| Philip Schwarzerd, connu sous le nom grécisé de Mélanchthon, est un humaniste et réformateur (Protestantisme) né à Bretten (auj. en Allemagne) le 10 février 1497, mort à Wittenberg le 19 avril 1560. Petit neveu du grand humaniste Reuchlin, il fut lui-même un des humanistes les plus distingués de son siècle (La Renaissance). D'un génie précoce, il alla à l'université de Heidelberg à douze ans, fut bachelier à quatorze, et, comme on le trouva trop jeune pour lui conférer de nouveaux grades, il devint maître ès arts à Tubingen (en 1514). Il se mit alors à étudier la théologie. En 1518, à vingt et un ans, il devint professeur à Wittenberg, où son discours d'ouverture, De Corrigendis adolescentiae studiis, fit sensation. Il devint bachelier en théologie et se maria en 1520. - Mélanchthon (1497-1560). Melanchthon se sentit attiré par la puissante individualité de Luther, qui, lui-même, lui voua une amitié qu'il lui conserva jusqu'à la fin de ses jours. Melanchthon accompagna Luther au colloque de Leipzig (1519) et publia, en 1521, ses Loci communes rerum theologicarum, la première dogmatique protestante, que Luther admirait, au point de l'appeler Liber invictus, non solum immortalitate, sed et canne ecclesiastico dignus. En 1526, Melanchthon fut nommé professeur de théologie; il est le premier laïque qui ait occupé une chaire de théologie. Il participa dès lors, à côté de Luther, à toutes les grandes oeuvres et à tous les actes importants de la réformation luthérienne. Il rédigea les instructions pour l'inspection des Églises, assista au colloque de Marbourg (1529), fut le rédacteur de la Confession d'Augsbourg et de l'Apologie de la Confession d'Augsbourg (1530). En 1535, Melanchthon prit part au colloque de Cassel, en 1536 à la concorde de Wittenberg, en 1537 à la réunion de Smalcalde, en 1539 au convent de Francfort, en 1540 au deuxième convent de Smalcalde et aux colloques de Haguenau et de Worms. En 1541, il approuva la bigamie du landgrave de Hesse et assista même à son mariage; il participa au colloque de Ratisbonne, et en 1543 à la réformation de Cologne. Après la mort de Luther, il prit la direction de la Réforme; mais, privé de son tuteur, il fléchit et faiblit dans toutes les grandes occasions, devint complice de l'Interim de Leipzig (1548) et s'attira les attaques des théologiens luthériens, par les concessions exagérées qu'il faisait aussi bien aux catholiques qu'aux réformés; ces luttes aigrirent son caractère et empoisonnèrent les dernières années de sa vie. Il se plaignit amèrement de la rabies theologorum, oubliant que lui-même n'en était nullement exempt. Comme humaniste, Melanchthon a été grand; il a mérité le beau surnom de Praeceptor Germaniae. François Ier eût voulu l'avoir à Paris, Henri VIII à Londres; il a décliné tous ces appels et a fondé la supériorité de l'enseignement classique chez les protestants au XVIe siècle, et stimulé, par l'émulation, les jésuites, contribuant ainsi, indirectement, au progrès des études classiques dans les autres pays. Sa Grammaire grecque a été souvent publiée depuis 1518; sa Rhétorique (1549) a été imprimée même à Paris et à Venise, ainsi que sa Dialectique (1533). Mélanchthon a édité et commenté quantité d'auteurs classiques (parties de Cicéron, de Pline le Jeune, de Tacite; puis Térence, Ovide, Hésiode, Lucien, Plutarque, Démosthène, etc.) et s'est appliqué aussi à l'étude de l'histoire et de presque toutes les autres sciences. Il avait un esprit clair, pondéré, dialectique, et ne put jamais prendre goût à Platon. Lui-même a bien caractérisé le concours qu'il a apporté à Luther, quand il a dit, dans l'oraison funèbre du réformateur : « Je n'ai que le mérite d'avoir rendu claire mainte chose qui ne l'était pas avant. » Admirable, quand Luther était à côté de lui, il fléchissait, sitôt qu'il était seul, cédant sur les points les plus essentiels, sacrifiant même des principes. C'est surtout par le caractère qu'il a été inférieur à son génie. Il était d'une faiblesse déplorable, et ne sut jamais résister. La puissante individualité de Luther le dominait et lui pesait parfois; il était intérieurement froissé de son impuissance et s'en vengeait dans sa correspondance privée, en se permettant, même vis-à-vis d'adversaires du réformateur, des plaintes et des récriminations souvent calomnieuses. Bien qu'on l'appelât le « doux » Melanchthon, il n'était pas aussi doux qu'on veut bien le dire; il avait la violence du faible; il a approuvé la condamnation et le supplice de Michel Servet - peut-être parce qu'il n'osait pas contredire Calvin. - Luther, par contre, a été avec lui d'une grande douceur; il a en la générosité de l'homme fort, admirant son beau génie et n'ayant jamais une plainte contre lui, ni dans sa correspondance ni dans ses écrits polémiques. L'édition ancienne la plus complète des Oeuvres de Melanchthon se trouve dans le Corpus reformatorium de Brelschneider et Bindseil (Halle, 1834-.60, 28 vol.). Bindseil a encore publié ses Epistolae, judicia, concilia,etc. (Halle, 1874, 2 vol.). (Ch. Pfender). | |