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Arts,
lettres, sciences : le retour de la curiosité.
Les arts et les lettres, qui semblaient
ankylosés depuis le naufrage que la société romaine ,
parurent retrouver une nouvelle énergie, et, après dix siècles de sommeil
relatif, briller d'un nouvel éclat : de là , comme s'ils eussent en effet
reparu tout à coup à la lumière, le nom de Renaissance, choisi
pour caractériser un événement qui avait été pourtant préparé dès
le Moyen âge .
Cette effervescence nouvelle, qui pour l'essentiel dure de la seconde moitié
du XVe
siècle à la fin XVIe,
est due à trois causes : 1° à la découverte de l'imprimerie ,
qui répandit les oeuvres des anciens et permit à tous de les étudier;
2° à la découverte des nombreux manuscrits
retrouvés dans les couvents et publiés par les érudits 3° à l'arrivée
en Italie
de savants Grecs, chassés de Constantinople
par la conquête ottomane ,
tels que Constantin et Jean Lascaris, le cardinal Bessarion,
Chalcondyle, le premier éditeur d'Homère.
Ce goût de l'Antiquité poussa les souverains à protéger les savants,
à fonder des académies, des de nouvelles
universités, des bibliothèques.
Un premier réveil des esprits avait eu
lieu sous Charlemagne : mais les malheurs
qui suivirent sa mort éteignirent ce faible rayon de politesse naissante,
que l'on a parfois appelé improprement la Renaissance carolingienne, et
reculèrent de trois siècles la restauration véritable des lettres. L'époque
de Louis IX vit un nouvel essor des esprits,
plus vigoureux cette fois et plus durable : alors naquirent ou se multiplièrent,
en France ,
en Angleterre ,
en Espagne ,
en Italie ,
les Universités ,
qui tirèrent l'activité intellectuelle, en quelque sorte, de la prison
des cloîtres et la sécularisèrent.
Des guerres étrangères et des divisions
intestines retardèrent eu Espagne, en Angleterre et en France le mouvement
intellectuel; mais en Italie, même au milieu des discordes civiles, l'action
bienfaisante de Dante, de Pétrarque
et de Boccace lui imprima au contraire un plus
vif élan. Ce ne fut pas seulement par leurs propres oeuvres que ces grands
génies exercèrent une puissante influence sur les esprits; ils mirent
aussi leur gloire à étudier et à répandre les écrivains de l'Antiquité ,
dont on s'efforçait de retrouver les écrits. Ainsi, par exemple, le Pogge
qui découvrit, à Saint-Gall
: Quintilien, Columelle,
Vitruve, le poème Sur la Nature
de Lucrèce, des comédies
de Plaute, des discours
de Cicéron.
La Renaissance ne fut pas seulement un
mouvement littéraire et artistique. En dévelopant l'esprit d'examen,
elle fit progresser le droit, la politique,
les sciences et la philosophie .
Dans le droit, le jurisconsulte Alciat fonde l'école
de Bourges; Cujas
approfondit le droit romain; Hotman
et Bodin s'occupent surtout de politique. En médecine,
Vésale crée l'anatomie
et Ambroise Paré est le père de la chirurgie.
En mathématiques, Viète
applique l'algèbre à la géométrie.
En astronomie ,
Nicolas Copernic propose un système héliocentrique,
dans lequel le Soleil
est mis à la place de la Terre ,
au centre de l'univers. C'est le point de départ d'une nouvelle
vision du monde, qui va pouvoir s'épanouir complètement après la découverte
de l'Amérique ,
par les équipages de Christophe Colomb.
En philosophie
et en théologie, Ramus
oppose les idées de Platon aux théories scolastiques;
Reuchlin, Ulric de Hutten
préparent les voies à Luther et à Calvin.
Mais ils sont tous dépassés par Érasme et par
Rabelais. Erasme, dans l'Éloge de la Folie,
fit la satire des conditions humaines, blâma les désordres des prélats
catholiques, mais condamna en même temps les violences de Luther. Rabelais
alla plus loin : il se moqua des érudits lourdauds par une obscurité
comique; il sut être éloquent, en paraissant fantaisiste. Il indiqua,
comme en se jouant, les grandes réformes de l'avenir.
Les
arrière-plans politiques de la Renaissance.
A la fin du XVe
siècle, la France s'étendait de la source
de l'Escaut et de la Meuse moyenne aux Pyrénées (mais elle ne possédait
pas le Roussillon ),
de la Manche aux Alpes (mais elle ne possédait ni la Franche-Comté
ni la Savoie );
ses rois, Charles VIII et Louis
XII, avaient imprudemment porté leur ambition en Italie; ils y avaient
trouvé des succès et des revers et ils en avaient ce mouvement d'idées
qui signale l'époque. La péninsule Ibérique
ne formait plus en réalité, malgré quelques protestations, que les deux
royaumes d'Espagne et de Portugal, et l'Espagne qui, grâce à Christophe
Colomb, se rendait maîtresse du Nouveau-Monde, devenait une des grandes
puissances de l'Europe. L'Italie était plus divisée; cependant les États
de l'Église, le royaume de Naples ,
le grand-duché de Toscane, les républiques de Venise
et de Gênes, le duché de Milan ,
l'emportaient en puissance sur les autres principautés.
En Allemagne, la
couronne impériale était fixée depuis le XIVe
siècle dans la maison
de Habsbourg, mais l'autorité de l'empereur, malgré le prestige qui
s' attachait à sa dignité, était faible sur les très nombreux États,
duchés, principautés, évêchés, abbayes, villes libres, etc., qui composaient
l'empire germanique et parmi lesquels primaient les sept électeurs archevêques
de Mayence ,
Trèves et Cologne ,
roi de Bohème, comte palatin du Rhin, électeur de Saxe, margrave de Brandebourg.
Cependant, lorsqu'on 1590
la couronne impériale fut placée sur la tête d'un Habsbourg, Charles-Quint,
qui était déjà roi des Espagnes, maître des Pays-Bas et de la Franche-Comté
et qui bientôt devint le dominateur de l'Italie et le vainqueur François
Ier,
put prétendre à le domination politique et religieuse de l'Europe.
Au Sud-Est de l'Allemagne,
le royaume de Hongrie, occupant le bassin moyen du Danube et la Transylvanie ,
n'opposait pas aux invasions asiatiques une barrière toujours infranchissable;
en 1241,
il avait subi une terrible invasion mongole
et, en 1526,
une défaite qui allait le placer sous le joug des Turcs.
Au Nord-Est de l'Allemagne, le royaume de Pologne s'étendait sur le bassin
de la Vistule et sur une partie de celui de l'Oder; il était flanqué
lui-même à l'Est du grand-duché de Lituanie qui occupait les bassins
du Dniepr et du Niémen; des Khans, Cosaques
ou Tatars ( Les
Turks), gouvernaient les plaines du Don et de la basse Volga; Ivan
III, le vrai fondateur de la puissance moscovite, venait de mourir
(1505)
et le grand-duché de Moscou s'étendait sur
la plaine orientale de Moscou et de Novgorod
à l'océan Glacial.
Cependant les bords
de la Baltique, au Sud du golfe de Finlande, appartenaient à l'ordre des
Chevaliers Porte-Glaives et Teutoniques,
qui avaient conquis et christianisé le pays; ils devaient, avant la fin
du siècle, devenir des luthériens et des seigneurs laïques. Au Nord
du golfe, la Finlande était une province suédoise. La Suède, qui supportait
mal l'union de Calmar (1397),
allait définitivement s'en affranchir avec Gustave Vasa (1523)
et adopter la réforme luthérienne. Le Danemark conservait la Norvège.
Au XVIe
siècle, l'Espagne, enrichie par les trésors
du Nouveau-Monde, devint la puissance prépondérante de l'Europe, lorsque
son roi, héritier des Habsbourg, eut été élu empereur d'Allemagne sous
le nom de Charles-Quint (1519).
C'est alors que, maître de l'Espagne, d'une partie de l'Italie, de l'Allemagne,
de la Franche-Comté et des Pays-Bas, Charles-Quint enserrait de tous les
côtés la France qui lutta pour ne pas se laisser étouffer; sa lutte
et celle de Philippe II contre François
Il, et contre Henri II dura jusqu'au traité
de Cateau-Cambrésis
(1559),
et la France ne fut complètement délivrée des ambitions de l'Espagne
qu'après l'avènement de Henri IV
(1598).
Contre Charles-Quint qui pressait sa frontière au Sud, au Nord et à l'Est,
François Ier
n'avait pas craint, malgré la force des idées religieuses, de s'allier
au sultan des Turcs ( Les
Capitulations), de manière à presser, lui aussi, son adversaire entre
ses armées et celles de son allié.
Si l'on veut caractériser
cette période, on pourra donc sans doute relever, sur le plan politique,
les contre-coups de la disparition de l'empire
Byzantin et la la menace ottomane dont l'empire atteint son apogée
( Le siècle
de Soliman), la puissance de l'Espagne et celle de Charles-Quint
et, secondairement, la confrontation de celui-ci avec François
Ier,
mais surtout, il apparaît que ce temps se signale bien davantage
par des faits de civilisation que par des faits politiques. D'ailleurs
le qualificatif de "nouvelle effervescence culturelle" lui conviendrait
sans doute mieux que celui de Renaissance. Déjà vivace en Italie dès
le XIVe siècle
(période connue sous le nom de Trecento),
ce mouvement est accentué après la chute
de Constantinople par l'arrivée en
Europe Occidentale d'une une foule de littérateurs grecs qui reçurent,
notamment à la cour de Cosme de Médicis, seigneur
de Florence, une hospitalité éclairée, puis se propage en se consolidant
dans le reste de l'Europe. Le développement de l'imprimerie favorise la
propagation des idées, de l'instruction, des controverses, et
aussi de la contestation de ce qui avait été le premier pouvoir pendant
tout le Moyen Âge, celui de la Papauté.
Au XVIe
siècle, Martin Luther,
Ulrich Zwingli, Philip
Mélanchthon, Jean Calvin
et d'autres, ne craignent plus de se confronter directement aux abus de
l'Église et inaugurent ce qu'on appellera la Réforme, mouvement religieux
d'ampleur qui gagnera une grande partie de l'Europe, mais au prix de nombreuses
Guerres de religion
entre catholiques et protestants.
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Anne
Kraatz, Luxe et luxure à la cour des papes de la Renaissance,
Belles Lettres, 2010.
2251338330.
J.
Hale, Dictionnaire de la Renaissance italienne, Thames and
Hudson, 2006. --Fascinant
panorama d'une des plus importantes périodes de l'histoire occidentale,
le Dictionnaire de la Renaissance italienne, sous la direction de
J. R. Hale, présente plus de 700 entrées consacrées aux domaines suivants
: peinture, scuplture,
architecture, littérature, musique, science,
religion, érudition et philosophie,
centres historiques, histoire et politique, histoire sociale et économique,
voyages et découvertes.Rédigé par de grands spécialistes et illustré
de nombreuses reproductions d'oeuvres majeures ainsi que de cartes, d'arbres
généalogiques et d'un tableau chronologique, cet ouvrage constitue un
précieux et indispensable outil de référence. (couv.). |
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