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jusqu'en 1900 |
Les
populations primitives ont laissé différentes traces de leur
passage sur le territoire du département : mégalithes
(grandes pierres brutes), habitations lacustres, armes en silex, ustensiles
de bronze, etc. A l'époque où commence l'histoire positive,
il était occupé depuis longtemps par un des peuples les plus
puissants de l'Europe, déjà
refoulé à cette époque par les invasions des Ligures
et des Gaulois. C'étaient les Ibères,
qui, après avoir dominé sur toute l'Espagne et le pays situe
des Pyrénées à la Garonne
et au Rhône,
n'occupaient plus que le voisinage des montagnes, mêlés ailleurs
aux tribus envahissantes sous le nom de Celtibères ou Aquitains.
Les Basques sont d'une implantation plus ancienne encore.
C'est l'an 56 avant
notre ère qu'eut lieu la première rencontre entre les Romains
et les Aquitains. Vaincus dans une grande bataille par un des lieutenants
de César, P. Crassus,
les Aquitains durent se soumettre. Ils ne fournirent aucun contingent à
la grande levée de Vercingétorix,
et, en 51, César vint avec deux cohortes visiter pour la première
fois l'Aquitaine ou Novempopulanie,
qui renouvela sa soumission.
Ces faits ne sont connus que par deux ou trois inscriptions, dont la plus importante fut trouvée à Hasparren même au XVIIe siècle et placée plus tard sur la porte de l'église. Elle est ainsi conçue (nous la donnons avec ses fautes grammaticales et prosodiques) :Trois voies romaines traversaient le pays : deux franchissaient les Pyrénées : l'une à l'Imus Pyrenaeus (Roncevaux), l'autre au Summus Pyrenaeus (le Somport, à l'ouest du pic, du Midi d'Ossau); la troisième, longeant la chaîne, conduisait de Bordeaux à Toulouse par Dax.Flamen item, duumvir, quaestor, pagique magister, Verus, ad Augustum legato munere functus, Pro Novem optinuit populis sejungere Gallos. Les noms des Beneharnenses, des Iluronenses et des Osquidates ne sont cités qu'assez tard par les géographes anciens; leurs cités, Beneharnum et Iluro, devinrent, lors de l'apparition du christianisme au IVe siècle, les diocèses de Lescar et d'Oloron; quant à Bayonne (Lapurdum?), qui conserve des vestiges de murailles romaines, elle figure pour la première rois parmi les cités en 587. De 407 à 409 arrivent les Vandales, les Alains, les Suèves. Les villes de la Novempopulanie sont brûlées, « tout est ravagé, rien, rien n'est épargné, dit saint Jérôme, par ce fleuve dévastateur »; suivent les Wisigoths, auxquels les Romains abandonnent, en 419, la seconde Aquitaine. Ils s'établissent dans la Novempopulanie, se partageant les terres décumanes et les nombreux domaines abandonnés. En 472, toute la Gaule méridionale appartenait à leur roi Euric, arien fanatique qui persécuta les catholiques. Son fils Alaric, plus tolérant, s'occupa surtout de l'organisation du pays, fit ouvrir des routes et creuser des canaux. C'est également lui qui fit rédiger par Anien le code dit Théodosien, publié à Agde en 506, qui fut plus tard le droit écrit du Languedoc et de l'Aquitaine. Mais Alaric, dont les possessions s'étendaient jusqu'à la Loire, se trouvant en contact avec les Francs, Clovis détruisit en 507, à la bataille de Vouillé, la domination wisigothique dans l'Aquitaine. Dès lors, les cités de Béarn et d'Oloron, dont les évêques avaient figuré en 506 au concile d'Agde, firent partie de l'un ou de l'autre des royaumes des Francs, selon l'ordre des partages; les cités furent administrées par des comtes, les évêchés et les églises attribués à des seigneurs austrasiens. En 566, les deux cités furent données par Chilpéric en cadeau du matin des noces à la reine Galswinthe; après le meurtre de la princesse, elles passèrent à sa soeur, la célèbre Brunehaut, femme de Sigebert, roi d'Austrasie. A la fin du VIe siècle, les Vascons encore païens, chassés du versant méridional des Pyrénées, se précipitèrent sur la Novempopulanie, et battirent en 581 le duc Bladaste; mais, battus à leur tour, ils abandonnèrent les plaines, acceptèrent pour chef le duc Génialis, d'origine franque (606) et se cantonnèrent dans les vallées connues plus tard sous les noms de Labourd, Soule et Basse-Navarre. En 630, Caribert II prit le titre de roi d'Aquitaine. En 688, Eudes, duc d'Aquitaine, possédait, sous la suzeraineté à peu près nominale des rois francs, presque toute la partie gauloise de l'ancien royaume des Wisigoths. En 721, il défit devant Toulouse, sa capitale, les Sarrasins déjà maîtres de Narbonne. En 731 arrive une nouvelle incursion des Sarrasins, qui ravagent toute l'Aquitaine. Battus en 732 par Charles Martel et le duc Eudes, les débris de leur armée furent détruits, suivant la tradition, dans les plaines de Lanne-Mourine, en Bigorre. La lutte entre les ducs d'Aquitaine et les Carolingiens ne laissa ni trêve ni repos à ce malheureux pays jusqu'à sa complète soumission aux Francs. En 773, Charlemagne porta la guerre en Espagne; au retour, l'arrière-garde de son armée, commandée par Roland, fut écrasée, le 15 août 778, à Roncevaux par les Vascons espagnols. En 810, il en eût été de même de l'armée de Louis le Débonnaire, alors roi d'Aquitaine, s'il n'avait eu la prudence de saisir comme otages les femmes et les enfants des Vascons; mais, en 822, au retour d'une nouvelle expédition franque en Espagne, les Sarrasins réunis aux Vascons vinrent de nouveau attendre l'armée franque à Roncevaux et massacrèrent jusqu'au dernier les envahisseurs. Le royaume d'Aquitaine, fondé en 778 par Charlemagne, eut un siècle de durée. En 877, son dernier roi, Louis le Bègue, monta sur le trône de France, et l'Aquitaine perdit son semblant d'autonomie. Vers l'an 840 commencèrent les incursions des Vikings, qui, à plusieurs reprises, saccagèrent la contrée, occupèrent Bayonne et furent pendant près d'un siècle la terreur du pays. Enfin, vers 980, Sanche-Guillaume, duc de Gascogne, remporta sur eux une brillante victoire, qui délivra l'Aquitaine. En 819, il est fait
mention pour la première fois d'un vicomte de Béarn,
simple lieutenant des comtes de Gascogne.
Ces vicomtes se rendirent peu à peu indépendants, et, lorsque
le comté de Gascogne eut été réuni au duché,
leur seigneur direct ayant disparu, ils surent se faire oublier. Vers la
fin du XIe siècle, ils obtinrent,
en raison de services rendus, l'abandon par le comte de Poitiers,
duc de Gascogne, des droits de gîte, derniers vestiges de leur sujétion.
Dès lors le vicomte de Béarn devint possesseur d'une véritable
souveraineté, ne devant hommage à personne, ayant droit de
justice, battant monnaie; et lorsque plus tard Louis
Xl se rendit eu pèlerinage à Notre-Dame de Sarrance,
le roi fit baisser l'épée de France à son entrée
en Béarn, «-n'étant
plus dans son royaume ». Cette petite souveraineté, à
laquelle avaient
Les fors de Béarn sont célèbres à juste titre. Le premier en date, celui d'Oloron (1080), renouvelé en 1290, est un des plus anciens textes connus écrits en langue romane. Il serait trop long d'analyser ici ces chartes, qui firent de la souveraineté de Béarn un petit état constitutionnel, où le chef, par droit héréditaire, n'était reconnu seigneur de Béarn qu'après avoir prêté serment à ses sujets de respecter leurs libertés, et qui administrait le pays avec l'aide de la cour maïour. Les seigneurs de Béarn furent tous de vaillants hommes de guerre et d'habiles politiques. Gaston IV prit une part brillante à la première croisade. Revenu en Béarn en 1099, il publia le for de Morlaàs, et réunit à sa souveraineté le pays de Mixe et d'Ostabat, puis alla guerroyer en Espagne contre les Maures. Ce fut lui qui fonda, vers 1120, le célèbre hôpital de Sainte-Christine de Somport en Aragon, et celui de Gabas dans la vallée d'Ossau, pour le service des voyageurs et des pèlerins. Il fut tué en 1130 dans une rencontre avec les Maures; quatre ans plus tard, son fils Centulle V périssait à la bataille, de Campodoliente, sous les murs de Fraga. La petite-fille de
Centulle V, la vicomtesse Marie, pupille du roi d'Aragon, ayant eu, en
1171, la faiblesse de prêter hommage à son tuteur pour la
terre de Béarn, les Béarnais se soulevèrent et se
choisirent un autre seigneur. Après l'assassinat de ce prince et
de son successeur, qui n'avaient pas observé les « fors »
du pays, les Béarnais reconnurent pour vicomte l'un des enfants
de la vicomtesse Marie, qui avait épousé Guillaume de Moncade,
baron catalan. Cet enfant, Gaston VI le Bon, vit son règne troublé
par la guerre des Albigeois. En 1211,
il porta secours au comte de Toulouse; excommunié
pour ce fait en 1214, il se retira de la ligue des seigneurs du Midi et
fut absous par le pape Son frère, Guillaume-Raymond, lui succéda
en 1215; mais ce ne fut qu'en 1220 qu'il fut reconnu comme seigneur de
Béarn, à la condition d'établir
Son petit-fils, Gaston VII, « moult vaillant homme aux armes », dit Froissart, régna de 1229 à 1290, et laissa la réputation d'avoir été bon et fidèle aux Béarnais et terrible à ses ennemis. Presque toujours allié des Français, il passa sa vie à batailler contre les Anglais, possesseurs du duché de Guyenne. A sa mort, la vicomté, de l'avis des États de Béarn, passa à Roger-Bernard III, comte de Foix, mari de Marguerite, fille de Gaston VII. Une autre fille de Gaston, Constance, qui avait épousé le comte d'Armagnac, ayant revendiqué une nouvelle part dans la succession de son père, tout le XIIIe et le XIVe siècle furent occupés par les guerres et les procès des comtes de Foix et des comtes d'Armagnac. Les successeurs de Roger-Bernard se mêlèrent activement tantôt aux guerres de Navarre, tantôt aux guerres de France; Gaston Phoebus (1343-1391), le plus célèbre d'entre eux, fut un des plus grands capitaines du XIVe siècle. Beau-frère de Charles le Mauvais, roi de Navarre, il fut soupçonné, à Paris, de liaison avec les ennemis de l'État, emprisonné au Châtelet, puis relâché. Il alla alors guerroyer en Prusse contre les païens, revint en France, délivra la famille royale assiégée dans la ville de Meaux par les Parisiens révoltés réunis aux Jacques, battit ensuite complètement son ennemi héréditaire, le comte d'Armagnac, et, l'ayant fait prisonnier ainsi qu'un grand nombre de seigneurs du Midi, tira plus d'un million de livres de leurs rançons qui le rendirent le plus riche seigneur de France. Grâce à la réputation de vaillance et d'habileté de Gaston Phoebus, le Béarn, placé entre les Français et les Anglais, fut le seul coin de la France où l'on vécut alors en paix (La Guerre de Cent ans). Chacun des ennemis craignait de mécontenter le riche et puissant seigneur, qui ne voulait pas prendre parti, et l'on évitait avec soin tout semblant d'hostilité; enfin, sur la promesse du roi de France de lever le séquestre du Bigorre et de lui rendre ce comté auquel il avait droit, Gaston se déclara ouvertement pour les Français, et, en 1377, Charles le Sage le nomma lieutenant général du gouvernement du Languedoc malgré l'opposition des princes du sang, habitués à piller cette riche province. Terrible à
ses heures, meurtrier d'Arnaud de Béarn, son parent, meurtrier,
involontaire il est vrai, de son propre fils (1582), Gaston Phoebus était,
dit un contemporain, « un homme fort juste, l'un des plus braves
et des premiers capitaines de son temps, et il gouverna ses états
et le Languedoc avec beaucoup de bonne grâce et l'amour des peuples
»; si bien que lorsque Charles VI le
révoqua de son gouvernement pour y mettre le duc de Berry,
son oncle, les peuples du Languedoc se soulevèrent; le duc de Berry
fut battu en 1381 dans la plaine de Revel,
mais le cardinal d'Amiens ménagea un accord entre les deux parties,
et Gaston, « ayant pitié du dégât du pays pour
sa querelle particulière, » mit le duc de Berry en possesslon
du Languedoc.
En 1457, son fils, Gaston IV, lui succéda. Fidèle à la cause française, il enleva Mauléon aux Anglais, réduisit Dax, et, en 1451, réuni au célèbre comte de Dunois, parvint à s'emparer de Bayonne. En 1458, il fut créé pair de France; nommé par Louis XI, en 1463, capitaine général des troupes envoyées dans le Roussillon, il s'empara de ce comté. Reconnu héritier du royaume de Navarre, il mourut en 1471, laissant la réputation d'un magnifique seigneur, « affable, populaire et droicturier ». Son fils aîné, marié à Madeleine de France, était mort laissant un fils encore mineur, François Phoebus, qui, placé sous la tutelle de sa mère, fut, à la mort du roi Jean d'Aragon, proclamé roi de Navarre par les États réunis à Tudela. Il fit son entrée à Pampelune, mais il mourut à 16 ans, et sa soeur Catherine, qui lui succéda (1485), épousa, sur l'avis de la cour de Béarn et malgré l'opposition de Louis XI et de la faction des Gramont, Jean d'Albret, l'un des plus riches seigneurs du midi de la France. Autant la reine Catherine était intelligente et énergique, autant Jean d'Albret était faible et indécis. Grâce à son ineptie, le royaume de Navarre leur fut enlevé (1512) par le roi d'Aragon, et les seigneurs de Béarn ne gardèrent de leur royaume que le titre de roi et la Basse-Navarre, située sur le versant septentrional des Pyrénées. Henri d'Albret Ier de Béarn et IIe de Navarre leur succéda en 1516. Élevé par son aïeul, Alain d'Albret, il devint l'un des hommes les plus remarquables du XVIe siècle. En 1521, il fit, avec l'aide de François Ier, une tentative infructueuse pour recouvrer sors royaume de Navarre. Allié de la France, il combattit à côté du roi à la bataille de Pavie. En 1527, il épousa Marguerite de Valois, soeur de François ler. Dès lors il se retira dans sa souveraineté, et sa femme, la Marguerite des Marguerites, attira à la cour du Béarn les savants, les théologiens, les poètes qui penchaient vers les idées des réformés. Henri s'occupa surtout des affaires du Béarn, édicta, de l'avis de la cour maïour, de sages règlements, et plus tard fit reviser les fors et publier un for général, accepté par la cour et confirmé par lui. Henri d'Albret avait perdu tous ses enfants mâles; il ne lui restait qu'une fille, Jeanne d'Albret, héritière de tous ses domaines. Charles-Quint et François Ier avaient des visées sur cette riche proie, et, en 1542, le roi de France la maria malgré sa protestation au duc de Clèves. Jeanne étant encore une enfant, le mariage fut nominal, et le duc de Clèves ayant quitté le parti de François Ier, le mariage fut cassé. Henri emmena aussitôt sa fille en Béarn, et là, avec l'assentiment des États, il lui fit épouser, en 1548, Antoine de Bourbon, duc de Vendôme, premier prince du sang. Peu après, Marguerite mourut au château d'Audos. Jeanne d'Albret perdit successivement, par accidents, ses deux premiers fils. Le 3 décembre 1553, au château de Pau où elle était venue malgré l'hiver faire ses couches, elle donna naissance à un fils qui plus tard fut le roi de France Henri IV. Henri d'Albret voulut prendre lui-même la direction de l'enfance de son petit-fils. Henri, confié aux soins d'une robuste nourrice, fut élevé avec les petits paysans; cette éducation rustique contribua à lui donner cette rondeur et cette bonhomie moqueuse qui ont fait de lui un des personnages les plus populaires de l'histoire de France. Henri d'Albret mourut à Hagetmau, le 25 mars 1555, regretté de ses sujets, estimé de ses ennemis. Jeanne d'Albret et son mari ayant prêté serment devant les États furent aussitôt reconnus comme souverains du Béarn. Nous n'avons pas ici à parler de la conjuration d'Amboise ni des faits généraux de l'histoire de France auxquels prit part Antoine de Bourbon. Brave, mais faible et flottant, Antoine se fit protestant et redevint catholique. Il mourut aux Andelys en 1562, d'une blessure reçue au siège de Rouen. Jeanne d'Albret, qui venait d'abjurer le catholicisme, devint alors l'appui du parti protestant; très instruite, très énergique, mais ayant les défauts de ses qualités, elle voulut imposer à ses sujets ses nouvelles croyances et donna lieu ainsi à des luttes violentes. Tour à tour vaincue et victorieuse, chassée de ses états par Terride et les catholiques, rétablie par Montgomery et les protestants, elle fut mêlée activement à toutes les guerres religieuses du XVIe siècle. Les seigneurs catholiques du Béarn et de la Basse-Navarre avaient soutenu l'armée royale française de Terride contre Jeanne : cette conduite les rendit odieux au pays, et, lorsqu'en 1570 la reine abolit dans ses états l'usage public de la religion catholique et décréta la mise en régie des biens ecclésiastiques, la déclaration de cette grave mesure fut accueillie par les Béarnais avec une indifférence complète. En 1572 Jeanne mourut à Paris, où elle négociait le mariage de son fils avec Marguerite de Valois, soeur du roi Charles IX. Henri était à Chaunay lorsqu'il apprit la mort de sa mère; il vint à Paris, où eut lieu son mariage. Peu après, pour échapper au massacre de la Saint-Barthélemy, il abjura, puis, ayant réussi à fuir, il se mit à la tête du parti protestant. A partir de cette époque, l'histoire d'Henri est celle de la France. Henri confia la régence de ses états à sa soeur Catherine. L'édit de Nantes avait établi la tolérance en France en faveur des protestants, mais en Béarn la tolérance n'existait plus pour les catholiques, et c'était par une grâce spéciale que la reine Marguerite avait pu assister, avec un nombre déterminé de personnes, aux offices catholiques dans l'intérieur du château de Pau. Quand Henri IV rétablit l'exercice public du culte catholique dans la souveraineté du Béarn (1599), deux évêques furent nommés, et douze paroisses ayant des curés appointés sur le domaine furent attribuées aux catholiques. En 1607, Henri IV,
qui avait réuni ses domaines particuliers à la Couronne,
déclara que les souverainetés du Béarn et de la Navarre
resteraient indépendantes de la Couronne de France, et qu'elles
continueraient à avoir un gouvernement séparé. Un
conseil d'État fut installé à Pau, et un secrétaire
d'État de Navarre et de Béarn dut résider à
Paris auprès du roi, Henri IV, assassiné en 1610, laissa
la couronne à Louis XIII mineur. Le
conseil de régence, hostile aux protestants, accueillit favorablement
les réclamations des évêques de Béarn, qui demandaient
la mainlevée des biens ecclésiastiques et qui
Histoire après
1789.
Ni Béarnais, ni Basques n'entrèrent de bon gré dans le moule départemental et dans la nouvelle unité française : ils protestèrent fort vivement; les Basques surtout, du moins ceux de la basse Navarre, au nom de leur « indépendance » : et, de fait, le roi de France s'appelait bien roi de France et de Navarre. Ils refusèrent d'envoyer leurs députés à Paris à la réunion des Etats généraux; mais ils n'étaient pas de force, il fallut se soumettre, « leur protestation s'étant perdue dans le tourbillon qui entraillait tous les esprits ». Depuis que le pays est constitué en départements, la différence radicale de ses deux éléments de population, disons linguistiques, est loin d'avoir entièrement disparu. Il y a toujours, dans le contrée, des Basques à l'Ouest, des Béarnais à l'Est, ceux-ci trois à quatre fois plus nombreux que ceux-là. Outre sa participation à l'histoire générale de la France, on peut citer, parmi les quelques faits qui lui sont particuliers : le séjour de Napoléon Ier au château de Marrac, voisin de Bayonne, en 1808 : c'est là qu'il arracha leur abdication à Charles IV, roi d'Espagne, et à son fils Ferdinand VII, et qu'il octroya la couronne des Espagnes à son frère Joseph; l'invasion anglo-hispano-portugaise en 1814; le siège de Bayonne, qui résista victorieusement et ne se rendit qu'après l'armistice; la bataille d'Orthez perdue par Soult, le 27 février, contre l'armée coalisée; le passage de l'armée qui conquit l'Espagne en 1823, d'Irun au Trocadéro; les nombreux séjours de la cour impériale à Biarritzet l'entrevue de Napoléon III avec Bismarck; enfin, et surtout, car, en réalité, c'est là le plus important, l'émigration qui a jeté au XIXe siècle plus de 80.000 Béarnais et Basques, peut-être bien 100.000, en divers pays du monde, principalement en Argentine et en Uruguay, et, à un bien moindre degré, au Brésil, au Chili, à Cuba, aux Etats-Unis, en Algérie; sans rien dire de l'émigration à l'intérieur, notamment vers Bordeaux et vers Paris. Un autre fait d'importance, c'est l'invasion pacifique des étrangers et, en moins grand nombre, des Français: en tant que malades, vers les Eaux-Bonnes et les Eaux-Chaudes; en tant que malades aussi ou convalescents, vers les villes d'hiver, telles que Pau, enfin, en tant que baigneurs en mer à Biarritz, Saint-Jean-de-Luz, Hendaye et toutes les anses de la rive océanique. Cette « invasion » a fortifié le pays, qu'anémiait l'émigration; elle lui a permis de ne presque pas diminuer de population malgré le départ de tant d'expatriés; enfin elle y a popularisé la langue française, jadis presque inconnue dans la contrée, et qui marche à partir de cette époque à la conquête générale du pays. (A. Joanne). |
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