| Prison du Temple, à Paris (IIIe arrondissement). - On désigne ainsi la tour de la Maison du Temple à Paris, en tant qu'elle a servi de lieu de détention. Après la chute des Templiers, le Temple, c.-à-d. vraisemblablement aussi le donjon, fut employé comme prison d'Etat par les rois de France au XIVe siècle. Enguerrand de Marigny y fut enfermé (1315), la comtesse de Bar, Yolande de Flandre également (1373); le captal de Buch, Jean de Grailly, y mourut après cinq ans de captivité (1376). Mais on ne voit pas que des prisonniers d'Etat y aient été enfermés après 1378. Il est curieux de relever qu'au XIVe siècle aussi il y eut, de plus, au Temple, une prison de ville. Quant aux tours mêmes, à cette même époque, Du Guesclin y donna un festin aux chefs des grandes compagnies (La Criminalité au Moyen âge) avant de les emmener en Espagne (1365). Au XVIe siècle, divers corps de troupe y furent fréquemment logés. De 1538 sans doute à 1664, la grosse tour fut utilisée comme arsenal pour les poudres et munitions de guerre. Elle fut ensuite affectée à la conservation des papiers du Temple, d'où le nom qu'elle porta en dernier lieu de tour des Archives, l'archiviste habitant la petite tour. Mais de tout temps, ce domaine appartenant aux hospitaliers, le premier étage servit aux réunions des chapitres et assemblées provinciales. Le donjon du Temple au XIXe s. Avec la Révolution, la tour redevint une prison, et elle garda jusqu'à sa disparition ce caractère. Après que la Commune de Paris eut imposé le choix de la tour du Temple, en se faisant charger de la garde et du gouvernement de la prison, la famille royale y fut amenée le 13 août 1792 et d'abord logée dans la petite tour, dont le deuxième étage ou entresol du premier avait été occupé en dernier lieu par le garde des archives de l'ordre de Malte. Le deuxième étage fut attribué à la reine et à ses enfants, le troisième au roi, à sa soeur et à Mme Élisabeth. D'importants travaux d'aménagement aussitôt entrepris en vue du transfert des prisonniers dans la grosse tour, furent dirigés par l'architecte Poyet, sous la surveillance de Palloy et de Santerre, et la tour fut enfermée entre quatre hautes murailles, avec une seule porte défendue de plus par un gros mur. Le 29 septembre, Louis XVI fut définitivement transféré au deuxième étage de la grosse tour, et la reine au troisième, le 26 octobre Le dauphin occupa la chambre qu'avait eue son père, pendant le temps qu'il vécut avec Simon, puis une seconde fois, avec ses nouveaux gardiens, après être resté six mois dans une pièce voisine transformée en cachot; il passa ses trois derniers jours dans la petite tour, là où sa mère avait été d'abord emprisonnée. Lorsque sa soeur, unique survivante, qui était demeurée au troisième étage de la grosse tour, eut été rendue à là liberté, les tours du Temple devinrent comme un lieu de pèlerinage, situation à laquelle le gouvernement mit fin en défendant de laisser pénétrer personne dans cette prison. - Le Donjon et la Rotonde du Temple (tableau J.-C Nattes, 1808). Le Directoire fit de la prison du Temple une prison d'Etat. C'est là que furent enfermés Babeuf et ses coaccusés; en 1796, le commodore Sidney Smith, qui réussit à s'échapper, et le capitaine Wright, trente-cinq personnes à la suite de l'affaire du camp de Grenelle, puis, après le 18 fructidor, un grand nombre d'autres, dont Pichegru et le directeur Barthélémy; de même encore Jos.-Alex. de Ségur et Fiévée. Le vicomte de Rivarol, Esménard, l'administrateur Rémusat et Toussaint-Louverture passent pour y avoir été pareillement détenus. La prison du Temple, qu'on appelait alors généralement maison-d'arrêt, reçut enfin, en 1804, le général Moreau avec Pichegru qui, à cette deuxième incarcération, s'y suicida, Cadoudal et les frères Polignac, Il paraît que, pour ceux qui n'étaient pas des détenus au secret, le régime fut presque toujours très doux dans cette prison les visites y étaient fréquentes et les détenus avaient même pu établir un jeu de paume; ils s'entretenaient eux-mêmes, et le gouvernement attribuait une solde à ceux qui ne pouvaient subvenir à leurs besoins, par exception le concierge ne fournissant ni mobilier ni aliments. A partir de l'an VI, la chapelle de l'Hôtel servit au casernement des brigades de gendarmerie de Paris, destination qui avait pour but de garantir la sûreté de la prison. Mais, le 3 juin 1808, les prisonniers furent transférés au donjon de Vincennes, et le Temple cessa d'être une prison d'Etat. Les tours furent démolies en 1811. Les pèlerinages ayant recommencé, lorsque, mises en vente, elles eurent été adjugées au prix de 33 100 à un royaliste, Robert Morel, le ministre dut s'y opposer, en objectant que l'adjudication avait été faite avec obligation de les raser. Il n'y eut pas d'édifice élevé sur leur emplacement. Une barrière en bois mise à la Restauration pour en marquer la place dura jusqu'en 1848. Suivant la tradition, il y eut dans le square du Temple, près de la rue des Archives, une petite allée de tilleuls sous lesquels Louis XVI se promena pendant sa détention et un saule pleureur qu'aurait fait planter en 1814 Madame Royale, devenue duchesse d'Angoulême, lorsqu'elle revint à Paris. Elle aussi avait fait un pèlerinage aux ruines de la tour du Temple où elle avait tant souffert, et son saule pleureur aurait été maintenu parmi les arbres du square. Est-ce une légende? Dans ses Mémoires, le baron Haussmann se borne à dire [Ce quare] contient quelques vieux arbres, conservés avec soin, et une pièce d'eau qu'alimente une cascade tombant d'un rocher factice. | |