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Histoire de l'Europe > L'Espagne
L'histoire de l'Espagne
L'Espagne au Moyen Âge
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L'Espagne médiévale Le royaume
wisigothique
Al-Andalus
L'Espagne musulmane
Les royaumes chrétiens
La Reconquista
Les Romains avaient arraché l'Espagne à Carthage à l'issue de la seconde guerre punique (219-204), et après la prise de Numance (133), étaient restés les seuls maîtres de la Péninsule.  Ils la possédèrent jusqu'au Ve siècle de notre ère. En 410 les Vandales, les Suèves et les Alains dévastèrent l'Espagne et s'y établirent. Mais dès 428 les Vandales avaient cédé la place aux Wisigoths, qui bientôt s'emparèrent de la Gaule méridionale et de L'Espagne entière, sauf le petit royaume des Suèves au Nord-Ouest, dont ils firent même la conquête en 585. En 611, les Wisigoths, ayant évincé les Grecs, qui, sous le règne de Justinien, avaient repris pied en Espagne et en avaient occupé les côtes méridionales, se trouvèrent en possession de toute la Péninsule. Ils adoptèrent la langue romane, se convertirent au catholicisme (après avoir été ariens) et installèrent leur capitale à Tolède, d'où ils régnèrent sur un royaume florissant.

L'Espagne sous les rois goths

L'État wisigothique.
Le roi des Wisigoths  était choisi, d'abord par les soldats réunis, plus tard par une assemblée de grands et d'évêques, et cette institution de l'élection ne put jamais être abolie; rarement un souverain parvint à faire agréer pour successeur son fils, et encore fallut-il à celui-ci être reconnu par l'assemblée en question. Les pouvoirs de la royauté étaient étendus, mais il y avait cependant deux restrictions : les rois ne pouvaient prononcer ou faire prononcer un jugement hors des formes de la justice; leurs décrets et ordonnances n'étaient exécutoires que leur règne durant et ne devenaient lois du royaume que par une confirmation formelle des conciles. Ceux-ci n'étaient pas toujours des synodes religieux; c'étaient, le plus souvent, par suite de la présence des grands et par la nature des sujets traités, de véritables représentations nationales. Le roi eut bientôt une cour (curia) dont les membres étaient appelés curiales ou privuti ou proceres; des personnages portant le titre de comte, comme les fonctionnaires des derniers jours de l'empire romain, étaient comme ses ministres. 
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Page du Bréviaire d'Alaric.
Page d'un manuscrit de la Loi romaine des Wisigoths
ou Bréviaire d'Alaric (828).
(Bibl. Nat. Ms. latin 4667, f° 49, verso).

Pour l'administration locale, il y avaient sept ducs ou gouverneurs de province : Tarraconaise, Carthaginoise, Galice, Lusitanie, Bétique, Maurétanie Tingitane et Narbonaise, sous lesquels des comtes administraient les cités pour le roi. La population était répartie en classes comme chez les Romains, mais les distinctions étaient moins nettement établies; l'influence de l'Église, le mélange des populations, le sentiment de solidarité en présence des dangers qui menaçaient tous à la fois eurent, à ce point de vue, un heureux effet; le servage même s'adoucit considérablement et en Espagne ne garda rien de l'esclavage antique. La législation, dont le Codex legis Visigothorum de Receswinth, traduit plus tard sous le nom de Fuero Juzgo, est le principal monument, était plus douce et plus équitable que celle des Francs. Bien des textes de cette législation témoignent que l'agriculture était en honneur et que le commerce et l'industrie n'étaient pas tout à fait morts. 

Même les lettres et les arts ne furent pas sans être cultivés par les Wisigoths d'Espagne, mais ils furent bien inférieurs sous ce rapport à leurs cousins les Ostrogoths d'Italie. De leur art, nous ne connaissons que quelques sculptures grossières et des médailles, imitations de l'art romain, et quant aux littérateurs, presque tous gens d'Église, Orose, Idace, les deux Avitus, Eutrope, Léandre, Isidore de Séville, s'ils sont presque tous Hispano-Romains d'origine, nous les voyons du moins honorés et protégés par les Goths (L'Espagne wisigothique). 

Al-Andalus, l'Espagne musulmane

Les Arabes vinrent à leur tour en 710 : ils refoulèrent les Wisigoths vers le Nord et les renfermèrent dans les montagnes des Asturies; en 719, ceux-ci ne possédaient plus que le petit royaume d'Asturie (nommé plus tard royaume d'Oviédo, et ensuite de Léon). L'Espagne fut alors une province du grand empire des califes de Damas; mais en 756, elle forma un empire à part, connu sous le nom de califat de Cordoue (du nom de sa capitale) ou califat omeyyade (du nom de la dynastie des Omeyyades, qui, détrônée en Orient, s'était réfugiée en Espagne). Les possessions des Arabes (ou des Maures, comme on les appelait) en Epagne furent connues sous le nom d'Al-Andalus, un nom peut-être d'origine pré-romaine, et dont dérive celui de l'Andalousie, mais qui s'étendit bien au-delà. Le califat de Cordoue cessa d'exister en 1031, après 275 ans d'existence, et se démembra en plusieurs principautés indépendantes ou taifas. On en compta jusqu'à 19 : Cordoue, Séville, Jaén, Carmone, Niebla, l'Algarve, Algésiras, Murcie, Orthuela, Valence, Denia, Tortose, Lérida, Saragosse, Huesca, Tolède, Badajoz, Lisbonne, Majorque. 

Pendant ces trois siècles, le petit royaume goth du nord s'était accru aux dépens des califes : il possédait au XIIIe siècle tout le pays qui s'étend jusqu'au Duéro (Les royaumes chrétiens). Mais d'autres facteurs expliquent l'affaiblissement de la puissance d'Al-Andalus pendant cette période. Ainis, en 1086, l'Espagne méridionale avait envahie par les Almoravides venus du Maroc, qui, après la victoire de.Zéldka, restèrent maîtres du pays jusqu'en 1145; vinrent ensuite les Almohades (1146-1269), puis les Mérinides (1267-1344). Au milieu de ces révolutions successives Les Maures perdaient chaque jour du terrain : vaincus en cent combats, notamment à Las Navas de Tolosa (1212) et à Tarifa (1340), ils eussent été promptement défaits sans les dissensions des princes chrétiens à la fin du XIIIe siècle, le royaume maure de Grenade susbsita jusqu'en 1492 (L'Espagne musulmane).

La civilisation arabe en Espagne.
Les musulmans qui s'étaient établis en Espagne étaient une population en majeure partie d'origine berbère. Elle s'était installée dans la péninsule à côté des anciens indigènes, des Romains et des Wisigoths (L'Espagne wisigothique); puis étaient venues des tribus yéménites, syriaques, égyptiennes, des tribus sahariennes de gens voilés, des Marocains. Tout ces nouveaux venus, qui imposaient leur lois, mais ne représentaient pas nécessairement un poids démographique très important, s'étaient longtemps agités avant de se fondre et de trouver une assiette définitive. Des gouverneurs ou oualis, subordonnés au gouverneur de l'Afrique, puis des émirs relevant des califes de Bagdad, puis des émirs indépendants ou califes, et enfin de nombreux chefs de provinces appelés aussi émirs avaient gouverné ce monde, conformément aux traditions islamiques. Les vaincus, Juifs ou Romains, n'avaient été en général dépossédés ni de leurs champs, ni de leurs maisons, et avaient formé comme une population tributaire, payant la dîme de ses revenus et parlant à la fois la langue espagnole et l'arabe. 
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Un des kiosques de l'Alhambra.

L'agriculture avait été encouragée, surtout dans les provinces de Valence, de Murcie, d'Andalousie, où l'on admire encore les magnifiques barrages construits par les Arabes et où les conquérants paraissent avoir introduit ou propagé le mûrier, le ver à soie, l'amandier, la canne à sucre. L'industrie était prospère dans bon nombre de villes; à Jaen étaient, dit-on, 600 manufactures de soie; à Almeria, 6000 métiers pour la fabrication des draps, des brocarts, des cotonnades; on fabriquait des tapis à Baeza, des cristaux à Malaga, des cuirs gaufrés à Cordoue, des armes et des bijoux à Cordoue, Murcie, Tolède, Saragosse, et ces produits étaient recherchés en Afrique et en Europe; le papier, dès 1009, était fourni abondamment par Jativa; on exploitait les mines d'Alhama, de Guadalcanal, de Murcie, etc. En un mot, la prospérité matérielle avait été grande, les villes riches, les campagnes peuplées, et, si on ne peut accepter comme exactes les indications des auteurs arabes qui disent que la seule vallée du Guadalquivir avait 14000 villages, il n'en est pas moins vrai qu'il y avait alors des régions extrêmement florissantes.

Les Arabes d'Espagne s'adonnèrent aussi aux lettres, aux sciences et aux arts, et eurent une civilisation qui, pour être peu originale, ne manqua pas d'éclat. Le nombre des savants en tout genre, que mentionnent les historiens, est vraiment incroyable; citons seulement les théologiens Abou Ali Alkali, Aboû'l-Abbâs, le philosophe Averroès, les mathématiciens Ibn-Zelti, Ibn-Djâber (à qui on attribue l'algèbre), des médecins renommés même parmi les chrétiens, les historiens Ibn Hayyân (mort en 1076), Ibn el-Khatib (mort en 1374) et Ibn Bach Kouwal (mort en 1182), les géographes Edrisi (mort en 1154) et Ibn Djobeïr (mort en 1215), et une foule de poètes, parmi lesquels bon nombre de femmes. Parmi les oeuvres artistiques, mentionnons la fameuse mosquée de Cordoue (786-796), le merveilleux palais d'Ez-Zahar malheureusement disparu (965), la Puerta del Sol de Tolède (1095), l'Alcazar et la Giralda de Séville (1171-1196), l'Alhambra de Grenade (1248-1306), le Généralife de la même ville (1350), les jardins de l'Alcazar (1466), etc.

Les royaumes chrétiens et la Reconquista

On l'a vu, les Arabes n'ont jamais réussi à étendre leur pouvoir sur toute l'Espagne (L'Espagne musulmane). Une partie de la Péninsule ibérique qui, d'abord peu étendue, alla s'agrandissant peu à peu jusqu'à former un État, puis, par les conquêtes, s'étendant et se divisant en plusieurs États. Au fil du temps, ses royaumes chrétiens gagnèrent en puissance et refoulèrent les Arabes vers le Sud, ne laissant au final subsister que le petit royaume de Grenade, auquel ils mirent un terme en 1492. L'histoire extérieure de cette Espagne restée chrétienne se borne ainsi presque à une lutte de sept siècles contre les Arabes et à une reconquête (Reconquista) progressive et ininterrompue du sol national, histoire enjolivée de mille légendes que nous racontent les vieilles chroniques et les romances populaires de l'Espagne(Les royaumes chrétiens de l'Espagne médiévale). 

On sait qu'une poignée de Goths, fuyant devant le flot de l'invasion musulmane qui recouvrit si rapidement toute la péninsule, se réfugia dans les Pyrénées Cantabriques comme dans une forteresse et se choisit pour roi un parent de Roderic, Pélage (718-737), dont l'histoire tient du mythe et qui est regardé comme le premier roi des Asturies. Ses successeurs, Favila (737-739), Alphonse le Catholique (739-756), Fruela (756-768), Aurelio (768-774), Lilo (774-783), Bermude le Diacre (791-793), Alphonse II (793-842), Ramire (842-850), Ordoño (850-866), Alphonse III (866-910) étendirent le petit royaume sur toutes les Asturies, la Galice, le pays de Léon, et Garcia, fils d'Alphonse III, devint roi des Asturies et de Léon, tige des rois de Castille, à qui fut soumis tout le Nord-Ouest de la Péninsule. 

En même temps que les compagnons de Pélage de ce côté fondaient un État chrétien, un autre se formait dans les pays basques, plus tard appelé royaume de Navarre, et plus à l'Est encore un comté qui allait devenir le royaume d'Aragon. Ainsi du pied des Pyrénées, leur refuge, les chrétiens commençaient la reconquête; mais ces trois États qu'ils avaient fondés furent pendant des siècles en guerre l'un contre l'autre, désolés de plus par des guerres intestines, et ce n'est qu'au XIIIe siècle qu'ils commencèrent à repousser les Arabes. Le royaume de Navarre, cerné par ses voisins de Castille et d'Aragon, prit la moindre part à cette lutte et ne put s'étendre vers le Midi, tandis que les princes d'Aragon conquéraient les Baléares, Valence, Alicante, et que les rois de Castille s'emparaient de la Nouvelle-Castille, de l'Estrémadure et enfin de l'Andalousie. Il y a donc alors trois royaumes distincts, dont chacun a son histoire, sa civilisation propre et ses coutumes; il n'y a une Espagne chrétienne que du jour où une alliance heureuse réunit sous une même administration les deux puissants États de Castille et d'Aragon et prépara l'unité politique de la Péninsule (moins le Portugal). C'est à cet avènement, qui eut lieu en 1474, que commence l'histoire de l'Espagne moderne.

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