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L'histoire de la Guyane française

La Guyane française avant l'arrivée des Européens

Premiers habitants.
Les premiers habitants de la région qui est aujourd'hui la Guyane française sont arrivés il y a environ 7000 à 10 000 ans. Ces premiers peuples étaient des chasseurs-cueilleurs qui vivaient de la forêt tropicale et des ressources fluviales.

Cultures précolombiennes.
Plusieurs groupes de populations ont habité la Guyane française avant l'arrivée des Européens. Ces populations ont su s'adapter à l'environnement amazonien, développant des techniques de survie, d'agriculture et d'artisanat qui témoignent de leur ingéniosité et de leur résilience. Leurs descendants existent toujours. Parmi les plus importants groupes, on trouve :

Les Arawaks.
Les Arawaks étaient l'un des premiers groupes à s'installer dans la région. Ils étaient principalement des agriculteurs sédentaires, cultivant le manioc, le maïs, les fruits et autres cultures. Les Arawaks étaient également connus pour leur artisanat, en particulier la poterie et le tissage. Ils vivaient dans des villages situés le long des rivières.

Les Caribes.
Les Caribes étaient des guerriers redoutés qui ont migré vers la région depuis les Caraïbes. Contrairement aux Arawaks, les Caribes étaient plus nomades et pratiquaient la chasse, la pêche et une agriculture limitée. Ils étaient habituellement en conflit avec les Arawaks et d'autres groupes. Les Caribes avaient des pirogues sophistiquées et étaient habiles dans la navigation fluviale et côtière.

Les Wayana et les Wayampi.
Les Wayana et les Wayampi vivaient dans l'intérieur de ce qui est aujourd'hui la Guyane française, dans des zones plus éloignées de la côte. Ils étaient principalement des chasseurs-cueilleurs avec une certaine agriculture. Les Wayana et les Wayampi se signalaient par leur artisanat, notamment la fabrication de paniers et d'objets en bois.

Culture sociale et matérielle.
La plupart des anciennes sociétés de la Guyane française avaient des systèmes basés sur des clans ou des tribus avec des chefs (appelés caciques) et des conseils de village. Les décisions étaient ordinairement prises collectivement, et les chefs jouaient un rôle de médiateurs et de leaders spirituels.

Ces populations croyaient en divers esprits de la nature et pratiquaient des formes de chamanisme. Les cérémonies et les rituels étaient importants pour assurer la prospérité de la communauté, la fertilité des cultures et la réussite des chasses et des pêches.

L'artisanat comprenait la poterie, le tissage, la sculpture sur bois et la fabrication de bijoux à partir de coquillages et d'autres matériaux naturels. Les motifs et les formes présents dans l'artisanat pouvaient avoir des significations symboliques et étaient utilisés dans des contextes cérémoniels.

Les économies des popoulations de l'ancienne Guyane française étaient basées sur une combinaison de chasse, de pêche, de cueillette et d'agriculture. Le manioc était une culture de base pour beaucoup de ces groupes, transformé en farine et en divers autres produits alimentaires. Le commerce entre les différents groupes était courant et permettait l'échange de produits comme les outils en pierre, les poteries, les denrées alimentaires et les objets artisanaux.

La Guyane française de l'arrivée des Européens à 1900

Peu de temps après la découverte des côtes de la Guyane par Vicente Yanes Pinzon (Vincent Pinçon) en 1500, prit naissance la légende de l'El Dorado, pays fabuleux où l'or était en extrême abondance et où, disait-on, le dernier des Incas s'était réfugié avec tous ses trésors. Cette légende de l'El Dorado amena dans le courant du XVIe siècle plusieurs aventuriers sur divers points de la Guyane, mais ce n'est que de 1604 que date la première entreprise historique des Français dans ce pays. Il y alors des Gascons, puis des Rouennais en 1626 et en 1643, des Parisiens en 1652 et 1664. Les écarts de régime, les dissensions intestines et la juste vengeance des Indiens eurent raison de ces premiers débarqués. Colbert, en 1664, créa la Compagnie des Indes occidentales, à laquelle il concéda la possession de la Guyane comme celle de toutes les autres terres américaines qui appartenaient à la France; mais dès 1674 il retira à cette compagnie ses privilèges et administra directement la colonie. Sous son impulsion, elle devint très prospère. Il introduisit à Cayenne la culture de la canne, du coton et de l'indigo. Comme la colonie manquait de bras, il lui en procura par le moyen de la traite des esclaves arrachés à l'Afrique et en y transportant des galériens. En 1716, on commença à cultiver le café à la Guyane, et en 1730 on tenta la culture du cacao.

Après la perte du Canada en 1763, Choiseul, cherchant une compensation, confia le gouvernement de la Guyane à Champvallon, qui emmena sur la plage du Kourou 15000 Alsaciens-Lorrains. Il en mourut 12 000 en quelques mois de la dysenterie et de la faim. En 1776, l'intelligent Malouet fut nommé gouverneur de la Guyane, et il entreprit de transformer le pays par la canalisation. Malheureusement il ne resta en charge que deux ans et ne put réaliser ses projets. Au début de la Révolution, l'émancipation soudaine des esclaves fut très fatale à la prospérité de la colonie. 

Un peu plus tard on fit de celle-ci un lieu d'exil pour les victimes des discordes civiles-: les prêtres insermentés et les exilés de fructidor y furent déportés. Beaucoup y moururent et les survivants ne contribuèrent pas peu à décrier la Guyane. En 1809, elle fut conquise par les Anglais et les Portugais et ne fut rendue à la France que par les traités de 1814 et de 1815. En 1858, l'abolition subite de l'esclavage, quelque légitime qu'elle fût, fit éclater une crise violente à la Guyane et ruina la plupart des établissements sucriers. Le second Empire y relégua les condamnés politiques et plus tard les forçats. Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, on y envoyait les condamnés arabes, africains ou asiatiques. Il y en avait un dépôt aux îles du Salut, un autre à Cayenne et un troisième à Saint-Laurent-du-Maroni où l'on accordait des concessions aux condamnés libérés. Il existait aussi un petit établissement pénitentiaire à Kourou. A la fin du XIXe siècle, les bagnes de Guyane n'accueillaient plus de déportés politiques; seulement des prisonniers de droit commun. Le dernier de ces bagnes, celui de Cayenne (à l'île du Diable), n'a plus reçu de condamnés à partir de 1937. La fermeture complète a eu lieu en 1951. 

La Guyane est devenue en 1946 un département d'Outre-mer de la France (c'est aujourd'hui aussi une région). Les tentatives de développement de l'agriculture qui ont été menées en Guyane n'ont jamais véritablement abouti et l'activité économique, fortement dépendante des aides de la Métropole, tourne surtout autour de celle du centre spatial de Kourou, depuis son ouverture en 1968. Depuis les années 1970, des revendications indépendantistes, parfois accompagnées d'attentats à la bombe, se font entendre dans le département. Le fort taux de chômage des jeunes qu'on y enregistre est en partie à  mettre en relation avec les violences urbaines qui ont éclaté dans les années 1990. La Guyane est également confrontée à une forte immigration illégale en provenance du Suriname et du Brésil.

La colonisation.
Le parcours chronologique ci-dessous donne la liste des différentes tentatives de colonisation dans la contrée jusqu'à la fin du XIXe siècle.

1604. Quelques Français se fixent sous la conduite de La Ravardière dans l'île fluviale qui devait plus tard s'appeler l'île de Cayenne. -1604. Une petite colonie anglaise, sous Charles Leigh, occupe la rive gauche des bas Oyapock qu'elle évacue au bout de deux ans. Mais une seconde colonie anglaise s'y installe encore pour quelques mois en 1608, sous Robert Harcourt. - 1626. 26 Français viennent sous la conduite des sieurs de Chauteil et de Chambaut, représentants de la Compagnie des marchands de Rouen, s'établir sur les bords du Sinnamary. - 1628. Quelques colons envoyés par la même compagnie se fixent, sous le commandement du capitaine Hautepine qui y laissa pour y commander son lieutenant Lafleur, sur les rives du Counamana. - 1630. 50 hommes sont amenés, sous la conduite du sieur Legrand, pour renforcer la colonie de Counamama. - 1633. 66 hommes conduits par le capitaine Grégoire viennent encore renforcer la colonie de Counamama. Cette même année, les Anglais et les Hollandais, chacun de leur côté, font un établissement dans l'île qui sera plus tard l'île de Cayenne. - 1634. Un certain nombre de Français envoyés par une nouvelle compagnie de marchands normands, compagnie qui avait obtenu, en 1633, le privilège du commerce et de la navigation des pays situés entre les rivières Orénoque et Amazone, les deux incluses, s'établissent sur la côte de Rémire qu'ils commencent à cultiver. En 1635, ils fondent le village qui prit bientôt le nom de Cayenne et bâtissent un fort pour le défendre. - 1638. Quelques Français se trouvent en outre à cette époque au Maroni et vers le Cap de Nord, ainsi que le constatent les lettres patentes de la compagnie de 1633 renouvelées en 1638. - 1643. 300 hommes sous la conduite de Poncet de Brétigny, représentant de la Compagnie du Cap de Nord qui avait remplacé dans tous ses privilèges celle de 1633, se fixent dans l'île de Cayenne, au mont Cepérou, non loin du Cayenne de 1635. Les colons des expéditions précédentes furent trouvés le long des côtes, réduits presque à rien, parlant la langue des Galibis dont ils avaient pris les moeurs. 1645. 40 hommes de renfort sont envoyés par la Compagnie du Cap de Nord. Mais Poncet de Brétigny avait été tué par les Indiens et ses 300 hommes étaient réduits à 25. Sur ces 25 hommes 16 seulement consentirent à rester, les autres se rembarquèrent. Des 16 restants, 14 furent tués par les Indiens, 2 seulement purent se sauver en 1645 à Suriname, chef-lieu du territoire pris par les Hollandais, entre le Maroni et l'Orénoque. En 1645, la Guyane était vide de colons. De 1604 à 1645 il en était mort environ 600.

1652. Environ 700 hommes d'une nouvelle compagnie de la France équinoxiale, substituée aux droits et privilèges de la Compagnie du Cap de Nord, débarquent à Cayenne sous la conduite des douze seigneurs, successeurs du sieur de Roiville, assassiné pendant la traversée. 60 hommes étaient arrivés à Cayenne quelque temps auparavant, envoyés par la Compagnie du Cap de Nord, qui, mais en vain, voulut essayer de se maintenir. Les 60 hommes se soumirent aux seigneurs de la Compagnie de la France équinoxiale. - 1654. La colonie est encore une fois détruite par les Indiens et par les dissensions intestines. Ses restes se réfugient à Suriname. Peu après les Hollandais, sous Spranger, s'emparent de l'île de Cayenne qui était redevenue déserte et amènent avec eux les premiers esclaves noirs qu'ait vus la colonie.

Colons morts de 1645 à 1654, environ 700, plus 600 morts de 1604 à 1645. Total en 1654 : 1300 colons morts dans la Guyane française. -1663.1000 nouveaux colons français sont envoyés par la Compagnie de la France équinoxiale dans l'île de Cayenne, d'où ils chassent les Hollandais. - 1664. Quelques colons sont envoyés, sous le commandement de M. de la Barre, par la compagnie des Indes occidentales, à laquelle furent cédés en 1664 les droits et privilèges de la compagnie de la France équinoxiale, pour prendre la colonie à l'ancienne compagnie et fortifier la colonie naissante. - 1667. Les Anglais ravagent entièrement la colonie et l'abandonnent sans y faire d'établissement. Les débris de la colonie, sous M. de La Barre, se remettent au travail. Le chef-lieu est alors à Armire (Rémire). - 1674. La Compagnie des Indes étant supprimée, la colonie passe en domaine royal. - En 1676. La colonie est prise par les Hollandais qui avaient déjà établi clandestinement de petites colonies à Approuague et à Oyapock. A la fin de cette même année 1676, la colonie est reprise par d'Estrées. . En 1677, le chevalier de Lézy, gouverneur de Cayenne, chasse les Hollandais de l'Oyapock. Quelques flibustiers s'établissent avec leurs richesses dans l'île de Cayenne, Rémire est abandonné comme chef-lieu pour le fort Saint-Louis de Cayenne. - 1688. La plus grande partie des habitants s'embarquent avec le corsaire Ducasse pour aller piller Suriname. L'expédition ayant échoué, ceux des survivants qui ne furent pas faits prisonniers se réfugièrent aux Antilles avec Ducasse.

Colons morts de 1663 à 1688 : environ 700. Total des colons détruits de 1604 à 1688, environ 2000. - 1688. Le chevalier de La Motte-Aigron remonte l'Oyapock pendant 50 lieues, pour arriver à l'Amazone, mais il est obligé de rebrousser chemin. -1696. 600 Français environ, d'après Froger, compagnon de M. de Gennes, peuplaient alors l'île de Cayenne et ses environs immédiats, dont 200 hommes pour la garnison de Cayenne. Il existait dans la colonie, dès 1685, 1500 esclaves noirs. - 1725. D'Orvilliers, gouverneur de Cayenne, fait établir le fort Saint-Louis sur la rive gauche de l'Oyapock, en face du Taprabo (Taparoubo); le village de Saint-Pierre d'Oyapock se forme et se développe à côté du fort Saint-Louis. -1740. Population : 5290 (dont 1000 environ à Cayenne), 566 Blancs; 54 affranchis ; 4634 esclaves noirs; 36 Indiens. - 1744. Le corsaire anglo-américain Potter détruit le fort Saint-Louis et le village de Saint-Pierre à l'Oyapock. Le fort Saint-Louis, reconstruit, est attaqué par les Portugais en 1794. -1762. Réductions indiennes du Kourou : 6500 Indiens. Réductions indiennes de l'Oyapock, 2000 Indiens. Total, 8000 Indiens. De 1764 à 1766, les Indiens des Réductions de Kourou disparaissent et ceux de l'Oyapock se disséminent.  -1763-1765. Expédition de Kourou : environ 12000 morts. - 1766. Colonisation de Tonnégrande (Bessner), 80 soldats agriculteurs. Meurent tous. - 1775. Population : 9300; 1300 personnes libres; 800 esclaves. - 1777-1780. Fondation du poste de Vincent-Pinçon et des missions de Macari et de Counani. - 1783. Colonisation de Cachipour (Bessner). - 1788. Colonisation de l'Approuague (Villeboi). - 1790. Population : 14 520; 2000 blancs; 520 personnes de couleur libres; 12 000 esclaves, population indigène employée par les colons environ 800 Indiens de différentes tribus. -1791. Colonisation du Ouanari (Compagnie du Sénégal). - 1794. Les Portugais détruisent Vincent-Pinçon, Macari, Counani et ravagent l'Ouassa et l'Oyapock. -1795. Proscrits montagnards de Germinal et de Prairial. - 1797-1798. 600 proscrits réactionnaires (du 18 fructidor), à Sinnamary et à Counamama, 16 en 1797, puis plus de 500 en 1798. J.-J. Aimé, un des déportés de Fructidor, donne un tableau de mortalité concernant 329 déportés, 8 sont morts pendant la traversée et 55 furent débarqués d'urgence, pour cause de maladie due aux mauvais traitements du bord. Professions libérales, morts : 11 sur 45 ; ecclésiastiques 147 sur 255 ; hommes de métiers, 5 sur 21. Total sur 321 163 morts dont 147 ecclésiastiques. - 1799. Proscrits du 18 brumaire. -1818. Population : de 15000 à 16000. -1820. Envoi de 32 Chinois; au bout d'un an il n'en reste plus que 3. -1821. A Laussadelphie, sur la Passoura, affluent du Kourou, ferme modèle du gouverneur Laussat, 7 familles de settlers des Etats-Unis. La colonie (164 hommes) est bientôt renvoyée en France en bloc. - 1824. Milius, 3 familles du Jura (27 personnes), à 8 kilomètres de l'embouchure de la Mana, nouveaux envois. La colonie est rapatriée en 1826. - 1828. Mme Javouhey commence à fonder le bourg actuel de Mana qu'elle termine en 1847 avec 36 religieuses, 39 engagistes blancs de trois ans (qui au bout des trois ans l'abandonnent) et 550 Noirs de traite libérés. - 1837. Etablissement du fort de Casfesoca à l'Oyapock. - 1838. Création du Fort-Inférieur (fort Malouet) à l'Oyapock. -1839. Population 20 940 (non compris la garnison et les fonctionnaires non propriétaires), population libre, 5189; population esclave, 15 761. - 1851-1854. Transportation ( ci-dessous) - 1857. Population : 25561. -1854-1869. Emigration africaine 1000 Noirs d'Afrique environ pris au Libéra, à Krou (La Côte des Graines) et au Dahomey. A partir de 1869 la traite est interdite. - 1861-1876. Immigration asiatique. Environ 3000 coolies de l'Hindoustan. En 1876, l'Angleterre défend le recrutement sous prétexte de mauvais traitements. A partir de 1860, quelques immigrants annamites.

La "Transportation".
L'introduction en Guyane de condamnés aux travaux forcés date d'un décret de 1851. Le premier convoi arriva aux îles du Salut en mai 1852. Plusieurs pénitenciers furent successivement établis qui, pour la plupart, furent successivement évacués pour cause d'insalubrité : celui de la Montagne-d'Argent (1852-1864); celui de Saint-Georges d'Oyapock (1853-1863); les trois pénitenciers de la Comté : Sainte-Marie, Saint-Augustin et Saint-Philippe (1854-1860). Un chantier forestier fut établi aux Trois-Carbets, à 30 kilomètres de l'embouchure du Kourou, et bientôt évacué, puis rétabli; un ponton établi à l'embouchure de ce fleuve fut bientôt abandonné. Dans l'île de Cayenne, les pénitenciers de Bourda et de Baduel durèrent de 1854 à 1856; celui de Mont-Joly de 1854 à 1864. Le pénitencier de Cayenne fut établi, en 1853, dans la geôle; en 1855, on répartit les déportés sur les pontons; enfin, peu après, le pénitencier de Cayenne fut établi dans une caserne attenant au jardin militaire. De 1852 à 1867, 18000 "transportés" furent envoyés en Guyane. Mais à partir de 1867 jusqu'en 1887, ce fut la Nouvelle-Calédonie qui fut désignée comme principale colonie pénale. Enfin, à partir de 1887, la Guyane reçut tous les condamnés européens ayant à subir plus de huit ans de peine et tous les condamnés de arabes et noirs. De plus, en 1885, la Guyane a été désignée, concurremment à la Nouvelle-Calédonie, pour la relégation collective des récidivistes. 

La Guyane comptait à la fin du XIXe siècle quatre pénitenciers, d'où l'on détachait divers chantiers de travaux publics, le pénitencier de Cayenne, celui des îles du Salut, celui des roches de Kourou et, enfin, le territoire pénitentiaire du Maroni. Les centres principaux du territoire pénitentiaire du Maroni étaient : Saint-Laurent, commune pénitentiaire spéciale, qui formait l'agglomération la plus importante de la colonie après Cayenne; Saint-Maurice, à 4 kilomètres au Sud de Saint-Laurent, qui avait une usine à sucre située au centre des plantations de cannes des concessionnaires; Saint-Jean, à 20 kilomètres, en amont de Saint-Laurent, était le centre de la relégation.

En 1889, le nombre total des condamnés en cours de peine était de 3376 hommes et 42 femmes, dont 1065 hommes au Maroni, 561 à Kourou, 626 aux îles du Salut et 1164 à Cayenne. C'est dans le territoire pénitentiaire du Maroni que se trouvaient, en majeure partie, les 2000 libérés astreints à la résidence.

Les territoires contestés.
La France a eu un long contentieux avec le Portugal, puis avec le Brésil à propos des délimitations des frontières de la Guyane Française. Le territoire contesté entre la France et le Brésil était limité (conférences diplomatiques franco-brésiliennes de 1853-1856), au Nord par l'Oyapock, les Tumuc Hamac et leurs prolongements occidentaux; à l'Est par l'océan Atlantique; à l'Ouest par le rio Branco et au Sud par une frontière formée par l'embouchure Nord de l'Araguary, l'Araguary, et une ligne indéterterminée partant des hauts de ce fleuve pour aboutir au rio Branco, et se confondant plus ou moins avec l'équateur à travers les espaces inconnus de la Guyane centrale. Sa superficie est d'environ 260 000 kilomètres carrés, superficie plus que triple de celle de la Guyane française incontestée. Sa population se composait que d'indiens, sauf dans sa partie littorale et sur la rive gauche du haut rio Branco.

Un autre contentieux frontalier a existé avec les Pays-Bas. Il a été résolu au début du XXe siècle, mais le Suriname, né de l'indépendance de la Guyane hollandaise revendique toujours aujourd'hui une partie du territoire de la Guyane française..

Le contentieux franco-brésilien.
Depuis le XVIIe siècle, la France et le Portugal se disputent la possession de la rive septentrionale de l'Amazone. En 1688, le gouvernement portugais fait établir à l'embouchure du grand fleuve, sur la rive gauche et sur l'emplacement de celui de Carriau pris aux Anglais par les Portugais en 1632, le fort de Macapà et quatre autres petits forts. Les protestations de Louis XIV étant demeurées vaines, celui-ci, en 1697, fait détruire les quatre petits forts et occuper Macapà par M. de Férolles, gouverneur de Cayenne. Les Portugais y rentrèrent la même année.

Le traité d'Utrecht (11 avril 1713), qui devait terminer le différend, ne servit qu'à le prolonger jusqu'au XXe siècle. Le traité dit que la France renonce aux terres du Cap de Nord, situées entre la rivière des Amazones et celle de Vincent-Pinçon; que la navigation de l'Amazone ainsi que les deux bords, les deux rives du fleuve appartiendront au Portugal, et que la rivière de Vincent-Pinçon servira de limite aux deux colonies. Or, les Portugais prétendirent ensuite que la rivière Vincent-Pinçon était l'Oyapock; tandis que les Français considéraient que la rivière de Vincent-Pinçon c'était l'Araguary dont l'embouchure principale se trouvait alors à la baie deVincent-Pinçon au Sud de l'île Maraca. Depuis, on ne put se mettre d'accord. 

Voici quels sont les principaux faits auxquels a donné lieu l'interprétation du traité d'Utrecht.

1745-1720. Les Portugais envoient des missionnaires dans le Yary, jusqu'aux sources de l'Oyapock, et font des incursions chez les populations indiennes de la côte contestée. - 1722. Pour punir les déprédations des Portugais, le gouvernement français envoie un détachement s'installer aux portes de Para, à Maribira, dans l'île des Guaribas. Le détachement reste un an dans le poste conquis. - 1725 à 1736. Les Français, prenant par la mer, s'assurent la possession de la côte jusqu'à l'Araguary, tandis que les Portugais, prenant par l'intérieur, font des razzias d'Indiens jusqu'à l'Oyapock. - 1736. Les Portugais reconnaissent aux Français la libre pratique des terres litigieuses. - 1764. Construction du nouveau fort de Macapa par les Portugais. - 1777. Fondation par les Français, sur la rive gauche de la bouche Nord de l'Araguary, du poste de Vincent-Pinçon puis de la mission de Macari (1783) qui devait subsister jusqu'en 1794. -1780. Fondation de la mission de Counani qui devait subsister également jusqu'en 1794. - 1782. Le gouvernement français donne au géographe Simon Mentelle la mission de relever l'Araguary et de se rendre au rio Branco en suivant l'équateur, « afin de chercher à nos possessions une frontière scientifique ». Mais Mentelle ne put se rendre qu'au premier saut de l'Araguary. - 1794. La guerre étant déclarée, les Français évacuent Vincent-Pinçon, Macari et Counani; les Portugais pillent la côte contestée, et établissent un poste sur la rive droite de l'Oyapock. - 1797. Traité du 20 août. La frontière est fixée au Corsevenne. Le Directoire ne ratifie pas le traité. - 6 juin 1801. Traité de Badajoz. La frontière suit l'Araguary, de la grande bouche aux sources, et des sources au rio Branco. - 29 septembre 1801. Traité de Madrid. La frontière suit le Carapanatuba, à quelques minutes au Nord de l'équateur, et va des sources de ce petit fleuve au rio Branco. - 25 mars 1802. Traité d'Amiens. On revient au traité de Badajoz : grande bouche de l'Araguary, Araguary, et des sources d'Araguary au rio Branco. - 1817. La Guyane, occupée depuis 1809 par les Portugais, est restituée à la France conformément au statu quo ante. Une commission mixte, qui ne se réunit pas, devait étudier sur place le différend. - 1836. Etablissement d'un poste militaire français à Mapa. - 1840. Le Brésil établit la colonie militaire de dom Pedro II sur la rive gauche de l'Araguary. - 1840. Evacuation du poste de Mapa et convention de non-action politique réciproque des Français et des Brésiliens dans le contesté (1841). Contrairement à la convention précédente, les Brésiliens conservent la colonie militaire de Pedro II, de l'Araguary au Tartarongal, dans le territoire contesté. - 1860. Le gouvernement brésilien annexe (contrairement à la convention) le district d'Apurema, la plus riche région du contesté. - 1887. Jules Gros prend en France le titre de président de la République du territoire contesté qu'il nomme Guyane indépendante avec Counani pour capitale. -1890-1891. Une expédition militaire brésilienne s'empare du Mapa et y fonde la colonie « Ferreira Gomes ». - 1892. Une autre expédition brésilienne part d'Alemquer, sur les bords de l'Amazone, pour se rendre aux Tumuc-Humac à travers le contesté de l'intérieur.

Le contentieux franco-hollandais.
La délimitation de la frontière entre la Guyane française et la Guyane hollandaise a également eté l'objet d'un contentieux entre la France et les Pays Bas. Un premier arbitrage, tenté par le tsar  Alexandre III en 1891 avait échoué. Les deux parties se sont finalement mises d'accord en 1905, en signant une concention par laquelle la France obtenait la possession du territoire contesté entre l'Itany et le Maroni (environ 250 000 hectares), ainsi que les îles de l'Awa et les îles les plus importantes du bas Maroni, grâce au partage du fleuve en biefs alternativement attribués à chaque Etat.

Histoire de la Guyane française de 1900 à 1970

Début du XXe siècle (1900-1945).

La Guyane française est encore à cette époque principalement une colonie pénitentiaire. Le bagne de Cayenne, ouvert au milieu du XIXe siècle, continue d'accueillir des bagnards envoyés de France. Le bagne de l'Île du Diable, où le capitaine Alfred Dreyfus fut emprisonné, est particulièrement connu. 

L'économie de la Guyane repose principalement sur l'exploitation de ses ressources naturelles, notamment l'or et le bois. Cependant, ces industries sont souvent caractérisées par des conditions de travail difficiles et une exploitation intensive. 

Félix Éboué, un administrateur colonial guyanais, devient en 1923 le premier Noir à être nommé gouverneur en Afrique française (Tchad). Il jouera un rôle important dans la Seconde Guerre mondiale en ralliant les colonies françaises à la France libre.

A la fin des années 1930, la Grande Dépression qui affecte l'économie mondiale touche aussi la Guyane française, où l'exploitation aurifère décline. La colonie reste économiquement marginalisée.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, la Guyane française, placée initialement sous le régime de Vichy, rejoint la France libre en 1943 sous l'influence de Félix Éboué.

De 1946 à 1975.
En 1946, elle cesse d'être une colonie et devient un département d'outre-mer de la France. Ce changement de statut marque un tournant important dans l'histoire de la région, intégrant la Guyane plus étroitement à la République française.

La départementalisation apporte des changements administratifs et économiques. Des investissements sont réalisés pour améliorer les infrastructures, l'éducation et les services de santé. Cependant, les inégalités sociales et économiques persistent. Pendant cette période, de nombreux Guyanais émigrent vers la France métropolitaine en quête de meilleures opportunités économiques.

Dans les années 1960, l'Etat investit dans le développement de la Guyane, notamment dans les secteurs de l'éducation, de la santé et des transports, mais aussi dans l'exploitation des ressources naturelles. Ces investissements visent à améliorer les conditions de vie et à réduire les inégalités sociales.  Des projets de développement agricole et industriel sont mis en place. Le Centre Spatial Guyanais (CSG) à Kourou est créé en 1964. Il deviendra bientôt un élément clé de l'économie guyanaise, attirant des travailleurs qualifiés. Les lancements de satellites attirent également des investissements internationaux et renforcent le rôle stratégique de la Guyane dans le domaine spatial.

Histoire de la Guyane française depuis 1970

La modernisation économique entraîne cependant des tensions sociales, notamment en raison des inégalités persistantes et du chômage. Des mouvements sociaux et politiques émergent pour revendiquer des droits et une meilleure répartition des richesses. On assiste également à partir des années 1970 et encore dans les années 1980 à la montée des revendications identitaires et autonomistes. Les Guyanais commencent à revendiquer une plus grande autonomie politique et économique, une meilleure répartition des richesses aussi, avec des mouvements tels que le Mouvement de décolonisation et d'émancipation sociale (MDES). 

Le Parc Amazonien de Guyane, l'une des plus grandes réserves naturelles au monde, visant à protéger la biodiversité et à promouvoir un développement durable est créé en 1992. En 1996, la réforme de la décentralisation, en donnant plus de pouvoir aux élus locaux pour gérer les affaires régionales, permet une plus grande autonomie des collectivités locales. Mais cette année des grèves et manifestations importantes éclatent contre le chômage et les conditions de vie. Les syndicats et les mouvements sociaux réclament des mesures pour améliorer les conditions de vie et réduire les inégalités.

Dans les années 2000, la Guyane connaît une croissance économique soutenue, en grande partie grâce aux activités spatiales du CSG et à l'exploitation des ressources naturelles - encore l'or et le bois, principalement -. Cependant, cette croissance s'accompagne de défis environnementaux importants, tels que la déforestation et la pollution des rivières par l'exploitation aurifère illégale. L'Euro est introduit en Guyane en 2000, alignant la monnaie locale avec celle de la France métropolitaine et des autres départements d'outre-mer. Le Grenelle de l'Environnement, un ensemble de lois visant à promouvoir le développement durable et à protéger l'environnement en Guyane et dans les autres régions françaises est adopté en 2007.

La Collectivité Territoriale de Guyane (CTG), qui fusionne les compétences du Conseil général et du Conseil régional, dans le cadre de la loi NOTRe (Nouvelle Organisation Territoriale de la République) est mise en place en 2015. Cette réforme vise à améliorer l'efficacité administrative et la gouvernance locale.

En 2017, la Guyane connaît, sous le nom des 500 frères contre la délinquance,  une série de grèves et de manifestations massives en mars-avril, appelées "les 500 frères contre la délinquance". Ces mouvements, soutenus par une large partie de la population, dénoncent l'insécurité, les inégalités économiques et le manque de services publics. Le gouvernement français annonce un plan d'urgence de 1 milliard d'euros pour répondre aux revendications des manifestants.

En 2020-2022, la Guyane, comme le reste du monde, est touchée par la pandémie de covid-19. Les mesures de confinement et les campagnes de vaccination sont mises en place pour lutter contre la propagation du virus, avec des défis particuliers liés à l'accès aux soins dans les zones reculées, mais aussi aux fortes réticences d'une partie de la population à se faire vacciner. A la même époque, la Guyane s'engage dans des initiatives de transition écologique, avec des projets visant à promouvoir les énergies renouvelables, à protéger la biodiversité et à lutter contre le changement climatique. Les débats sur l'exploitation minière, notamment le projet controversé de la Montagne d'or, illustrent les tensions entre développement économique et protection de l'environnement.
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Le projet de la Montagne d'or

Le projet de la Montagne d'or est un projet miniers très controversé. Il est situé dans l'ouest de la Guyane, à environ 125 km au sud de Saint-Laurent-du-Maroni, près de la frontière avec le Suriname. Ce projet est porté par la Compagnie minière montagne d'or, une coentreprise entre la société canadienne Columbus Gold et la société russe Nordgold. Le projet vise à exploiter un gisement d'or estimé à environ 85 tonnes, avec une production annuelle prévue de 6,7 tonnes d'or sur une durée de 12 ans.

Le projet inclut la construction de plusieurs infrastructures, dont une mine à ciel ouvert, des installations de traitement du minerai, des routes d'accès, et des infrastructures pour les travailleurs. Les investissements nécessaires pour développer le projet sont estimés à environ 500 millions d'euros. Le projet promet de créer environ 750 emplois directs pendant la phase d'exploitation. La mine produirait de l'or à partir de techniques de cyanuration, un procédé controversé en raison des risques environnementaux qu'il comporte.

De plus, le site du projet se trouve dans une zone de forêt tropicale riche en biodiversité. Les écologistes s'inquiètent de l'impact de la déforestation, de la pollution des cours d'eau et de la perturbation des habitats naturels. L'utilisation de cyanure pour l'extraction de l'or pose des risques de pollution chimique des sols et des eaux, avec des conséquences potentiellement graves pour les écosystèmes locaux et la santé humaine. Les communautés amérindiennes vivant dans la région craignent les impacts négatifs sur leurs terres, leur mode de vie traditionnel et leur santé.

Le projet a suscité une forte opposition de la part des organisations écologistes, des scientifiques et de nombreux citoyens. Des manifestations, pétitions et campagnes de sensibilisation ont été organisées pour dénoncer les risques environnementaux et sociaux. En 2018, le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) a émis un avis défavorable sur le projet en raison des impacts environnementaux jugés inacceptables. Le projet a également divisé la classe politique. En 2019, le président Emmanuel Macron a exprimé des réserves sur le projet, affirmant qu'il ne serait pas autorisé en l'état. La décision finale repose sur les autorités locales et nationales.

En mai 2019, le gouvernement français a annoncé la suspension du projet, citant les préoccupations environnementales et la nécessité de réévaluer son impact. Depuis, aucune décision finale n'a été prise. Un débat public a été organisé pour discuter des enjeux et des alternatives possibles au projet. Ce débat a souligné les profondes divisions entre les partisans du développement économique et les défenseurs de l'environnement. 



Marion F. Godfroy, Bagnards, Points, 2010. - Né en 1795, d'une volonté impériale d'exiler le plus loin possible des criminels de droit commun et des agitateurs politiques dont on craignait qu'ils gangrènent la société, le bagne a fait vivre la Guyane au rythme de ses arrivées de déportés, emprisonnements de bagnards puis occupations de "libérés" à qui il était interdit de quitter l'île, jusqu'en 1953. 

Dans ce monde de violence, où l'on doit rendre coup pour coup si l'on veut survivre, où l'on doit voler pour exister et se défendre avec la hargne des exclus sans espoir de retour, vécurent des milliers d'hommes et quelques centaines de femmes, qu'on tenta d'"apparier" pour les inciter à "faire souche" et à développer, en lieu et place des esclaves affranchis, cette colonie encore balbutiante qu'était la Guyane. Cet ouvrage en raconte l'histoire, décrit le mode de vie de ces bannis, leurs occupations, tentatives d'évasion et punitions et explique aussi comment le témoignage de journalistes tels qu'Albert Londres fit beaucoup pour l'abolition du système.

140 reproductions de documents anciens et 50 photographies. (couv.).

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