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Au point de vue
stratégique, la défense de l'Empire
romain n'était pas seulement assurée aux frontières;
les mesures prises de ce côté furent complétées par la construction
d'un vaste réseau de routes, routes militaires d'abord, mais qui
servirent à tous les besoins d'une circulation d'hommes et de marchandises
de plus en plus active. Nous ne nous occuperons de ces routes qu'au point
de vue politique. L'importance de ces grandes voies était telle qu'Auguste
s'en fit attribuer l'administration par une loi spéciale (20 av. J.-C.).
Il lui donna un grand développement. Toutes partaient de Rome,
du Milliaire d'or que l'empereur fit ériger au Forum;
de là elles rayonnaient vers les extrémités de l'Empire. On discerne
cinq réseaux principaux. Par la voie Appienne,
on se rendait en Campanie, puis dans l'Italie
méridionale jusqu'à Rhegium; de là on passait
en Sicile et la route longeait la côte septentrionale de l'île, par Palerme,
gagnant Lilybée; on s'y embarquait pour Carthage
d'où partaient deux grandes routes, dont l'une fut prolongée jusqu'Ã
Tingis (Tanger) vers l'Atlantique, l'autre
jusqu'Ã Alexandrie en Egypte. D'Alexandrie,
deux voies remontaient le long des deux rives du Nil jusqu'à la frontière
éthiopienne; une troisième chaussée traversait l'isthme de Suez et par
la Palestine et la Syrie arrivait à Antioche.
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Principales
routes dans l'Empire romain à sa plus grande extension.
Ceux qui voulaient de l'Italie passer dans
les provinces orientales suivaient la voie Appienne jusqu'Ã Capoue,
bifurquaient alors vers le Sud-Est et allaient à Brundusium, traversaient
l'Adriatique et débarquaient à Dyrrhachium.
Ce port grec était la tête de la belle voie Egnatia qui par la Macédoine,
gagnait Thessalonique; deux embranchements se dirigeaient par la région
occidentale et la région orientale de la péninsule hellénique et se
réunissaient à Athènes où ils se reliaient
au système routier, du Péloponnèse.
De Thessalonique, la voie maîtresse continuait le long du rivage de la
mer Egée, par les villes grecques de Thrace
vers Byzance d'une part et Callipolis
de l'autre. La grande roule des armées était celle-ci : elle franchissait
l'Hellespont entre Callipolis et Lampsaque,
traversait toute l'Asie Mineure pour
aboutir à Antioche.
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Carte
des routes romaines de la péninsule italienne. - De même que les
termes Asie et Afrique, Italia ne s'appliqua tout d'abord qu'Ã
une très faible portion du territoire qu'il désigne actuellement; c'était
le "pied de la botte italienne", la sous-péninsule appelée aussi Brutium,
la Calabre actuelle. Ce dernier nom avait été appliqué primitivement
à la langue de terre messapienne. L'emplacement de la ville Bononia, Bologne,
l'antique Felsina des Etrusques, longtemps occupée par les Gaulois, devrait
se trouver sur la voie Emilia. |
Trois réseaux routiers mettaient en communication
Rome avec les contrées septentrionales. Par
la voie Flaminia, on allait en Ombrie
et vers Ancône, ensuite la voie Aemilia ramenait
vers le Nord-Ouest à Milan. De celle-ci se
détachait à Mutina (Modène) une chaussée
qui conduisait à Aquilée par Vérone;
une autre partie de Milan, atteignait le même but par Bergamum et Brixia,
rejoignant la précédente à Vérone. Du grand marché et poste militaire
d'Aquilée portaient une série de routes; celle de la Dalmatie
qui, par Pola et les côtes orientales de l'Adriatique, se dirigeait vers
Dyrrhachium; celle de la péninsule balkanique
qui passait par Siscia, Sirmium, Sardique
et Andrinople pour aboutir à Byzance
et s'y rattacher aux routes de l'Asie Mineure; enfin celle de la Pannonie
dont l'extrémité était Carnuntum (en face du confluent de la March et
du Danube);
d'où l'on allait à l'Est vers Aquincum (Ofen), à l'Ouest vers l'Enns.
L'affermissement de la domination romaine dans les Alpes centrales décida
la construction de nouvelles routes; l'une d'Aquilée à Veldidena (Wilden)
sur l'Inn, franchissait les Alpes Carniques. Mais la grande voie était
celle du Brenner, dont la tête était Vérone et l'aboutissant Augusta
Vindelicorum (Augsbourg); cette ville était
rattachée à Ratisbonne et Enns (et par
là à Carnuntum) vers l'Est, à l'Ouest avec les établissements romains
des bords du Neekar (Champs décumates),
enfin au Sud-Ouest, avec ceux du lac de Constance desservis par la route
de Milan et du col du Splugen vers Bregenz et Augusta Rauracorum (Augst-Bale).
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Carte
des routes romaines de la Gaule. - Les voies des Gaules sont tracées
d'après la Table dite de Peutinger et l'itinéraire d'Antonin,
pris dans E. Desjardins, Géographie de la Gaule romaine. Il manque
la route du littoral méditerranéen, le long de la Rivière de Gênes;
celle du Mont-Cenis pourrait, au contraire, être supprimée. |
Les relations entre l'Italie et la Gaule
se faisaient par l'intermédiaire de Milan et de Turin. Les voies romaines
principales étaient celle du mont Genèvre, par où l'on se rendait Ã
Arles; celle du Petit-Saint-Bernard qui menait
à Vienne, à Genève, à Besançon
et à la vallée moyenne du Rhin; celle dit Grand-Saint-Bernard qui se
détachait de la précédente à Augusta Praetoria (Aoste),
passait par Martigny, Vevey, Augusta Rauracorum,
et la rive gauche du Rhin jusqu'Ã Moguntaciacum (Mayence)
: on la prolongea par Trèves, Cologne,
Nimègue, Utrecht, jusqu'à la mer du Nord,
et, dans un autre sens, vers Reims, la grande
place de la Gaule septentrionale, reliée à la vallée de la Seine par
Paris et Rouen,
à celle de la Loire par Orléans, enfin
à celle du Rhône par Lyon; de Lyon, centre
de la Gaule entière, d'autres routes joignaient Strasbourg
et Bordeaux.
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Borne
routière romaine (Afrique du Nord).
Photo
: © Angel Latorre, 2008.
La dernière grande route militaire de
l'ltalie était la voie Aurelia qui longeait le rivage de la mer Tyrrhénienne,
par Centumcellae, Pise, Luna, Gênes,
puis suivant le trajet de la Corniche conduisait à Marseille
et Arles. De là elle allait à Narbonne,
avec embranchement sur Bordeaux; elle franchissait les Pyrénées
à Juncaria, se rendait à Barcelone, Tarragone,
Tortose où elle passait l'Ebre
pour suivre la côte méditerranéenne jusqu'à Gades (Cadix).
En somme, les cinq réseaux que nous venons
de décrire sommairement, rattachaient la capitale de l'Empire romain Ã
l'Afrique, à l'Orient hellénique, aux pays
danubiens, Ã la Gaule, Ã l'Espagne.
Leur raison d'être essentielle était le transport rapide des légions
d'un point à l'autre des provinces. La faiblesse numérique de l'armée
romaine était compensée par cette mobilité. Nous avons déjà dit
que ces routes furent aussi utilisées pour le commerce et servirent au
développement de la poste, institution publique créée par le fondateur
de l'Empire.
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Carte
des routes romaines de l'Angleterre ancienne. - Les principales voies
romaines d'Angleterre portaient certains noms par lesquels elles furent
connues durant tout le Moyen âge. Ainsi, d'après Th. Codrington (The
Roman Roads in Britain), Watling Street conduisait de Dover à Ribchester
par Wall, puis en Ecosse par Binchester et Melrose, - Erning Street allait
de Londres à Carlisle par Lincoln et York, - Foss Way était la route
droite de Lincoln à la côte sud, près d'Exeter, correspondant, dit Ch.
Barrois, à une route gauloise qui aboutissait à l'Abervrach. |
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