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Moreau

Moreau (Jean-Victor), né à Morlaix en 1763, était fils d'un avocat. Il étudia le droit à Rennes, et, de venu prévôt de l'école de droit de celle ville, il fut successivement le chef du parti parlementaire contre le gouvernement, et le chef du parti révolutionnaire contre le parlement. Il se rendit en 1792, à la tête d'un bataillon de volontaires, à l'armée du Nord, commandée par Dumouriez. Devenu par sa bravoure et par ses talents général de brigade en 1795 et général de division en 1794, il concourut a la conquête de la Hollande, sous Pichegru. Chargé en 1796 du commandement de l'armée de Rhin-et-Moselle, il envahit l'Allemagne de concert avec l'armée de Sambre-et-Meuse; conduite par Jourdan, et défit plusieurs fois l'archiduc Charles. Obligé par les revers de Jourdan d'opérer un mouvement rétrograde, il exécuta vers Strasbourg une retraite qui le plaça au premier rang des généraux de son époque. Il repassa le Rhin en 1797 et prit Kehl; mais les préliminaires de paix de Leoben mirent un terme à ses succès. 

Tombé dans la disgrâce du Directoire pour n'avoir point. révélé les menées de Pichegru, il resta sans emploi pendant 18 mois, et reçut ensuite le commandement d'une simple division de l'armée d'Italie, sous Schérer, qu'il remplaça, et dont il s'efforça de réparer les fautes. Placé ensuite sous Joubert, qui fut tué à Novi, il fit encore, après cette défaite, une savante retraite. Il seconda Bonaparte dans la journée du 18 brumaire, et le commandement de l'armée du Rhin lui fut rendu.Moreau pénétra en Allemagne en repoussant les Autrichiens, gagna, après une suspension des hostilités, la bataille de Hohenlinden, en 1800, et il se portait sur Vienne lorsque la paix de Lunéville arrêta sa marche victorieuse en 1801. 

Revenu à Paris il se maria, et, cédant aux excitations de sa femme et de sa belle-mère, il se mit en opposition avec le gouvernement du premier consul. Il fuit condamné en 1804 à deux ans de détention, comme complice du complot de Pichegru et de Cadoudal. Sa captivité ayant été commuée en un exil, il partit pour les Etats-Unis, où il resta jusqu'en 1813. Il accepta alors la proposition que lui fit l'empereur de Russie, Alexandre ler, de venir tracer un plan de campagne contre Napoléon, et se rendit à Prague auprès des souverains alliés. Mais un boulet lui fracassa les deux jambes à la bataille de Dresde, et il fut transporté en Bohème, où il mourut en septembre 1813. C'était avec des espérances républicaines qu'il avait tiré l'épée contre son pays.

Moreau (Jean-Michel), dessinateur et graveur, né à Paris en 1741, fut dessinateur des menus-plaisirs et du cabinet du roi. Nommé en 1797 professeur aux écoles centrales de Paris, il a orné d'estampes les édititions des oeuvres des grands écrivains du XVIIe siècle et du XVIIIe. Il mourut en 1814.
Moreau (Gustave), peintre français, né à Paris le 6 avril 1826, mort à Paris en 1898. Elève de Picot, Gustave Moreau s'éprit d'abord des tableaux de Delacroix et de Chasseriau, puis il alla à Rome où il trouva, dans l'étude des maîtres italiens, le goût des choses antiques. Ses sujets, presque tous pris à l'Antiquité, sont tous traités avec une recherche de l'idée, non pas avec une recherche littéraire, mais avec une recherche philosophique du sentiment humain, et dans une forme aux couleurs détaillées qui fait apparaître sa peinture avec des aspects de matières précieuses. 

Gustave Moreau a débuté au Salon de 1853 avec une Pietà. Il a exposé ensuite : Episode du songe de Salomon, au musée de Dijon; Fuite de Darius après la bataille d'Arbelles (1853); Athéniens livrés au Minotaure dans le labyrinthe de Crète (1855); OEdipe et le Sphinx, qu'on regarda au Salon de 1864 comme une nouveauté; Jason et le Jeune homme et la Mort, à la mémoire de Chasseriau (1865); Orphée, et Diomède dévoré par ses chevaux (1867); Prométhée et Jupiter d'Europe (1869) ; Salomé et Hercule et l'Hydre de Lerne (1876), Jacob et l'Ange, David, Moïse exposé sur le Nil, le Sphinx divin (à l'Exposition universelle de 1878); Galatée et Hélène (1880). 

Gustave Moreau a aussi peint des aquarelles : Salomé portant la tête de saint-Jean-Baptiste et une Péri (Exposition universelle de 1878) et fait des peintures à la cire : Saint Sébastien (1876). Il a en outre fait des dessins pour l'orfèvrerie. Il a été élu à l'Académie des Beaux-Arts, où il a succédé à Boulanger, le 24 novembre 1888; en 1892, il a été nommé professeur à l'Ecole des Beaux-Arts. II a laissé à l'Etat par testament un grand nombre de ses oeuvres et son hôtel de la rue La Rochefoucauld. (Etienne Bricon).

Hégésippe Moreau est un poète français, né à Paris en 1810, mort à Paris le 20 décembre 1838. Fils naturel d'un professeur qui mourut quand il était encore enfant, il fut recueilli, du vivant de sa mère, par une famille de Provins qui lui fit faire ses études aux séminaires de Meaux et d'Avon. Sorti du collège, l'enfant entra en apprentissage dans l'imprimerie de M. Lebeau, à Provins. Ses travaux prosaïques ne firent qu'exalter son génie poétique. Le chaste amour, qu'il éprouva pour la fille de son patron lui inspira des poésies touchantes, et il lui dédia ses contes en prose. 

Poussé par l'ambition, qui lui faisait quitter une vie paisible, il vint à Paris et entra comme compositeur à l'imprimerie Didot, à l'âge de dix-neuf ans. Le poète Pierre-Antoine Lebrun, de l'Académie française, l'auteur d'Ulysse, de Pallas et de Marie Stuart, s'intéressa aux débuts du jeune homme, et ce fut à son instigation qu'Hégésippe Moreau adressa à Didot son Epitre sur l'imprimerie, un peu didactique, mais élégante et ne rappelant guère les périphrases compliquées et encore à la mode qu'on trouvait chez Delille et jusque chez Chateaubriand
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La Voulzie

« S'il est un nom bien doux, fait pour la poésie,
Oh! dites, n'est-ce pas le nom de la Voulzie?
La Voulzie, est-ce un fleuve aux grandes îles? Non; 
Mais, avec un murmure aussi doux que son nom, 
Un tout petit ruisseau coulant visible à veine; 
Un géant altéré le boirait d'une haleine; 
Le nain vert Obéron, jouant au bord des flots,
Sauterait par-dessus sans mouiller ses grelots.
Mais j'aime la Voulzie et ses bois noirs de mûres,
Et dans son lit de fleurs ses bonds et ses murmures. 
Enfant, j'ai bien souvent, à l'ombre des buissons, 
Dans le langage humain traduit ses vagues sons; 
Pauvre écolier rêveur et qu'on disait sauvage, 
Quand j'émiettais mon pain à l'oiseau du rivage, 
L'onde semblait me dire : « Espère! aux mauvais jours 
Dieu te rendra ton pain. » Dieu me le doit toujours. »

(H. Moreau).

La révolution de 1830 ne le laissa pas indifférent; il combattit bravement sur les barricades, et de ce moment data pour lui, à la suite des chômages et d'un changement profond dans son caractère, une période de privations et d'amertume. Donnant quelques leçons peu rétribuées, triste et souvent errant, vagabondant la nuit comme le jour, il finit par tomber malade et entra à l'hospice en 1833. A peine guéri, il retourna à Provins et redemanda le calme à la douce compagnie de ses premiers bienfaiteurs, au charme des paysages admirés dès l'enfance, puis, ressaisi de nouveau par le besoin de la lutte, il fonda dans cette ville un journal satirique et politique, le Diogène. Malgré le scandale que causèrent ses écrits, le gros public fut indifférent, et le poète retourna à Paris où il recommença une vie de déboires et de pauvreté que sa solitude et son besoin inassouvi d'affections faisaient plus douloureuse encore. Le Myosotis, volume renfermant ses oeuvres, fut édité à cette époque, et la réputation du poète, fortement loué par le National, allait s'établir enfin, lorsqu'il retomba malade et mourut à l'hospice de la Charité. Son convoi fut suivi de nombreux admirateurs.

Comme l'a remarqué fort bien Sainte-Beuve, Hégésippe Moreau rappelle André Chénier dans les ïambes, Barthélemy dans la satire et Béranger dans la chanson. Ce qui n'enlève rien à sa personnalité où la fraîcheur et la grâce se mêlent aux fortes inspirations. La célèbre pièce sur la Voulzie respire une mélancolie, un désenchantement et un sentiment de la nature qui n'ont pas vieilli et qui contrastent avec l'âpreté de ses satires politiques de haut style et richement ornées à la rime de ces fameuses « consonnes d'appui » que Théodore de Banville a tant réclamées plus tard. 

Ses contes en prose, au nombre de cinq : le Gui de chêne, la Souris blanche, les Petits souliers, Thérèse Sureau et le Neveu de la fruitière, sont écrits dans une langue pure et élégante et avec un esprit à la fois naïf et fin, qui font songer un peu à Nodier et à Perrault. Sa pièce de vers sur l'isolement semble résumer tout entier ce jeune homme tourmenté, romantique dans sa vie, qui demandait à Dieu l'amour, ce pain de l'âme, aimait la pauvreté comme une soeur et trouvait souvent les coeurs vivants pétrifiés pour lui. (Charles Grandmougin).

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Dictionnaire biographique
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