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Le Puy-en-Velay

Le Puy ou Le Puy-en-Velay est une ville de France, dans le département de la Haute-Loire. Population 20, 500 habitants. Cette ville est située sur la Borne et son affluent le Dolezon ou Dolaison, autour du mont Anis dont il occupe le sommet et les versants Ouest, Sud et Est; altitude minima de 623 m (fontaine Crozatier); la base de la cathédrale est à 686 m; le rocher (dyke volcanique) Corneille s'élève à 760 m.

Histoire.
Grégoire de Tours cite Anicium comme un simple lieu : la capitale primitive des Velaves était Ruessio ou Revessio, qui subit les atteintes des barbares et fut entièrement détruite par les Vikings en 886. Il est assez vraisemblable toutefois, par analogie, que le mont Anis, comme le Puy-de-Dôme, avait été pour les Velaves un centre religieux : c'est ce que semble attester la conservation d'une pierre mégalithique (pierre de la lèpre, puis pierre des fièvres), adoptée au Moyen âge par la superstition chrétienne, reléguée de nos jours derrière une grille de la cathédrale. Sur le mont Anis, vers le milieu du Ve siècle, le culte de saint Michel remplaça probablement celui de Mercure-Teutatès, puis fut lui-même transféré au dyke d'Aiguilhe (église' romane) pour faire place à la Vierge. Des fragments lapidaires recueillis par Aymard, et déposés au musée de la ville, ont révélé sur la même montagne l'existence d'un temple gallo-romain, dont la dédicace demeure incertaine. 

La mythologie 'chrétienne prend ensuite possession du mont Anis, avec l'épiscopat légendaire de Saint-Georges, l'apparition de la Vierge, les guérisons merveilleuses, le cerf qui trace sur le sol l'enceinte de la future église, la haie d'aubépine plantée sur cette trace et qui fleurit le lendemain; saint Martial laisse à l'église vélavienne plusieurs reliques, entre autres, un « soulier de la vierge » (qui figure dans le trésor). Au VIe siècle, après la translation du siège épiscopal, l'abside et la « coupole angélique » s'élevèrent par les soins de saint Vosy et de l'architecte Scutaire. Les pèlerins affluèrent, Charlemagne y serait venu deux fois. 

Un comte de Bigorre fit hommage de son fief à Notre-Dame-du-Puy. Avant le concile de Clermont, le pape Urbain II désigna comme légat, pour diriger la première croisade. l'évêque du Puy, Adhémar de Monteil, que suivirent 400 chevaliers. Au siècle suivant, les évêques, devenus les maîtres, sous le nom de comtes du Velay, firent appel contre les comtes d'Auvergne ou leurs autres rivaux laïques aux rois de France 'Louis VI et Louis VII; en 1173, ce dernier roi partagea le droit de monnaya e entre l'évêché et la vicomté de Polignac. Cet arbitrage, Philippe-Auguste l'exerce entre l'évêque et les habitants dont il reçoit l'aveu : en 1218, il confirme solennellement les coutumes municipales que l'Eglise combattait ou contestait, et la ville devint, dans une certaine mesure, ville de bourgeoisie. Le consulat fut supprimé, il est vrai, en 1277, par la cour du roi, mais il fut rétabli en 1343, et confirmé en 1383 par une bulle de Clément VII.

C'est à la même époque (1381) que se constituent les Etats particuliers du Velay : les consuls du Puy y siègent ainsi qu'aux Etats de Languedoc. Au droit de régale et au droit de gîte, les rois de France avaient ajouté un cannonicat dans l'Eglise du Puy, par subrogation aux droits du comte de Viennois, Humbert II. La ville leur accorda des secours d'hommes et d'argent dans la guerre contre les Anglais. Elle fit des obsèques vraiment nationales à Bertrand Du Guesclin), et le couvent des Dominicains (aujourd'hui église Saint-Laurent) retint une partie des dépouilles mortelles du connétable. Le « roi de Bourges» visita Le Puy en 1425, et en reçut un secours important. En 1429 Jeanne d'Arc envoya sa mère au pèlerinage jubilaire de Notre-Dame, dont la fin coïncida avec la reprise d'Orléans sur les Anglais. En novembre 1469, par une ordonnance datée de Montils-les-Tours (publiée par A. Chassaing dans la Nouvelle revue historique du droit français et étranger, 1884), Louis XI sanctionna les articles arrêtés entre les consuls et les habitants du Puy. 

Longtemps l'évêque-comte et le vicomte de Polignac s'étaient disputé le droit exclusif de battre monnaie, puis ils se l'étaient partagé. Enfin le roi en jouit seul, mais en vertu de traités acceptés par ses rivaux, devenus ses sujets. Les débuts de la Réforme semblèrent d'abord resserrer l'alliance de la royauté et de l'épiscopat (pèlerinage de François ler, 1533) : la ville était fort attachée, même par des raisons d'intérêt, aux pratiques pieuses et aux cérémonies que les calvinistes taxaient d'idolâtrie. Son palladium, depuis le XIIIe siècle, était une « vierge noire ». rapportée Orient par saint Louis (d'après la tradition populaire). Les reliques, les pèlerinages, les jubilés, les indulgences pontificales, c'était son histoire et sa vie. Les bourgeois de la ville haute se fortifièrent (vestiges encore notables : porte Pannessac) et repoussèrent toutes les attaques des huguenots, celle de Blacons, lieutenant du baron des Adrets (1562), celle de Châtillon (1585). Si la ville ne connut pas les horreurs de la Saint-Barthélemy, c'est qu'en fait les protestants y étaient très peu nombreux, et furent considérés bénévolement comme ayant abjuré. Mais le baron de Saint-Vidal y représenta la « Sainte Ligue » aux côtés de l'évêque Antoine Il de Sénectère, et les « ponts » furent parmi les derniers Français à reconnaître Henri IV sous l'épiscopat de Jacques Ier de Serres (1596).

Louis XIII rendit contre la dentelle, principale industrie de la ville, des édits somptuaires dont le parlement de Toulouse étendit l'application à son ressort en 1640 : heureusement pour Le Puy, un jésuite influent, François Régis, fit rapporter l'arrêt, et devint un saint aux yeux de la ville avant d'être canonisé par Clément XII. Colbert protégea la dentelle, et eut aussi le mérite de ne pas la réglementer; il était d'ailleurs difficile de transformer cette industrie domestique en manufacture royale. Mais le commerce en était gêné par les douanes intérieures (arrêt du consul du 6 août 1707), et dans l'Encyclopédie méthodique Roland de La Platière note que les gros bénéfices restaient entre les mains des intermédiaires anglais, hollandais, lyonnais; qu'aucune maison du Puy n'était parvenue à une grande fortune; et cependant les ouvriers (6000 au Puy sur 20.000 en tout) ne touchaient que de maigres salaires (10 à 12 sous pour la dentelle de fil, 5 ou 6 sous pour la dentelle de soie). L'intendant Ballainvilliers, dans ses mémoires officiels manuscrits de 1788 (bibliothèque municipale de Montpellier), donne des chiffres un peu plus élevés : de fait, le commerce avec les Indes occidentales avait repris depuis la paix de Versailles et surtout depuis le traité de commerce de 1786 avec l'Angleterre.

En 1789, la ville du Puy demeurait la reine du pays de Velay, et la reine absolue. Elle en concentrait la vie, elle en réglait les salaires presque sans concurrence : les grandes voies nationales de Nîmes à Paris et de Lyon à Bordeaux, qui se croisent dans le Velay, étaient inachevées; la seconde, praticable seulement de Lyon au Puy. Du Puy à Brioude, pas de pont pour passer l'Allier. Jusqu'en 1757, les péages des Polignac sur ces deux routes (Brives-sur-Loire et Trouillas [c.-à-d. Trois-Liards] sur la Borne) interceptent les communications les plus indispensables, et le pont de Brives venait à peine, en 1789, d'être terminé. Ainsi tous les intérets, toutes les transactions tendaient vers le même point. Parmi les localités vélaviennes, Le Puy seul était représenté constamment aux Etats de Languedoc par ses consuls; dans la ville, leur charge est réduite à la présidence du conseil, à l'édilité, à l'organisation matérielle des fêtes publiques ; elle consiste surtout dans la perception des impôts, répartie entre vingt-deux quartiers. Maintes fois des charges vénales de maire avaient été établies par une royauté de plus en plus besogneuse; mais toujours les habitants, après les avoir subies, s'étaient résignés à les racheter.

Le consulat électif l'a donc emporté, mais seuls les bourgeois, divisés eu classes, sont électeurs ou éligibles; en 1783 seulement, les commerçants en dentelle ont réussi à passer de la cinquième classé à la seconde. Cela marque que les fonctionnaires en sont déjà à défendre leurs positons. L'intendant de Languedoc est représenté par un subdélégué. Les treize justices royales, épiscopales, mixtes (du paréage), etc., ont fait place peu à peu à l'autorité de la sénéchaussée royale (1560), fondue avec le présidial de 1689 : la lieutenance criminelle du Puy s'étend sur le Gévaudan et le Vivarais, outre le Velay. Les prisons, peuplées de 60 prisonniers en moyenne, ne sont « ni sûres, ni saines » (Ballainvilliers). La ville loge un régiment de cavalerie, La municipalité est subordonnée surtout par les Etats du Velay, dont l'evêque est président-né. Aussi, dès 1789, le mouvement d'opinion est nettement antiépiscopal (élection du curé de Craponne); l'impopularité des Polignac porte la noblesse du côté des idées de La Fayette dont la statue s'élève, depuis 1883, sur une des places publiques du Puy, quoique son château natal ne soit pas dans le Velay. 

Comme chef-lieu, Le Puy gagna par l'annexion du district de Brioude au Velay, lors de la formation du département de la Haute-Loire. En 1793, la « Vierge noire » fut brûlée solennellement. Depuis deux siècle, la ville basse, les faubourgs se sont quelque peu développés; les promenades (le Breuil) et  les boulevards ont été aménagés. Quoique la haute ville conserve son caractère, ses rues étroites et raides, ses escaliers, etc., inséparables de sa topographie, la population vit plus au large, et beaucoup au dehors, dans les cafés, aux marchés : elle a d'ailleurs relativement moins augmenté que dans l'ensemble du département.

Au point de vue intellectuel, Le Puy eut sous l'Ancien régime, depuis le XIIIe siècle, une Université connue sous le nom de Saint-Mayol et dont les réunions littéraires se nommaient puids d'amour : les troubadours Pons de Capdeuil, Guillaume de Saint-Didier, Pierre Cardinal y ont figuré. Le collège de jésuites, fondé au XVIe siècle, devint collège royal sous Louis XV, et lycée depuis deux siècle.

En dehors des célébrités locales, Le Puy est le lieu de naissance du général Mouton-Duvernet, du fondeur Crozatier, bienfaiteur du pays, de Jules Vallès et de Ch. Dupuy.

Monuments.
La cathédrale Notre-Dame a des parties gallo-romaines sinon dans sa disposition actuelle, au moins dans ses substructions et ses matériaux. Elle a été l'objet, il y a cent-cinquante ans, d'une savante restauration, due surtout à Malay, qui a réparé autant que possible les méfaits de l'âge classique afin de restituer l'ensemble qui se rapporte aux XIe et XIIe siècles. L'histoire, très compliquée du monument est ainsi résumée dans un écrit anonyme (Le Puy et ses environs), publié par la Société scientifique de la Haute-Loire : 

« Au début, une petite basilique quadrangulaire, occupant la place du choeur actuel; vers le VIe siècle, addition de deux collatéraux; puis, sous Charlemagne, prolongement des trois nefs et addition de deux transepts, le tout formant une croix grecque, avec dôme au centre ; vers le XIe siècle, addition de deux travées, ce qui fit une croix latine; au XIIe siècle, addition des deux travées occidentales avec la façade actuelle et les deux porches de Saint-Jean et du For ».
On aborde la basilique par la rue des Tables (allusion aux étalages qui la doublent sur toute sa longueur aux jours de grandes fêtes). Au pied de la montée est une fontaine dont la flèche commémore le « miracle de 1320 » : un enfant de choeur qui aurait été tué par les juifs et miraculeusement ressuscité. C'est le meilleur point de vue pour embrasser l'ensemble de la façade romano-byzantine, en pierres alternées de rouge et de blanc. La montée des Tables (260 marches taillées dans le roc) se continue par un escalier de 108 degrés qui pénètre sous les voûtes de l'édifice; le sol de la basilique correspond en effet au milieu de la façade. A gauche de l'escalier sont l'Hôtel-Dieu (chapelle), puis l'ancien bâtiment féodal des Etats du Velay; à l'entrée des voûtes, hautes de 20 m, les portes à vantaux sculptés sur bois de deux anciennes chapelles (XIe siècle), celle de Saint-Gilles à gauche, celle de Saint-Etienne à droite, donnent issue sur les bas-côtés. Sous les voûtes, il y a des vestiges de fresques. On arrive ensuite à la porte dorée, qui est bordée de deux colonnes en porphyre rouge et près de laquelle, sous grille, est la « pierre des fièvres ». Autrefois l'escalier se prolongeait jusqu'au centre de l'église, ce qui faisait dire qu'on entrait à Notre-Dame par le nombril et qu'on en sortait par les oreilles. Aujourd'hui l'escalier bifurque : on prend à gauche pour visiter le cloître (IXe siècle) et à droite pour pénétrer dans l'église.

Au centre du choeur, sur l'autel, est l'image de la Vierge, sous la grande coupole du dôme. La grande nef est montée en coupoles oblongues contre-butées par les bas-côtés. Les piliers sont lourds et frustes, les trois nefs, sombres et majestueuses. Il y a deux portes latérales (porche du For et porche Saint-Jean), et entre les deux la «-porte papale-» avec l'inscription Papa vive Deo.

En résumé, le grand porche pratiqué sous la nef, l'escalier qui conduisait au centre de la basilique et permettait aux pèlerins de suivre du dehors le prêtre officiant, les coupoles oblongues, les clochers-arcades simulés en façade à la place des tours jumelles, les archivoltes à claire-voie du portail latéral sud, n'ont «  nulle part d'analogue-» (Vivien Saint-Martin).

La basilique a conservé en partie ses anciennes dépendances, baptistère, campanile (carré jusqu'aux deux tiers de sa hauteur et terminé en pyramide); forteresse épiscopale, du XIIIe siècle en partie (salle capitulaire ornée de peintures murales anciennes). 

Outre la vieille église Saint-Laurent des Jacobins, et, aux environs immédiats, la chapelle Saint-Clair et la chapelle Saint-Michel, Le Puy a, d'autre part, quelques monuments modernes à signaler : le palais de justice bâti en brèche brune du mont Denise (1835), la fontaine Crozatier (1855), avec, en relief, le portrait, du donateur, et cinq belles statues allégoriques de Bosio; la statue colossale (16 m) de Notre-Dame de France, fondue par Bonnassieux avec les canons pris à Sébastopol et inaugurée en 1860 par l'évèque Morlhon (du haut du rocher Corneille elle domine tout le pays; de la place du Breuil, à 135 m en contre-bas, elle paraît plutôt de proportions mesquines); enfin la statue de La Fayette, par Hiolle (1883) : le général élève en l'air la cocarde nationale. (H. Monin).

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Dictionnaire Villes et monuments
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