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Histoire de l'Europe > La France > Le XVIIIe siècle
La Révolution française
Sommaire Causes Constituante Législative Convention Directoire
On donne le nom de Révolution française ou de Révolution de 1789 à la période de l'histoire de France qui s'étend depuis la réunion des Etats généraux (5 mai 1789) jusqu'au coup d'Etat du 18 brumaire an VIII (9 novembre 1799). 

La France monarchique et féodale de 1789 fit place à la France démocratique et égalitaire du XIXe siècle. Avant le XXe siècle, il n'y a pas d'exemple d'une transformation politique et sociale aussi radicale accomplie dans une nation en si peu d'années par le seul jeu des forces intérieures, sans l'intervention d'un conquérant étranger ou d'une religion nouvelle. La Révolution française est un des plus grands événements de l'histoire. Elle n'est pas simplement un événement français; elle eut une influence universelle qui marque le commencement d'une ère nouvelle. Elle fut la conséquence d'un mouvement philosophique autant que politique et assit la législation sur les principes du droit naturel et de la discussion rationnelle. 

Le roi et la cour se trouvèrent vers 1788 acculés par le déficit à une réforme politique et administrative. Sous l'influence des idées philosophiques, la plupart des monarchies européennes avaient fait des tentatives analogues; en France même Turgot et Malesherbes en avaient essayé une; là, comme dans le reste de l'Europe, une réaction avait suivi; mais les difficultés financières s'aggravant d'année en année, tout le monde reconnut qu'il était impossible d'éviter une réorganisation. A bout d'expédients, Louis XVI décida la convocation des Etats généraux, réclamée par le Parlement et par Necker. C'était rendre la parole à la nation et la charger de régler ses destinées ultérieures.

La cour ne l'entendait pas ainsi et un conflit était inévitable entre elle et les députés sur l'étendue des pouvoirs de ceux-ci. Les publicistes les revendiquaient tous, proclamant le principe de la souveraineté du peuple. Les cahiers des Etats généraux prouvent que les Français s'accordaient à demander des réformes radicales; s'inspirant des principes du droit naturel presque universellement admis par les gens cultivés de l'époque, ils exigent l'égalité devant la loi et la liberté politique. En bien des points les trois ordres s'assemblent pour réclamer la suppression de l'arbitraire royal et administratif, l'unité de législation et de juridiction, l'admission de tous aux emplois, la répartition égale des impôts. 

Le bas clergé est d'accord avec le tiers état. Cependant, ailleurs, l'antagonisme se marque; la noblesse et le clergé veulent conserver leurs privilèges, surtout en matière d'impôts; l'intolérance du clergé catholique se manifeste. Souvent aussi perce le particularisme des provinces pour qui la liberté serait la restauration des prérogatives locales, sans souci de l'unité française. En somme, les cahiers demandent une révolution sociale abolissant le régime féodal; sur ce point, ils devaient obtenir toute satisfaction; quant à la révolution politique, ils veulent mettre fin à la monarchie absolue, mais sans savoir nettement par quoi la remplacer. Il y faudra quatre-vingts ans de tâtonnements.

Dès la première séance des Etats (5 mai 1789), l'antagonisme fut évident entre la nation, représentée par les députés du tiers, et le roi, champion des privilégiés. De suite apparurent l'incapacité de Louis XVI et de ses conseillers, leur irrésolution, leur partialité en faveur des abus. La lutte s'engagea d'abord sur l'organisation de l'assemblée. Serait-elle une ou tripartite? voterait-elle par tête ou par corps? Dans la seconde hypothèse les deux ordres privilégiés auraient tenu en échec le tiers état, c.-à-d. la nation. C'était la lutte entre le droit ancien et le droit nouveau; pour les uns, il s'agissait d'une consultation des Etats généraux par le roi; pour les autres, de la réunion d'une Assemblée nationale. La double représentation accordée au tiers état prouvait que le vote par tête et l'assemblée unique étaient la solution légitime. Elle prévalut, et ce premier combat décida du sort de la monarchie bourbonienne

Le 17 juin, les députés du tiers, sur le conseil de Sieyès et de Mirabeau, se constituèrent en Assemblée nationale; « ils sortirent à jamais du cercle des formalités ou les classes privilégiés croyaient les avoir enfermés ». Ce jour naquit la France nouvelle. Du même coup fut tranchée par la négative la question de savoir s'il y aurait une aristocratie en France. On dépassa le régime de la constitution anglaise et des deux Chambres, ou les pairs, héritiers d'un privilège séculaire, subsistent en face des Communes. Contre l'opposition du roi, les députés se lient par le serment du Jeu de paume (20 juin); ils lui tiennent tête le 23 juin et remportent une première victoire morale. L'Ancien régime prenait fin. La direction passait à l'Assemblée.
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Prise de la Bastille.
La Prise de la Bastille (14 juillet 1789).

Il n'y avait plus de recours que dans la puissance des baïonnettes. Le roi réunit autour de Paris des mercenaires étrangers. Mais la ville se soulève autour des agitateurs du Palais-Royal (résidence du duc d'Orléans); elle adopte la cocarde, arme une milice, élit une municipalité et répond au renvoi de Necker par la prise de la Bastille (14 juillet). Dans toute la France s'organisent des municipalités et des gardes nationales. D'un seul coup l'autorité royale est brisée et les novateurs sentent qu'ils ont aussi bien la force que le droit. Louis XVI s'incline, rappelle Necker, nomme Bailly maire de Paris, Lafayette commandant de la garde nationale. Les coryphées du parti réactionnaire, le comte d'Artois (le futur Charles X), les princes de Condé et de Conti, Polignac, Breteuil, Broglie, donnent le signal de l'émigration; les privilégiés vont s'armer contre la patrie et armer l'étranger contre elle pour la défense des abus dont ils vivaient. Ainsi se consomme la rupture entre l'ancien régime et la France démocratique.

L'Assemblée nationale pose les fondements du nouveau régime dans l'immortelle Déclaration des droits de l'homme. Dans le pays entier les populations secouent le joug détesté des servitudes féodales; leur exaspération, aggravée par la famine, effraye les nobles, et dans la nuit du 4 août ils abandonnent volontairement leurs privilèges : corvée, droits seigneuriaux, dîmes, cens disparaissent. Corporations, villes, provinces les imitent, et cet élan unanime consacre l'affranchissement du travail, l'égalité civile, l'unité de la patrie. La révolution civile est consommée ; elle se fait avec le concours de tous, sans résistance. On constate la fin de l'antique inégalité. Restait le problème de la liberté politique, bien autrement difficile.

Le conflit avec la cour reparut lorsqu'on discuta les conditions de la monarchie constitutionnelle. Les Parisiens viennent chercher le roi à Versailles et l'emmènent à Paris; l'Assemblée l'y suit; désormais les pouvoirs publics seront sous la main du peuple et de ses chefs. Désormais entre ceux-ci et le roi nulle réconciliation possible; pourtant on n'eut pas l'énergie de se séparer de l'ancienne dynastie; on laissa le fer dans la plaie. La monarchie constitutionnelle, possible avec le duc d'Orléans, était absurde avec Louis XVI; l'Assemblée passera dix-huit mois à organiser cette absurdité, tandis que le roi et surtout la reine Marie-Antoinette conspirent avec l'étranger la destruction du système qu'on élabore. La constitution de 1791 était condamnée d'avance, mort-née.

Ce faisant se poursuivaient les travaux de la Constituante. Pièce à pièce elle démolissait l'organisation existante. Elle compléta la révolution sociale en mettant les biens du clergé à la disposition de la nation. Leur vente devait mettre un tiers du sol aux mains des paysans et réaliser pour la majorité des Français un progrès immense qui fut la principale sauvegarde du nouveau régime. Pour mobiliser ce capital foncier, on crée les assignats, qui fut la principale et périlleuse ressource des gouvernements  de la Révolution française. L'organisation administrative et judiciaire est entièrement refondue; on fait table rase du passé. Aux pouvoirs délégués par le roi, souverain absolu, on substitue des pouvoirs électifs. Mais, en même temps qu'on accomplit ce travail de décentralisation, on réagit contre le particularisme provincial.
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Les assignats

Les assignats furent créés, le 19 avril 1790, par un décret de l'Assemblée nationale. Cette création avait été faite sur la proposition de Bailly, afin d'empêcher. la dépréciation des biens nationaux d'une part, et, de l'autre, pour faire face à toutes les exigences du moment sans recourir à l'augmentation de l'impôt. 

En effet, l'Etat abandonnait aux communes les biens nationaux situés sur leur territoire; les communes devaient revendre ces biens en détail, et les payer au trésor public au moyen de bons à longues échéances; dont les ventes effectuées dans l'intervalle fourniraient les fonds : l'Etat, avec ces bons, désintéressait ses créanciers en leur laissant la faculté de les donner comme argent comptant en paiement des acquisitions de biens nationaux. 
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Assignats.

Types des principaux assignats et mandats territoriaux
émis pendant la révolution.

Les assignats n'étaient donc pas un papier-monnaie, comme on pourrait le croire, puisque les biens nationaux constituaient une valeur réelle qu'on évaluait à dix milliards. La première émission d'assignats s'éleva à 400 millions et rendit tous les services qu'on en attendait. 

Mais bientôt les manoeuvres des partis, la désorganisation du corps social, les menaces des émigrés, l'agiotage effréné des spéculateurs; ébranlèrent la confiance publique, et les assignats tombèrent dans un discrédit tel que leur valeur, comparée à celle du numéraire, était comme de 7 à 1. Les émissions inconsidérées du gouvernement augmentèrentencore ce discrédit: enfin, le 30 pluviôse an IV (19 février 1796), la planche aux assignats fut brisée : on en avait émis pour près de 46 milliards.

La révolution territoriale s'exécuta si facilement qu'on n'en aperçoit pas toujours la portée. 

« Changer la face du territoire, effacer jusqu'au nom des provinces, y substituer arbitrairement quatre-vingt-trois départements semble le comble de l'audace. Mirabeau lui-même pensait qu'un pareil bouleversement ne se ferait pas sans arracher des cris aux pierres, et qu'il serait nécessaire de tenir plus de compte des anciens liens historiques. Mirabeau se trompait. Il ne fallut à l'Assemblée qu'un décret pour effacer les provinces, oeuvre des siècles. Elle ne trouva plus dans toute la France qu'une table rase, où elle put se jouer des souvenirs, des traditions, sans rencontrer un seul obstacle, comme si la France n'avait eu aucun passé. Ce changement, en apparence le plus grand de tous, et qui paraissait au-dessus des forces humaines, s'accomplit sans rencontrer aucune difficulté. Les provinces s'évanouirent et n'excitèrent aucun regret. Ce qui dans d'autres peuples a été à peine possible par des invasions, des exterminations séculaires, des cataclysmes qui avaient aboli la géographie historique avec la mémoire des races humaines, n'exigea en France qu'un arrêté de quelques lignes. Deux choses opérèrent ce prodige chez les Français : premièrement le désir, qu'aucun peuple n'eut au même degré, de s'unir étroitement, de se pénétrer d'une frontière à l'autre, de n'avoir partout qu'un coeur et une âme ; et ce fut là une des inspirations sacrées de la Révolution. Deuxièmement, ce désir de se fondre en un seul corps trouva une singulière facilité dans le délabrement et la ruine morale où la royauté avait conduit les provinces. » (E. Quinet).
Ceci fut probablement un mal, car le pays se trouva à la merci de sa capitale. L'effort décentralisateur de la Constituante ne suffit pas à garantir les libertés locales; l'autonomie qui est la seule forme de la liberté politique et les cadres qu'elle avait tracés devinrent dix ans après ceux d'un despotisme centralisé. 

L'organisation judiciaire qui devait subir aussi la même adultération n'en demeure pas moins une des oeuvres les plus admirables des constituants. Elle a servi de modèle aux autres peuples européens; l'adoption du jury, la suppression de la justice médiévale avec la torture et le secret, des juridictions spéciales et de la vénalité des offices furent des bienfaits inappréciables; la nouvelle classification des tribunaux a servi de type; enfin l'élection de la magistrature était la garantie des libertés publiques.

Un redoutable problème se posa quand il fallut procéder à la réorganisation religieuse. L'Assemblée ne songea pas à vivifier les institutions nouvelles par des croyances conformes; elle ne s'attaqua pas à la religion catholique protectrice de beaucoup des abus qu'elle déracinait; elle n'aborda pas cette question du gouvernement spirituel dont Auguste Comte a si bien démontré l'importance; elle voulut simplement faire entrer l'Eglise dans les nouveaux cadres; elle n'y put parvenir. La constitution civile du clergé ne touchait pas au dogme; elle assimilait les fonctionnaires ecclésiastiques aux autres; les prêtres, les évêques (un par département) devaient être élus par les fidèles. Le clergé résista et les premiers symptômes de la guerre civile se manifestèrent.

De part et d'autre on rassemblait ses forces pour la lutte décisive. L'anarchie déchaînée par l'effondrement de l'autorité royale était inquiétante. On compléta l'organisation des municipalités, et la fédération des gardes nationales de la France entière (14 juillet 1790) affirma l'enthousiasme général pour les idées nouvelles ( Fête de la fédération). Mais à la frontière les émigrants s'armaient : Condé à Worms, le comte d'Artois à Coblence; les deux tiers du clergé avaient refusé le serment, et les clubs, dont celui des Jacobins fut le plus fameux, n'avaient pas encore étendu sur toute la France le réseau des associations démocratiques; Louis XVI jugea le moment venu de prendre la tête de la contre-révolution et s'enfuit de Paris vers l'armée de Bouillé (20 juin 1791). Arrêté à Varennes, il fut ramené à Paris, mais dès lors ne fut plus roi que de nom. On n'osa pourtant proclamer la République dont les partisans furent massacrés au Champ de Mars (17 juillet  1791). On s'en tint à l'équivoque de la monarchie constitutionnelle, avec un roi gardé à vue dans les Tuileries. Les royalistes émigrent en masse, prétendent former au delà de la frontière une « France extérieure-». On marchait à la guerre civile et à la guerre étrangère.

Les souverains étrangers se sentaient menacés par les idées révolutionnaires proclamées vérités universelles. La Constituante les avait liés directement par l'annexion du Comtat-Venaissin enlevé au pape après les massacres d'Avignon, par la suppression des droits féodaux et territoriaux des princes allemands en Alsace et en Lorraine, droits garantis par les traités de Westphalie. L'empereur Léopold était aussi sollicité d'intervenir par les émigrés, par Marie-Antoinette et Louis XVI. Il engagea tous les monarques européens, par une lettre-circulaire, à regarder comme leur la cause du roi de France (6 juillet 1791). Le roi de Prusse entra dans ces vues et le congrès de Pilnitz leur donna une sanction officielle (27 août 1791).
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Les  Sans-culottes

On a donné le nom de Sans-culottes, dans les premières années de la Révolution, aux  hommes du parti démocratique, parce qu'au lieu des culottes des gens de cour et de la haute bourgeoisie, ils portaient des pantalons longs. 

Plus tard ce nom fut spécialement réservé à certains patriotes qui formaient en quelque sorte l'avant-garde de la démocratie, toujours prêts à s'insurger contre le pouvoir qui entrait dans la voie de la réaction. Ils ne quittaient pas les clubs et ne demandaient à la patrie qu'un morceau de pain pour la défendre. Ils portaient la carmagnole, le bonnet rouge et des sabots. 

Ce sobriquet, accepté par eux, acquit une renommée légendaire après leurs victoires sur la coalition européenne.Les flatteurs du peuple s'honoraient eux-mêmes du titre de sans-culottes. Ces hommes disparurent après la chute de Robespierre. Dans le calendrier républicain, on donnait le nom de sans-culottides aux cinq jours épagomènes (=complémentaires) de l'année.

L'Assemblée législative qui s'ouvrit alors releva le gant. Les girondins, arrivés au ministère, firent déclarer la guerre à l'Autriche (Les guerres de la Révolution), décision dont nul ne pouvait pressentir la portée et qui détermina tout l'avenir de la Révolution et de la France; de là sortirent la Terreur, puis l'Empire (Napoléon Ier). La guerre débuta par des échecs en Belgique. Le désaccord entre le roi et l'Assemblée paralysait le gouvernement. Malgré l'enthousiasme populaire qui se traduisait par la Marseillaise, les armées allemandes envahissent la France. 

La démocratie parisienne (La Commune révolutionnaire) renverse alors la monarchie, le 10 août 1792, terrifie ses ennemis par les massacres de Septembre, répondant à la trahison qui livrait Longwy et Verdun et à l'insolent manifeste du duc de Brunswick. Dumouriez arrête celui-ci dans les défilés de l'Argonne, et la canonnade de Valmy prouve la solidité de la jeune armée révolutionnaire (19 septembre 1792). Les Prussiens reculent. Les Français occupent la rive gauche du Rhin, Spire, Mayence; la victoire de Jemmapes leur livre la Belgique. Partout ils sont accueillis en libérateurs. La Convention promulgue son fameux décret promettant l'appui de la France à tous les peuples qui veulent conquérir la liberté. La Savoie, Nice, se donnent; on en forme les nouveaux départements du Mont-Blanc et des Alpes-Maritimes.

A l'intérieur, la République avait été proclamée par la Convention dès sa première séance; on s'était occupé du procès de Louis XVI qui fit passer l'ascendant des girondins aux montagnards. Condamné à mort, le roi fut exécuté le 21 janvier 1793. Toute transaction devenait impossible entre les révolutionnaires et les royalistes. Ce fut le signal de la guerre européenne; l'Angleterre, la Hollande et l'Espagne entrèrent dans la coalition. La campagne de 1793 commença mal, malgré l'abstention de la Prusse, qu'absorbaient les affaires de Pologne. La défaite de Neerwinden (18 mars 1793) et la trahison de Dumouriez firent perdre la Belgique. Mayence fut repris par les Allemands (12 juillet). Derrière la frontière artificielle construite par Vauban, les armées françaises se défendent péniblement, tandis que les alliés font lentement le siège des forteresses.

Les discordes civiles aggravent le péril. La Commune de Paris et les montagnards de la Convention, Danton, Robespierre, se débarrassent des girondins. La réorganisation du gouvernement avec le tribunal révolutionnaire et le comité de Salut public prépare la Terreur; l'insurrection du 31 mai, par laquelle la Commune chasse les girondins de l'Assemblée, livre le pouvoir aux jacobins. Mais dans les départements les royalistes et les modérés prennent les armes contre le gouvernement parisien. La Normandie, la Bretagne, la Vendée, Lyon, les villes du Rhône et de la Méditerranée, Bordeaux et le Sud-Ouest sont insurgés. 

La Convention fait face à tout, lève quatorze armées, écrase et épouvante les résistances. La Normandie est soumise; Bordeaux, Lyon, Marseille sont repris, Toulon livré aux Anglais est reconquis (décembre 1793). En Bretagne, les chouans ne sont que gênants ; il n'y a de véritable guerre qu'en Vendée; les campagnes catholiques luttent contre les villes républicaines et tiennent tête aux armées régulières. Après quelques mois de carnage, 80.000 Vendéens passent la Loire; leur grande armée est décimée dans le Maine et la Bretagne orientale, finalement exterminée (décembre 1793). La guerre continue en Vendée, mais sans danger.
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L'Assassinat de Marat.
Assassinat de Jean-Paul Marat (14 juillet 1793).

Pendant ces combats épiques, l'ennemi extérieur avait également été vaincu  (Les guerres de la Révolution). Les représentants en mission avaient coopéré à l'armée avec les généraux nouveaux, Pichegru, Jourdan, Hoche, auxquels Carnot donnait la direction. La levée de 300.000 hommes en février, la levée en masse en août fournirent des soldats animés d'un enthousiasme qui les fit invincibles. Les vieilles armées, la vieille tactique, ne purent leur tenir tête. La victoire de Hondschoote débloque Dunkerque; celle de Wattignies, Maubeuge. En 1794, les victoires de Tourcoing et de Fleurus rendent la Belgique aux Français. La mésintelligence des coalisés achève leur défaite. La rive gauche du Rhin, la Hollande, sont conquises.

A l'intérieur la Terreur est entretenue par les supplices; la guillotine est dressée, en permanence, à Paris et en province; Marie-Antoinette, les girondins, le duc d'Orléans sont exécutés. Les montagnards se divisent alors. Le vertueux Robespierrefait monter sur l'échafaud les hébertistesénergumènes et les dantonistes qui inclinaient à la modération. Les fournées de condamnés se multiplient jusqu'au 9 thermidor ou le dictateur populaire est renversé par la Convention et exécuté avec ses partisans. 
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La guillotine

La guillotine se composait d'un énorme couperet chargé de plomb et à lame d'acier triangulaire oblique dont les extrémités glissaient dans les rainures de deux poteaux verticaux et qui tombait lourdement sur le col du patient. Celui-ci était étendu sur une planche à bascule; son cou était maintenu entre deux planchettes à demi-lune. La décollation était instantanée. La tête, séparée vers la quatrième vertèbre cervicale, était jetée dans un panier avec le corps. 

La tradition populaire veut que le docteur Guillotin ait été l'inventeur de cet instrument de mort. En 1866, Dubois, d'Amiens, a rétabli la vérité sur le rôle joué par ce médecin dans l'adoption de cette fatale machine. Ayant fait décréter l'égalité des peines par l'Assemblée législative, le 1er décembre 1789, Guillotin réussit à faire charger le secrétaire de l'Académie de chirurgie (Antoine Louis) de chercher quel instrument de supplice procure la mort la plus prompte et la moins cruelle. Le 20 mars 1792, Louis soumit à la Convention un mode d'exécution capitale, « sûr, rapide et uniforme », dont on avait déjà. fait usage au XVIe siècle, sous les noms de fallbeil en Allemagne, de mannaia en Italie et de maiden ou widow en Ecosse et en Angleterre.

Le premier essai de cet appareil fut fait en France le 25 avril 1792, sur la personne d'un voleur de grand chemin nommé Pelletier. Quelques mois plus tard, la Louisette ou Louison, comme on appelait alors la guillotine, fit sa première victime politique (exécution de Dangremont, 21 août 1793). Le nom de guillotine fut employé pour la première fois dans une chanson que publia le journal royaliste Les Actes des Apôtres, en décembre 1789. Soemmering (Moniteur du 9 novembre 1795) a affirmé que l'action trop rapide de la guillotine n'abrège pas les douloureuses sensations du supplicié dont les souffrances ne cessent pas immédiatement après que la tête a été tranchée. Cette opinion souleva une controverse qui a été plusieurs fois renouvelée. 

Le 7 avril 1871, le peuple se saisit de la guillotine et la brûla sur la place Voltaire. Cela n'empêcha pas qu'elle continue d'être utilisée en France jusqu'à l'abolition de la peine de mort en 1981.

A travers ces atrocités, qu'inspirait la crainte maladive de la trahison étrangère, se déroule l'oeuvre constructrice de la Convention. Elle se butta à la question religieuse. Pour compléter la Révolution, il eût fallu une croyance nouvelle, un nouveau culte. On ne put en trouver. Le culte de la Raison essayé par Chaumette et Hébert parut extravagant; Robespierre ne réussit pas mieux avec celui de l'Etre suprême. Ces échecs, la résistance de la Vendée, la prédilection de la majorité des fidèles pour les prêtres insermentés, démontrent que le catholicisme survit. La réaction commence au 9 thermidor. Les chefs du mouvement révolutionnaire s'étaient entr'égorgés les résultats ne répondaient pas aux sacrifices. Le parti républicain se trouva décapité; ses principaux défenseurs avaient disparu; une cause ne peut guère survivre aux hommes qui la personnifiaient; les idées ne se défendent pas toutes seules.

La réaction fut lente, accidentée, mais presque continue et aboutit à la dictature militaire. Les thermidoriens achèvent l'écrasement des jacobins; la « jeunesse dorée » ferme leur club; les insurrections du 12 germinal et du 1er prairial sont vaincues et les derniers montagnards n'échappent à l'échafaud que par le suicide. Les royalistes, groupés au club de Clichy, tentent un retour offènsif; mais le jeune Louis XVII meurt au Temple; les émigrés débarqués à Quiberon sont exterminés; l'insurrection monarchiste du 13 vendémiaire est balayée; Hoche pacifie la Vendée. La Convention se sépare après avoir élaboré une constitution nouvelle, préparé le code civil, créé le grand-livre de la dette publique et les principaux établissements d'enseignement supérieur (Ecole Polytechnique, Conservatoire des Arts et Métiers), l'Institut, etc. Cette « assemblée de géants » avait assuré à la France l'hégémonie de l'Europe. Le traité de Bâle avec la Prusse avait garanti la conquête de la rive gauche du Rhin; le traité avec l'Espagne achevait la rupture de la coalition. Il est vrai que l'Angleterre avait détruit la marine et occupé les colonies de la France.

Le Directoire comprenait un pouvoir exécutif de cinq membres superposé à deux conseils législatifs (Conseil des Anciens, Conseil des Cinq-Cents. Ce fut un régime anarchique et impuissant, tiraillé entre les partis extrêmes et entre les ambitions personnelles. Il ne put donner au peuple le calme qu'il réclamait pour organiser la société nouvelle. Les difficultés financières restaient inextricables, malgré les bénéfices des conquêtes; l'émission des assignats, effroyablement dépréciés, les avait aggravées; on finit par une banqueroute des deux tiers. Le gouvernement frappa successivement les babouvistes et la majorité monarchiste des deux Conseils par le coup d'Etat du 18 fructidor (1797). L'impopularité du Directoire était complète, malgré les victoires extérieures. Jourdan et Moreau avaient été repoussés de Bavière par l'archiduc Charles (1796-1797), mais Hoche envahit l'Allemagne centrale; Bonaparte conquit l'Italie et imposa à l'Autriche la paix de Campo-Formio (1797). 

La République française s'entourait d'une ceinture de républiques vassales : batave, cisalpine, romaine, démocratisait la Suisse devenue République helvétique. Bonaparte tente l'expédition d'Égypte; sa victoire des Pyramides est annulée par la perte de la flotte française que Nelson détruit à Aboukir; il échoue en Syrie devant Saint-Jean-d'Acre et rentre en France (1799); ses lieutenants reperdent l'Egypte (1801). Cependant en Europe la guerre avait recommencé. Souvarov chassa les Français d'ltalie; Masséna défit en Suisse les armées russe et autrichienne (septembre 1799). Brune défit en Hollande les armées anglo-russes. Néanmoins, tout le monde souhaitait la fin de l'anarchie et un gouvernement fort. Sieyès, d'accord avec les financiers, cherchait une épée. Il choisit Bonaparte qui mit fin au Directoire par le coup d'Etat du 18 brumaire (9 novembre 1799).

L'importance croissante de l'élément militaire rendait fatal ce dénouement. La Terreur seule avait contraint les généraux à l'obéissance; sous le Directoire, ces roseaux de fer se redressent. En face d'un pouvoir divisé et impuissant, l'armée se substitue à la nation. Bonaparte recueillit le fruit de la réaction.

Voici quelle était alors l'étendue du territoire français, telle que la République le transmit au dictateur. Aux quatre-vingt-trois départements créés le 17 janvier 1790 s'en étaient ajoutés vingt-deux autres. Les premiers étaient :

Nord, Pas-de-Calais, Somme, Seine-Inférieure, Eure, Calvados, Orne, Manche, Seine, Seine-et-Oise, Seine-et-Marne, Oise, Aisne, Ardennes, Haute-Marne, Marne, Aube, Meuse, Moselle, Meurthe, Vosges, Bas-Rhin, Haut-Rhin, Haute-Saône, Jura, Doubs, Ain, Saône-et-Loire, Côted'Or, Yonne, Nièvre, Cher, Indre, Loiret, Loir-et-Cher, Eure-et-Loir, Indre-et-Loire, Maine-et-Loire, Mayenne, Sarthe, Ille-et-Vilaine, Côtes-du-Nord, Finistère, Morbihan, Loire-Inférieure, Vienne, Deux-Sèvres, Vendée, Charente-Inférieure, Charente, Haute-Vienne, Corrèze, Creuse, Allier, Puy-de-Dôme, Cantal, Rhône-et-Loire, Dordogne, Gironde, Landes, Gers, Hautes-Pyrénées, Lot-et-Garonne, Aveyron, Lot, Basses-Pyrénées, Ariège, Pyrénées-Orientales, Haute-Garonne, Tarn, Aude, Lozère, Hérault, Gard, Ardèche, Haute-Loire , Drôme, Isère, Hautes-Alpes, Basses-Alpes, Bouches-du-Rhône, Var, Corse. 
La Corse fut divisée en deux départements Golo (ch.-l. Bastia) et Liamone (ch.-l. Ajaccio) ; Rhône-et-Loire fut divisé en deux départements : Rhône (ch.-l. Lyon), Loire (Montbrison); le Comtat-Venaissin, réuni en 1791, forma le département du Vaucluse; la Savoie, réunie en 1792, celui du Mont-Blanc; le comté de Nice (1792), celui des Alpes-Maritimes. Plus tard fut créé celui du Léman avec Genève pour chef-lieu. Les traités de Bâle et de Campo-Formio, qui portèrent la frontière au Rhin, entraînèrent la création de quinze nouveaux départements, dont voici la liste ainsi que celle des pays dont on les forma :
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Départements Chefs-lieux  Pays d'origine
Lys
Escaut
Jemmapes
Dyle
Deux-Nètes  Sambre-et-Meuse
Forêts 
Ourthe 
Meuse-Inférieure . Bouches-de-I'Escaut Bouches-du-Rhin 
Sarre 
Mont-Tonnerre 
Roër (Ruhr)
Rhin-et-Moselle
Bruges
Gand
Mons
Bruxelles
Anvers 
Namur 
Luxembourg 
Liège 
Maestricht.
Middlebourg
Bois-le-Duc 
Trèves 
Mayence Aix-la-Chapelle Coblence
Flandre
Flandre et Brabant
Hainaut
Brabant
Anvers
Namur
Luxembourg
Liège
Limbourg
Zélande
Brabant septentrional
Trèves, Deux-Ponts, etc. Palatinat, Mayence 
Gueldre, Juliers, etc.
Cologne, etc.

Ces annexions avaient tous les caractères d'acquisitions définitives. Les populations étaient dévouées à la France qui les avait délivrées de l'oppression féodale; elles avaient avec les lois et les institutions françaises pris le patriotisme français, et il fallut, après la tyrannie impériale, un demi-siècle pour le leur faire oublier. Ainsi, la Révolution avait, en quelques années, obtenu ce que n'avaient pu faire les rois depuis des siècles. L'ambition égoïste d'un soldat allait bientôt compromette ces résultats. (H. Monin).



Pour les plus jeunes.
Michel Vovelle, La Révolution française expliquée  à ma petite-fille, Seuil, 2006. - Comment expliquer à un enfant ce formidable bouleversement que fut la Révolution française ? Ce petit livre est tout à la fois une synthèse et une approche profonde de dix années cruciales pour l'avenir de la France (1789-1799), écrite par un des plus grands spécialistes de la période qui répond aux questions de sa petite-fille: qu'est-ce qui a conduit à la Révolution? Qu'est-ce qu'un sans-culotte? Pourquoi la Terreur? 

L'ouvrage éclaire les grandes phases et les grands moments de la Révolution française et permettra, aux enfants comme aux adultes, de s'y retrouver dans ce labyrinthe si riche, mais parfois complexe. (couv.).

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