| Euclide de Mégare est un philosophe grec, qui fut d'abord disciple des Eléates avant de suivre les leçons de Socrate. On raconte que l'accès d'Athènes ayant été interdit aux habitants de Mégare, Euclide s'introduisait la nuit dans la ville sous un déguisement, afin d'entendre Socrate. Il assista à la mort de son maître et réunit quelque temps autour de lui, à Mégare, ses compagnons socratiques, entre autres Platon. Puis il fonda l'école de Mégare : il mourut vers 360 av. J.-C. Sa philosophie nous est assez peu connue ; elle paraît avoir été surtout un effort pour concilier l'éléatisme avec l'enseignement de Socrate. Euclide, après les Eléates et avec Platon, prenait pour point de départ l'opposition du sensible et de l'intelligible; selon lui l'incorporel seul, les Genres ou Idées peuvent posséder la véritable existence. Jusqu'ici il est d'accord avec Platon. Mais s'inspirant de Parménide, il refusait à l'être véritable l'action, la passion, le mouvement, en un mot tout ce qui se rattache au devenir. Euclide parait avoir connu la distinction entre la puissance et l'acte, si capitale dans la philosophie d'Aristote; mais c'était pour refuser à l'être réel la puissance; il n'y a de réel, selon lui, que ce qui existe en acte. L'être est donc un, impassible et immuable. Cet être, si semblable à celui des Eléates, Euclide l'identifiait avec le Bien de Socrate; il n'y a qu'un être et un seul bien; seulement nous le désignons sous différents noms : nous l'appelons Dieu, ou la Raison, ou la Sagesse; de même la vertu est une sous des noms divers. Cette thèse de l'unité et de l'immobilité absolue de l'être était pour Euclide, comme elle l'avait été pour Parménide, difficile à défendre directement; aussi fut-il-amené, comme les Eléates, et pour les mêmes raisons, à s'attaquer de préférence aux doctrines de ses adversaires qui raisonnaient en prenant pour point de départ les apparences sensibles de là l'usage et bientôt l'abus de la dialectique. Euclide, au témoignage de Diogène, s'attachait à réfuter non les prémisses, mais les conclusions de ses adversaires; c'était la réduction à l'absurde, déjà tant employée par Zénon d'Elée. Il repoussait le raisonnement par analogie, si familier à Socrate, sous ce prétexte que si deux objets sont semblables il vaut mieux s'occuper des choses mêmes que de leur ressemblance; s'ils sont dissemblables, la comparaison est vicieuse. Nous voyons aussi par un passage du Sophiste de Platon qu'il s'attachait, comme Zénon, à réduire, à diviser à l'infini et à faire disparaître la réalité corporelle. Il a ainsi frayé la voie à ce qu'on appellera bientôt l'éristique mégarienne, quoique lui-même paraisse avoir évité les excès dans lesquels tombèrent ses successeurs. En un mot, le fondateur de l'école de Mégare fut un philosophe subtil et profond, dont les théories ont mérité d'être sérieusement discutées par Platon. (V. Br.). | |