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L'Empire Ottoman au XVIe siècle
Le siècle de Soliman
La Turquie engagée dès le XVe siècle dans une politique de conquêtes au nom de l'Islam, grandit encore sous Sélim I, qui réduisit en provinces ottomanes la Syrie, la Palestine, l'Égypte (1517), prit la Mecque et acquit Alger (1520). Son successeur, Soliman, après un début de règne inspiré par un apparent désir de justice, reprit les guerres, et ajouta à l'Empire, en Asie, l'Aldjézireh (Mésopotamie) et partie de l'Arménie, du Kurdistan, de l'Arabie; en Europe, partie de la Hongrie, la Transylvanie, la Slavonie, la Moldavie; il enleva Rhodes aux Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem (1522), après un siège mémorable, vint camper devant Vienne (1529). Vienne devient la borne fatale des progrès du croissant en Europe. L'Europe assistera alors au duel gigantesque des deux souverains, qui semblent se partager l'empire du monde, Soliman et Charles-Quint. Une occasion saisie par François Ier, qui conclut avec Soliman une ligue offensive et défensive contre Charles-Quint et la Hongrie, ainsi que divers traités (1535) destinés notamment à faciliter les échanges commerciaux (Les Capitulations). 

Soliman ajouta encore à son empire Tunis (1534) et Tripoli (1551), et de nouveaux succès en Perse (Iran) de la part de ses armées, le rendirent également maître du Schirwan et de la Géorgie (1549-1550). Soliman crut devoir reprendre les hostilités en Hongrie : il y eut dix ans de guerre, pendant lesquelles il prit Lippa, Temeswar, Veszprim; ayant échoué devant Agria, il consentit à conclure la paix. En 1565, Dragut, son amiral, échouait dans sa tentative de s'emparer de l'île de Malte; mais, l'année suivante, il se rendait maître de l'île de Chio. Après lui,  Sélim II enleva Chypre aux Vénitiens (1570), mais l'année suivante la marine turque était anéantie à la bataille de Lépante (1571). C'est de cet événement que date le début du déclin de l'empire ottoman. 

Dates clés :
1517 - Conquête de l'Égypte.

1520 - Prise d'Alger.

1529 - Siège de Vienne.

1571 - Bataille navale de Lépante.

Sélim Ier

Selim Ier, surnommé Yavouz (= le Cruel), né à Amassia en 1467, était le fils de Bayézid IIIl. Il fut un hmme de guerre sans pitié pour ses proches parents et pour ses ministres; il aimait les exercices violents, passait les journées à chasser, donnait peu d'heures au sommeil, mais aussi, suivant un paradoxe que cultivèrent volontiers les sultans ottomans, il aimait et protégeait arts. Il lisait la nuit des ouvrages d'histoire ou des poésies persanes et il a même laissé un recueil d'odes composées par lui dans cette dernière langue. Avant cela, Sélim fut, du vivant de son père, chargé du gouvernement de la province de Trébizonde, et profita de la désignation de son frère Ahmed comme héritier présomptif pour se rendre à Andrinople avec une suite nombreuse solliciter un gouvernement en Europe (1511). Son père, qui lui avait interdit de venir le trouver, céda à ses menaces, et lui donna la province de Semendria; mais Sélim n'en avait pas encore pris possession qu'il marcha contre les troupes de Bayézid et fut complètement défait près de Tchorlou; il se réfugia auprès du khan des Tatars de Crimée. La faveur des janissaires ramena Sélim à Constantinople et obligea son père à abdiquer (25 avril 1512).

Son règne débuta par le massacre de cinq de ses neveux (en particulier d'Ala-ed-din qui s'était emparé de Brousse) et par la défaite de ses deux frères, Korkoud et Ahmed (1513). Korkoud, qui fut chassé de Magnésie et Ahmed, qui fut défait à Yeni-Chéhir, près de Brousse. Comme Chah-Ismaïl, fondateur de la dynastie des Çatavides (Séfévis) en Perse, avait pris le parti d'Ahmed et accueilli ses fils Sélim, pour entraver l'influence de sa puissance et couper court à l'envahissement des doctrines chiites, officiellement professées en Perse;  fit égorger ou emprisonner pour la vie 40 000 chiites qui habitaient ses Etats. Il marcha ensuite contre la Perse à la tête d'une armée de 140 000 hommes et 60 000 chameaux qu'il passa en revue à Sivas. Il atteignit Ismaïl dans la plaine de Tchaldyran (23 août 1514) et le défit complètement grâce à son artillerie; le camp tout entier, dans lequel on trouva le trône orné de perles qui sera conservé comme trophée dans le Trésor impérial, tomba aux mains des Ottomans; ceux-ci entrèrent à Tabriz, mais n'y séjournèrent que huit jours et se retirèrent, contraints par les murmures des janissaires qui convainquirent Sélim de retourner en Asie Mineure.

En 1515, il conquit Koumakh, battit les princes de la dynastie de Zou'I-Kadrie, punit les janissaires indisciplinés dans la personne de plusieurs de leurs chefs, réforma leur hiérarchie, créa la charge d'agha et celle de kulkiaya, fit établir un arsenal pour la marine sur le conseil de son vizir, Piri pacha, pendant que le général Biyklu-Mohammed réunissait à l'empire les provinces de Diarbékir, d'Orfa (Urfa) et de Mossoul. Au total,  vingt-cinq beys du Kurdistan se soumirent à son autorité.

En 1516, Kansou el-Ghauri, sultan d'Égypte, voulant tirer vengeance du traitement ignominieux réservé à son ambassadeur, marcha à la rencontre des Ottomans et fut complètement défait à Merdj-Dâbik (24 août), près d'Alep. Alep et toute la Syrie passèrent au pouvoir de Sélim, qui passa l'hiver à Damas, d'où il fit envoyer une délégation auprès du sultan mamelouk Touman Bey pour lui offrir la paix. Mais le meurtre de ses deux ambassadeurs fit échouer les pourparlers, et la bataille de Ridania, sous les murs du Caire (22 janvier 1517) fit passer l'Égypte au pouvoir des Turcs. L'énergique résistance du brave Touman Bey ne différa que de quelques ,jours l'occupation de la nouvelle province de l'Empire. Sélim s'empara du Caire et en fit massacrer  les habitants qui s'y révoltèrent. A la suite de cette conquête, le chérif de la Mecque, Mohammed Abou'l Bérékat, lui fit remettre les clefs des deux villes saintes Médine et la Mecque dont il devint le protecteur.

Après avoir encore combattu en Asie Mineure le novateur Djélali (1519), Sélim s'apprêtait à partir en guerre contre les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem établis dans l'île de Rhodes lorsqu'il mourut d'un bubon à l'aine, sur la route de Constantinople à Andrinople (22 septembre 1520), âgé de cinquante-quatre ans. 

Soliman

Surnommé le Magnifique et le Législateur, appelé parfois Soliman II, Soliman (Suleïman) a été appelé Soliman Ier par les historiographes ottomans qui ne considéraient le fils de Bayézid Ier, son homonyme, que comme un prétendant. Né en 1495, il était fils de Sélim Ier et gouvernait la Magnésie lorsque la mort de son père le rappela brusquement à Constantinople (1520) où il fit élever à sa mémoire la mosquée Sélimyié. Son avénement  fut le signal de la révolte du gouverneur de la Syrie, l'ancien bey mamelouk Djanberdi-Ghazali, qui échoua devant Alep, et fut tué près de Damas (1521). Délivré de tout souci de ce côté, Suleïman déclara la guerre à la Hongrie pour venger la mort de son ambassadeur Behram-Tchaouch. Prenant en personne la direction des opérations, il conquit Sabacz (8 juillet) et Belgrade (29 août). Il assiégea ensuite Rhodes à la tête de 100 000 hommes et d'une flotte de 300 voiles et en obtint la capitulation au bout de cinq mois (25 décembre 1522). L'affaire à peine réglée, il eut encore à lutter contre son ministre Ahmed-pacha qui, nommé au gouvernement de l'Égypte, voulut s'y rendre indépendant, mais fut trahi par Mohammed-bey et livré par les Bédouins chez lesquels il s'était réfugié (1523). 

En 1526, la guerre reprit avec la Hongrie; Soliman défit complètement le roi Louis près du bourg de Mohacz. Le roi Louis étant mort, il s'empara d'un butin immense. Le trésor royal et la bibliothèque de Mathias Corvin tombèrent entre les mains des vainqueurs, entrés par capitulation dans Bude (10 septembre). Soliman y établit pour roi de Hongrie un homme de paille, Jean Zapolya. Cependant, ces succès considérables n'empêchèrent pas des troubles de se produire en Asie Mineure, où les vexations du fisc amenèrent au soulèvement des Turcomans du Itch-Il, puis la révolte de la Karamanie, où un derviche nommé Kalender-oghlou, descendant du chéikh Hadji-Bektach, qui avait réuni, autour de lui une foule de moines mendiants et battu à Tokat les troupes impériales, fut enfin défait et pris par le grand vizir Ibrahim en personne.

La défaite de Zapolya (1528), vaincu par le frère de Charles-Quint, Ferdinand, ramena les Ottomans en Hongrie; Bude fut prise de nouveau (1529), Vienne assiégée, mais en vain; voyant ses soldats découragés par l'héroïque défense des Impériaux, Soliman leva le siège (14 octobre). En 1532, il rentra en campagne, envahit la Styrie et la dévasta. Il arriva devant Graz et ne put s'en emparer, non plus que de Marbourg sur la Drave; aussi il consentit bientôt à une trêve avec Ferdinand (1533). Le sultan se sentit alors libre de songer à la guerre de Perse, car il voulait enlever Bagdad à cette puissance. Pendant que son grand vizir prenait Tabriz (13 juillet 1534), Soliman marchait sur la capitale des califes, où il entra sans difficulté (31 décembre), le gouverneur persan s'étant enfui avec toutes ses troupes. Le grand vizir Ibrahim étant devenu trop puissant, Soliman, qui craignait une entreprise de son commensal et favori, le fit étrangler subitement (5 mars 1536).
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Portrait de Soliman le Magnifique.
Soliman II le Magnifique.

Au retour, fut conclu le premier traité de commerce avec la France, et cette même année 1536, le corsaire Khaïr-ed-dîn, surnommé Barberousse, devenu amiral de la flotte, enleva Corfou, qui avait été prise par Andrea Doria, et mit fin, par l'occupation de Tunis,  où régnait Mouley-Hassan, à la dynastie des Beni-Hafs; seulement cette dernière conquête ne dura que quelques mois. 

Charles-Quint rétablit bientôt le prince détrôné en laissant une garnison espagnole à la Goulette. En 1537, Soliman fit une campagne peu heureuse dans l'Adriatique; Khaïr-eddin ravagea les eûtes de la Pouille, mais assiégea en vain Corfou; Nauplie résista également; les Ottomans ne réussirent qu'à occuper une dizaine d'îles de l'archipel appartenant aux Vénitiens, telles que Paros, Tipos, Yaxos. Le prince de Moldavie, Rarech, ayant donné des motifs de plainte à la Porte, Soliman envahit ses États, prit Jassy et installa à la place de Rarech son frère Étienne.  L'année suivante, Soliman envoya une flotte sur les cotes de l'Arabie, sous le commandement de Khadim-Suleïman-pacha, gouverneur d'Égypte; cette armée navale envahit le territoire d'Aden et, poussant jusque sur les cotes de l'Inde, enleva aux Portugais Din pour la rendre à Béhadir-chah, prince du Guzerat. 

En 1541 reprit la guerre contre l'Autriche. Profitant de la mort de Zapolya, et tout en promettant de rendre le royaume de Hongrie à son fils Sigismond dès qu'il aurait atteint sa majorité, Soliman annexa Bude (2 septembre) et Gran. Le gouverneur de l'Égypte, Khadim-Suléïman Pacha, équipa une flotte de 70 voiles qui enleva aux Portugais Diu, dans le Goudjérat. Khaïr-ed-dîn s'empara du château de Messine, rejoignit à Marseille la flotte française du duc d'Enghien pour aller, de concert, prendre Nice (20 août 1543). D'un autre côté, les lieutenants du sultan reconquéraient les villes de Hongrie tombées au pouvoir de Ferdinand (1544), campagne qui se termina par une trêve de cinq ans (19 juin 1547). 

Les gurres se porsuivront encore sur tous les fronts pendant près de dix ans. Sous le prétexte de défendre les droits du prince Séfévi Elkas-Mirza, Suleïman recommença la guerre avec la Perse et prit Van  et Tabriz (1548). La Hongrie ne resta pas longtemps tranquille : le beylerbey Mohammed prit plusieurs châteaux, mais échoua devant Temesvar (1551), tandis que le Persan Oulama capitulait à Lippa (5 décembre); Szegedin, surprise et pillée par les Impériaux, fut reprise (1552), Temesvar fut conquise par le vizir Ahmed-pacha; son gouverneur, Losonczy, ne voulut pas survivre à sa défaite. D'autres généraux prirent villes et châteaux, mais échouèrent devant Erlau (Éger), dont Ahmed-pacha dut lever, le siège (18 octobre). Après des alternatives de succès et de revers, la paix avait été signée avec la Perse (29 mai 1555). Le grand-amiral Pialé, qui avait succédé à Barberousse, conquit l'île de Djerba en Tunisie (1564) mais échoua complètement devant Malte (1565).

Soliman voulut encore diriger en personne le siège de Szigeth; sa marche avait été pénible à cause de son grand âge (soixante-quatorze ans); il expira le 5 septembre 1566. Sa mort resta cachée pendant trois semaines; grâce à ce délai, ses ministres purent pousser avec vigueur le siège de la ville, s'en emparer (8 septembre) et permettre à son fils Sélim, d'accourir de Kutahia à Istanbul pour son avènement  (24 septembre ). Le règne de Suleïman aura marqué le point culminant de la puissance ottomane, mais avec lui, le régime commence à se miner de l'intérieur. Les sultans, après lui, de plus en plus s'isolés; ignoreront de plus en plus le monde extérieur, et, livrés aux intrigues du palais et du harem, laisseront les charges du pouvoir au grand vizir. Les successions devindront incertaines, dépendant des caprices des ulémas et des janissaires. Dès cette époque aussi, est déjà en place le système déplorable de la vénalité des charges publiques, introduit dans les moeurs publiques par le grand vizir Roustèm-pacha, créature de la sultane Khourrèm (Roxelane). Il produira tout son effet sous ses successeurs et amenera l'inexorable décadence de l'empire ottoman.
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La part de lumière

Soliman fut aussi un grand constructeur. Il fit élever, à Constantinople / Istanbul, la belle et grande mosquée qui porte son nom (Suléimanyé), chef-d'oeuvre de l'architecture ottomane, dérivé du type de Sainte-Sophie, celle de son père Sélim, celle du prince Djéhanquir, à Fondoukli, celles des sultanes Mihrimah et Khasséki, l'aqueduc des Quarante-Fontaines; il orna de somptueux mausolées les tombeaux du grand imam Abou-Hanifa et du chéikh Abd-el Kader Guilani, à Bagdad, du fondateur de l'ordre des derviches tourneurs Djélal-eddin Roumi, à Konya

Il se livrait par ailleurs à la composition littéraire et publia des oeuvres poétiques sous le pseudonyme de Mouhibbi; mais sa gloire dans cet ordre d'idées fut vite effacée par celle du grand poète lyrique Baki et même par celles des poètes d'un rang relativement secondaire, tels que Khiali, Fouzouli, Fikri et Lamiï. 

Il avait un esprit essentiellement organisateur, et ce sont les lois et règlements édifiés sous son règne qui lui valurent le titre de kanouri (législateur) il établit des règles pour l'avancement dans le corps hiérarchique de l'Uléma, créa trois classes de janissaires (en activité, vétérans, invalides), réforma les abus qui s'étaient glissés dans le régime de la cavalerie feudataire (timar et ziamet), rendit des ordonnances classant définitivement les diverses sortes de propriétés territoriales, en fondant ses décisions sur les fetvas (fatwas) rendus par le chéikh ul-Islam Abou'-s-Sooûd; ces ordonnances, réunies en un corpus par le defterdar Mohammed Tchélébi l'année même de la mort du sultan, forment le Kanoun-Nâmé (= code des règlements). Il divisa le territoire en 24 gouvernements comprennant 150 sandjaks. 

Sélim II

Sélim, surnommé Mest (= l'Ivrogne), fils du sultan Soliman, était né en 1524. Il était chargé du gouvernement de Kutahia lorsque son père mourut, le jour même de la prise de Szigeth (5 septembre 1566). Prévenu par un courrier, il se rendit en hâte à Constantinople où personne ne l'attendait; il rejoignit l'armée de Hongrie à Belgrade et la ramena dans la capitale où il fut contraint, à la suite d'une sédition des janissaires, de leur donner une gratification malgré la pénurie da trésor. II garda comme grand vizir Mohammed Sokolli que lui avait légué Soliman. II conclut avec Maximilien, empereur d'Allemagne, une trêve de huit ans (17 février 1568), envoya en 1569 Mahmoud bey demander à Charles IX, roi de France, la main de sa soeur marguerite pour le prince Sigismond de Transylvanie, et un autre ambassadeur, Ibrahim, pour porter le traité de commerce qui venait d'être conclu avec Claude du Bourg. 

Le début du règne de Sélim II fut surtout marqué par la conquête du Yémen sur Moutahhar, qui appartenait à la secte hérétique des Zéïdis ou Zéilites (1569) et avait pris le titre de calife; la prise de Sanaa par Sinan Pacha et la reddition du château de Kaukéhan (18 mai 1570) obligèrent Moutahhar à reconnaître la suzeraineté de la Porte.

L'île de Chypre fut enlevée aux Vénitiens par le sérasker Lala-Moustafa et l'amiral Pialé. En 1571, les sièges de Nicosie et de Famagouste, placé sous le commandement de Bragadino,  furent terribles.  Mais la flotte ottomane fut entièrement détruite à Lépante par les forces combinées de l'Espagne, de Venise et des États du pape, commandées par Don Juan d'Autriche (7 octobre 1571).
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La bataille de Lépante

Même si le déclin de l'empire Ottoman ne s'amorcera véritablement qu'à partir du XVIIe siècle, la bataille de Lépante, en mettant fin au prestige des armes ottomanes, qui perdirent la supériorité sur mer, en est déjà la préfiguration. C'est dès l'aube ensoleillée du 7 octobre 1571, au large du cap Schrophia, entre Lépante et Ithaque, qu'elle fut livrée. La flotte chrétienne équipée par l'Espagne, le pape Pie V et Venise, commandée par don Juan d'Autriche, comptait 250 navires montés par Antonio Colonna, Andrea Doria, Barberigo, Sch. Veniero, etc. Côté turc, le capoudan-pacha Mouezzin-Zadé-Ali en comptait un nombre beaucoup plus grand; il attendit l'attaque le long de la côte de Morée; on se battit avec acharnement, à l'abordage : la mort du capoudan-pacha et la prise de son vaisseau décidèrent la victoire des alliés; ils perdirent 15 galères et 8000 hommes et eurent quantité de blessés, parmi lesquels le futur auteur de Don Quichotte, Cervantès, qui perdit un bras. Mais il n'échappa que 40 galères musulmanes, 30 000 Turcs périrent dans ce carnage. 4 500 esclaves chrétiens attachés à la chiourme furent délivrés. L'effet moral de ce succès fut immense chez les Chrétiens, même si, concrètement, les effets immédiats furent minimes. Lépante fut repris aux Turcs qui ne l'enlevèrent tout à fait aux Vénitiens qu'en 1699. Le 27 mars 1829, les Grecs en prirent possession.
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 Lépante a été la dernière bataille navale impliquant des galères à rames.

Sélim signa  finalement  la paix avec Venise (7 mars 1573) et reprit Tunis et la Goulette sur les Espagnols (1574). Ayant été saisi par l'humidité des murs en visitant une salle de bains qu'il faisait construire dans son palais, il but un flacon de vin de Chypre, pour lequel il avait un goût immodéré, et tomba; pris d'une fièvre violente, il mourut à cinquante ans (12 décembre 1574). Les succès de ce prince incapable sont dus au grand vizir Mohammed Sokolli, lequel continua, au début du règne suivant, d'être le vrai maître de l'Empire jusqu'en 1579, date à laquelle il fut assassiné sur l'ordre du sultan en titre Mourad III.

Mourad III
Fils aîné et successeur de Sélim lIMourad était né en 1546. Parvenu au trône dès 1574, il fit d'abord périr ses cinq frères, renouvela les traités avec les puissances européennes, puis se débarrassa comme on vient de le dire su fameux grand vizir Mohammed Sokolli, qui était depuis quatorze ans le vrai chef de l'empire. Il se plongea ensuite dans les plaisirs du harem, surtout préoccupé d'amasser des trésors. Se seront donc ses lieutenants qui menèrent les campagnes militaires qui marqu-rent son règne. Ceux -ci soumirent les Maronites du Liban, le khan rebelle de Crimée, et soutinrent la grande guerre de Perse (1576-90). Cette entreprise conduisit les troupes ottomanes jusqu'en Géorgie; une bataille acharnée qui dura pendant toute une nuit porte le nom de bataille des torches (1583). Osman Pacha, nommé grand vizir et généralissime, envahit une partie de l'Azerbaïdjan, avec l'appui des tribus nomades d'origine turque établies sur le territoire persan; la prise de Ghendja décida le chah à conclure une paix qui laissait aux Ottomans Tabriz et le Chirvan (1590).

L'altération des monnaies provoqua une insurrection des janissaires qui, pour avoir obtenu l'exécution du trésorier et du commandant militaire, leur inspira la plus grande confiance en eux-mêmes et les convainquit de l'étendue de leur pouvoir; aussi, à partir de ce moment, la désorganisation se met dans l'Empire, et des révoltes continuelles éclatent. Pour occuper les troupes, on reprit donc la guerre avec la Hongrie, mais les armes ottomanes n'éprouvèrent que des désastres. Le gouverneur de Bosnie, Hassan, fut battu et tué devant Sissek, sur la Koulpa, le pacha de Bude battu à Stuhlveissenburg; le grand vizir Sinan échoua devant Komoru; la détection des voïvodes de Valachie et de Moldavie et de Transylvanie compléta l'échec des Turcs dont le règne de Mourad III commença la décadence. 

Le sultan mourut de mélancolie le 16 janvier 1595. Sous son règne, l'ambassadeur Jacques de Germiny avait obtenu le renouvellement des capitulations avec la France (1581). (Cl. Huart / A.-M. B.).



En librairie - André Clot, Soliman le Magnifique, Fayard, 1983. - Willy Sperco, Roxelane, épouse de soliman le magnifique, Nouvelles éditions latines. - Robert Mantran, Istanbul au temps de Soliman le Magnifique, Hachette, 1994.

Frédéric Tinquely, L'Ecriture du Levant à la Renaissance, enquête sur les voyageurs français dans l'empire de Soliman le Magnifique, Droz, 2000.

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