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Histoire de l'Europe > La France > Le XIXe siècle |
Le Second Empire 1852-1870 |
Le
coup d'Etat du 2 décembre 1851,
qui mettait fin à la Seconde
République préparait en même temps le Second
Empire. Dans la Constitution que le prince-président Louis-Napoléon
fit sanctionner par un « plébiscite », il lui suffit
de changer quelques mots pour que l'Empire fût rétabli (décembre
1852). Pour l'anniversaire de son coup d'Etat du Deux-Décembre (1851),
le prince-président prit le titre d'empereur des Français,
« par la grâce de Dieu et la volonté nationale »,
et, comme si le roi de Rome avait régné, le nom de Napoléon
III. Il épousa en 1853 une Espagnole de grande famille, Eugénie
de Montijo, comtesse de Téba, dont il eut un fils.
Il y eut un Sénat nommé par l'empereur, un Corps législatif trié par la « candidature officielle», un Conseil d'Etat qui fut le principal organe du travail législatif. Toute liberté de la presse, de réunion ou d'association, fut supprimée. L'université, la magistrature avaient été décimées par l'obligation du serment, les républicains déportés, les monarchistes déçus dans leurs espérances du 24-Février, les commerçants et les industriels séduits par le rétablissement de l'ordre, le clergé gagné d'avance par la restauration du pouvoir temporel du pape. L'Empire s'appuya principalement sur les classes rurales; les paysans voyaient les bonnes récoltes se succédant, leurs produits se vendre bien; ils étaient ravis que l'on multipliât les constructions de routes, de chemins de fer, d'églises, de mairies. Les classes ouvrières savaient gré à l'empereur d'avoir rétabli le suffrage universel. Il leur accorda le droit de grève (1864); il encouragea la Société mulhousienne des cités ouvrières (1853), fit voter la loi sur les Sociétés coopératives (1867), créa des hospices. En 1867, il présenta un projet de loi sur la Caisse des invalides du travail; les grands travaux de Paris assainirent les quartiers laborieux. Le Second Empire mena plusieurs guerres; certaines furent victorieuses, comme la Guerre de Crimée, d'autres furent des désastres comme l'Expédition du mexique. Au final, la Guerre de 1870, déclenchée à l'initiative de Napoléon III fut fatale à son régime. La révolution du 4 septembre 1870, qu fut surtout une insurrection du sentiment national, fit succéder au Second Empire la Troisième République. Le régime
de décembre.
Le Corps législatif perdit tout droit d'initiative; la publicité de ses débats fut interdite. Comme le gouvernement propose les lois aux députés, il proposera les députés aux électeurs et les préfets les leur imposeront. Autant les nommer lui-même. La juridiction correctionnelle fut rétablie pour les, délits de presse, les journaux placés sous la surveillance de l'administration; ils pouvaient être suspendus ou supprimés par décret ou, même, par arrêté préfectoral. La liberté de réunion fut à peu près abolie. Les biens des princes d'Orléans furent confisqués par décret. Comme c'est le propre des périodes troublées de finir par un besoin de soumission, le système était rationnel, puisqu'il fondait sur le silence du peuple, découragé de lui-même, l'autorité absolue du prince. Mais c'était aussi dans la nature des choses que le système ne durerait qu'autant que les fautes du pouvoir absolu ne démontreraient pas à nouveau l'avantage de la liberté politique, même pour la sécurité des intérêts matériels. Politique économique
du régime.
Le réseau ferré s'accrut de 4000 à près de 20 000 kilomètres; les compagnies de navigation furent subventionnées pour l'ouverture de nouvelles lignes; les grandes villes, et d'abord Paris, furent transformées par des travaux d'une utilité à la fois stratégique et hygiénique. La percée de larges voies de circulation rendit impossible la classique insurrection par les barricades et fit pénétrer la lumière et l'air dans des quartiers qui étaient des foyers de pestilence. D'autres grands travaux publics (construction de ports et de canaux, de halles, de casernes, d'églises, achèvement du Louvre, par sa jonction aux Tuileries, création de parcs) employèrent des milliers d'ouvriers dont les salaires s'accrurent pendant que des traités de commerce avec l'Angleterre et les principaux pays du continent abaissèrent le prix de la vie. Le libre échange stimula l'industrie par la concurrence. Cette véritable révolution économique fut surtout l'oeuvre de l'anglais Richard Cobden et d'un ancien saint-simonien, Michel Chevalier; elle fut réalisée en dehors des Chambres, par décret, comme un autre coup d'Etat. La Révolution avait interdit les coalitions entre les ouvriers (pour obtenir des patrons de meilleures conditions de travail); l'Empire supprima le délit de grève et autorisa les coalitions. Les paysans ne furent guère moins favorisés. L'organisation des chambres d'agriculture, l'établissement de comices et de concours agricoles, les lois sur le déboisement et sur le drainage. l'abolition de l'échelle mobile, en trave au commerce du blé, l'institution des médecins cantonaux, accrurent la prospérité et le bien-être des classes rurales. L'empereur prit à la Révolution l'idée d'expositions universelles (1855 et 1867). Grandes foires de plaisir, mais où se manifestait la puissance industrielle, agricole, artistique, du pays et qui, par la comparaison avec celle des autres peuples, provoquèrent de nouveaux progrès. La constitution de nombreuses sociétés de crédit facilita les affaires et aida au succès des emprunts d'Etat. Politique étrangère
de Napoléon III.
Mais le souvenir de Napoléon Ier le hantait, il rêva de gloire militaire; il fallait à l'armée d'autres batailles que celle du boulevard Montmartre. Enfin, du droit qui appartient aux peuples de se choisir et de se créer une patrie, il avait déduit une politique nouvelle : la politique des nationalités. Il avait rêvé dans sa jeunesse d'une Italie affranchie de la domination autrichienne et d'une Allemagne affranchie de la réaction autrichienne. Il continua de penser, durant la plus grande partie de son règne, que sa tâche était de réaliser « la justice » pour l'Allemagne comme pour l'Italie. A cet effet, il rechercha jusqu'en 1867 deux alliances : l'Angleterre, non moins favorable à l'Allemagne qu'à l'Italie, et la Prusse, « amie inséparable de la France », disait son père le roi Louis. Napoléon Ier
avait prophétisé à Sainte-Hélène
: « Le premier souverain qui, au milieu de la grande mêlée,
embrassera de bonne foi la cause des peuples, se trouvera à la tête
de l'Europe »; Napoléon III se crut cet homme.
Il ne fit pas seulement la guerre de Crimée pour repousser dans l'ombre le 2 décembre, rompre ce qui restait de la Sainte Alliance, s'imposer à l'Europe, mais aussi pour préparer son intervention en Italie. Quand les devoirs qu'il se croyait envers ses idées l'eurent conduit à faire la guerre pour chasser l'Autriche de l'Italie et à aider la Prusse à chasser l'Autriche de l'Allemagne, et lorsqu'il se trouva ainsi, à son insu, l'artisan de l'unité italienne et de l'unité allemande, tout à coup ses devoirs envers son pays lui apparurent et il aperçut que le premier des grands intérêts français, c'est l'équilibre. Mais alors il ne sut que tomber au piège de la Prusse, - d'où la catastrophe dont les conséquences ont pesé sur le monde pendant presque un siècle. La Guerre de Crimée.
La Guerre d'Italie.
Les Guerres lointaines
Les premières, en Asie, accrurent le domaine colonial de la France ou fortifièrent sa politique traditionnelle dans le bassin oriental de la Méditerranée et dans l'Océan Indien. La dernière, en Amérique, dirigée contre l'indépendance d'un peuple, annoncée comme a la grande pensée du règne, finit par une catastrophe. Expédition
de Syrie.
Le
creusement du canal de Suez.
La
Cochinchine.
La France imposa aussi son protectorat à un Cambodge fragilisé par les ambitions du Siam. Prise
de Pékin.
Une armée de 20 000 hommes, où le contingent français était commandé par le général Cousin-Montauban, s'empara de Takou, mit en déroute au pont de Pali-Kao une énorme cohue de Chinois et de Mongols et occupa Pékin. Le pillage du Palais d'Eté entacha cette rapide victoire (octobre 1860). Un traité solide confirma les anciennes conventions, ouvrit aux Européens de nouveaux ports et accorda la liberté des cultes. L'Expédition
du Mexique.
Les dernières années du Second EmpireTandis qu'au dehors l'Empire descendait ainsi, poussé par ses propres fautes, de l'apogée où l'avait porté la guerre de Crimée, d'importantes transformations s'étaient opérées au dedans.Déclin
du système de Décembre.
Napoléon III ne fut pas plutôt revenu d'Italie qu'il se sentit obligé à relâcher le carcan. Ayant mené la guerre contre l'absolutisme de la maison d'Autriche, le moins qu'il devait à la France, c'était « la liberté comme en Autriche ». Mais du moment qu'il cessa d'être logique avec lui-même, qui s'était proposé puis imposé comme l'homme providentiel, il sapa son oeuvre en pensant la consolider. Les sénatus-consultes.
Dès qu'un peu d'air eut pénétré dans le régime jusqu'alors hermétiquement clos, l'activité politique se réveilla; nécessairement, elle se tourna contre celui qui avait interrompu son sommeil. Les Cinq.
Moins la presse est libre, plus elle est favorable au développement des vrais talents; les grands journalistes de l'époque (Nefftzer, Peyrat, Prévost-Paradol, J.-J. Weiss, Emile de Girardin, John Lemoinne, Veuillot) appartinrent tous à la presse d'opposition. Elections de 1863.
Les anciens partis, républicains, légitimistes et orléanistes, formèrent une coalition sous le nom d'Union libérale. Divisés dans le passé et sans dissimuler qu'ils le seraient dans l'avenir, ils étaient d'accord contre l'Empire. Nul ne pouvant être candidat sans prêter serment à l'empereur, les « purs » s'abstenaient, non sans fierté, mais sans profit pour la cause. Le refus de serment continua à être le mot d'ordre des grands proscrits républicains, qui avaient repoussé l'amnistie, Hugo, Charras, Schoelcher, Quinet, et des féaux du comte de Chambord. L'opinion des « assermentés » l'emporta dans les réunions préparatoires des partis. L'opposition fit passer tous ses candidats à Paris, trente-cinq dans tout le pays. Thiers et Berryer furent élus. Les adversaires de l'Empire réunirent deux millions de voix. Le pays ne se sentit pas moins soulagé en rentrant dans la liberté que, dix ans auparavant, en entrant dans le silence. L'unité
allemande.
II y a de grandes différences entre les deux entreprises et les deux oeuvres. Les Italiens se sont volontairement unis en un seul corps de nation, sous une monarchie constitutionnelle et démocratique les Allemands, de gré ou de force, ont été réunis, sans rompre entièrement leur organisation fédérative, sous une domination militaire et féodale. Les uns et les autres étaient las des divisions qui font d'un peuple fragmenté la proie facile de l'étranger. Comme Cavour, Bismarck eut d'abord l'appui de Napoléon III. Avènement
de Bismarck.
« La Prusse restant Prusse et donnant la loi à l'Allemagne. »Avec moins de brutale franchise, il entendit pas autrement, à aucun moment, l'unité allemande. Il a raconté lui-même que sa résolution de chasser l'Autriche de l'Allemagne data de son séjour à Francfort, comme ministre de Prusse auprès de la Diète, et qu'il amorça son entreprise comme ambassadeur à Pétersbourg et à Paris. Il eut vite fait de constater chez le tsar une violente animosité contre l'Autriche. Ce fut Napoléon III qui, le premier, lui parla d'« alliance diplomatique ». Le danger était à Berlin, l'empereur continua de le voir à Vienne. Bismarck
et les lois militaires.
Ils étaient tous trois liés d'ancienne date; ils le restèrent toute leur vie. Il y a peu d'exemples d'une aussi longue et redoutable association. Bismarck se fit tout le suite l'homme du parti militaire. La hambre prussienne était opposée aux projets de Roon sur la réorganisation, c'est-à-dire sur l'accroissement de l'armée. Bismarck fit simplement rétablir par la Chambre des seigneurs les crédits rejetés et, mis en minorité, resta aux affaires. Loin de s'en cacher, il proclama son mépris des assemblées parlementaires et des politiques pacifiques. Il dit crûment que « les grandes questions du temps ne seraient pas décidées par des discours et des décisions de majorité », mais « par le fer et par le sang ». La fameuse formule : « La force prime le droit » n'est que la traduction synthétique (par le comte Schwerin) de l'un de ses discours. Guerre
des duchés.
Il commença par associer l'Autriche à son entreprise contre les duchés de l'Elbe; la possession en avait été reconnue au Danemark par le traité de Londres (1852) qui portait les signatures de l'Autriche comme de la Prusse. On doit accorder que, si le Slesvig du Nord était certainement danois, le Holstein n'était pas moins certainement allemand et que la question, posée par l'avènement de la dynastie de Glucksburg, après la mort du roi Frédéric, était complexe. Pendant que Bismarck poursuivit la campagne diplomatique dont il a dit lui-même que c'est son oeuvre maîtresse, Roon, le ministre de la Guerre, dit plus simplement : « La question est de force, non de droit. »L'Angleterre n'eut que des velléités d'intervenir; Napoléon III répondit « qu'une guerre entre l'Allemagne et la France serait la plus impie et la plus risquée » et « qu'il n'y fallait pas songer ». Le petit Danemark fut écrasé à Duppel, malgré une héroïque résistance (1864). Conflit entre la Prusse et l'Autriche. Cette complicité morale des grandes puissances dans l'affaire danoise fut l'origine des malheurs qui s'abattirent par la suite sur l'Europe, et, d'abord, sur l'Autriche. Bismarck, alléguant la géographie, réclama la proie commune pour la Prusse seule, quitte à indemniser l'Autriche en argent. Il sut manoeuvrer si bien qu'en moins de deux ans, ce fut l'Autriche, au printemps de 1866, qui parut vouloir la guerre. Elle refusa de prendre part au Congrès qu'avait proposé l'Angleterre si on ne lui garantissait pas par avance le Holstein et la Vénétie, que réclamait l'Italie. L'entrevue
de Biarritz.
Venu en France à l'automne de 1865, il eut avec lui à Biarritz, de longs entretiens secrets où il joua le rôle de tentateur. Selon ses propres récits, Bismarck aurait expliqué seulement que les remaniements qu'il préparait en Allemagne étaient conformes au système napoléonien des « grandes agglomérations »; hostile par principe à « la mosaïque disjointe » des Allemagnes, l'empereur profitera de la guerre pour achever à Venise son oeuvre italienne interrompue à Villafranca. Bismarck lui fit-il, en outre, entrevoir une compensation territoriale sur le Rhin? En tout cas, il lui parla de la Belgique; puisqu'il fit savoir au roi des Belges que Napoléon lui en avait parlé, et Venise fut son grand argument, puisqu'il ne se gêna pas de dire en s'en allant que, «si l'Italie n'existait pas, il faudrait l'inventer ». Alliance
italo-prussienne.
« Il est indispensable que vous déterminiez la Prusse à la guerre et que vous vous mettiez vous-même en état de la faire. »Quand la guerre éclata, la France n'eut pas un seul homme sur le Rhin. Bismarck a reconnu que le moindre rassemblement de troupes aurait empêché la Prusse de porter le gros de ses armées en Bohème. Sadowa.
La
confédération du Nord.
Les Etats du Sud, en reconnaissance pour
leurs territoires respectés, conclurent des conventions militaires
qui assuraient le concours de leurs forces en cas de guerre.
Les
compensations.
C'était les prévisions de Thiers justifiées : « Alors que, de Marignan à Almanza, la France avait lutté avec ténacité pour abattre l'Empire des Habsbourg, elle allait rééditier elle-même le colosse germanique. »Celles de Quinet seront vérifiées à leur tour : « L'Allemagne qu'on a déchaînée ne s'arrêtera pas là ».On prêta ce mot au maréchal Randon, ministre de la Guerre : « C'est la France qui a été vaincue à Sadowa ».L'empereur se sentit atteint et suivit la politique la plus incohérente. Dans la même journée (5 juillet 1866), il ordonna et contremanda la convocation des Chambres et la mobilisation. Tantôt il déclara dans une circulaire aux puissances, écrite tout entière de sa propre main, que « la France ne devait prendre aucun ombrage de la Prusse agrandie », que e la Prusse assurait l'indépendance de l'Allemagne » et que, tout ce qui s'était passé, la France (c'est-à-dire lui) l'avait voulue. Tantôt il demanda à la reconnaissance de Bismarck des compensations territoriales qui calmeraient l'opinion. Les
refus de Bismarck.
Après avoir ameuté le Reichstag contre « l'aliénation d'un domaine allemand » et forcé le roi de Hollande à retirer sa parole, Bismarck consentit seulement, au milieu d'un premier tumulte de guerre, à un arbitrage. La conférence de Londres décida le retrait des troupes prussiennes de la forteresse du Luxembourg, démantelée et déclarée neutre (mars-mai 1867). Mentana.
au grand mécontentement des Italiens. Ainsi, moins d'un an après que Napoléon III avait lui-même coalisé la Prusse et l'Italie contre l'Autriche, son entreprise contre l'équilibre de l'Europe ne tournait pas autrement que celle de Louis XV au siècle précédent. Bismarck avait continué Frédéric, etThiers pouvait dire : « Il n'y a plus une faute à commettre. » L'Exposition universelle.
Bismarck est convenu (dans une lettre à l'historien Sybel), que, pendant les trois dernières années de l'Empire, « les velléités hostiles ne firent que des apparitions temporaire ». En effet, passé le vif mouvement
d'humeur d'après l'ascension soudaine de
Le projet du maréchal
Niel.
Après avoir étudié avec le maréchal Niel un projet de loi militaire qui, par la fixation du contingent annuel à un chiffre immuable, aurait donné un effectif de combat de 600 000 hommes et, avec les réserves de la garde mobile, une armée de 1 200 000 hommes, il céda au Corps législatif qui, majorité et opposition, refusait de « militariser toute la jeunesse ». Les députés gardèrent le droit de fixer le contingent, sans pouvoir jamais dépasser 100 000 hommes. L'Empire libéral.
Thiers inclinait à aider à la transformation de l'Empire, mais il ne pardonnait pas le 2 décembre. Pour lui, comme pour Berryer et les républicains, c'était une question d'honneur. Au contraire, Emile Ollivier, fils d'un
ancien proscrit, lui-même préfet de la République de
1848, puis l'un des Cinq, et, avec Jules Favre, leur plus bel orateur,
s'était
La
souscription Baudin.
La suppression du pamphlet de Rochefort fit de cet amuseur un personnage; le procès intenté aux journaux qui avaient ouvert une souscription publique pour élever un monument au représentant Baudin, évoqua les origines du régime dans le même temps où il travaillait à les faire oublier. Le
procès Baudin.
Le défenseur de Delescluze se fit accusateur. Ce fut le procès du 2 décembre. Tous les régimes qui se sont succédé se sont honorés du jour qui les a vus naître. Il n'y a que deux anniversaires; le 18 brumaire et le 2 décembre, qui n'ont jamais été mis au rang des solennités d'origine par crainte que la conscience universelle les repousse. « Cet anniversaire dont vous n'avez pas voulu, nous le revendiquons, nous le prenons pour nous. »Ce flot passionné « submergea » les juges; Gambetta fut porté du premier coup au premier rang des orateurs et des chefs républicains. Les
élections de 1869.
Les élections de mai 1869 donnèrent 40 sièges aux républicains, 50 à l'union libérale, 116 au Tiers Parti. Les bonapartistes « purs» se trouvèrent en minorité. Gambetta fut élu deux fois, à Paris et à Marseille. Paris ne nomma que des candidats de l'opposition : Thiers, Favre, Jules Simon, Jules Ferry, Ernest Picard, Bancel, Garnier Pagès, Pelletan. Belleville, à une élection partielle, nomma Rochefort. L'Empire craquait. L'empereur se résigna à rétablir le régime parlementaire et donna le pouvoir à Ollivier. Le
ministère Ollivier.
D'Ollivier et de ses collaborateurs dans le ministère du 2 janvier 1870, on peut répéter le mot de Mme de Staël : « Quelques amis de la liberté, cherchant à se faire illusion à eux-mêmes, ont voulu se justifier de se rattacher à Bonaparte en lui faisant signer une Constitution libre. »Le ministère fut bien accueilli, surtout des hommes de tempérament orléaniste. Thiers, montrant le banc des ministres : « Ce sont, dit-il, mes idées qui sont sur ces bancs. » Les « libertés nécessaires », qu'il réclamait depuis 1863, étaient à peu près rétablies. Les républicains ne désarmèrent pas à visage découvert ou sous le masque orléaniste, l'Empire resta l'ennemi. La première fois que Gambetta se heurta à Ollivier, il lui dit : « Vous n'êtes qu'un pont entre la République de 1848 et la République à venir, et ce pont, nous le passerons. » Une manifestation, où grondait la révolution, se produisit aux obsèques de Victor Noir, journaliste tué par le prince Pierre Bonaparte, cousin de l'empereur, au cours d'une dispute. Deux cent mille Parisiens suivirent son cercueil. Repoussé par ses anciens amis, pour qui sa conversion était une trahison, Ollivier se rapprocha de la droite, mais elle ne lui pardonnait pas d'avoir été républicain. Il s'obstina à vouloir concilier les contradictoires. Le
plébiscite.
L'introduction du droit plébiscitaire
dans la Constitution parut aux libéraux la négation du régime
parlementaire où le peuple n'agit que par ses représentants.
Daru et Buffet, puis Talhouët, quittèrent le ministère
qui perdit l'appui de Thiers. Gambetta ne répudiait pas le plébiscite,
mais il déclara que la souveraineté nationale est incompatible
avec tout ce qui a un caractère permanent et héréditaire
dans le pouvoir.
« Le peuple approuve les réformes libérales opérées dans la Constitution depuis 1868 par l'empereur. »Mais on ne vota pas sur la liberté; c'était l'Empire lui-même qui se remettait aux voix. Il eut 7 millions et demi de oui contre 1 million et demi de non (8 mai 1870). Malgré les progrès de l'opposition, Napoléon III, pendant quelques jours, se crut plus fort que jamais. Cependant, le vote de l'armée, où l'on constata 40,000 opposants, l'atteignit dans son autorité morale. Ce vote révéla d'ailleurs à la Prusse la faiblesse numérique de l'armée française, et l'encouragea à une rupture. La Guerre de 1870.
L'entreprise tourna rapidement au désastre. Les nouvelles du front jetèrent la stupeur dans Paris. Les Chambres furent convoquées pour le 10 août, et le cabinet Ollivier remplacé par un ministère pris dans la droite, sous la présidence du général Cousin-Montauban, comte de Palikao. Déchéance
de Napoléon III.
Bazaine, défaillant, s'enferma dans Metz; de son côté, Mac-Mahon, rejoint par l'Empereur le 16 août, fut forcé de se replier sur Sedan. Le 31, les troupes allemandes franchissent la Meuse après de nouveaux succès à Remilly, et, le 1er septembre, attaqnent l'armée française à Sedan. Mac-Mahon, grièvement blessé, cède le commandement au général Ducrot; mais le général de Wimpffen, arrivé d'Algérie la veille, le réclame par droit d'ancienneté. Il est bientôt forcé de rentrer dans la ville et de capituler le lendemain, par ordre de Napoléon III. Un maréchal de France, 39 généraux, 2225 officiers, 55,000 soldats dats, sans compter 14,000 blessés, étaient prisonniers, et l'ennemi s'emparait de 450 pièces de campagne et de siège, et de 10,000 chevaux. Environ 15,000 hommes avaient pu se réfugier sur le territoire belge. Napoléon III fut envoyé au château de Wilhemshoehe, près de Kassel. Pendant ce temps, Paris avait été mis en état de défense, et le général Trochu en avait été nommé gouverneur. Le ministère fit connaître la défaite de Sedan et la captivité de Napoléon III, et proposa la création d'un conseil de défense; il était trop tard, l'indignation nationale exigeait la déchéance de l'empereur et de sa dynastie. Ainsi s'achevait, ptiteusement, le Second Empire. Début
de la Troisième République.
Le nouveau gouvernement, aussitôt reconnu dans toute la France; annonça, par un manifeste, qu'il était prêt à traiter avec l'Allemagne et à lui payer une indemnité de guerre, mais qu'il ne cèderait ni un pouce de terrain, ni une pierre de de forteresses françaises. La guerre, si sottement engagée par Napoléon III, continua. Elle se solda par la défaite de la France, qui perdit l'Alsace et une partie de la Lorraine. (J. Reinach). |
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