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Histoire de la Gironde
[Géographie de la Gironde]
Dans la période protohistorique, le territoire qui forme aujourd'hui le département de la Gironde fut occupé par les Celtes. L'histoire mentionne ensuite les Bituriges-Vivisci, descendants des Celtes qui avaient fondé sur les bords de la Garonne un établissement considérable nommé Burdigal. Strabon le cite comme un marché célèbre. Des peuples d'origine ibère ou ligurienne complétaient la population; c'étaient les Boii, pêcheurs qui abritaient leurs barques dans les ports de Boïe et de Noviomagus, aujourd'hui ensevelis sous les sables; les Medulli, habitants du Médoc; les Belendi, habitants des landes du Bélinois, et les Vasates, fondateurs de
Bazas.

Lorsque Vercingétorix réunit tous les peuples de la Gaule pour tenter un suprême effort contre la domination romaine, aucune peuplade de la Gironde ne marcha au secours de l'indépendance gauloise. Les légions de César conquirent facilement le pays compris entre les Pyrénées et la Garonne, qui reçut le nom de province d'Aquitaine. Bientôt la grande voie romaine d'Arles à Toulouse fut continuée jusqu'à Burdigala, nom latin de Bordeaux.

Au IIe siècle de l'ère commune, sous l'empereur Hadrien, Bordeaux devint la métropole de la seconde Aquitaine, qui comprenait le Poitou, la Saintonge, l'Aunis, Ie Périgord, l'Agénois, l'Angoumois et le Bordelais.

Au IIIe siècle, saint Martial, saint Front et saint Martin prêchèrent la foi chrétienne dans le Bordelais et y subirent le martyre. La domination romaine avait répandu dans cette province des temples magnifiques, des théâtres, des palais, des aqueducs, qui embellissaient la métropole, et, au IVe siècle, les écoles de Bordeaux rivalisèrent avec celles de Rome et de Byzance. Ce fut l'apogée de son éclat. Au milieu de ce luxe et de ces splendeurs retentit le cri de guerre des Germains.

En 412, les hordes des Vandales entrèrent Ă  Bordeaux sans y trouver de rĂ©sistance. A leur suite vinrent les Wisigoths, dont  la conquĂŞte fut plus durable ; ils Ă©rigèrent la seconde Aquitaine en un royaume dont Toulouse devint la capitale. Dès lors, Bordeaux perdit de son importance. Mais ces conquĂ©rants, qui Ă©taient ariens, persĂ©cutèrent les Ă©vĂŞques catholiques; ceux-ci appelèrent Ă  leur secours Clovis, qui s'Ă©tait converti au christianisme après la bataille de Tolbiac. Le roi des Francs s'avança donc contre les Wisigoths et les dĂ©fit complètement Ă  la bataille de VouillĂ© (507). Cependant l'Aquitaine ne fut pas dĂ©finitivement conquise par les Francs. En 731, les Sarrasins, maĂ®tres de Narbonne, de Carcassonne et de NĂ®mes, s'emparèrent de Bordeaux, qui fut presque entièrement dĂ©truit. 

Au retour de son expédition d'Espagne, Charlemagne fit de l'Aquitaine un royaume auquel il donna Toulouse pour capitale. Louis le Débonnaire en fut le premier roi. Devenu empereur à son tour, Louis le Débonnaire laissa son ancien royaume à son second fils Pépin, dont le successeur, Pépin II, fut déshérité par Charles le Chauve, son oncle, à la suite d'une révolte. Louis le Bègue fut le dernier roi d'Aquitaine; ce royaume fut transformé en simple duché lorsque ce prince monta sur le trône de France.

Les ducs d'Aquitaine cherchèrent à se rendre de plus en plus indépendants et à agrandir leurs possessions. Aussi, lorsque Louis VII épousa Eléonore de Guyenne, fille unique du dernier duc, cette riche héritière apporta en dot au futur roi de France tout le pays compris entre Nantes et les Pyrénées. Mais le 18 mars 1152, cette union était rompue Eléonore, répudiée, épousa Henri Plantagenet, duc d'Anjou, qui fut, quelques années plus tard, roi d'Angteterre sous le nom de Henri II. C'est ainsi que ces belles et riches provinces se trouvèrent placées pendant trois siècles sous la domination anglaise, et furent, pendant toute cette période, la cause et le théâtre de guerres désastreuses.

Lorsque Jean sans Terre eut assassiné son neveu, Arthur de Bretagne, pour s'emparer du trône d'Angleterre, Philippe Auguste prit possession de toutes les provinces de France placées sous la domination anglaise. La Normandie, l'Anjou, la Touraine et le Poitou furent réunis à la couronne; mais il épargna la Guyenne, à la condition expresse que Jean et ses successeurs reconnaîtraient la suzeraineté du roi de France et lui rendraient désormais hommage lige (1204).

En 1295, Philippe le Bel s'empara de la Guyenne, tandis qu'une flotte française allait piller le port de Douvres; mais l'intervention du pape Boniface VIII amena entre les deux rois une paix scellée par un mariage. Une fille de Philippe le Bel, Isabelle de France, épousa le fils d'Édouard Ier, et porta dans la Maison d'Angleterre des droits à la Couronne de France, droits que les princes étrangers feront valoir plus tard, et qui amèneront la désastreuse guerre de Cent-Ans (1299).

Après la bataille de Crécy (1346), Edouard III érigea la Guyenne en principauté en faveur de son fils, le prince de Galles, plus connu sous le nom de prince Noir. Le prince Noir s'établit à Bordeaux et y tint une cour brillante. Le roi Jean, fait prisonnier à la bataille de Poitiers (1356), séjourna quelque temps à Bordeaux avant d'être emmené en Angleterre.

Le prince Noir ayant épuisé son trésor dans son expédition en Espagne, entreprise pour le rétablissement de Pierre le Cruel sur le trône de Castille, voulut établir des impôts exorbitants. Mais les seigneurs gascons refusèrent de payer et en appelèrent au roi de France, Charles V, qui profita avec empressement de l'occasion qu'on lui offrait de recouvrer ses provinces du sud-ouest. A la mort d'Edouard III, les Anglais étaient presque chassés de France, et il ne leur restait plus sur le continent que Bayonne, Bordeaux, Brest, Cherbourg et Calais (1380).

Malgré les victoires du roi de France, la capitale de la Guyenne était restée dévouée à l'Angleterre. La démence de Charles VI fit perdre à la France toutes les acquisitions précédentes.

En 1451, une expédition en Guyenne fit tomber aux mains des Français les villes de Blaye, Libourne, Castillon, Saint-Emilion; le 5 juin, Bordeaux ouvrit ses portes. L'année suivante, les Anglais ayant repris Bordeaux par trahison, les armées françaises recommencèrent la conquête du pays de Guyenne. La bataille de Castillon, où l'artillerie des Français fit des ravages et détruisit 4000 Anglais, rendit aux Français Libourne, Castillon et Saint-Emilion. Bordeaux, assiégé par terre et bloqué par mer, fut obligé de se rendre à discrétion, et, le 19 octobre 1453, Charles VII y fit son entrée triomphale.

Louis XI rendit Ă  la capitale de la Guyenne les droits que son attachement a l'Angleterre lui avait fait enlever. Il y Ă©tablit un parlement et releva son universitĂ©. Bordeaux, qui avait perdu de son importance dans les premiers temps de la conquĂŞte française, recouvra toute sa prospĂ©ritĂ© sous le règne de François Ier. La RĂ©forme fit de nombreux prosĂ©lytes en Guyenne, que Calvin avait visitĂ©e en 1532, lorsqu'il fuyait de Paris pour se rĂ©fugier Ă  NĂ©rac, auprès de Marguerite de Navarre; et les querelles religieuses avaient dĂ©jĂ  plusieurs fois ensanglantĂ© cette province, lorsque, le 5 octobre 1572, le gouverneur de Bordeaux et le lieutenant du roi dans cette ville donnèrent le signal d'un nouveau massacre des protestants. Il y en eut 264 d'Ă©gorgĂ©s Ă  Bordeaux, et toutes les maisons suspectes de Calvinisme furent, trois jours entiers, abandonnĂ©es au pillage. 
Sous Louis XIII et pendant la minoritĂ© de Louis XIV, Bordeaux fut le théâtre de plusieurs insurrections occasionnĂ©es par l'aggravation exorbitante des impĂ´ts et par la sĂ©vĂ©ritĂ© du gouverneur, le fameux duc d'Epernon. Quand son fils lui eut succĂ©dĂ©, une vĂ©ritable guerre Ă©clata dans la province et se continua avec des vicissitudes diverses, jusqu'en 1653, oĂą elle se termina par le siĂ©ge de Bordeaux. 

Louis XIV n'abusa pas de la victoire; dès que les troubles furent apaisĂ©s, il ne songea qu'Ă  en effacer les traces. On aurait bien Ă  lui reprocher la façon barbare dont il rĂ©prima, en 1675, une nouvelle Ă©meute amenĂ©e par les impĂ´ts sur le timbre, le tabac et l'Ă©tain, et les calamitĂ©s qui rĂ©sultèrent, pour la citĂ© bordelaise encore plus que pour quelques autres, de la rĂ©vocation de l'Ă©dit de Nantes (1685); mais on peut opposer Ă  ces tristes souvenirs les bienfaits dont il combla Bordeaux et qui furent pour cette ville la source de sa fortune commerciale et de sa grandeur. 

Pendant la seconde moitiĂ© du XVIIIe siècle, le parlement de Bordeaux, dont l'ambition avait Ă©tĂ© Ă  deux reprises comprimĂ©e par la royautĂ©, essaya d'Ă©tendre les limites de son autoritĂ©. II ne rĂ©ussit qu'Ă  se faire exiler Ă  Libourne. La RĂ©volution mit seule un terme Ă  la lutte suprĂŞme qu'il avait engagĂ©e. 

Le département de la Gironde fut formé, en 1790, aux dépens de la province de Guyenne. Des différents pays appartenant à cette province, il a pris environ les trois quarts de son territoire au Bordelais, plus de 700,000 hectares; au Bazadais environ 210,000 hectares; au Périgord 46,600 et à l'Agenais 14,300.

Les représentants du département de la Gironde à l'Asemblée législative, puis à la Convention, et principalement Vergniaud, Guadet, Gensonné, Grangeneuve, Ducos et Fonfrède, ont rendu célèbre le nom des Girondins autour desquels se groupa le parti modéré de la Révolution. Après leur proscription en masse et le supplice de plusieurs d'entre eux, Bordeaux et quelques autres villes s'insurgèrent contre la Convention mais Lacombe, Tallien et Jullien de Paris vinrent faire cruellement expier aux habitants l'intérêt trop légitime qu'ils avaient porté à leurs représentants.

Sous le Consulat, Bordeaux fut le centre d'une vaste conspiration royaliste qui avorta. Napoléon, devenu empereur, visita la Gironde et y fut reçu avec enthousiasme; mais, lorsque quatorze années de guerre et de blocus continental eurent ruiné presque complètement les populations de ce riche département, l'enthousiasme fit place à la haine, et, en 1814, le duc d'Angoulême, marchant à la tête des troupes anglo-espagnoles, y fut accueilli avec des cris de joie. Cependant, un an plus tard, lors du retour de l'île d'Elbe, Bordeaux ne sut pas rester fidèle aux Bourbons. Sous la seconde Restauration, cette ville vit tomber les têtes des deux frères Faucher, les jumeaux de la Réole, condamnés une première fois à mort sous la République pour crime de fédéralisme, grâciés, puis condamnés et exécutés sous Louis XVIII, pour avoir conservé un commandement militaire contre la volonté du gouvernement, et excité les citoyens à la guerre civile.

La révolution de 1830 fut accueillie avec faveur dans l'ancienne ville légitimiste; celle de 1848 y fut d'abord l'objet de quelques défiances. En 1859, le prince Louis-Napoléon, alors président de la République, visitant Bordeaux, y prononça un discours, dont la dernière phrase : « l'Empire, c'est la paix », n'a été depuis que trop douloureusement démentie par cette guerre fatale de 1870, qui, entreprise sans raison, sans hommes, sans approvisionnement et si follement conduite, aura coûté à la France plus de 10 milliards et deux de ses provinces.

Sur la fin de la guerre, le 9 décembre 1870, Bordeaux devint le siège de la délégation du gouvernement provisoire. Le 12 février suivant, l'Assemblée nationale s'y réunit; elle y nomma, cinq jours après, Thiers président de la République, et, le 1er mars, vota les préliminaires de la paix par 546 voix contre 107. Les députés ne quittèrent Bordeaux que le 11 mars, pour aller siéger à Versailles. (A. Joanne).
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Les figures de la Gironde

Les personnages célèbres du XIXe siècle nés sur le territoire de la Gironde sont : Vernet (Carle), peintre, né à Bordeaux (1758-1835); le vicomte de Martignac, ministre de Charles X, né à Bordeaux (1776-1832); le comte de Peyronnet (Charles-Ignace), ministre de Charles X, né à Bordeaux (1778-1854); le duc Decazes (Elie); ministre de Louis XVIII, né à Saint-Martin-de-Laye (1780-1860); Magendie (François), célèbre physiologiste, né à Bordeaux (1783-1855); Alaux (Jean), peintre, né à Bordeaux (1786-1864); Fonfrède (Henri), publiciste, né à Bordeaux (1788-1843); Brascassat (Jacques-Raymond), peintre, né à Bordeaux (1806-1867); Rosa Bonheur, peintre, née à Bordeaux en 1822; Broca (Paul), anthropologiste, né à Sainte-Foy-la-Grande (1824-1880); Reclus (Elisée), géographe, né à Sainte-Foy-la-Grande en 1830.

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Dictionnaire Territoires et lieux d'Histoire
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