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Les départements |
Le département
est une division administrative de la France
créée à la Révolution.
Aussitôt que l'Assemblée
constituante de 1789 se fut
constituée, elle reconnut, à une immense majorité,
la nécessité de briser le cadre administratif de la monarchie,
afin d'assurer la perpétuité de son oeuvre. Dès le
7 septembre Sieyès avait réclamé
la formation d'un comité chargé de présenter le plus
tôt possible à l'assemblée un plan de municipalités
et de provinces « tel qu'on puisse espérer de ne pas voir
le royaume se déchirer en une multitude de petits Etats sous forme
républicaine et qu'au contraire la
France puisse former un seul tout soumis uniformément dans toutes
ses parties à une législation et à une administration
communes ».
Depuis longtemps d'ailleurs les publicistes et les administrateurs les plus compétents désiraient une meilleure division territoriale du royaume, toutes celles qui existaient alors étant excessivement inégales et présentant une confusion de divisions très embarrassante. Le cartographe Robert de Hesseln avait même imaginé en 1786 tout un plan qui fut par la suite presque exactement suivi. L'époque était essentiellement favorable à la répression des tendances séparatistes des provinces et à l'organisation d'une centralisation puissante. Le comité de constitution de l'Assemblée nationale reçut donc la délicate mission d'arrêter un plan de division générale du royaume et il apporta une grande activité dans l'accomplissement de sa tâche. Le 4 novembre 1789, Thouret lisait un rapport étendu dans lequel, au nom du comité de constitution, il proposait avec une grande rigueur d'argumentation de partager la France en quatre-vingts divisions nouvelles, ayant chacune une étendue de 324 lieues carrées environ. Chacun de ces départements était subdivisé en neuf districts de commune qui se fractionnaient encore chacun en neuf cantons. L'étendue de 324 lieues était considérée comme une moyenne heureuse, convenant à la fois à des districts d'élection directe et à des districts d'administration, et qui pourrait convenir par la suite pour réunir dans les mêmes divisions l'exercice des autres pouvoirs publics. En somme, on s'était appliqué à innover de manière à ne pas froisser inutilement les amours-propres provinciaux et, rejetant telle ou telle division de territoire déjà existante, on avait cherché une division de superficie assez réduite pour que l'administration chargée d'en surveiller les intérêts pût le faire avec promptitude et facilité, et des subdivisions point trop multipliées afin que trop de degrés entre la communauté de village et l'Assemblée nationale ne pussent embarrasser ou du moins retarder la marche des affaires. La discussion sur les propositions du comité fut très ardue et très approfondie : on lui reprochait surtout de diviser l'espace et non la population. Un grand nombre de projets surgirent. Verdet voulait qu'on divisât la France d'après la population, en sept cent vingt-cinq communes, chaque commune en dix-huit municipalités et que chaque province conservât ses anciennes limites, réunît en une ou plusieurs assemblées administratives supérieures toutes les communes de son ressort. Mirabeau rejetait une division mathématique, presque idéale, et dont il considérait l'exécution comme impraticable. Au lieu des quatre-vingts départements, sept cent vingt districts et six mille quatre cent quatre-vingts cantons du comité, il proposait cent vingt départements supprimant toutes les autres subdivisions intermédiaires. On eût communiqué directement des villes et villages an chef-lieu du département et de chaque département au pouvoir exécutif et à l'Assemblée nationale. Bengy de Puyvallée ne voulait que soixante-dix départements inégaux en superficie, mais égaux en population. Chaque département serait le siège d'une assemblée provinciale, divisée en dix districts et chaque district n'aurait d'autre division que celle des villes et des paroisses de campagne de sa circonscription. Barrère proposait d'établir deux sortes de municipalités, les unes secondaires et les autres principales, auxquelles les secondaires ressortiraient pour certains objets. Aubry du Bochet partageait le territoire en cent dix départements dont chacun pouvait former une assemblée provinciale, un siège épiscopal et une ou plusieurs cours de justice équivalentes aux présidiaux. En fin de compte, l'Assemblée constituante adopta le projet du comité le 11 novembre 1789, décréta que le nombre des départements serait de soixante-quinze à quatre-vingt-cinq et laissa au comité le soin de déterminer le chef-lieu de chaque département, la circonscription des territoires, en lui enjoignant de respecter les localités, les frontières, les provinces et jusqu'aux répugnances et aux habitudes morales des habitants. Il fallut à peu près trois mois au comité de constitution pour venir à bout de ce travail ardu. La loi du 22 décembre 1789 décida
que chaque département serait divisé en districts, chaque
district en cantons d'environ 4 lieues carrées. Au chef-lieu du
département, il était établi une assemblée
administrative supérieure sous le titre d'administration du département;
au chef-lieu du district une assemblée administrative inférieure
sous le titre d'administration de district. De plus, il y avait une municipalité
en chaque ville, bourg, paroisse ou communauté de campagne. Le département
était une division formée aussi bien pour la représentation
que pour l'administration.
Ces fonctionnaires étaient nommés pour quatre ans et rééligibles après l'intervalle de quatre autres années. Les autres membres des administrations départementales étaient renouvelables par moitié tous les deux ans. Le gouvernement n'avait pas le droit de les révoquer. Ces administrations étaient chargées de l'assiette, de la répartition, de la perception de l'impôt et du paiement des dépenses, sous l'autorité du pouvoir législatif; de l'assistance publique, des encouragements à l'agriculture, à l'industrie et au commerce, de la gestion des forêts, de la viabilité et des travaux publics, de l'organisation et de l'emploi des milices et gardes nationales, etc., sous l'autorité du pouvoir exécutif. Les municipalités furent administrées par un maire, un corps municipal (de trois membres à vingt et un), un conseil général de la commune (composé du corps municipal et de notables en nombre double), un procureur de la commune assisté dans les grands centres d'un substitut du procureur, un secrétaire greffier et un trésorier. Le décret du 26 février 1790 établit quatre-vingt-trois départements copiés en général presque exactement sur les diocèses de la France l'avant 1789. Par suite, ils furent comme les évêchés sur lesquels on les calquait, peu ou point homogènes et « réunirent des pays différents de moeurs et d'histoire, des climats divers, des bassins divergents, des sols disparates » (Reclus). Ils reçurent le nom des principaux fleuves; rivières ou montagnes enfermés dans les limites factices qu'on leur imposa. Un grand nombre eurent des noms de rivière, plusieurs des noms de monts ou de plateaux (Ardennes, Lozère, Puy-de-Dôme, Côte-d'Or, etc.); deux, des noms suggérés par leur situation (Finistère, Nord); cinq, des noms qui rappellent leur proximité de la mer ou des côtes (Pas-de- Calais, Calvados, Manche, Morbihan, Côtes-du-Nord), un seul, les Landes, porta un nom de région. Ce qui formera à peu près ensuite le département de la Seine s'appela d'abord le département de Paris. Sans rien innover, au fond, à ce régime, la Convention ne pouvant obtenir des autorités locales auxquelles la loi avait assuré une indépendance presque complète du pouvoir central, la levée régulière de l'impôt et le recrutement de l'armée, fut obligée de recourir à des mesures de rigueur et d'exception. Dans chaque commune, elle installa (décret du 21 mars 1793) un comité de surveillance qui fut ensuite le comité révolutionnaire. Par la loi du 4 décembre 1793, elle supprima les procureurs de commune et de district, et les remplaça par des agents nationaux de commune et de district qui furent chargés de requérir et de poursuivre l'exécution des lois ainsi que de dénoncer les négligences apportées dans cette exécution. Plus d'élection pour ces fonctionnaires : ils sont nommés et révoqués par la Convention qui supprime encore les conseils généraux de département et les procureurs généraux syndics. Les directoires furent conservés, mais chaque membre dut les présider à tour de rôle. Les représentants en mission, comme autrefois les intendants, furent chargés du contrôle général; ils disposèrent: de l'armée et des tribunaux. La Constitution de l'an III fit disparaître les administrations de district et jusqu'aux districts eux-mêmes. Il ne resta plus pour administrer le département; qu'un directoire de cinq membres renouvelable par cinquième tous les ans. Les quarante et une mille communes de France furent réduites à cinq mille environ : on divisa les grandes, on groupa les petites, on conserva telles quelles les moyennes. Les municipalités furent administrées par des officiers municipaux (jusqu'à cinq mille habitants); celles qui n'avaient pas au moins cinq mille habitants furent groupées de manière à former une municipalité de canton, administrée par des agents municipaux nommés par chacune de ces communes. Les maires n'existaient plus, ils étaient remplacés par des officiers ou agents municipaux, que le gouvernement pouvait suspendre ou destituer et qu'il faisait surveiller par un commissaire chargé de requérir l'exécution des lois. Pendant cette période, la division territoriale fut remaniée. Le Comtat-Venaissin, réuni à la France le 14 septembre 1791, fit d'abord partie du département des Bouches-du-Rhône, puis il en fut séparé le 25 juin 1793 et forma le département du Vaucluse. Le département de Rhône-et-Loire fut divisé le 19 novembre 1793 en deux départements, ceux du Rhône et de la Loire. La Corse fut partagée le 1er juillet 1793 en deux départements, Golo et Liamone. La Savoie, réunie à la France le 27 novembre 1792, forma le département du Mont-Blanc. Le comté de Nice (31 janvier 1793) forma celui des Alpes-Maritimes; l'évêché de Bâle (23 mars 1793) celui du Mont-Terrible. Le traité du 27 floréal an III donna lieu à la création des départements de la Roer, du Rhin-et-Moselle, du Mont-Tonnerre, de la Sarre. La Belgique fournit le 9 vendémiaire an IV les départements de la Dyle, de l'Escaut, de la Lys, de Jemmapes, des Forêts, de Sambre-et-Meuse, de l'Ourthe, de la Meuse-Inférieure, des Deux-Nèthes. La Suisse fournit le département du Léman (7 avril 1798). L'Italie, ceux des Apennins, de la Doire, de Gênes, de Marengo, de Montenotte, du Pô, du Tanaro, de la Sesia, de la Stura, du Taro, de l'Arno, de la Méditerranée, de l'Ombrone. Le Consulat et l'Empire apportèrent dans cette organisation des changements administratifs et territoriaux très considérables. La loi du 28 pluviôse an VIII supprima les municipalités de canton, rétablit les anciennes communes, divisa le département non plus en districts, mais en arrondissements. Dans chaque département il y eut un préfet (fonctionnaire exécutif) et un conseil général (assemblée délibérante); dans chaque arrondissement, un sous-préfet et un conseil d'arrondissement; dans chaque commune, un maire (assisté d'un ou plusieurs adjoints) et un conseil municipal. Le préfet et le sous-préfet étaient uniquement les agents du gouvernement, le maire représentait le pouvoir exécutif de la commune et en même temps l'agent du pouvoir exécutif central. Le préfet était assisté d'un conseil de préfecture chargé de la justice administrative. Tous les fonctionnairesdépartementaux étaient nommés par le gouvernement. Paris était soumis à un régime exceptionnel. Il était divisé en douze municipalités avant chacune un maire et des adjoints et un commissaire de police. Les douze maires étaient placés sous l'autorité du préfet de la Seine, les douze commissaires sous les ordres du préfet de police. Pas de conseil municipal; le conseil général de la Seine en tenait lieu. C'était la centralisation à outrance. Passons rapidement en revue les remaniements de territoire. En 1808, on créa le Tarn-et-Garonne aux dépens du Lot, de la Haute-Garonne, du Tarn, de l'Aveyron, du Lot-et-Garonne, du Gers et de l'Ariège. L'empire français, en 1808, se composait de cent vingt-sept départements dont treize pour les colonies (Guadeloupe, Martinique, Guyanne-Cayenne, Sainte-Lucie, Tobago, La Réunion, l'lle-de-France, les Indes-Orientales et Saint Domingue partagée en cinq départements : ceux du Sud, du Nord, de l'Ouest, d'Ingranne, de Samana). Les Etats de l'Eglise réunis en 1809 formèrent deux départements, Tibre et Trasimène. De 1809 à 1811, quatorze départements nouveaux furent créés aux dépens de la Hollande et de l'Allemagne: Bouches-de-l'Escaut, Bouches-du-Rhin, Bouchesde-la-Meuse, Bouches-de-l'Yssel, Yssel-Supérieur, Zuyderzée, Frise, Ems-Oriental, Ems-Occidental, Ems-Supérieur, Bouches-de-l'Elbe, Bouches-du-Weser, Lippe, Simplon; on réunit les départements du Golo et du Liamone qui redevinrent la Corse. Il y eut alors cent trente départements, nombre réduit à quatre-vingt-six par les traités de 1845. Les départements formés lors annexions de la Révolution et de l'Empire.
La Restauration ne modifia rien à l'organisation autoritaire de l'administration locale. Suivant un mot célèbre de Napoléon, elle trouva son lit bon et se contenta d'en changer les draps. La loi du 21 mars 1831 considéra les maires et adjoints comme agents du pouvoir exécutif; en conséquence; ils furent nommés, suivant la population des municipalités, soit par le roi, soit par le préfet. Le conseil municipal fut élu par un corps électoral spécial comprenant les habitants les plus imposés de la commune et certaines catégories de fonctionnaires, de magistrats et de lettrés. La loi du 22 juin 1833 rendit à l'élection la nomination des conseils généraux et des conseils d'arrondissement. La loi du 20 avril 1834 accorda à Paris un conseil municipal de trente-six membres, dont le président et le vice-président furent nommés par le roi. La loi du 10 mai 1838 se contenta de déterminer les attributions des conseils-généraux et d'arrondissement. La Révolution de 1848 ne fit qu'introduire le suffrage universel et supprimer le cens dans les élections locales : l'organisation générale resta identique et bien entendu le Second Empire la maintint. En 1860, l'annexion de la Savoie et de
Nice rendit à la France trois départements : ceux des
Alpes-Maritimes, de la Savoie et de la Haute-Savoie. Mais, en 1871, à
la suite de la guerre franco-allemande, les départements du Bas-Rhin,
du Haut-Rhin, de la Moselle furent rattachés à l'Allemagne.
Du Haut-Rhin il resta le territoire de Belfort; de la Moselle et de la
Meurthe, des tronçons qui furent réunis sous le nom de Meurthe-et-Moselle.
En sorte que la France ne posséda plus, jusqu'au lendemain de la
Première Guerre mondiale, plus que quatre-vingt-sept départements
ou plus exactement quatre-vingt-six, plus un territoire très inférieur
en superficie à l'arrondissement moyen.
L'administration de l'arrondissement est modelée sur celle de la circonscription supérieure. Le sous-préfet administre l'arrondissement sous la direction du préfet, et un conseil d'arrondissement représente les cantons respectifs. En moyenne l'arrondissement a huit cantons. Le canton, composé de treize communes en moyenne, est simplement un district judiciaire; par suite il n'a pas de conseil local ni d'administration particulière. Chaque canton a un juge de paix : c'est par canton qu'on nomme les conseillers généraux et d'arrondissement et c'est par canton que se fait le recrutement de l'armée. La commune gère ses intérêts par l'entremise d'un conseil municipal. Le chef de l'administration communale est le maire. (Ch. Mortet). Régions et départements français (2016)
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