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Ce qui constitue
la philosophie socratique ne consiste pas dans un système,
ni même dans une école particulière. Par opposition
aux écoles antérieures et aux Sophistes,
Socrate changea l'objet de la philosophie, en
s'attachant bien plus à la connaissance
de l'humain qu'à celle du monde, sa marche, en substituant la philosophie
pratique à de vaines spéculations; sa méthode,
en remplaçant l'affirmation hardie et dénuée de preuves
des premiers philosophes et les déductions sophistiques par l'observation,
l'analyse et l'induction.
En ajoutant à cela l'idée d'une sanction
de la loi morale après la mort, on aura la
philosophie socratique. Ce qui la distingue des écoles précédentes,
c'est surtout son caractère moral : le
sage, selon Socrate, ne s'occupe que de sa nature morale, ne consulte que
lui-même pour savoir ce qui est vrai et faire ce qui est bien.
L'école
d'Epicure et celle du Portique prolongeront
à quelques égards la philosophie de Socrate. En fait, celui-ci
anime de son souffle toute la philosophie grecque,
dont il est en quelque sorte le fondateur, de même qu'on retrouve
l'esprit de Descartes dans un large pan de
la philosophie moderne.
Les écoles
socratiques.
Les Écoles qui sortirent du principe
socratique l'appliquèrent diversement et partiellement :
Les Cyniques,
les plus recommandables, ne présentèrent que son héroïsme
moral. Ces philosophes, ainsi nommés, à ce qu'on croit, du
mot grec cyon, cynos, chien, parce qu'ils bravaient les bienséances
sociales avaient pour chef Antisthène,
d'Athènes. Il soutenaient qu'on ne
doit rougir que de ce qui est criminel; ils affectaient un grand mépris
pour la parure, les richesses, les arts et les sciences; ils ne portaient
jamais qu'un manteau en lambeaux, un bâton et une besace. Les principaux
personnages de cette secte, après Antisthène, sont Cratès
de Thèbes, Diogène
et Ménippe. Cette secte se fondit dans
celle des Stoïciens.
Les Cyrénaïques
prirent à Socrate son sens pratique de la vie. Ils avaient pour
chef Aristippe de Cyrène. Ils enseignaient
que l'humain ne doit vivre que pour le plaisir. De là l'indifférence
morale qui semble, avoir caractérisé leur doctrine; de là
aussi, chez ceux qui pensaient que notre nature ne peut atteindre à
la volupté, parfaite, le mépris de la vie. L'École
cyrénaique eut, en somme, peu d'importance, et fut complètement
éclipsée par l'Épicurisme, qui, en adoptant les mêmes
principes des morale, les fit entrer dans un système à toutes
les parties duquel ils se rattachent intimement.
Les Mégariques,
empruntèrent à Socrate sa dialectique,
mais tous avec exagération. Cette école fut fondée
par Euclide de Mégare et Stilpon.
L'école mégarique s'occupa surtout de logique
et de métaphysique, et, dans la logique;
elle donna la préférence à la dialectique,
ce qui fit donner aux Mégariques le surnom d'éristiques
(disputeurs), parce qu'ils faisaient dégénérer
en dispute la science du raisonnement. Ils
se rattachaient, par suite, aux Sophistes et
aux Éléates. Ainsi que ceux-ci,
ils repoussaient la certitude des sens,
les regardant comme trompeurs, et lie voulant s'en rapporter qu'à
la raison. Ce principe
logique conduisait nécessairement à la négation du
mouvement, du changement, de la pluralité, et à l'affirmation
de l'immutabilité. C'est ce que firent les Mégariques. Un
principe qui leur appartient en propre est l'identification de l'être
et du bien, principe adopté plus tard par l'école
d'Alexandrie. La morale
tint peu de place dans l'école de Mégare;
cependant les Stoïciens lui empruntèrent
quelques maximes, entre autres celle-ci de Stilpon : "Le bien consiste
dans l'impassibilité."(R.).
L'école d'Elis
ou d'Erétrie, ainsi nommée de ses deux principaux représentants,
Phédon d'Élis
et Ménédème d'Érétrie,
et qui n'était qu'une branche de celle de Mégare. On y révoquait
en doute la réalité
objective des idées d'espèce,
et la possibilité d'arriver à une notion quelconque par des
jugements synthétiques. Elle est regardée
comme ayant marché plus fidèlement sur les pas du maître;
peut-être est-ce parce que cette école a laissé moins
de traces dans l'histoire.
Platon et Aristote.
Platon et Aristote
reproduisent la philosophie socratique dans sa méthode et dans ses
principes essentiels; on y retrouve l'esprit critique, qui n'était
pas le scepticisme, et qui distinguait avec
soin l'opinion de la science,
deux choses que le scepticisme confond volontiers. Platon s'attache de
préférence aux idées rationnelles
du beau, du vrai, du bien et du juste, que Socrate avait laissé
percer dans son enseignement. (R.). |
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