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Richard Ier Coeur de Lion. - Roi d'Angleterre, était le troisième fils de Henri Il et d'Aliénor d'Aquitaine. Il naquit à Oxford le 8 septembre 1157. Il fut d'abord, comme ses autres frères et soeurs, un simple instrument de la politique paternelle, car il avait trois ans quand il fut fiancé avec Alice, fille du roi de France, et douze ans quand il dut faire hommage à ce même roi pour le duché d'Aquitaine (1169); mais il n'était pas né pour servir quiconque, pas même son père, et il n'hésita pas à jouer sa partie dans le soulèvement féodal qui ébranla l'empire angevin. Il alla se faire armer chevalier par Louis VII; mais ses partisans ayant été vaincus partout, il dut implorer sa grâce (13 septembre 1174). Pendant les dix années suivantes, il ne s'occupa plus que des affaires de son duché, combattant ses vassaux rebelles, tels que Geoffroi de Rancon et Bertrand de Born, tenant en échec les ennemis de l'extérieur, tels que le comte de Toulouse, ou son propre frère, Henri au Court-Mantel. Fatigué de ses allures indépendantes, Henri II l'obligea de rendre le duché à sa mère Aliénor (1185) et, par là le rejeta vers le roi de France. Il se lia avec Philippe-Auguste d'une étroite amitié; après l'entrevue de Bonmonlins (18 mars 1188), soupçonnant son père de vouloir le déshériter, il fit hommage à Philippe de toutes ses possessions. La mort de son père (6 juillet 1189), en appelant Richard au trône, changea brusquement la situation. Avec la couronne, il hérita de la politique paternelle; l'allié, le vassal, l'ami de Philippe-Auguste devint son rival et bientôt son ennemi. Cependant la croisade avait été prêchée avec un plein succès en Angleterre, ainsi qu'en France. Richard avait pris la croix. Après son couronnement à Westminster (3 septembre 1189), il ne songea plus qu'aux préparatifs de l'expédition. Il lui fallut réaliser des sommes énormes, opération rendue difficile et onéreuse par les horribles persécutions dont à ce même moment les juifs furent victimes en Angleterre. Richard partit le 11 décembre. Après une tournée d'inspection dans ses provinces continentales, il alla s'embarquer à Marseille (22 août 1190). A Messine, où les troupes croisées se concentrèrent, il fit alliance avec le roi Tancrède qui lui remit la veuve du feu roi, Jeanne d'Angleterre, fille de Henri Il, avec une partie du trésor amassé pour la croisade (23 septembre), et négocia un mariage entre la fille de Tancrède et son neveu Arthur de Bretagne. Pour lui-même, repoussant désormais toute idée d'union avec la soeur de Philippe-Auguste, il épousa Bérangère, fille de Sanche VI, roi de Navarre. Après cet affront fait au roi de France, qu'il accusait d'ailleurs de noires machinations contre lui et sa flotte, il quitta Messine (12 avril 1191), perdit encore du temps à conquérir Chypre qu'il donna au roi détrôné de Jérusalem en échange des droits que ce dernier lui abandonnait sur son royaume et arriva enfin (8 juin) devant Acre qui capitula le 12 juillet. - Sceau de Richard Ier Coeur de Lion (1198). Au revers, sur l'écu, sont figurés trois lions : c'est là qu'apparaissent pour la première fois les armes royales d'Angleterre; les trois lions seront ensuite remplacés par trois léopards. Ce succès permit aux deux rois rivaux d'Angleterre et de France de se séparer sans rompre; Philippe-Auguste retourna en France, laissant la plus grande partie de ses troupes à Richard. Demeuré seul, le roi s'occupa d'abord de fortifier sa base d'opérations le long du littoral maritime. Il se couvrit de gloire par la brillante victoire d'Arsouf (7 septembre), l'occupation de Jaffa, la prise de la grande caravane de Tell el-Hezy (23 juin 1192); mais il n'osa pas entreprendre sa marche sur Jérusalem. II est vrai qu'il n'était pas maître de ses moyens : les Français lui obéissaient avec répugnance; certains chefs croisés, comme le duc d'Autriche, lui tenaient rancune de ses violences; enfin sa santé, de tout temps, délicate, était fort compromise par le climat. Il conclut donc une trêve de trois ans avec Saladin (1er septembre), et quitta peu après la Palestine (9 octobre). Richard Coeur de Lion en route vers Jérusalem. Des vents contraires et des tempêtes le retenant dans l'Adriatique, il se décida brusquement à tenter le retour par terre; mais, comme il traversait sous un déguisement les États du duc d'Autriche, il fut reconnu, arrêté, enfermé d'abord dans une forteresse que l'on croit être Dürnstein sur le Danube, puis livré à l'empereur, qui le garda dans une étroite prison pendant plus d'une année.
Richard ne racheta sa liberté qu'au prix d'une énorme rançon et à condition de s'avouer le vassal de l'empereur (2 mars 1194). Douze jours après, il débarquait à Sandwich. Il était temps qu'il revînt. Son frère Jean sans Terre essayait de s'emparer du trône les armes à la main; il avait lié partie avec Philippe-Auguste qui commençait la conquête de la Normandie. Richard déploya une activité prodigieuse, enleva de vive force les châteaux occupés par son frère, arrêta partout Philippe-Auguste, l'obligea de demander la paix (janvier 1196) et forma contre lui un faisceau d'alliances qui réunit les comtes de Bretagne, de Flandre et de Toulouse, tandis qu'il réussissait à faire élire son neveu Othon de Brunswick comme roi d'Allemagne. Seule la détresse de ses finances l'empêcha de pousser à fond cette vigoureuse offensive. La nouvelle d'un trésor découvert sur les terres du seigneur de Charlus en Limousin alluma sa convoitise; il alla le réclamer les armes à la main. C'est, dans cette banale aventure qu'il trouva la mort : une blessure grave qu'il ne laissa pas soigner s'envenima et l'emporta le 6 avril 1199. Richard Coeur de Lion (1157-1199). Son règne avait été un lourd fardeau pour l'Angleterre qui avait payé sa gloire très cher. Le peuple s'y résigna cependant sans de trop grands murmures, parce que la politique du roi répondait au sentiment national. D'ailleurs, si Richard était violent, tyrannique et parfois cruel, il pouvait aussi plaire. Il avait de l'esprit, une culture même raffinée. Il avait, en outre, de rares qualités, non seulement comme chef d'armée, comme ingénieur militaire, mais comme administrateur. Il avait de l'ordre dans l'esprit et de la persévérance dans ses desseins. Mais ses ressources étaient inférieures aux besoins de son vaste empire. Il ne put que maintenir l'oeuvre de son père sans la consolider. (Ch. Bémont).
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