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Arles |
Arles (Arelas, Arelate, Arelatum) est une ville de France, dans le département des Bouches-du-Rhône, située sur les deux rives du Rhône, mais surtout sur la rive gauche ou orientale, au-dessous du point où le fleuve se partage en deux bras; à 28 km environ au Nord de l'embouchure du Rhône, et à 691 kilomètres de Paris; 50 400 habitants. Petit port; beaucoup de monuments antiques (théâtre, amphithéâtre, obélisque, aqueduc, temples, arc de triomphe); c'est dans cette ville que fut trouvée, en 1651, la Vénus d'Arles, aujourd'hui au Louvre. Histoire. Sans s'arrêter plus longtemps à des origines légendaires, il faut retenir seulement que l'admirable situation géographique d'Arles (plus admirable encore dans l'Antiquité) dut en faire dès une époque très reculée un centre pour les populations indigènes, puis une colonie grecque. Située au confluent du Rhône et de la Druentia (bras aujourd'hui mort de la Durance), au point de division des trois bras du Rhône, au pied de l'important massif des Alpines et sur les étangs alors plus considérables du plan du bourg moderne, la cité dut être peuplée et devenir importante de bonne heure; elle l'était à coup sûr déjà quand Marius vint au-devant de l'invasion des Cimbres, puisqu'il voulut la protéger et qu'il établit pour cela son camp à Ernaginum (Saint-Gabriel), et creusa le grand canal des fossae marianae pour faire d'Arles son port et son point de ravitaillement. Après cette crise, après que Marius eut donné aux Marseillais son canal qui devint le grand chemin du trafic avec l'intérieur et qui fut pour eux une source de richesses, Arles s'enrichit rapidement, étant la première escale du commerce par eau auquel se prêtaient si admirablement ses deux ports, l'un pour la navigation fluviale, sur le Rhône (le plus important, au témoignage d'Ausone), l'autre pour la navigation maritime, sur la Fossa, et qui communiquaient probablement entre eux. Il exista sans doute promptement une rivalité entre Arles et Marseille qui abusait de ses privilèges commerciaux sur le Bas-Rhône. Vue générale d'Arles, prise depuis les Arènes (début du XXe siècle). Pendant le siège de Marseille en 49 av. J.-C Arles fut le chantier de César qui y construisit douze vaisseaux pour bloquer le Lacydon. Pour la récompenser de l'aide fournie contre l'altière république, César y établit une colonie qui fut fondée par son lieutenant Tiberius Claudius Nero; elle reçut à la fois des colons civils et des colons militaires (des vétérans de la sixième légion), mais ceux-ci en moins grand nombre que les premiers, et prit le nom de Colonia Julia Paterna Arelatensium Sextanorum. Ce fut une des six colonies fondées par T.-Claude Néron en 46-45. En l'an 727 de Rome (27 av. J. C.), quand l'assemblée de Narbonne réunie par Auguste établit la division administrative que la Gaule devait conserver pendant tout l'Empire, Arles devint une des vingt civitates de la province sénatoriale de Narbonnaise (22 av. J.-C.) Sous l'Empire, Arles jouit du régime ordinaire des colonies militaires. Ses habitants, inscrits dans la tribu Terentina, avaient le droit de cité dans sa plénitude. Outre les magistrats ordinaires des colonies : duumviri, aediles, quaestores, Arles avait un flamine d'Auguste, un pontifex, un collège de sévirs augustaux. C'était une ville industrielle et surtout commerciale, qui avait de nombreuses corporations; ouvriers des chantiers de la marine (fabri navales), tailleurs et marchands d'habits (centonarii), charpentiers (fagni tignarii), marins (utricularii, navicularii marini), corporation distincte de celle des mariniers de rivière (nautae) qui existait sur le Rhône et dont un important syndicat fonctionnait à Lyon, mariniers pour la navigation fluviale, mariniers pour celle de la Durance. Des liens étroits existaient entre ces diverses sociétés, organisées avec des curateurs et dont nous connaissons plusieurs protecteurs; le choix des mêmes patrons, l'élection en commun des sévirs augustaux éveillent l'idée d'une grande solidarité municipale et d'une démocratie riche, intelligente et sage. Une Arlésienne en costume traditionnel. Les deux parties de la ville furent réunies par un pont de bateaux rattaché aux deux rives par de forts ouvrages en pierre. Constantin fit aussi reconstruire les murailles de la ville, détruites par le chef germain Crocus. Dans les actes officiels, Arles s'appela même quelque temps Constantina, mais ce nom disparut avec l'Empire d'Occident. Dans sa réorganisation des provinces, Constantin avait fait d'Arles la résidence du vicarius ou gouverneur des Gaules dont elle fut ainsi la capitale réelle, quoique le titre officiel fit réservé à Trèves, capitale de la préfecture des Gaules (Gaule, Bretagne, Hispanie). Lors de la division définitive de l'Empire et des premiers établissements des barbares, Arles, d'après la Notitia dignitatum, fait partie de la Viennensis, province consulaire dont elle est l'une des 13 cités (vers 395). En 418, quand Trèves fut menacée, et envahie par les Germains, le préfet du prétoire transporta sa résidence à Arles. Le mémorial des évêques de Gaule de 450 dit que les empereurs Honorius et Valentinien l'avaient déclarée métropole. L'édit de 418 la désigne comme lieu de réunion de l'assemblée des sept provinces (Viennoise, Aquitaines lre et IIe, Novempopulanie, Narbonnaises Ire et Ile, Alpes-Maritimes), créée au Ve siècle et qui se réunissait annuellement en août et septembre. Cet édit (longtemps attribué à Constantin sur la foi de son premier éditeur, le cardinal de Cusa, attribué à Constantin le Tyran par Scaliger, restitué à Honorius, avec sa date de mai 418 par Sirmond), fixe cette assemblée à Arles, dont la situation, dit-il, est le plus favorable à la réunion, à cause de la proximité du Rhône et de la mer Méditerranée qui y font affluer les richesses de tout le bassin méditerranéen. Arles du reste, à cause de son importance même, fut victime des guerres qui divisèrent les héritiers de Constantin. Résidence de Constantin le Tyran, elle fut assiégée et prise en 411 par Constance, qui y fit Constantin prisonnier. Comme ville épiscopale, Arles n'était pas moins importante que comme ville municipale. Ville de naissance d'Ambroise, évêque de Milan et père de l'Eglise (qui y naquit d'un sénateur romain envoyé comme préfet du prétoire des Gaules), Arles aspirait à la suprématie religieuse. Vers l'an 400, d'après le concile de Turin, les évêques d'Arles prétendaient avoir la primatie des Gaules comme successeurs de saint Trophime, disciple immédiat des saints Pierre et Paul, qu'ils confondaient avec le Trophime envoyé par le pape Fabien vers 250, dont Grégoire de Tours a parlé le premier. Après un long différend entre les évêques de Vienne et ceux d'Arles, plusieurs fois rallumé par des décisions contradictoires rendues par les papes, saint Léon adjugea à Arles, en 450, les droits et prérogatives des primats sur la Première Viennoise, sauf Valence, Grenoble et Genève, évêchés qu'il soumit avec celui de Tarentaise à la métropole de Vienne. L'archevêché d'Arles avait ainsi dix suffragants savoir : Marseille, Toulon, Orange, Saint-Paul-Trois-Chateaux, Viviers, Die, Avignon, Cavaillon, Carpentras et Vaison; il devait les perdre peu à peu en 1475, Die et Viviers lui avaient été enlevés; à cette date la création de l'archevêché d'Avignon le priva encore de Marseille, Toulon, Orange, Saint-Paul.
Avec l'établissement des Germains dans les Gaules commença pour Arles une période de troubles qui ne devait finir qu'avec la réunion de cette ville à la France; mais qui ne l'empêcha pas d'être florissante par son commerce et son industrie, république puissante, et de jouer un rôle politique souvent important. L'histoire d'Arles, malheureusement, comme celle de toute la Provence, doit au manque presque absolu de chroniques régionales d'être pleine d'obscurités. On sait qu'elle soutint plusieurs sièges au Ve siècle : Aétius repoussa les Wisigoths en 429; en 452 Thrasamond, en 457 Théodoric Il, l'assiégèrent non moins infructueusement. Le roi des Wisigoths, Euric, y établit sa cour et sa résidence. Théodoric, fondateur de l'Empire ostrogothique, s'en empara après la mort d'Alaric fils d'Euric et en fit le siège de la préfecture des Gaules. Elle fut enlevée par les Austrasiens aux descendants de Théodoric, malgré la résistance que le général ostrogoth Ibas leur opposa en 508-509; elle appartint finalement aux rois de Neustrie. Sous les Carolingiens, partie intégrante de l'Empire, puis du royaume de Lotharingie, après avoir été prise par les Sarrasins en 730 et leur avoir été reprise par Charles-Martel, Arles cesse d'avoir une histoire particulière. La création du royaume de Bourgogne en 879, par Boson, dans l'assemblée de Mantaille du 15 octobre, ne lui rendit pas d'abord toute son importance, Boson et Louis l'Aveugle firent de Vienne leur capitale. Hugues seulement la replaça à Arles. Arles prétendait être ville impériale libre, ne voulait reconnaître que la puissance des empereurs, et les empereurs confirmèrent, par la concession de plusieurs chartes, les privilèges de l'archevêché, de l'église et de la ville. En fait comme en droit, sous les empereurs-rois et sous les comtes de Provence des dynasties mérovingienne et carolingienne, Arles fut à peu près libre. La disparition du royaume d'Arles, l'éloignement des souverains auxquels Rodolphe le Fainéant avait transmis ses droits, favorisèrent l'établissement des libertés communales dans les grandes villes de Provence. Depuis 1131, la ville se gouverna presque seule sous l'autorité d'un conseil. En 1212, Frédéric Il concéda à Arles, sur la demande de l'archevêque Michel de Morienne, qui lui avait été député à Bâle, une constitution municipale (preuve qu'Arles n'a jamais dépendu des comtes de Provence avant l'avènement de la maison d'Anjou), constitution si étendue qu'elle se déclara république, et, en 1220, la création des podestats rapprocha encore plus son gouvernement de celui des villes italiennes. Elle fut, dès lors, gouvernée par un chef nommé podestat, des consuls et un juge ou viguier. Le peuple élisait le podestat qui nommait le viguier; l'archevêque nommait les consuls. Chef de la république, le podestat prêtait serment de fidélité à l'empereur entre les mains de l'archevêque, qui l'attendait en habits pontificaux à la porte de la cathédrale. Le podestat entrait en charge le lundi de Pâques, avait l'administration des finances, de la police, de la guerre et était juge souverain. Il datait les actes de l'année de l'empereur et de l'année de son gouvernement. Il pouvait être renommé après un an d'exercice de ses fonctions. Pierre d'Eyguières, qui fut le premier podestat, fut continué pendant plusieurs années en charge. Le viguier prêtait serment entre les mains de l'archevêque ou de son grand-vicaire, avait l'administration de la justice et entrait en charge le mardi de Pâques. Les consuls avaient le soin des affaires de police. Cette république ne tarda pas à devenir très puissante par son commerce; elle contracta des alliances avec Gênes et avec d'autres villes maritimes. Cette indépendance prospère dura peu. L'orgueilleux et tyrannique Charles Ier d'Anjou ne put la supporter et essaya de soumettre la ville à sa puissance par de moyens juridiques. Devenu comte de Provence par suite de son mariage avec Béatrix, il prétendit qu'en 1162 Frédéric Barberousse avait donné au comte Raimond-Bérenger toute juridiction sur la ville d'Arles, et que Raimond et ses successeurs en avaient joui paisiblement. Il voulut faire revivre des droits plus ou moins fondés. Les Arlésiens repoussèrent ses prétentions; mais, intimidés par les forces du prince, vaincus par les conseils de leur archevêque Jean de Baussan et du podestat Barral des Baux, ils firent hommage, en 1251, à Charles, alors à Tarascon, pour leur ville et ses dépendances, conservant toutefois leurs franchises, et ils le reconnurent, non comme comte de Provence, mais seulement comme seigneur d'Arles. L'archevêque, personnellement, fit hommage de la ville de Salon et de tout le temporel de l'archevêché. Les prétentions de Charles d'Anjou ne paraissent pas avoir été fondées, car, avant lui, les comtes étaient seulement défenseurs et avoués de l'Eglise et de la cité d'Arles, à qui ils prêtaient serment de fidélité. La fiction légale qui rattachait Arles au Saint-Empire cessa sous le règne de Charles; après avoir exercé plusieurs droits de souveraineté et confirmé les privilèges d'Arles dans son voyage de 1354, après avoir été couronné, en 1364, par l'archevêque G. de la Garde, comme roi d'Arles, devant nombre de seigneurs, entre autres le sénéchal de Provence, R. d'Agoult, il céda à son petit-neveu le dauphin, plus tard Charles VI, le vicariat du royaume d'Arles, en exceptant seulement les domaines de la maison de Savoie. Ainsi soumise à la domination immédiate des comtes de Provence et à la suzeraineté des rois de France, Arles suivit la fortune de la Provence. Son union à la couronne fut définitivement terminée en 1535, quand François ler s'y attribua la haute justice en y fondant un siège de sénéchaussée. De son ancienne grandeur, il ne resta à Arles que la satisfaction de n'être ni viguerie, ni bailliage, mais simplement « terre adjacente au comté de Provence ». L'histoire municipale d'Arles finit ici. Elle ne joua aucun rôle important sous la monarchie; elle entra avec ardeur dans le mouvement révolutionnaire, dont elle subit les excès. Privée de son archevêché, dépouillée de son commerce par la transformation des constructions navales, qui a rendu le cours du Rhône inférieur impraticable aux vaisseaux modernes, Arles s'est muée en une ville de souvenirs, qu'éveillent les touristes et le brouhaha qui entoure la féria taurine qui s'y déroule chaque année. Arles porte dans ses armes : d'argent au lion accroupi d'or. Monuments. Les « Arènes ». Un spectacle taurin dans les arènes d'Arles. Le théâtre. Le théâtre romain. Les autres vestiges civils. Les remparts romains. Il n'y a que quelques substructions sans intérêt du palais de la Trouille, qui aient survécu à la destruction du faubourg de Trinquetaille, où s'éleva jadis une redoutable forteresse de la famille des Baux, que Raimond-Bérenger prit et rasa en 1161. Sur le rocher qui s'élève près des arènes et sur le chemin de Mouriès, il y a des restes des aqueducs qui amenaient à Arles les eaux des sources de Saint-Remy. Sur la place de l'Hôtel-de-Ville ou du Marché, ancienne place Royale, s'élève aujourd'hui un bel Obélisque de granit qui, destiné probablement à servir de spina au milieu du cirque, est resté enfoui dans les vases du Rhône, peut être depuis son débarquement jusqu'en 1676. Le 20 mars de cette année, on le traîna sur rouleaux jusqu'à la place, on en refit les angles avec des morceaux de granit, et on l'éleva sur un piédestal en le consacrant à Louis XIV. ll repose sur quatre lions accroupis, et porte l'inscription : Ab ira Leonis. Sur sa pointe est un globe terrestre chargé des armes de France et d'un soleil; c'est un monolithe haut de 15 m, qui n'est pas de provenance égyptienne, comme on l'a cru longtemps, mais bien en granit de l'Esterel ou peut-être de Corse. Charles IX avait voulu le faire déterrer et emporter à Paris, mais il ne donna pas suite à son projet. Arles ne possède plus aussi qu'un moulage de sa Vénus, ce ravissant marbre grec, dont l'attitude est si noble et l'air de tête si charmant. On la trouva en 1651 dans une maison particulière en creusant un puits; après avoir été quelque temps l'ornement de l'hôtel de ville d'Arles, elle fut offerte en 1684 à Louis XIV, et placée d'abord à Versailles, puis au Louvre. A l'architecture privée de la Renaissance, Arles doit les beaux hôtels de Nicolay, Saint-Roman, Datty, Artaut et Du Rourre. L'architecture civile moderne a doté Arles des magnifiques quais du Rhône, et du pont tubulaire fixe, qui a avantageusement remplacé les ponts de bateaux de Constantin et de 1240. La seule promenade publique d'Arles est celle de la Lice, qui s'étend entre les portes aujourd'hui détruites de la Roquette et de Maraneau. Les autres portes de la ville étaient la porte de la Cavalerie, la porte Agneau et la porte de Laure. L'église Saint-Honorat, aux Aliscamps.. Une des curiosités les plus intéressantes d'Arles, au moins pour les souvenirs historiques, est le cimetière des Aliscamps (Vivien). L'église Saint-Trophime. La partie la plus intéressante de Saint-Trophime est son portail, commencé par l'archevêque Hugues Béroard (vers 1221) et terminé par J. Beaussan, purement gothique, ce qui n'a pas empêché Emeric David, de le nommer « le dernier soupir du ciseau grec ». Aussi beau que ceux des grandes cathédrales du Nord, il se compose de trois séries circulaires de bas-reliefs, séparés par des colonnes de granit auxquelles sont adossées les statues en pied des apôtres reposent sur des animaux chimériques, des vagues et des méandres (L'imagerie). Il est précédé d'un escalier de dix marches, couronné d'un fronton surbaissé dont les deux côtés reposent sur une corniche que soutiennent d'espace en espace des consoles représentant des figures allégoriques ou des feuillages. A droite et à gauche du portail sont, dans des niches, les statues du patron de l'église et de quatre apôtres en longues robes. Les petites portes carrées des côtés sont du XVIIe siècle. Les autres églises d'Arles. L'Abbaye de Saint Césaire, aujourd'hui maison particulière, a deux chapelles, l'une du XVe siècle, l'autre plus ancienne. La chapelle de Notre-Dame de l'Assomption, devenue maison particulière, a une belle voûte gothique. L'hôtel de ville est une construction assez lourde du règne de Louis XIV, sur un plan revu par Mansart. Dans l'hôtel de ville est engagée la tour de l'Horloge, avec une coupole de bon goût, qui supporte une statue de Mars, dite Homme de Bronze. Dans l'ancienne église de Sainte-Anne, on a établi le Musée lapidaire, qui renferme, outre les pièces provenant du théâtre et citées plus haut, une statue de Mithra, des bas-reliefs : les Muses, Médée égorgeant ses enfants, des autels antiques, l'un avec le bas-relief célèbre de Marsyas et Apollon, des tombeaux romains, des sarcophages chrétiens. A quelque distance d'Arles, s'élèvent les ruines de la célèbre Abbaye de Montmajour. (L.-G. Pélissier). |
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