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Alexandrie
est une ville de la Basse-Égypte .
C'est l'antique Racondah des Pharaons,
la Rhacôtis des Grecs qui,
après sa reconstruction par Alexandre le
Grand, l'appelèrent Alexandreôn Polis; les Romains la nommèrent
Alexandria; les Turcs lui conserveront
cette appellation sous la forme de Iskanderièh.
Alexandrie
ancienne.
C'est en 322 avant J.-C. qu'Alexandre
le Grand, après s'être emparé de l'Égypte, frappé de l'admirable
position de Rhacotis, qui n'était alors qu'une misérable bourgade habitée
par des pêcheurs et des bergers, décida d'y fonder une ville qui porterait
son nom. L'architecte Dinocratès fut chargé de la construction d'Alexandrie
à laquelle il donna la forme de la chlamyde, un manteau macédonien, et
qu'il éleva sur l'espace compris entre la mer et le lac Mariout (anciennement
: lac Maréotis); une chaussée de sept stades, l'Heptastadion, relia l'île
de Pharos au continent et est devenue, par suite des atterrissements, l'isthme
actuel. L'Heptastadion divisa en deux le port naturel qui se trouvait entre
Rhacôtis et l'île de Pharos; la partie orientale fut appelée le Grand
Port, c'est aujourd'hui le Port neuf; la partie occidentale reçut le nom
d'Eunostos où de « Bon retour ».
De larges voies, se coupant à angles droits,
traversaient toute la ville dans sa longueur et dans sa largeur. Au point
d'intersection des deux rues principales, au centre de la ville, se trouvait
une vaste place où aboutissaient les deux principaux quartiers, celui
des Palais, ou Bruchion, à l'Est, et celui du Sérapeum, ou de Rhacôtis,
à l'Ouest. Le Bruchion s'étendait le long du Grand Port et renfermait
les palais, le Théâtre, le Poseideion, le Timoneum, le Caesareum, le
Musée, la Bibliothèque ,
le Gymnase; après la prise d'Alexandrie par Jules
César, le Bruchion fut fortifié et séparé du reste de la ville;
il soutint un siège en 270 et fut presque entièrement détruit en 275.
Le quartier de Rhacôtis bordait le port Eunostos et renfermait le temple
de Sérapis .
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Le
phare d'Alexandrie.
(Gravure
du XIXe s.)
De vastes faubourgs prolongeaient la ville
sur une étendue considérable; au Sud-Ouest c'était Nécropolis, au Nord-Est.
c'étaient Eleusis et Nicopolis. Le canal de Canope,
navigable du Nil à Alexandrie, servait à l'entretien des fontaines et
au transport des marchandises. Les eaux amenées par le canal étaient
distribuées par des aqueducs souterrains dans plus de cinq cents citernes
creusées sous la ville à une profondeur de 5 à 6 m au-dessous du niveau
de la mer; ces citernes ont été utilisées jusqu'au XIXe
siècle; elles ont été abandonnées après l'établissement d'une compagnie
des eaux dont les réservoirs alimentèrent toute la ville.
Les
monuments.
De magnifiques monuments firent rapidement
d'Alexandrie une ville merveilleuse, et son admirable situation commerciale
lui donna un degré inouï de prospérité.
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Alexandrie
antique.
Le Phare
(Pharus turris), édifié sous le premier des Ptolémées,
passait pour une des sept merveilles du monde ;
ce monument, oeuvre de Sostrate de Cnide ,
haut de plus de 400 pieds, portait la nuit des feux de bois que l'on apercevait
le plus de 300 stades en mer; le jour, la fumée servait de signal; un
grand miroir d'acier poli, placé en haut de l'édifice, réfléchissait
pendant le jour l'image des vaisseaux dès qu'ils paraissaient à l'horizon.
Ce magnifique monument, bien que détérioré par le temps, par les tremblements
de terre, par les pluies, subsista jusqu'à la fin du XIIIe siècle. Des
études conduites dans les années 1990 ont permis d'en retrouver les ruines
sous la mer.
Le Musée (Museum)
(c.-à -d. lieu dédié ou inspiré par les Muses ),
édifice d'Alexandrie où les Ptolémées rassemblaient en les entretenant
aux frais de l'État, les savants les plus distingués, pour qu'ils s'y
livrent à loisir à la culture et à l'enseignement des lettres et des
sciences. On en attribue la fondation à Ptolémée
I. Dans cette espèce d'académie, on remarque, parmi les savants,
Euclide, Erasistrate,
Diophante; parmi les poètes, Théocrite,
Aratus ( Les
Phénomènes) Apollonius, Lycophron,
Callimaque; parmi les critiques, Aristarque;
parmi les philosophes, Ammonius Saccas, père
de l'éclectisme alexandrin ( Les
Ecoles d'Alexandrie). Le Musée dura jusqu'au règne d'Aurélien,
sous lequel il fut détruit par un incendie. On a depuis donné le nom
de Musée, soit à des réunions semblables de savants, soit à des collections
d'objets d'arts ou d'antiquités. Le Musée renfermait la fameuse Bibliothèque
d'Alexandrie
où se trouvaient réunis 700 000 volumes, provenant de tous les pays du
monde, et rassemblés par les soins infatigables des Ptolémées; cette
bibliothèque fut brûlée lorsque Jules
César incendia la flotte des Alexandrins stationnée dans le port
(47 av. J.-C.).
Le Sérapéum.
- Celui d'Alexandrie était le plus considérable des temples dédiés
au dieu égyptien
Sérapis ,
construit par Ptolémée Sôter. Ammien
Marcellin dit qu'après le Capitole, l'univers
n'offrait rien de plus magnifique. Ce temple, élevé sur la petite colline
où se dresse encore aujourd'hui la colonne dite de Pompée,
fut détruit en 389 par les chrétiens ( L'Égypte
chrétienne )
qui le saccagèrent et brûlèrent les 100 000 volumes qu'il renfermait.
Le Soma, ou
tombeau d'Alexandre, était situé vers
le milieu de la ville, à l'endroit même où se trouve aujourd'hui la
butte de décombres appelée Kom el Démas.
Le Poseideion,
ou temple de Poséidon ,
se dressait sur une sorte de cap en maçonnerie s'avançant dans le Grand
Port à l'Ouest du Museum.
Le Timoneum.
- Il se trouvait en avant et au-delà du Poseideion, sur une chaussée
qui, du rivage, se prolongeait dans l'intérieur du port, pour ainsi dire
au milieu des eaux. C'était un palais que fit construire Antoine
après la défaite d'Actium .
Le Palais des
Ptolémées se trouvait sur le cap Lochias, à l'Est du Grand Port;
il n'en reste pas même les ruines aujourd'hui.
Le Caesareum
ou temple de César, dont il subsiste à peine
quelques traces, était, au dire de Philon d'Alexandrie,
« très grand et très rempli d'ornements dédiés consistant en tableaux,
statues, objets d'or et d'argent, pourvu de portiques,
de bibliothèques, de riches appartements
et des plus somptueux embellissements »; érigé par Antoine ou par Octave,
le Temple de César fut, trois siècles après, converti en église
chrétienne; brûlé et détruit sous l'empereur Julien
en 362, il fut rebâti deux ans plus tard par Valens
et continua de servir de cathédrale aux patriarches orthodoxes d'Alexandrie
jusqu'à la prise de cette ville par les Arabes; il fut définitivement
détruit en 912.
Un Stade Olympique,
long de 555 m et large de 51 m, destiné aux courses à pied et aux jeux
publics, s'étendait au sud du Sérapeum.
L'Hippodrome d'Alexandrie
était situé, d'après Strabon, à l'extrémité
de la voie Canopique.
Le Paneum,
ou « Belle-Vue » était le lieu où se réunissait tous les jours la
haute société d'Alexandrie; c'est aujourd'hui la colline de Kom-el-Dik.
Le Gymnase.
Il se trouvait au Nord-Est du Paneum.
La Nécropole
d'Alexandrie s'étendait le long de la mer, à l'Ouest du port Eunostos,
dans des catacombes qui communiquaient
toutes avec la mer et renfermaient des salles de bains connues vulgairement
sous le nom de Bains de Cléopâtre; on a retrouvé
dans ces catacombes un magnifique temple souterrain, à demi comblé par
les sables et les décombres.
Ajoutons que la ville
possédait plusieurs obélisques et colonnes;
parmi lesquelles la colonne de Pompée (ou plus
exactement de Dioclétien),
les deux aiguilles de Cléopâtre, etc. A la
fin du XIXe siècle, il ne restait que
des vestiges de tous ces anciens monuments; de tous ces somptueux édifices,
seule la Colonne de Pompée, existait encore presque intacte. Elle se dressait
au sommet de la colline du Sérapeum; composée de quatre morceaux de granit,
elle atteint une hauteur de 28,75 m, son plus grand diamètre est de 2,684
m; d'après la pesanteur spécifique du granit, le fût seul ne pèse pas
moins de 289,869 kilogrammes et la colonne entière 550,492 kilogrammes;
cette colonne reposait sur un tronçon d'obélisque renversé, enveloppé
dans un épais massif de maçonnerie; sur la plate-bande de la plinthe,
une inscription grecque indiquait que la colonne avait été érigée en
l'honneur de l'empereur Dioclétien par un préfet d'Égypte; l'historien
arabe Abulfelda dit que cette colonne aurait
été élevée en l'honneur de l'empereur Septime
Sévère. L'expansion anarchique d'Alexandrie
au cours du XXe siècle a fait dsparaître
ce vestige.
Alexandrie
au fil du temps.
Alexandrie fut pendant trois siècles
(de 323 à 30 v. J.-C.) la capitale des Ptolémées Lagides ,
successeurs d'Alexandre au trône d'Égypte .
Ces princes, habiles et éclairés, firent de cette ville la métropole
commerciale et intellectuelle du monde alors connu. Elle devint l'entrepôt
des richesses de l'Orient, le centre des transactions entre l'Asie et l'Europe,
le rendez-vous des savants les plus illustres et des artistes les plus
renommés ( Écoles
d'Alexandrie).
Diodore de Sicile
dit que le nombre des habitants d'Alexandrie dépassait 300 00 personnes
libres qui suppose une population triple.
Avec Cléopâtre
VII (15 août 30 av. J. C.), s'éteignit la dynastie des Ptolémées.
Alexandrie, prise par Octave Auguste, devint
le chef-lieu d'une province romaine ( l'Égypte
Romaine ;
l'Égypte chrétienne )
et suivit les vicissitudes de l'empire romain, puis byzantin ,
jusqu'au jour où les Arabes, conduits par Amr ibn AI-Asi, lieutenant du
calife Omar, s'emparèrent, après un siège
de quatorze mois, de l'ancienne capitale des Ptolémées (22 décembre
640). Amr annonça en ces termes sa conquête au calife :
J'ai conquis
la ville de l'Occident, et je ne pourrais énumérer tout ce que renferme
son enceinte. Elle contient quatre mille bains, douze mille vendeurs de
légumes verts, quatre mille musiciens et baladins,
ainsi que quatre mille juifs ( La
Diaspora juive )
payant le tribut, etc...
On voit par là quelle était encore à cette
époque l'importance d'Alexandrie. Cette importance commença à décliner
avec l'invasion arabe. La fondation du Caire,
qui devint sous les califes fatimides la capitale
de l'Égypte, relégua Alexandrie au second rang. En 1202 les Vénitiens
s'emparèrent d'Alexandrie; reprise par les Arabes, elle fut de nouveau,
en 1367, conquise par les chrétiens qui ne la conservèrent que peu de
temps ( Moyen âge ;
Croisades );
enfin, en 1517, après la prise de l'Égypte par Sélim
Ier, elle
tomba sous la domination ottomane .
-
La
prise d'Alexandrie par Bonaparte, par J. E. Chaponnière
(bas-relief
de l'Arc de Triomphe, à Paris). © Photo : Serge
Jodra, 2010.
Dès lors, commencèrent pour Alexandrie
des années de décadence qui en firent une ville aussi faible et misérable
qu'elle avait été jadis forte et puissante. Aussi lorsque Bonaparte
s'empara d'Alexandrie le 2 juillet 1798, on ne comptait pas dans ses murs
plus de 7000 habitants. C'est seulement sous Mohammed-Ali
(Mehemet-Ali) et sous ses successeurs qu'Alexandrie se releva et reprit
dans le bassin de la Méditerranée, sinon son rôle prépondérant des
anciens temps, au moins une importance commerciale considérable et qui
ira chaque jour en augmentant; l'accroissement de sa population en est
la preuve; de 5 000 habitants en 1808 elle s'est élevée successivement
à 12 000 en 1818, à 25 000 en 1825, à 100 000 en 1849; au début du
XXe siècle elle comprenait 220 000
habitants dont plus de 60 000 Européens. Aujourd'hui
Alexandrie compte plus de quatre millions d'habitants, mais a perdu au
cours du dernier demi-siècle son lustre d'antan. (E. Dutemple).
--
Alexandrie
en 1900

Le bras ouest de
la presqu'île porte à son extrémité un phare assez remarquable, élevé
par Mohammed Ali. A 500 m du phare, et sur
la plage Nord-Ouest du Vieux Port, se trouve le palais de Ras-et-Tin, construit
également par Mohammed Ali, habitation d'été des vice-rois d'Égypte;
les bâtiments réservés au harem donnent en grande partie sur la haute
mer, du côté opposé à celui du palais proprement dit. A l'Est du palais
de Ras-et-Tin, Ã l'intersection du bras occidental et de l'isthme,
il y a des casernes et l'arsenal maritime avec ses bassins et ses ateliers
de construction et de réparation. Vient ensuite la ville turque, bâtie
sur l'isthme, de 500 m de large et de 1380 m de long, qui réunit les deux
bras de la presqu'île au continent. Elle se termine à la place Mohammed
Ali, ou Place des Consuls, située au Sud-Est de l'isthme. Cette place,
qui est le centre du commerce européen, est le point de départ de toutes
les grandes voies qui traversent les quartiers européens.
Elle a la forme d'un
vaste parallélogramme de 400 m de longueur, garni de larges trottoirs
que bordent deux rangées d'acacias-lebbek; à ses extrémités se trouvent
deux bassins à jet d'eau; au centre s'élève la statue équestre de Mohammed-Ali,
oeuvre de Jacquemont. A côté de la place des Consuls, se trouve la petite
place de l'Église ou square Ibrahim. Le quartier des bazars s'étend entre
la mosquée du cheikh Ibrahim et le port,
sur la partie Ouest de l'isthme. Les mosquées d'Alexandrie ne présentent
aucun caractère architectural; elles sont bâties en briques et flanquées
de minarets presque tous copiés sur le même
modèle, blanchis à la chaux et ornés de moulures
en stuc; l'intérieur n'est guère plus remarquable. La plus fréquentée
est celle du cheikh Abou-l' Abbâs-al-Moursi; c'est aussi la plus grande.
A l'extrémité Sud-Ouest
d'Alexandrie, sur la langue de terre qui s'étend entre le lac Mariout
(Maréotis) et la mer, à peu près sur l'emplacement de l'ancienne nécropole
d'Alexandrie, on trouve le palais et les Jardins de Cabbari (du verbe arabe
gabara enterrer); le palais, construit par Saïd-Pacha, tombe Ã
cette époque en ruines et est presque abandonné, les jardins au contraire
offrent une luxuriante végétation. Un peu plus loin, à l'Ouest, se trouve
le château du Mex, édifié par Saïd-Pacha,
en 1857; comme le palais de Gabbari, le château du Mex est en ruines;
pendant le bombardement du 10 juillet 1882, ce château, où une batterie
égyptienne avait été installée, a beaucoup souffert du feu des Anglais.
Au Nord-Est d'Alexandrie, se situe l'agglomération des villas de Ramleh
où la haute société d'Alexandrie vient passer la saison d'été. Des
jardins superbes, magnifiquement entretenus, font de Ramleh un séjour
délicieux. Gabbari, le Mex, Ramleh sont les lieux de promenade les plus
fréquentés hors d'Alexandrie, le rendez-vous de la population élégante.
II convient d'y ajouter les bords du canal Mahmoudieh.
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Jean-Yves Empereur, Le
phare d'Alexandrie, la merveille retrouvée, Gallimard (Découvertes),
2004.--La
dernière des Merveilles du Monde
vit le jour à Alexandrie, la nouvelle capitale de l'Égypte
fondée par Alexandre en 331 av. J. C.
La tour destinée à guider les navigateurs à l'approche d'une côte basse
et dangereuse fut baptisée Pharos, du nom de l'île sur laquelle elle
était construite. Ce phare était haut de 135 m, son feu éclairait Ã
cent milles marins, etc. Mais il s'écroula en 1303 à la suite d'un séisme.
Depuis, nul n'en vit plus les vestiges jusqu'Ã ce que Jean-Yves Empereur
les redécouvre, immergés...(couv.). |
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