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Les fontaines ont, à toutes les époques et dans toutes les civilisations, joué un grand rôle dans la décoration des villes et des habitations de plaisance aussi, en dehors des fontaines proprement dites, dans lesquelles des nappes et des jets d'eau constituent seuls toute la beauté des effets qu'on y admire, a-t-il été souvent, depuis l'Antiquité la plus reculée jusqu'à nos jours, fait appel au talent de l'architecte et à celui du sculpteur pour encadrer d'une façon monumentale et pour agrémenter de figures et de motifs d'ornement les effets ou seulement les conduits d'eau amenés par la science de l'ingénieur hydraulicien. On ne peut douter que les anciens édifices de la Mésopotamie, dont la construction massive témoigne un tel souci de ménager aux voyageurs des renfoncements pourvus d'ombre, n'aient compris une ou plusieurs fontaines, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur de leur enceinte, et Sarzec (Découvertes en Chaldée, Paris, 1883, p. 16, dem.-fol.) a retrouvé encore en place, en avant de la grande façade Nord-Est du palais chaldéen de Tello et au milieu d'une plate-forme dallée, un bassin de pierre remarquable par les bas-reliefs dont il est orné, bas-reliefs représentant une suite de figures de femmes debout, les bras étendus et tenant de chaque côté, dans leurs mains réunies, un vase d'où s'échappe un double flot de liquide qui retombe ensuite en bouillonnant jusqu'à terre. Du monde oriental où elle s'est perpétuée et a trouvé des encouragements dans les prescriptions du Coran, la tradition des fontaines monumentales a gagné la Grèce, et Pausanias (Corinthie; Paris, 1814, t. I, passim) donne l'origine et une trop courte description de nombreuses fontaines encore existantes au commencement du IIe siècle de notre ère, entre autres, à Corinthe : la fontaine Pirène, ornée de marbre blanc et dans laquelle étaient pratiquées des loges en forme de grottes d'où l'eau coulait dans un bassin découvert, et la fontaine de Lerne, qui était entourée de colonnes et où étaient disposés des sièges pour ceux qui voulaient y venir prendre le frais pendant l'été. Une fontaine, à Bhaktapur au Népal. © Serge Jodra, 2011. Rome fut, plus que toute autre ville de l'Antiquité, la ville des fontaines monumentales et des fontaines ornées de sculptures, et les anciennes fontaines de cette ville pouvaient se répartir en trois classes : les vastes châteaux d'eau construits à l'arrivée des nombreux aqueducs amenant l'eau de sources souvent lointaines; les fontaines jaillissantes et enfin les fontaines à bassin ou abreuvoirs. Pline l'Ancien (Hist. nat., XXXVI, 15 et 24) rapporte à ce sujet qu'Agrippa qui, pendant son édilité, donna une attention toute particulière à la mise en état des travaux hydrauliques de la ville de Rome, n'y fit pas construire ou réparer moins de 700 bassins, de 105 fontaines jaillissantes et de 130 châteaux d'eau, et on doit croire, autant d'après de nombreuses traditions que d'après les ruines que l'on rencontre fréquemment en Italie, en Gaule et dans les autres provinces de l'Empire, que tout le monde romain avait suivi l'exemple de la capitale. La fontaine de Neptune, dans les jardins du château de Schoenbrunn (Autriche), et, ci-dessous, une autre fontaine de Neptune, place Stanislas, à Nancy. Images : The World Factbook. Les traditions de l'antiquité romaine se perpétuèrent longtemps en Gaule, et Viollet-le-Duc (Dictionnaire de l'Architecture, V, 527) n'hésite pas à reconnaître ces traditions dans le programme, presque toujours le même, des plus anciennes fontaines établies pendant le Moyen âge au bord des routes : il cite notamment, en dehors de Poitiers, le long du Clain, une fontaine. placée en contre-bas de la route et remontant au XIVe siècle, mais restaurée en 1579. Cette fontaine se compose d'une niche en maçonnerie abritant le bassin de puisage, niche surmontée d'une statue et ornée des armoiries du fondateur. Des bancs, en prolongation des côtés de la niche, invitent à se reposer, et un escalier, établi le long d'une des parois, permet de descendre de la route au niveau du bassin. Dans les villes, les plus anciennes fontaines isolées, presque les seules que l'on décorât à cette époque, consistaient en un bassin peu profond, élevé au-dessus du sol et au milieu duquel une colonne, parfois ornée et surmontée d'un chapiteau et peut-être d'une statue, recevait intérieurement les tuyaux de distribution d'où l'eau s'échappait par des sortes de gargouilles en pierre ou en métal. Plus tard, la colonne ou le faisceau de colonnes fut remplacé par un pinacle orné de sculptures, comme on le voit à la fontaine dite de la Pucelle, à Rouen, laquelle date du milieu du XVe siècle. La Fontaine Samson, sur la grande place de Ceske Bujedovice (République Tchèque); en médaillon, un des mascarons cracheurs d'eau à la base de la fontaine; au fond, la Tour noire. Photo : © Angel Latorre, 2008. C'est surtout de la colonne surmontée d'une statue et s'élevant au milieu d'un bassin que procèdent une grande partie des fontaines isolées que la Renaissance vit s'élever à profusion dans certaines villes de Suisse, d'Italie (Les fontaines de Rome), d'Allemagne et de France; les fontaines de Berne entre autres, lesquelles sont entretenues avec un soin pieux par l'édilité de cette ville, doivent à la statue surmontant leur colonne centrale les noms de fontaines de l'Ogre, de l'Ours, de l'Arbalétrier, de l'Arquebusier, du Banneret, du Héraut, du Joueur de cornemuse, de Samson, de Moïse, de Berthold V, d'Anna Seiler, de la Justice, etc. Cependant, sous la Renaissance, dans les fontaines soit isolées, soit adossées à des constructions, l'architecture tendit à reprendre une plus grande place, et Paris, par exemple, vit s'élever, en 1550, la fontaine des Innocents, d'abord composée de trois travées disposées à l'angle de la rue aux Fers et de la rue Saint-Denis, plus tard complétée lors de son transport, en 1788, à son emplacement actuel, d'une quatrième travée et offrant d'élégantes arcades ornées de chaque côté de deux pilastres corinthiens encadrant des bas-reliefs; de même aussi la fontaine Médicis, élevée dans les jardins du Luxembourg et transportée à sa place actuelle en 1861, se distingue par une masse imposante comme architecture et bien mise en valeur par l'allée d'arbres et le bassin qui la précèdent. Une fontaine publique, à Oran, en Algérie. © Serge Jodra. Mais, malgré le grand luxe de fontaines qui décorèrent à la fin de cette période les jardins et les palais de plusieurs villes d'Italie, fontaines dans lesquelles les statues faisaient corps et s'harmonisaient avec les vasques, les rochers et les motifs d'une architecture souvent tourmentée dans ses lignes, c'est à Versailles que furent obtenus, sous Louis XIV, les effets les plus splendides et les plus variés de cette architecture spéciale de fontaines monumentales, et c'est à Versailles aussi que la plus innombrable quantité de jets d'eau, l'élément par excellence des fontaines, a été mise en oeuvre pour donner la vie à des ensembles vraiment inimitables. La fontaine du Gros-Horloge, à Rouen. © Serge Jodra. Il suffit ici, en dehors des fontaines isolées, adossées, en encoignure et en renfoncement, fontaines dont les noms expliquent la situation, de rappeler, avec quelques détails, les noms le plus généralement donnés aux fontaines eu égard à leur forme et à leur décoration :
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