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L'histoire de la philosophie |
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Aperçu |
Pas
plus que la philosophie elle-même, l'histoire
des écoles et des doctrines philosophiques n'est
une oeuvre unie et simple, soustraite aux controverses. La fin et la méthode
de cette branche de la science historique ont
été très diversement comprises, selon l'idée
que l'on se faisait des conditions de l'activité philosophique. Mais principalement
un problème de haute psychologie a dominé
les difficultés de conception et de méthode.
L'activité philosophique est-elle nécessitée
ou contingente? L'éclosion d'un système
est-elle un fait, semblable à tous les faits naturels, déterminé par
des causes certaines, inflexibles, dont il appartient
à la science de découvrir l'enchaînement? Ou encore le déterminisme
régissant une telle éclosion ne peut-il pas être considéré comme étant
d'ordre logique, l'avènement d'une théorie
correspondant à l'une des phases de l'évolution
de l'idée, évolution nécessaire, assignable a
priori, dont un Hegel, par exemple, prétendra
déduire la formule. Tout à l'opposé de ces conceptions, il faudrait
placer celle qui explique l'apparition d'un système
exclusivement par la spontanéité de la pensée
individuelle et par le libre exercice du génie spéculatif. A ce point
de vue, la production d'une théorie originale serait donc un événement
irréductible, d'origine contingente, né de la liberté même, c.-à-d.
d'une cause incausée. Mais alors, au contraire de ce qui était dit tout
à l'heure, l'oeuvre de l'historien des doctrines serait toute d'exposition,
d'une exposition brisée, sans recherche de lois
profondes et de causes générales; sa tâche consisterait à raconter
les pensées, non à en comprendre la genèse, ou à en retracer l'influence,
le lien rationnel permanent avec ce qui précéda
et ce qui suivit.
Entre ces, deux extrêmes, dont l'un ferait peser sur l'histoire de la philosophie le plus rigide des fatalismes, et dont l'autre la transformerait en une scène où régneraient le hasard et le miracle, il y a place pour plus d'une position conciliatrice. Et une position de ce genre semble bien devoir être celle que de plus en plus l'esprit scientifique sera conduit à adopter. L'évidence des faits apporte ici des enseignements dont on ne peut nier la force. C'est une véritéindiscutable que les grands mouvements de pensée philosophique ont eu pour origine l'apparition imprévisible d'esprit originaux, de qui l'action a été le plus souvent continuée par de plus ou moins nombreuses générations de disciples; ce n'est pas une vérité moins assurée, d'autre part, que ces esprits ont émergé dans des milieux intellectuels, parmi des circonstances sociales dont ils ont ressenti l'influence; que ces successions philosophiques, auxquelles on donne le nom d'écoles, offrent un développement dont la courbe se peut en quelque sorte mesurer. Bref, déterminisme et contingence s'entremêlent étroitement dans cette délicate science, qui réunit en elle aux difficultés afférentes à toute histoire celles qui tiennent à la nature particulière, vraiment unique, de son objet. Individuelle et générale; ces deux caractères opposés devront donc se trouver conciliés dans une histoire de la philosophie, ambitieuse de pleinement remplir ses fins. Dans l'esquisse que nous allons donner des grandes successions doctrinales qui ont occupé, à des intervalles singulièrement inégaux, la scène du monde occidental, nous ne pourrons qu'indiquer rapidement les penseurs les plus illustres qui ont fondé, raffermi ou renouvelé les écoles. Presque tous font l'objet, ainsi que leurs systèmes, d'articles distincts, accessibles par les hyperliens, et auxquels le visiteur pourra utilement se reporter. |
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Jalons |
L'Antiquité
Ce fut trop longtemps un lieu commun littéraire de célébrer la Grèce comme ayant été la créatrice de la philosophie. C'est pousser un peu loin l'idolâtrie de l'hellénisme. Indépendamment de la Grèce, et bien antérieurement à elle, le monde oriental a connu des foyers philosophiques distincts (Chine, Inde, Iran, etc.). Ce qui est vrai, du moins, c'est que la Grèce a été la première éducatrice et qu'elle demeure le guide incomparable de la pensée philosophique européenne, et que son esprit anime encore la spéculation contemporaine. Philosophie grecque et philosophie moderne sont comme les deux bouts d'une chaîne, parfois brisée, toujours renouée, que l'on ne saurait omettre de remonter, sous peine de perdre le sens des progrès mêmes de l'esprit humain. Les Présocratiques,
Socrate.
L'école
ionienne.
L'école
Eléatique et les Pythagoriciens.
Empédocle,
Anaxagore.
L'école
atomistique.
La
Sophistique.
Socrate.
Platon, Aristote
et leurs successeurs
La philosophie idéaliste inaugurée par Platon rencontra dans son disciple Aristote, son égal, savant encyclopédique, physicien, logicien, sociologue, politique, métaphysicien, « père de la métaphysique », comme on l'a parfois nommé, qui refuse toute existence à l'idéal à part du réel, le rival immortel qui devait tenir à jamais sa doctrine en échec : à ce point que l'on a pu dire que quiconque se mêlera de philosopher procédera de l'un ou de l'autre et sera élève d'Aristote ou de Platon. Chacun d'eux, au reste, laisse une longue lignée : Platon, l'école Académique, qui subira jusqu'à cinq renouvellements, dont le plus imprévu est celui que lui imprimèrent les philosophes dits acataleptiques (Scepticisme); Arcésilas et Carnéade, ces redoutables ennemis de toute théorie dogmatique;Scepticisme, Epicurisme, Stoïcisme. En même temps que le platonisme et l'aristotélisme étendaient ainsi, non sans bien des altérations, leur influence, d'illustres écoles s'élevaient qui, d'ailleurs, avaient emprunté à l'un et à l'autre plus d'un élément. • C'est le Scepticisme radical avec Pyrrhon, théoricien de l'époque ou systématique abstention du jugement;Philosophie romaine. A vrai dire, Rome n'eut pas de philosophie propre, et c'est aux Grecs qu'elle emprunta les enseignements dont s'inspirèrent ses écrivains. L'Épicurisme fit chez elle de nombreux adeptes dont le plus illustre fut Lucrèce, auteur du poème De la Nature. La nouvelle Académie eut, alternativement avec l'Éclectisme, son principal interprète en Cicéron, qui consacra les dernières années de sa vie à exposer en langue latine les spéculations de la pensée grecque. Mais ce fut le Stoïcisme qui exerça à Rome, semble-t-il, l'action la plus durable cette doctrine est partout présente aux écrits du généreux et faible Sénèque; elle est portée sur le trône par la grande figure de Marc-Aurèle. L'école d'Alexandrie.
Le Néoplatonisme.
Les Pères de l'Eglise.
Nous ne saurions suivre plus loin la courbe que décrit la pensée spéculative antique sans nous engager dans l'histoire de l'Église chrétienne en ses premiers âges et, à l'occasion des théories émises par les Pères et les Docteurs, les uns apologistes, les autres détracteurs résolus de la culture hellénique, nous jeter dans le champ illimité des controverses théologiques. De plus en plus, à mesure que nous descendons le cours du temps, le sens de la pure métaphysique s'affaiblit, les partisans de doctrines si longtemps reçues par des générations de disciples se font plus rares, l'enseignement des systèmes est battu en brèche par les ministres du culte chrétien. On peut considérer que la culture philosophique ancienne atteint son terme historique, en 529, lors de la fermeture des écoles par Justinien. Le Moyen âge et la Renaissance Le terme consacré pour désigner la philosophie du Moyen âge en Occident est celui de scolastique, mot qui proprement ne devrait dénommer que l'enseignement donné dans les écoles, ou mieux encore l'enseignement de « l'Ecole », c'est-à-dire l'Aristotélisme. Cette philosophie, qui a aussi une composante platonicienne, et dont les historiens s'accordent à placer la naissance sous le règne de Charlemagne, eut pour premier initiateur Alcuin, dont la pensée s'était nourrie de saint Augustin et de Boèce. La scolastique s'appuya sur deux colonnes : la Bible et Aristote, du moins l'Aristote de l'Organon, car le Moyen âge n'aura qu'assez tardivement, et grâce, principalement, aux Arabes, la connaissance plus complète de la doctrine aristotélicienne, dans sa richesse et sa profondeur. Peut-être si, dès l'origine, elle avait eu de l'aristotélisme une notion moins étroite, aurait-elle évité la longue méprise qui a fait, malgré un tel labeur, sa stérilité : la méprise d'identifier la logique avec la métaphysique. Réalistes et
nominalistes.
« Les genres et les espèces sont d'une certaine manière des choses et d'une autre manière des conceptions, et en ce sens ils sont incorporels; mais, unis aux choses sensibles, ils subsistent dans ces choses et on les conçoit hors des corps comme subsistant par eux-mêmes. »Cette phrase obscure, non exempte d'ambiguïté, formulait la question relative à l'essence et au rôle des idées générales, c.-à-d. qu'elle énonçait la difficulté éternelle qui met aux prises les philosophes. Quelque gaucherie que les écoles du Moyen âge aient pu apporter à la résoudre, comment n'y pas reconnaître le constant objet sur lequel portent les méditations des penseurs? D'ailleurs, il semble que ce soit la nature elle-même qui, par le spectacle qu'elle offre de la permanence des types constitutifs dans l'inépuisable multiplicité des individus en qui ils se réalisent, nous mette en demeure de l'aborder. Cette difficulté, les principaux spéculatifs de la première ère de la scolastique la tranchèrent dans le sens platonicien ; c.-à-d. qu'ils hypostasièrent les notions générales, leur assignèrent. indépendamment des individus, l'objectivité. Telle est la réponse du Réalisme, qui trouve, dès le IXe siècle, un hardi métaphysicien pour la soutenir : Jean Sot Erigène et, deux siècles après, possède un protagoniste d'une autorité égale, dans un prélat qui demeure l'une des gloires de l'Église, saint Anselme. Au Réalisme, doctrine de la transcendance, allait s'opposer la philosophie inverse qui, ne reconnaissant d'objectivité qu'aux êtres individuels, réduisait les concepts généraux au rôle de simples vocables n'ayant par eux-mêmes d'autre réalité que celle des mots qui les constituent: ce fut le Nominalisme, dont le premier représentant d'envergure fut, au XIe siècle. Roscelin, disputeur consommé, qui prêta des formes saisissantes et paradoxales à une thèse qui fit grand scandale, thèse qui ne nous est guère connue que par les témoignages de ceux qui la combattirent. L'enseignement de Roscelin ne triompha point du reste, et le XIIe siècle s'ouvre sur une reprise du réalisme professé par un maître de renom, Guillaume de Champeaux, de qui les théories ne nous sont guère mieux connues que ne l'avaient été celles de Roscelin. Ce que surtout nous savons d'elles, c'est qu'elles furent impitoyablement battues en brèche par un brillant disciple de Guillaume de Champeaux, l'éloquent et l'entraînant Abélard, sans que, du reste, ce dernier ait montré plus d'indulgence pour les paradoxes de Roscelin. Aussi a-t-on prêté à Abélard une position philosophique intermédiaire à laquelle fut appliqué le nom peu clair de Conceptualisme. L'âge d'or de
la scolastique.
Le dernier âge de la scolastique n'en marque pas tout d'abord le déclin. Loin de là; un métaphysicien, d'une extraordinaire profondeur, se rencontre, dont l'esprit à la fois critique et constructif réforme la théologie naturelle, renouvelle le Réalisme, fait l'intelligible identique à l'être et semble avoir donné pour couronnement à ce haut Idéalisme une philosophie de la volonté : ce maître puissant fut Duns Scot qui laissa une longue lignée de disciples. Tout son génie cependant ne réussit pas à assurer au Réalisme le dernier mot. Une grande réaction Nominaliste va se produire qui dominera les dernières périodes du Moyen âge et pénétrera même la plupart des mystiques de la Renaissance; réaction amenée par Guillaume d'Occam, véritable précurseur de la philosophie criticiste, que l'on peut sans paradoxe et en dépit de la forme surannée, purement logique et dialectique de ses écrits, appeler le père de l'Empirisme anglais. Après Occam, le Nominalisme est à peu près partout en faveur, et la scolastique finissante ne connaît pas le réveil de ces idées de transcendance qui en avaient illustré l'origine. La philosophie
de la Renaissance.
L'aristotélisme perdant de son crédit et parmi ses partisans mêmes une sorte de schisme se produisant : d'une part les Averroïstes (Averroès), qui tendaient, par leur interprétation du maître grec, à faire s'évanouir la conscience de la personnalité et, d'autre part, les Alexandristes (Alexandre d'Aphrodisie), bien moins suspects à l'Église et ayant adopté de la doctrine aristotélicienne un sens beaucoup plus spiritualiste . Par contre, prédilection générale pour Platon et les Néo-platoniciens, philosophes précisément aimés pour avoir tenu que le monde des existences et celui des idées ne sont que le voile de l'éternelle et immuable unité; la philosophie entière devenue comme l'expression supérieure de la physique, renonçant aux constructions de concepts et s'efforçant de traduire la vie universelle dans son unité comme dans son expansion infinie; enfin alliance de la philosophie et de la science, alliance qui pour aucune des deux n'est onéreuse, car c'est la philosophie elle-même qui favorise l'affranchissement de la science à l'égard de la pure logique, préconise l'étude directe de la nature et, en particulier, le recours aux méthodes expérimentales. La philosophie de la Renaissance est ainsi remarquablement diverse et impersonnelle. On ne rencontre pas chez elle de puissantes personnalités métaphysiques, d'esprits spéculatifs comparables aux grands hommes de la scolastique. Fut-ce diplomatie? Fut-ce éblouissement irrésistible devant la beauté de la pensée antique? Toujours est-il que les maîtres de cet âge se flatteront de faire revivre telle ou telle secte grecque fameuse dans l'enseignement de laquelle il leur semblera retrouver leurs propres méditations. Nicolas de Cuse se réclame des Pythagoriciens et, après avoir déclaré que la raison humaine est inadéquate au réel, professe avec eux que, par le nombre et au-dessus du nombre par l'unité, se déploie la raison elle-même. Sceptique à la base, sa théorie aboutit à un monisme mystique. Au contraire, Pomponazzi demeure fidèle à Aristote qu'il interprète, habilement pour ses vues, dans un sens bien voisin de l'empirisme. Telesio, le fondateur de l'Académie de Cosenza, maître jadis de grande renommée, un des précurseurs de la philosophie naturelle, professa un hylozoïsme que ses disciples exagérèrent encore et qu'un Campanella poussera plus tard à son point extrême; or, lui aussi, Telesio adoptera pour patronner sa physique une école de l'antique Grèce : il choisira l'éléatisme. Quant à Platon, considérable sera le nombre de ses admirateurs passionnés : nous citerons seulement l'un des plus célèbres, François Patrizzi. Epicure a lui aussi ses disciples, et l'on verra l'héroïque Thomas More, dans son ingénieux roman socialiste, faire de la doctrine épicurienne la philosophie officielle de l'État « d'Utopie ». Sans doute la Renaissance compta des esprits vigoureux qui surent s'affranchir du servage même de l'admiration : par exemple, ce Giordano Bruno qui, se détachant même de tout credo ecclésiastique, audace qu'il expia par le martyre, se fit une conception hautement panthéiste de l'univers. Le plus grand de tous ces libres génies fut sans contredit Galilée, penseur ennemi de toute autorité en matière de philosophie et de science, attaché à peu près exclusivement aux problèmes du monde naturel, qui non seulement formula les règles de la méthode expérimentale, mais établit cette méthode à coups de découvertes. Le XVIIe siècle Bacon et Descartes.
La philosophie
anglaise au XVIIe siècle.
Hobbes.
Les
Platoniciens de Cambridge.
Locke.
La philosophie
française au XVIIe siècle.
La révolution cartésienne, que ne parviennent pas à refouler des résistances individuelles, celle du théologien empirique Gassendi, pas plus que celle des Péripatéticiensencore en crédit dans les écoles, s'étend sur le continent. Les universités du nord de l'Europe sont promptement gagnées. En France, les Jansénistes lui sont pour la plupart favorables. L'Angleterre elle-même n'est pas sans en ressentir l'influence. Les
Cartésianisme.
Le
Sensualisme.
Le XVIIIe siècle. Le XVIIe siècle, en dépit de Bacon, avait été le siècle de la métaphysique et du rationalisme constructif; le XVIIIe siècle, en dépit de Leibniz, sera celui de l'empirisme. La philosophie
française au XVIIIe siècle.
La philosophie
française au XVIIIe siècle.
La philosophie
allemande au XVIIIe siècle.
Leibniz.
Ni sur Dieu, ni sur l'âme, ni sur la matière, ni sur le monde Leibniz ne pense comme Descartes. Il nie le libre arbitre en l'humain et en Dieu. Il ramène la différence de nature à la différence de degré; donc il supprime entre les genres de substances toute distinction radicale. Enfin, il est bien près d'être évolutionniste. Descartes, lui, croiyait au progrès indéfini, non de la nature, mais de l'humain et de la science humaine. Leibniz n'est pas dualiste, et il n'entend pas être panthéiste. L'univers est conçu par lui comme une hiérarchie de monades, dont chacune absolument simple est représentatrice de toutes les autres, différentes d'elles, exclusivement par le degré, et dont la plus parfaite, celle qui occupe le sommet de la pyramide, est Dieu. Les théories de Leibniz, non sans subir d'importantes modifications dues à l'influence d'Aristote, sont organisées en un système compréhensif par Christian Wolf, dont les doctrines allaient prédominer longtemps en Allemagne. Enfin, de même que Locke avait été réfuté par Leibniz, le phénoménisme sceptique de Hume provoque l'immortel assaut de Kant. La
révolution kantienne.
Le XIXe siècle Au point de vue philosophique comme à beaucoup d'autres, le XIXe siècle semble pouvoir se diviser en deux périodes, dont la coupure plus ou moins brusque se produit, selon les pays, de 1830 à 1848, au moment où les doctrines positivistes, détrônent un peu partout les métaphysiques a prioristes, La première période avait été marquée par une réaction, entière ou partielle, contre le XVIIIe siècle; seule l'Allemagne semble y poursuivre un développement autonome. Les répliques
au XVIIIe siècle.
Selon Fichte (1762-1844), nous atteignons par la raison pratique le seul noumène, qui est le moi volontaire et libre; cette seule réalité du monde intérieur est aussi la suprême et seule réalité qui crée les choses : c'est le moi lui-même qui, pour se connaître, s'oppose un objet de connaissance, le non-moi, la nature. Mais Schelling (1775-1854), dans sa première philosophie, se demande de quel droit on ferait du moi l'absolu : c'est bien l'absolu qui, par un double mouvement de production, se manifeste dans ces séries parallèles de réalités qui sont la nature et l'esprit, mais il n'est lui-même ni nature ni esprit, ni moi ni non-moi; et ainsi, restant la source mystérieuse d'où tout sort et que rien n'épuise, il laisse place encore à toutes les effusions mystiques de la seconde philosophie de Schelling. Chez Hegel enfin (1770-1834), l'absolu perd tout caractère transcendant et mystique, pour devenir la raison immanente au monde, exprimée tout entière par l'univers réel, nature et esprit, et par suite tout entière intelligible : la création est vraiment alors un panlogisme; l'être se pose d'abord, puis, de par une nécessité interne, se nie lui-même, pour se concilier ensuite avec sa propre négation dans une synthèse supérieure; et tel est le rythme universel des choses, qui nous permet d'établir d'abord la généalogie des concepts-purs, puis de construire a priori la philosophie de la nature, et enfin la philosophie de l'esprit. De là, dans l'hégélianisme, le dédain ou l'oubli de l'expérience, que la pensée pure peut devancer ou suppléer; et l'optimisme et le fatalisme historiques, puisque, découvrant la raison logique de tout ce qui est, a été ou sera, il le légitime par lui-même en tant que nécessaire tout ensemble et rationnel. L'influence de la métaphysique hégélienne fut profonde et générale, et l'on peut la considérer comme triomphante jusqu'aux environs de 1830. Angleterre.
France.
Mais en même temps, avec un tout autre éclat apparent, la réaction contre le XVIIIe siècle semble triompher, sous une ferme intransigeante d'abord, avec l'école théocratique, et Chateaubriand, de Maistre, de Bonald; sous une forme plus mesurée et toute rationaliste et laïque, avec l'éclectisme : comme l'école écossaise, ce dernier prétend restaurer les vérités nécessaires ébranlées par les négations du XVIIIe siècle, grâce à une sage méthode empruntée aux sciences de la nature et qui, se fondant à la fois sur l'accord des grands penseurs de toutes les écoles et sur l'observation intime, s'élèverait à de prudentes inductions métaphysiques que le bon sens autorise. Sous l'influence de Hegel, l'éclectisme donna aussi une féconde impulsion aux études d'histoire de la philosophie, et ce fut par là peut-être qu'il servit le plus la pensée humaine; et il resta, sous la haute autorité de Cousin et de ses disciples, Jouffroy, P. Janet, Jules Simon, la philosophie officielle en France, jusque vers 1870, sans que même des penseurs plus originaux ou plus indépendants, comme Maine de Biran, le philosophe de « l'effort », ou à certains égards Lamennais, ou Ravaisson et Vacherot, eussent complètement répudié son timide spiritualisme. Mais depuis longtemps il avait perdu toute action réelle sur les esprits. Italie.
La philosophie
à l'âge positiviste.
Elle s'ouvre en Allemagne par une réaction contre Hegel. et ses prétentions de reconstruire la nature par les seules forces de la logique. Herbart (1776-1841) revient à la position kantienne, prétend s'appuyer sans cesse sur la science, et croit retrouver, en ruinant l'idéalisme, des réalités indépendantes de la pensée, à la fois multiples et absolues, inétendues et unes, intermédiaires par là entre l'atome des savants et la monade des leibniziens. Beneke et Lotze représentent des préoccupations analogues. Enfin Schopenhauer (1788-1860) affirme que l'essence des choses n'est rien moins que logique ou rationnelle, qu'elle est une tendance aveugle, un vouloir vivre, dont la penséemême, avec ses lois, ses types et ses idées, n'est qu'une forme secondaire et fugitive; et il en conclut la vanité de l'être et l'éternité de la douleur. Bien qu'écrite vers 1819, son oeuvre principale ne se répand qu'avec la deuxième et la troisième édition (1844 et 1859); mais alors elle fait école, avec von Hartmann par exemple, et c'est à elle qu'en peut encore rattacher l' «-aristocratisme » de Nietzsche qui, sous l'influence, il est vrai, des idées évolutionnistes, fait du sacrifice de la foule à l'élite, de la douleur du plus grand nombre nécessaire à la production du « surhomme », la loi même de la vie. En France le positivisme, bien que latent déjà dans tous les pays d'Europe et implicitement contenu dans la philosophie du XVIIIe siècle, vient se formuler et prendre un nom, pour rayonner ensuite sur le monde entier. De 1839 à 1842, dans son Cours de philosophie positive, Auguste Comte (1789-1857) déclare l'esprit humain inapte à la métaphysique; ignorant sa force et ses limites, l'humain tente d'abord d'expliquer les choses par des volontés analogues à la sienne, puis par des entités abstraites, et ce n'est que plus tard qu'il arrive à la phase positive, où il se contente de connaître les faits et leurs propriétés ou leur loi. Toutes les sciences tour à tour arrivent ou arriveront à ce dernier stade, et il est temps d'y amener la science sociale elle-même, la sociologie. La doctrine de Comte eut, après lui, pour représentants on France, Littré et, dans une certaine mesure, Taine et Renan. En Angleterre, le positivisme trouva sa seconde ou plutôt peut-être sa véritable et naturelle patrie : Stuart Mill, (1806-1875), Bain et leur école y appuyèrent leurs minutieuses et précises analyses de l'âme et de la pensée, dont ils continuent à voir la loi essentielle dans l'association des idées et des sentiments ils prétendent ainsi, par cette espèce de chimie mentale, expliquer l'origine des idées dites innées comme des sentiments prétendus moraux. A la même époque, la doctrine de Darwin (1809-82) sur l'origine des espèces, leurs variations et leurs transformations l'une dans l'autre, par la triple action du milieu, de l'hérédité et de la sélection, vient élargir à l'infini le champ des explications positives des choses humaines et sociales. Herbert Spencer, tout en reconnaissant qu'un fond inconnaissable subsiste dans les choses, restreint rigoureusement la connaissance au monde des phénomènes, et croit en trouver la loi suprême dans l'évolution, éternelle et nécessaire, qui, en transformant sans cesse la matière diffuse en matière intégrée, et l' homogène en hétérogène, crée tour à tour, par une différenciation croissante, les astres et les corps bruts, les formes vivantes et les formes sociales. De même en Allemagne, la tendance positiviste prend une importance de plus en plus grande à mesure que le pessimisme de Schopenhauer commence à paraître trop métaphysique encore. Il s'exprime, d'une part par le matérialisme pur, qui se rattache par Feuerbach à la gauche hégélienne et prétend bientôt, avec Haeckel, interpréter dans un sens exclusivement mécaniste l'évolutionnisme de Darwin : Moleschott et Büchner en sont les représentants les plus connus. D'autre part, on peut y rattacher encore les tentatives nouvelles pour étudier l'esprit et ses oeuvres selon les méthodes et avec les instruments de la science positive : c'est en Allemagne que prétendent se constituer en sciences indépendantes et la psychophysique avec Weber et Fechner, et la psychophysiologie avec Wundt; par là la vieille conception de la psychologie se trouve toute renouvelée; elle devient oeuvre de laboratoire, et cela, en Amérique avec W. James, comme en France avec Ribot, ou en Italie. Enfin, en Allemagne encore, les études sociales, nées de l'hégélianisme, prennent un caractère positif et «-matérialiste », lorsque Karl Marx, Engels et Lasalle, transformant le socialisme français, encore sentimental, en une doctrine à allure et prétentions scientifiques, veulent découvrir dans le phénomène économique la cause et l'origine de toutes les évolutions historiques. Même triomphe enfin du positivisme en Italie, que représentent R. Ardigo et son école, et même effort vers l'étude expérimentale de la nature humaine, soit par la psycho-physiologie, soit par la criminologie avec l'école de Lombroso, soit par la sociologie. La fin du XIXe
siècle.
A cette époque, l'évolutionnisme paraît en être souvent comme l'hypothèse directrice. Mais, d'autre part, il a semblé aussi se manifester, après 1870, une réaction nouvelle contre les excès du matérialisme ou les étroitesses du positivisme : la métaphysique renaît de ses cendres, mais avec une conscience plus nette aussi de son rôle et de sa puissance, fondée parfois sur les sciences, elle ne prétend qu'à l'expliquer et à les légitimer aux yeux de la raison. Peut-être est-ce en Allemagne que cette tendance est encore le moins visible; mais elle s'est manifestée en France avant la fin du second Empire par le néo-criticisme de Renouvier, dont l'idée centrale est celle du primat de la raison pratique, et un peu partout en Europe par une renaissance du dynamisme leibnizien d'un côté et de l'idéalisme de l'autre : On peut rattacher à cette dernière orientation l'école de Ravaisson et Lachelier en France et de Thomas Green en Angleterre. (G.L. et D.P.). Le XXe siècle Philosophie analytique.
Pragmatisme
Phénoménologie
et existentialisme.
Structuralisme
et post-structuralisme.
Michel Foucault analyse les relations entre pouvoir, savoir et discours dans Les Mots et les Choses (1966) et Surveiller et punir (1975). Jacques Derrida, initiateur du concept de déconstruction, critique les fondements de la métaphysique occidentale dans des oeuvres comme De la grammatologie (1967). Marxisme et École
de Francfort.
Philosophie politique
et éthique.
Féminisme et
philosophie du genre.
Philosophie de
l'esprit et sciences cognitives
Philosophie en
Afrique.
Des leaders comme Julius Nyerere ont développé des philosophies politiques basées sur les valeurs communautaires traditionnelles. Nyerere a promu l'Ujamaa ( = socialisme africain), qui mettait l'accent sur la coopération et la solidarité. Des penseurs comme Kwame Nkrumah et Ngũgĩ wa Thiong'o ont étudié les dynamiques postcoloniales, en s'interrogeant sur l'identité africaine et les chemins vers le développement autonome. Un courant ethnophilosophique est aussi apparu, représenté par des penseurs comme Placide Tempels, qui a tenté de systématiser et de formaliser les pensées traditionnelles africaines. Tempels, en particulier, a été controversé pour son approche de la "philosophie bantoue". Dans une perspective proche, une autre courant, initié par Henry Odera Oruka, a visé à identifier et documenter les pensées des sages africains traditionnels, en les reconnaissant comme des philosophes à part entière. Philosophie en
Asie.
En Chine, s'est développée une philosophie dominée par l'idéologie communiste, avec Mao Zedong jouant un rôle central dans l'élaboration d'une philosophie politique basée sur le marxisme-léninisme. Après la Révolution culturelle, la Chine a vu une ouverture aux idées occidentales. Des philosophes comme Li Zehou ont essayé de synthétiser la tradition confucéenne avec des concepts marxistes et des idées des Lumières. Au Japon, l'École de Kyoto, avec des figures comme Nishida Kitarō et Keiji Nishitani, a cherché à intégrer la philosophie occidentale avec des traditions bouddhistes et shintoïstes. Ce courant a eu une influence considérable sur la pensée japonaise contemporaine. Après la Seconde Guerre mondiale, des philosophes comme Watsuji Tetsurō ont réfléchi aux questions de l'identité japonaise, de la culture et de l'éthique dans un monde globalisé. Le XXIe siècle Depuis 2000, les défis mondiaux tels que le changement climatique, la montée des populismes, les crises économiques, les avancées en biotechnologie et intelligence artificielle, ainsi que les mouvements pour les droits sociaux et l'égalité influencent profondément la réflexion philosophique. La mondialisation et la digitalisation facilitent également une plus grande diffusion et hybridation des idées philosophiques. Philosophie analytique.
Philosophie continentale.
Philosophie politique
et éthique.
Les philosophes continent d'adresser les question posées par le post-colonialisme. Ils s'interrogent aussi sur les effets de la mondialisation. Des penseuses comme Oyeronke Oyewumi et Amina Mama travaillent sur les questions de genre et d'égalité, critiquant les structures patriarcales héritées du colonialisme et de la tradition. Des philosophes contemporains questionnent aussi les défis posés par la mondialisation, les migrations et les transformations économiques. Achille Mbembe, par exemple, analyse les questions de la postcolonie et des nouvelles formes de pouvoir et de résistance. Philosophie environnementale.
Philosophie de
la technologie.
Études de genre
et théories critiques.
Philosophie de
l'esprit et neurosciences.
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