Neustrie s'étendait de la Seine à la Loire. Pendant la période mérovingienne, les crimes des rois francs y côtoient le travail d'évangélisation des évêques saint Romain, saint Ouen, saint Ansbert. Alors furent fondés les monastères de Saint-Wandrille, de Jumièges, de Fécamp, de Saint-Michel-en-Péril-de-Mer.

Des bandes de pirates originaires de Scandinavie, les Vikings (ou Northmans  = hommes du Nord), terme dont on a fait Normands) vinrent dès cette époque infester les côtes de la Neustrie, et s'établir même dans quelques localités. Quoique ce fût une époque de violence et de barbarie, il se faisait pourtant du commerce par la Seine avec les contrées d'outre mer, et on voit par une charte de Dagobert en faveur de la foire de Saint-Denis que, cette foire était approvisionnée de diverses denrées apportées par mer en Neustrie, et transportées sur la Seine jusqu'au près du lieu de la foire. Les églises et les couvents se multiplièrent, et il se forma dans plusieurs de ces institutions religieuses des écoles et des bibliothèques. 

Au IXe siècle les invasions hostiles des Vikings devinrent fréquentes, le cours de la Seine fut infesté, et la province servit aux Normands de passage pour pénétrer dans l'intérieur de la France. La dynastie carolingienne, dont les membres étaient peu d'accord entre eux, fut à la fin trop faible pour se débarrasser de ces ennemis, et obligée de leur céder par une convention passée à Saint-Clair-sur-Epte entre le chef viking Rollon et le roi Charles le Simple, la partie de la Neustrie qu'ils avaient envahie, et qui dès lors prit le nom de Normandie; cette dénomination s'étendit sur les districts que les Normands réunirent à leur conquête. 

A partir de l'an 912, la Normandie eut donc des ducs vikings, qui adoptèrent assez promptement, les moeurs et usages locaux, et rebâtirent dans la province où ils s'étaient établis les églises et les couvents que païens ils avaient dévastés sans pitié. Ils s'étaient partagé les terres qui étaient à leur convenance, et les chefs étaient devenus des seigneurs de district, de ville et de village. De 931 à 996, le nouveau duché s'étendit de la Bresle au Couesnon, de l'Epte, de l'Eure et de la Sarthe à l'Océan Atlantique. Comme on jouissait de la paix et de la tranquillité sous le régime ducal, la Normandie, qui auparavant avait perdu beaucoup d'habitants, se repeupla, et beaucoup d'émigrés d'autres parties de la France étaient venus se mêler à la population indigène.

Dès le règne du second duc, Guillaume, surnommé Longue-Épée, fils de Rollon ou Raoul, la Normandie entra dans les querelles de la France, sa voisine. Guillaume contribua à assurer le trône à Louis d'Outre-mer; mais, en prenant fait et cause pour un comte de Montreuil-sur-Mer contre Arnoul, comte de Flandres, il fut attiré par celui-ci dans un guet-apens, et assassiné dans une île de la Somme. Louis d'Outre-Mer profita du trouble pour enlever le jeune Richard, fils mineur de Guillaume et le mener en France; mais des serviteurs fidèles surent le ramener en Normandie, et appelèrent à leur secours des chefs danois. Louis à son tour fut fait prisonnier et obligé de promettre de laisser la Normandie en paix. Hugues, comte de Paris, entra en alliance avec le jeune duc de cette province, et lui donna sa fille en mariage.

Par la suite Lothaire, successeur de Louis d'Outre-Mer, attaqua encore le duché de Normandie; mais il ne fut pas plus heureux que son prédécesseur; et Richard gagna par sa résistance un accroissement de territoire. Sous Richard II ce furent d'autres ennemis que la Normandie eut à combattre : d'abord des nobles du pays, qui s'insurgeaient contre le pouvoir du duc et opprimaient le peuple; ensuite Éthelred, roi d'Angleterre et beau-frère de ce duc; enfin le duc de Chartres, autre beau-frère de Richard II. Dans la dernière de ces guerres il fut encore secouru par une expédition des hommes du Nord. 

Richard III succéda à Richard II; mais, étant mort en 1028, il avait été remplacé par son frère Robert, contre lequel il avait été en guerre lorsque celui-ci n'était encore que comte d'Exmes. Ce frère fut même accusé par la voix publique de s'être débarrassé par le poison du duc régnant. Plus guerroyant que ses prédécesseurs immédiats, Robert aida le duc de Flandre à rentrer dans son pouvoir, et le roi de France à remonter sur le trône, ce qui lui valut la cession du Vexin Français, de Gisors et de quelques autres places. Puis il força le duc de Bretagne à lui rendre un hommage auquel prétendaient les ducs de Normandie depuis la convention de Saint-Clair-sur-Epte. Il fit ensuite un pèlerinage à Jérusalem, et mourut, en Asie, en 1035, ne laissant que des enfants illégitimes, de ses liaisons avec la fille d'un pelletier de Falaise.

L'un de ces enfants, Guillaume, n'avait que huit ans quand il fut appelé à succéder à son père; ce n'était encore que Guillaurne le Bâtard; on ne se doutait pas qu'il acquerrait un jour le titre de Conquérant. Henri, roi de France, profita de la minorité de Guillaume pour envahir son héritage. Le comte d'Arques, quoique oncle de l'enfant, se déclara contre lui; deux autres parents, les comtes d'Eu et de Mortain, par leur révolte, et le comte d'Anjou par ses attaques, ajoutèrent aux troubles de la province. 

Guillaume, parvenu à l'adolescence, se défendit avec succès contre tous ses ennemis, et enfin son mariage avec Mathilde, fille du comte de Flandre et nièce du roi de France, lui procura des alliances puissantes. Dès lors, tranquille à l'égard de son duché, il porta ses vues plus loin; faisant valoir, un prétendu testament d'Édouard, roi d'Angleterre, il réclama de Harold, fils du comte de Kent, le trône de ce pays; et sur le refus de ce chef saxon, il assembla; en 1066, ses leudes à Lillebonne, pour prendre, avec eux la résolution d'une expédition en Angleterre
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Tapisserie de Bayeux.
La conquête de l'Angleterre par les Normands (détails de la Tapisserie de Bayeux).
Tapisserie de Bayeux.

Cette expédition composée, de trois mille bâtiments; montés par soixante mille guerriers, non seulement de la Normandie, mais aussi du royaume de France et de la Bretagne, mit à la voile peu, de temps après : Harold fut vaincu à la bataille d'Hastings; Guillaume avec ses Normands prit possession du royaume d'Angleterre, et distribua des terres plus ou moins considérables aux compagnons d'armes qui l'avaient secondé, et qui devinrent ainsi grands seigneurs en Angleterre, sans perdre leurs petites seigneuries en Normandie; avec eux furent transplantées dans la Grande-Bretagne les lois et coutumes de la féodalité normande et en partie la langue de cette province.

Dès lors, la Normandie fut en rapports continuels avec l'Angleterre; Guillaume revint dans son duché, et tint en 1080 une grande assemblée à Lillebonne pour régler les affaires urgentes du pays; six ans auparavant, dans une autre assemblée, on avait déjà défendu ces guerres que les nobles se faisaient de château à château, et dont le peuple était victime. Dans l'assemblée de 1080 il fut enjoint aux Normands d'observer la trêve de Dieu; défense fut faite de construire de nouveaux forts, de tendre des embûches dans les forêts, de troubler les marchands dans leur commerce, d'usurper le droit de battre monnaie. 

Ayant été blessé dans une expédition entreprise pour repousser le roi de France, qui menaçait le duché, Guillaume expira en 1087. Il avait légué, à ce qu'il paraît, à son second fils Guillaume, surnommé le Roux, la couronne d'Angleterre, tandis qu'à son fils aîné, Robert, surnommé Courte-Heuse, qui auparavant avait pris les armes contre lui, il ne laissait que le duché de Normandie; ou bien celui-ci s'était laissé prévenir par son frère, plus hardi et plus actif que lui. Robert Courte-Heuse était en effet peu capable de gouverner. Il laissa les nobles, reçommencer leurs vexations, oppressives, aussi Guillaume le Roux, fut-il appelé d'Angleterre par un parti de mécontents, à Rouen; mais le complot échoua. 

Au départ de Robert pour la croisade, 1095, les deux contrées sont réunies, puis divisées à la mort de Guillaume, 1100. Robert, de retour, règne en Normandie, et son jeune frère, Henri Beauclerc, en Angleterre; mais, en 1106, la bataille de Tinchebray (Orne) soumet la Normandie à Henri Ier

La Normandie, entre France et Angleterre.

Parmi les dispositions qu'Henri fit en faveur des villes, il y en avait une qui accordait la franchise aux serfs qui auraient été établis dans les villes et bourgs, pendant un an et un jour  sans être réclamés, ce qui eut pour effet d'augmenter beaucoup la classe bourgeoise et d'affaiblir le pouvoir des seigneurs féodaux.

Après la mort de Henri Ier, plusieurs partis se formèrent et désolèrent de nouveau le pays; c'étaient ceux de Mathilde, fille de ce roi, et de Henri Plantagenet, duc d'Anjou et mari de Mathilde, puis d'Étienne de Blois, petit-fils de Guillaume le Conquérant; Cliton, fils de Robert Courte-Heuse, avait aussi des partisans, mais ils étaient trop peu nombreux pour pouvoir le mettre en possession de l'héritage de son père.Ce fut Henri Plantagenet qui, par une charte, reconnut la commune de Rouen et les corporations de ses bourgeois. Aussi les Rouennais, le soutinrent-ils dans ses guerres contre ses propres fils, contre Louis VII, roi de France, et contre le comte de Flandre. Son mariage avec Aliénor d'Aquitaine (Éléonore de Guienne) lui donna encore l'ancien duché d'Aquitaine, de la Loire aux Pyrénées. 

Obligé de repasser en Angleterre, Henri ne put empêcher ses ennemis de pénétrer en Normandie, et d'en assiéger la capitale; mais victorieux de ses adversaires dans les îles Britanniques, Henri Plantagenet vint la délivrer, et assura de nouveaux avantages aux habitants de Rouen, tels que le monopole de la navigation et du commerce de la basse Seine, et celui du commerce avec l'Irlande; depuis lors le chef-lieu de la Normandie parvint à une grande prospérité.

En 1189, Richard, surnommé Coeur de Lion, succéda à son père comme roi d'Angleterre et comme duc de Normandie; ce fut un règne peu heureux pour le duché, qui, pendant la croisade entreprise par Richard, fut envahi par Philippe Auguste, roi de France. A cette invasion se joignirent des querelles entre le clergé et la bourgeoisie; mais ce fut sous Jean Sans Terre, qui, en 1199, avait succédé à Richard, que la Normandie cessa d'avoir des ducs indépendants. Ce roi d'Angleterre ayant laissé ou fait assassiner le jeune Arthur de Bretagne, son neveu, qui était tombé entre ses mains, et qu'il avait fait enfermer dans une tour auprès de la Seine, Philippe-Auguste fit valoir ses prétentions de suzerain; puis, connaissant le mécontentement des Normands au sujet du mauvais gouvernement du roi Jean, il vint de nouveau envahir la Normandie, et força, en 1204, la ville de Rouen à se rendre; tout le duché subit le sort du chef-lieu, n'étant pas secouru par l'indolent Jean sans Terre, et fit dès lors partie du royaume de France. Jean sans Terre ne conserva que Jersey, Guernesey, Aurigny (Les Îles Anglo-Normandes).

Philippe-Auguste confirma pourtant les droits de la commune de Rouen, et son monopole à l'égard de la navigation commerciale sur la basse Seine, et du commerce avec l'Irlande. D'un autre côté, il restreignit et réprima les opérations usuraires des juifs que Jean sans Terre avait tolérées, et il mit des bornes à la puissance temporelle du clergé, qui trop fréquemment était dans cette province comme ailleurs en conflit avec l'autorité civile. 

Déjà, sous le régime ducal, la Normandie avait une haute cour de justice, désignée sous le nom de l'Échiquier; et qui était en même temps une cour des comptes. Un autre conflit existait et se renouvelait fréquemment entre les Parisiens et les Rouennais au sujet de la navigation de la Seine; il y eut plusieurs enquêtes et decisions du parlement du roi à cet égard. En 1293, après une insurrection des Rouennais contre l'autorité royale, qui fréquemment portait atteinte à leurs anciens privilèges, ils furent privés de leur monopole de la navigation sur la basse Seine, les droits de commune furent restreints dans toute la province, et en 1302 l'Échiquier de Normandie, jusqu'alors assez indépendant, fut obligé de recevoir des commissaires royaux. 

Après le règne de Philippe le Bel vint un mode d'administration moins despotique; et son successeur Louis X accorda la fameuse Charte aux Normands, qui reconnaissait quelques-uns des droits auxquels les Normands attachaient beaucoup d'importance, comme étant un reste de leur ancienne indépendance, et cette charte fut confirmée dans la suite par plusieurs rois successifs. Il leur sembla recouvrer encore davantage cette ancienne indépendance lorsqu'en 1332 Philippe de Valois nomma duc de Normandie son fils Jean, rétablissant ainsi un titre auquel était attaché jadis un pouvoir souverain. En même temps paraissent les États de Normandie, qui dureront jusqu'à Louis XIV

Ce qui fut plus important, c'est une charte de 1339, par laquelle le roi et Jean son fils, tout en confirmant la charte aux Normands, reconnurent qu'en Normandie les impôts ne pourraient être levés s'ils n'avaient été votés préalablement par les états provinciaux. Pénétrés de reconnaissance, les Normands promirent de seconder le roi de France dans sa guerre contre Édouard III d'Angleterre; mais celui-ci les prévint en faisant une invasion en Normandie, et en ravageant le pays. La prise des vaisseaux normands lors du combat de l'Écluse, en 1340, les défaites des troupes françaises à Crécy et à Poitiers, et les troubles civils de la France laissèrent de longues traces en Normandie, qui avait besoin du commerce maritime pour prospérer. 

L'invasion anglaise en 1346, la guerre civile, la Peste noire, désolèrent la Normandie jusque sous Charles V. Aux états de la province, assemblés en 1351 pour voter des subsides au roi, un orateur exposa tous les maux qu'un mauvais gouvernement avait attirés à la province. Désolée de nouveau par la guerre des Armagnacs et des Bourguignons, la Normandie est aux Anglais de 1417 à 1450. De cette époque date l'université de Caen, établie par Bedford en 1435. En 1419, Henri V, roi d'Angleterre, fit son entrée à Rouen; c'est dans la même ville que les Anglais firent mourir en 1431 Jeanne d'Arc. Il fallut que les Français assiégeassent une place après l'autre, et ce ne fut qu'en 1450 qu'ils délivrèrent le pays des garnisons anglaises. 

La Ligue du Bien public agita encore la Normandie, qui fut reconstituée en duché, pour une année seulement, en faveur de Charles de Berry, frère de Louis XI, 1465-1466. Le roi fit déclarer par des États généraux de 1468 que la Normandie ne serait jamais détachée de la couronne; l'anneau ducal fut brisé en présence de l'Echiquier, et le titre de duc de Normandie ne fut plus porté que par le fils de Louis XVI (Louis XVII).

De 1461 à la Révolution.
Après tant d'agitations, les Normands se livrèrent au commerce et à la navigations. Aux ports de Dieppe et de Cherbourg, François ler ajouta celui du Havre; Rouen n'était pas seulement un port commerçant : c'était aussi une ville manufacturière, qui fournissait beaucoup de marchandises pour l'exportation. Une bourgeoisie enrichie y formait une pairie et une véritable aristocratie dans le corps municipal. 

Au commencement du XVIe siècle, l'Échiquier fut transformé en parlement siégeant à Rouen. Les guerres de religion et de Ia Ligue ensanglantèrent la Normandie : Rouen était pour Charles de Bourbon, Caen pour Henri IV. Ce dernier, s'étant emparé du chef-lieu après plusieurs jours de tranchée ouverte, parvint enfin à pacifier le pays, et présida en 1595 à une assemblée de notables à Rouen. 

La Normandie connut encore un certaine effervescence au XVIIe siècle, mais l'émeute des Nu-pieds, en 1639, et les troubles de la Fronde y furent assez rapidement étouffés. Louis XIV enleva à la Normandie ses États en 1654, qui étaient demeurés le seul reste de l'ancienne indépendance de la Normandie; la Charte aux Normands et le cri de Haro n'eurent plus de sens. Les libertés municipales firent place aux mairies royales. Cette province s'assimila de plus en plus au reste de la France, et à mesure que les voies de communication ont été perfectionnées, l'assimilation devint plus intime et complète. 
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Les outre-mers normands

A partir de 1025, des nobles de la Normandie étant allés en pèlerins en Palestine, et ayant, vu, à leur retour, en passant par le midi de l'ltalie, les côtes de ce pays en butte aux incursions des Sarrasins, repoussèrent ces derniers, et, à leur retour dans leur pays, ils engagèrent leurs compatriotes à aller s'établir dans le pays de Naples, pour s'y établir, sous prétexte d'y défendre les chrétiens. 

De fait, les premiers Normands qui s'y rendirent eurent à combattre non des Musulmans, mais les Grecs, qui étaient en possession des plus belles contrées de l'ltalie méridionale. Ils furent suivis des fils de Tancrède de Hauteville et d'autres Normands, qui en dépit des Grecs, des Napolitains et même du, pape, s'emparèrent de la Pouille, de la Calabre, et de la Sicile. Le pape finit par lnves tir Robert Guiscard du duché de la Pouille et de la Calabre, et Roger fut le premier roi normand de Sicile et de Naples (Les Normands en Italie).

Les Normands ont aussi fondésur la côte d'Afrique des comptoirs, 1366, et, sous Jean de Béthencourt, ils colonisent les Canaries. Au XVIe siècle les navigateurs normands se signalent même par des découvertes maritimes.  Ils découvrirent le Canada, et y fondèrent les premières colonies françaises. Avec la paix, 1594, recommencèrent les expéditions maritimes : les Normands fondèrent Québec en 1608, s'établirent au Brésil en 1612, visitèrent les îles de la Sonde en 1617, colonisèrent la Guadeloupe en 1635. 

La population française du Canada est en grande partie d'origine normande, et encore aujourd'hui au Québec et à Montréal on reconnait dans la langue parlée un accent qui témoigne de son héritage normand. 

Sous Louis XV, la Normandie ne s'émut vivement qu'à la suppression du parlement de Rouen, 1771. Louis XVI le lui rendit en 1774, et lui donna Cherbourg, 1786. 

Pendant la Révolution, le Normand Thouret fut quatre fois président de l'Assemblée nationale; le mouvement girondin, organisé à Caen et à Evreux contre la Terreur, eut le Normand Buzot pour chef; de Caen partit la Normande Charlotte Corday. Mais la défaite de Wimpfen et du marquis de Puisaye à Vernon abattit l'opposition fédéraliste. Ajoutons que la Normandie leva 100 bataillons contre l'étranger; les généraux Davenay, Bachelet, Canville, Bonnet, Brouard, Cavalier, Chauvel, Dagobert, Decaen, Delannay, Lemarrois, Ruffin, Valhubert, tous Normands, les commandaient. 

En 1790, la province et l'ancien gouvernement de Normandie disparurent pour laisser la place à cinq départements qui se distribuent aujourd'hui entre la Haute-Normandie (Seine-Maritime, Eure) et la  Basse-Normandie (Calvados, Orne, Manche)

Le débarquement et la bataille de Normandie

Après la Révolution, l'histoire des départements normands se fond dans l'histoire de la France. Aucun événement majeur n'y est à relever jusqu'à la Seconde Guerre mondiale (1939-1945). La partie Est de la Normandie souffre de l'invasion allemande à partir de 1940, mais c'est surtout avec le débarquement, du 6 au 12 juin 1944, des troupes américano-anglaises et la bataille qui s'ensuit, jusqu'en août 1944, entre les armées alliées et la Wehrmacht, que va s'écrire une des pages les plus dramatiques de l'histoire de la Normandie.

Le débarquement de Normandie.
La préparation (1942-1944).
Connue sous le nom de plan Overlord, le débarquement de troupes en Normandie, puis l'invasion de l'Europe, a été une opération militaire de très grande envergure préparée dès décembre 1942, d'abord par le haut commandement britannique, puis par le quartier général des forces alliées (Supreme headquarter allied expeditionary forces), placé, près de Londres, sous le commandement du général Dwight D. Eisenhower.

La mise en oeuvre du plan d'invasion impliquera trois millions et demi de soldats : 1.750.000 Britanniques, 1.5000.000 Américains; le reste originaires de divers pays en guerre contre l'Allemagne. Parmi les Français, 256 seront appelés à prendre part au débarquement. L'invasion sera précédée de bombardements  massifs des industries allemandes, des voies de communication et d'autres objectifs stratégiques, qui s'intensifieront entre le 20 février et le 1er juin 1944, et feront aussi beaucoup de dommages parmi les populations civiles. 

De leur côté, les Allemands s'attendant à une invasion, dont ils ne connaissent ni le lieu ni la date, s'y préparent en édifiant des fortifications côtières (le mur de l'Atlantique) et en disposant près de trois millions de mines terrestres. Cinq plages sont finalement choisies par les Alliés, entre le nord de Carentan et le cours de l'Orne. De l'ouest à l'est; noms de code : Utah, Omaha, Gold, Juno et Sword. Escortées de près de mille navires d'escorte, 4000 unités navales seront chargées d'acheminer les troupes et le matériel d'invasion, dans le cadre du plan Neptune, dont la mise en oeuvre est confiée à l'amiral Ramsey, épaulé par les amiraux Alan C. Kirk et Philip Vian.
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Normandie : carte des sites du débarquement et de la bataille de l'été 1944.
Le théâtre du débarquement et de la bataille de Normandie.
(Cliquer pour afficher une carte détaillée des plages du débarquement
et des sites de parachutages alliés).

Les débarquement (6-12 juin 1944).
Le mauvais temps retarde d'un jour le débarquement, qui a lieu le 6 juin 1944; c'est le D Day ou Jour J. Au milieu de la nuit du 5 au 6, 7000 tonnes de bombes son lâchées sur les positions allemandes  par  2 000 avions entre Cherbourg et Le Havre. Dans le même temps, afin de protéger le flanc des opérations, 2400 avions et près de 900 planeurs larguent 24 500 hommes dans la régions de Sainte-Mère-Église, près du pont de Bénouville, sur le canal de Caen (Britanniques) et près de Montebourg (Américains), dans le Cotentin. Suit, peu avant l'aube, un bombardement naval, puis, à partir de 6 h 30, les premières vagues d'infanterie et les premiers chars américains déferlent sur la côte. Une heure plus tard, les Britanniques débarquent sur le secteur qui leur a été dévolu. 

Une première tête de pont est établie dans le secteur d'Utah Beach (Les Dunes de Varreville) et  Sainte-Mère-Église par les Américains, qui parviennent également à se rendre maîtres de la route entre Caen et Bayeux, puis à assurer la jonctions avec les forces britanniques et canadiennes, confrontées à de très fortes  résistances. A partir des 14 h, la situation a tourné à peu près partout en faveur des Alliés. Le soir, les plages Gold, Juno et Sword sont reliées; dix divisions américaines, britanniques et canadiennes ont réussi a établir deux solides têtes de pont entre l'Orne et la Vire. Reste encore à assurer la jonction avec les forces américaines débarquées à Omaha Beach; la soudure complète s'opérera progressivement entre le 7 et le 12 juin.
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Débarquement de Normandie : troupes alliées et matériel sur une plage.
Débarquement de troupes et de matériel sur une plage normande en juin 1944.

Le débarquement proprement dit est accompagné d'une gigantesque opération logistique. De vieux navires sont acheminés le long des côtes normandes pour y être coulés et former des digues artificielles; en un rien de temps deux ports artificiels sont créés, comme celui d'Arromanches. Une rotation de navires permet alors d'acheminer depuis l'Angleterre le gros du corps expéditionnaire, avec tout son matériel et sont ravitaillement (armes, essence, etc.). Plus d'un million et demi de soldats et 300 000 véhicules, vont pouvoir, à partir du 25 juin, entreprendre pas à pas la libération de tout l'Ouest de l'Europe, non sans se heurter à une âpre résistance alllemande.

La bataille de Normandie.
L'avancée des Alliés à l'intérieur des terres a commencé avec les prises de Bayeux (8 juin) d'Isigny (9 juin) et de Carentan (12 juin) et la première bataille de Caen (11 au 16 juin). Le 16 les Américains arrivent à Barneville; le 26, ils prennent Cherbourg, tandis que le 28 juin de nouveaux combats ont lieu à Caen, qui ne sera reprise aux Allemands que le 9 juillet.  Les campagnes entre Falaise et Caen sont l'objet d'effroyables combats de chars entre Britanniques et Allemands.

Entretemps, les Alliés se seront emparés de La Haye-du Puits (8 juillet). Et le 10, ils entrent dans Saint-Lô. Le 29, la bataille atteint Coutances; à la suite d'une guerre de haies conduite par les Américains solidement appuyés par leur aviation dans le Bocage, Avranches et Granville tombent entre les mains des Alliés le 30; le lendemain c'est au tour de Pontaubault. 

Début août, les lignes allemandes s'effondrent à partir d'Avranches. Vire (2 août), Dinan (3 août), Mortain (4 août), Rennes (5 août) sont libérées. L'ordre de retraite générale est donné à l'armée de Von Kluge (qui se suicidera le 18 août), le 13 août. Il faudra encore quelques jours pour que Dreux et Falaise passent au mains des Alliés, mais la route vers Paris est désormais ouverte. Déjà la Bretagne, Orléans, Le Mans, Chartres, Châteaudun ont été libérées de l'occupation allemande.

Gens de Normandie

La Normandie a vu naître un grand nombre d'hommes remarquables dans les genres les plus divers : des guerriers, tels que les fils de Tancrède de Hauteville et Guillaume le Conquérant; de hardis navigateurs et d'intrépides explorateurs, Jean de Béthencourt d'Enambuc, Ango, Jacques Cartier, Robert de Lasalle; d'illustres marins, Tourville, Duquesne; de grands poètes, Malherbe, les deux Corneille, Casimir Delavigne; des philosophes et des historiens, Fontenelle, Huet, Bernardin-de-St-Pierre, Mézeray, Daniel, Vertot, les peintres tels que Poussin, Jouvenet, etc. Le consul Lebrun et Flaubert aussi étaient Normands. 

Rouen a donné naissance au sculpteur Pierre Mazeline (1632-1708) et à un architecte, qui fut surtout un théoricien, Jacques-François Blondel (1709-1774). Michel lasne, qui naquit à Caen et mourut en 1667, fut un graveur de grand talent et son compatriote, Jean-Baptiste Fontenay, fournit des dessins pour les Gobelins et la manufacture de Chaillot (1654-1715). Enfin le XVIIIe siècle a vu naître à Caen le grand musicien Auber (1782) et, à Rouen, Boieldieu (1775). 

Au XIVe et au XVe siècle, la Normandie avait donné le jour à quelques médecins illustres, Jean Pitart, qui fut médecin de Philippe le Bel; Henri de Mondeville, dont le traité de médecine renferme des prescriptions qui n'ont pas peu étonné le monde médical au moment de leur publication à la fin du XIXe siècle; Jean Dalechamp, qui fut surtout un praticien.

Plusieurs scientifiques peuvent encore être mentionnés. Le médecin Pierre Heurtant publia un Traité de la peste en 1621 à Caen où il exerçait. Son confrère de Dieppe, Jean Pecquet (mort en 1674), découvrit le réservoir du chyle connu sous le nom de réservoir de Pecquet et publia ses Expériences d'anatomie. Georges Fournier (1595-1652), Adrien Auzout (mort en 1690), Guillaume et Jean Gosselin, Pierre Varignon (1654-1722) et Laplace (1749-1827), furent des mathématiciens et des astronomes.  Le Havre a produit le naturaliste Dicquemare (1733-89) et Rouen  le chimiste Lémery (1645-1715). Vauquelin a été un autre chimiste d'origine normande.

Ducs héréditaires de Normandie

Rollon, 912 
Guillaume Ier, Longue-Epée, 927
Richard ler, Sans-Peur, 942
Richard II, le Bon, 996 
Richard III, 1027
Robert Ier, le Magnifique et le Diable, 1028 
Guillaume II, le Bâtard et le Conquérant,1035
Robert II, Courte-Heuse, 1087 
Henri Ier, roi d'Angleterre, 1106
Mathilde / Etienne de Blois, roi d'Angleterre, 1135
Geoffroi Plantagenet,1144
Henri II, roi d'Angleterre, 1149
Richard Coeur de Lion, roi d'Angleterre, 1189
Jean Sans-Terre et Arthur, 1199-1204

Le titre de duc de Normandie a été donné à quatre princes de la maison royale de France : Jean, fils de Philippe de Valois, roi de France en 1350; Charles, fils aîné du roi Jean, roi en 1364; Charles de France, fils de Charles VII, et frère de Louis XI, mort en 1472, et Louis-Charles, second fils de Louis XVI, Dauphin après la mort de son frère en 1789, Louis XVII en 1705. 


En librairie. - Collectif, Légendes et récits de Normandie, La Découvrance, 2007. Charles Brisson, René Herval et A. Lepilleur racontent dans cet ouvrage, quelques légendes et croyances populaires de la Normandie : L'histoire du roi d'Yvetot, La légende du diable et du pont de Pont-de-l'Arche, La légende du Val-Pitant, Le loup de Jumièges  (légende du Loup-Vert), Les énervés de Jumièges, Le trésor diabolique, Le maître de l'oeuvre de Norrey, Le fou de Valognes, La dame blanche de Gouvy, La brèche au diable, Des ailes au vent des grèves, La reine de Cent Quatre. (couv).
 
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Dictionnaire Territoires et lieux d'Histoire
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