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Histoire de l'Angleterre / Le droit > Droit anglais |
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Au Royaume-Uni, le pouvoir législatif est entre les mains du parlement , qui se compose de deux chambres, la Chambre des Lords (House of Lords) et la Chambre des Communes (House of Commons). La Chambre des Lords compte aujourd'hui 618 sièges, soit environ 500 pairs nommés à vie, 92 pairs héréditaires et 26 membres du clergé. La Chambre des Communes, quant à elle, comprend aujourd'hui de 642 membres. Ceux-ci sont élus par le vote populaire pour cinq ans ( sauf si la Chambre est dissoute avant le terme de leur mandat). Le Parlement anglais au Moyen âge. Nous ignorons si l'on a le droit, comme l'a fait J. Kemble (The Saxons in England, t. Il, ch. VI), d'appliquer à l'Angleterre la description des assemblées populaires donnée par Tacite dans la Germania. Dans les royaumes de l'Heptarchie, les rois étaient assistés des grands, laïques et ecclésiastiques (majores natu; principes, sapientes, witan); c'est ce que les historiens modernes ont appelé d'un nom qui est rare dans les documents authentiques, le witenagemot. Ces assemblées comprenaient, outre le roi, la reine et les membres de la famille royale, les archevêques et évêques, la plupart des abbés, les principaux dignitaires (ealdormen), des shérifs (mais non pas tous les shérifs), des serviteurs de la maison du roi (ministri thanes). Aucune trace d'élection ni de représentation. Le roi les assemblait quand et où il lui plaisait; vers la fin de la période anglo-saxonne, c'était de préférence aux trois grandes fêtes religieuses de l'année : Noël, Pâques et Pentecôte. Leur compétence était illimitée; elles donnaient leur avis en matière de législation, de finances, quand il fallut établir des taxes extraordinaires pour combattre les Danois (shipgeld, danegeld), d'administration générale (affaires militaires et ecclésiastiques), de justice. Elles avaient une part, il est vrai mal définie, à l'élection du souverain, mais jamais on ne voit avec certitude qu'elles aient eu ni initiative ni indépendance. Les textes disent seulement qu'elles présentaient des observations an roi, qu'elles approuvaient ses projets ou ses actes. Parfois même leur consentement se réduit à une simple attestation de témoins. Quant au peuple, sa présence est souvent constatée; les grands du royaume, les évêques et abbés, les personnages de la cour étaient accompagnés d'une suite nombreuse à laquelle venait se joindre la « multitude » quand l'Assemblée se tenait dans une ville. Leur consentement consistait dans l'approbation bruyante qu'ils donnaient aux décisions prises par le roi et l'Assemblée. Après la conquête, les choses changent de nom et d'aspect. Le nom le plus employé sous Guillaume ler et ses fils est celui de curia, qui, d'ailleurs, s'applique à deux assemblées différentes : 1° celles qui se réunissaient, comme à l'époque anglo-saxonne, aux trois grandes fêtes de l'année;On n'y retrouve plus les fonctionnaires ni les serviteurs de la maison du roi comme précédemment, mais seulement les prélats (archevêques et évêques, des abbés et parfois des prieurs) et les principaux des vassaux directs de la couronne (comtes et barons); tous sont convoqués par le roi à raison des fiefs qu'ils tiennent de lui et obligés de venir à raison même de leur tenure. L'assemblée des seigneurs laïques et ecclésiastiques des premiers rois normands n'est que la curia agrandie des ducs de Normandie. Elle changea peu sous les rois angevins. On peut cependant déjà signaler quelques actes de résistance à l'arbitraire royal, et c'est le clergé qui les osa. Les refus d'impôt qui furent opposés à Henri II et à Richard par Thomas Becket et par l'évêque de Lincoln, Hugues d'Avalon, sont des faits controuvés; mais l'action de ces prélats fut efficace, en rappelant le plus despotique des rois au respect de la loi et de la coutume. Ces rois fortifient d'ailleurs leur pouvoir en concentrant dans la curie les principaux services administratifs; l'assemblée politique prend alors le nom de consilium, que l'on trouve, par exemple, dans la Grande charte. Le mot de Parlement apparaît un peu plus tard et seulement d'abord dans les chroniqueurs; Mathieu Paris l'emploie pour la première fois à l'année 1239. Trois faits dominent l'histoire du Parlement anglais au XIIIe siècle : la convocation fréquente de ces assemblées, la formation d'une opposition parlementaire et l'admission de l'élément représentatif. A partir de Henri III, il est rare que le Parlement n'ait pas été convoqué une fois par an, et souvent il l'a été plusieurs fois. Il en est de même sous le règne des Edouard. Mais ce n'est plus un instrument docile entre les mains de la royauté. Il est d'ordinaire unanime pour la contraindre à l'observation de la Grande charte; la guerre des barons (Simon de Montfort)) a un caractère nettement parlementaire. Les grands, qui n'avaient pas craint d'enlever la couronne à Jean sans Terre, s'attaquent maintenant aux ministres de la couronne, et le Parlement prétend imposer au roi ses conseillers. Son opposition obligea Henri III à traiter avec la France en 1259 et entrava la politique guerrière d'Edouard Ier en 1297. Mais le fait vraiment nouveau, c'est l'éclosion du régime représentatif. C'était une maxime, officiellement admise par Henri III en 1225 et par Edouard Ier en 1295, que le roi ne pouvait régler seul une affaire qui intéressait tout le monde, et il était conforme à l'esprit du régime féodal, d'une part, que le roi fut tenu de réclamer l'aide et le conseil dont il avait besoin; d'autre part, que ses fidèles fussent tenus de les accorder selon la coutume. Avant le XIIIe siècle, on ne parle que de décisions prises, de consentement donné au roi par les prélats et par les grands du royaume. Mais cette «-multitude », dont les chroniqueurs signalent la présence autour des Parlements, avait aussi des intérêts que les prélats et les grands ne représentaient pas directement. Il était naturel que le souverain voulut la plier à son service. Le régime représentatif a en effet son origine dans une idée féodale, et c'est la royauté qui s'en est emparée d'abord comme d'un moyen de gouvernement. Elle commença de l'employer pour la formation des jurys d'enquête, que l'on voit fonctionner depuis Henri II en matière judiciaire et financière, puis pour la répartition et la levée des impôts extraordinaires consentis par le Parlement, enfin pour rendre plus efficaces les résolutions du Parlement lui-même. Le Parlement de 1295 comprit pour la première fois tous les éléments qui l'ont constitué jusqu'au temps de la Réforme. Furent en effet sommés individuellement à comparaître : parmi le clergé, les 2 archevêques, tous les évêques, 3 chefs d'ordre religieux, 53 abbés et prieurs; parmi les laïques : 11 comtes et 53 barons, le chef-juge et 38 autres fonctionnaires. En outre, des writs royaux enjoignirent à chaque archevêque, de faire prévenir (clause Praemunientes) le prieur de chaque chapitre et les archidiacres de venir en personne, les chapitres et les prêtres des paroisses de s'y faire représenter par des procureurs munis de pleins pouvoirs. Enfin les shérifs reçurent l'ordre de faire élire deux chevaliers pour chaque comté et deux bourgeois pour chaque ville importante, avec pleins pouvoirs de leurs commettants. Les writs étaient rédigés sous la forme la plus impérative; ils énonçaient en termes généraux le motif de la convocation, en termes précis la date et le lieu de l'assemblée. Personne, à moins d'excuse valable, ne pouvait se dispenser d'assister au Parlement ni se retirer sans une autorisation expresse du roi. Jamais encore le caractère de l'obligation n'avait été formulé aussi nettement. Mais les Parlements organisés sur le modèle de 1295 contenaient des éléments trop disparates pour former longtemps un corps unique. Le XIVe siècle vit en effet se former d'autres groupements, soit dans le sein du Parlement, soit en dehors. Il arriva, d'une part, que les affaires propres au clergé et en particulier les taxes que la royauté lui demandaitt furent renvoyées à l'examen d'une assemblée particulière, et, de l'autre, que les députés élus dans les comtés et dans les villes formèrent bientôt un corps séparé sous le nom de Chambre des communes. Quant à la séparation du Parlement en deux Chambres, elle s'opéra par une évolution graduelle dans la première moitié du XIVe siècle. Elle apparaît déjà clairement en 1332; elle était accomplie à la fin du règne d'Edouard III. Elle eut pour cause le double mouvement qui aboutit, d'une part, à transformer les barons laïques en lords héréditaires, et, de l'autre, à remettre aux députés élus la discussion et le vote de la plus grosse part des subsides extraordinaires réclamés par la royauté. A quel titre pouvait-on faire partie de la première Chambre ou Chambre des lords? Tout d'abord il fallait posséder un fief mouvant de la couronne et qualifié de, baronnie. Edouard ler, en même temps qu'il restreignit le nombre des barons convoqués, prit l'habitude d'appeler toujours à peu près les mêmes. Cet usage, appliqué à un petit nombre de seigneurs pris parmi les plus notables, sembla une faveur, et la réception d'un writ, après avoir été considérée par eux comme une charge, fut bientôt revendiquée comme un privilège; enfin, les baronnies laïques étant héréditaires, ce privilège devint héréditaire aussi. Edouard III et ses successeurs créèrent ensuite des lords héréditaires par lettres patentes. Les lords furent appelés pairs, à l'imitation de la France, mais il n'y eut pas de pairies ecclésiastiques. La Chambre des communes a cette originalité qu'elle comprend des députés élus par la petite noblesse des comtés et par la bourgeoisie des villes. Avant l'annexion administrative de tout le pays de Galles à l'Angleterre, ce royaume comprenait 37 comtés, en dehors de Chester et de Durham; qui étaient comtés palatins. Chacun de ces 37 comtés députait deux chevaliers. Quant aux villes, la détermination en a toujours été arbitraire, surtout à l'origine. Les villes épiscopales ou cités étaient presque toutes désignées, mais, jusqu'en 1382, les bourgs furent choisis arbitrairement par le roi ou le shérif. Le nombre n'avait cessé d'en décroître depuis Edouard Ier, quand Henri VI commença de le relever en créant (1445) huit bourgs parlementaires par charte royale. Chaque ville désignée députait un ou deux bourgeois, suivant son importance. A la fin du XVe siècle, le nombre des députés bourgeois s'élevait à 300 environ. Les chevaliers étaient élus dans les cours de comté. Au XIVe siècle, il fallait qu'ils eussent réellement pris les armes de la chevalerie (milites gladio cincti), puis on admit les écuyers; enfin, en 1430, l'éligibilité fut étendue à tout propriétaire libre (freeholder) d'une terre donnant un revenu annuel de 40 shillings. Dans les villes, sans qu'on puisse généraliser, il fallait y posséder un domicile et participer aux droits et aux charges de la bourgeoisie. N'étaient donc éligibles à la Chambre des communes que les propriétaires. Les députés issus de cette double origine étaient égaux en droit; en fait, les chevaliers exercèrent pendant longtemps une influence prépondérante. C'est dans leurs rangs qu'était toujours pris, l'orateur chargé de porter la parole au nom de la Chambre (speaker). Le premier connu est le chevalier Pierre de la Mare, qui joua un si grand rôle au « Bon Parlement » de 1376. Au regard de ces nobles, les bourgeois faisaient mince figure, d'autant que les marchands, au moins au XIVe siècle, étaient souvent convoqués à part et que les légistes furent, à plusieurs reprises, déclarés inéligibles. Ils étaient de petite condition, et leur responsabilité était lourde; pour les empêcher plus sûrement d'échapper à la contrainte du Parlement, on les obligea de fournir des cautions (manucaptores). A la fin de chaque session, les députés recevaient une indemnité journalière qui devait à peine couvrir leurs frais personnels de déplacements. Considéré à la fin du Moyen âge, le Parlement paraît très différent de ce qu'il était à l'origine. Il a perdu en partie son caractère féodal depuis que l'assistance au Parlement est devenue un privilège héréditaire, convoité par les grands, et la députation un avantage concédé à certaines villes. Son autorité n'en reste pas moins subordonnée à celle du roi. Il peut toucher à tout : affaires étrangères et administration intérieure, législation ecclésiastique et civile, économie politique et nomination des fonctionnaires. Son droit d'initiative n'est limité par aucune barrière légale, mais il ne l'exerce que par voie de pétition, et la loi ne vaut que par le consentement du souverain. Celui-ci n'a pas de scrupule à intervenir dans les élections; le premier exemple de pression administrative a été donné, par le duc de Lancaster pour le « Mauvais Parlement » (1377). La parole et les votes n'étaient pas libres et, plus d'une fois, le roi punit comme d'une violation à la foi jurée des avis, des décisions qui lui déplaisaient. Tant que le Parlement était demeuré le centre d'action des grandes forces sociales liguées contre la royauté, celle-ci n'avait éprouvé que des échecs; elle recouvra une partie de son autorité en face d'un Parlement divisé. Quand le clergé eut pris l'habitude de régler ses affaires en Convocation et que la plupart des prélats furent recrutés dans l'aristocratie (seconde moitié du XIVe siècle); quand, à son tour, l'aristocratie eut été plus que décimée pendant la guerre des Deux Roses, il n'y eut plus d'esprit public; le Parlement approuva toutes les révolutions, depuis la déposition de Richard II jusqu'à l'usurpation de Henri VII. Celui-ci crut presque pouvoir se passer du Parlement qui fut convoqué seulement sept fois pendant son règne. Ce grand corps, qui avait résisté victorieusement aux Plantagenets, était mûr pour le despotisme des Tudors. (C. Bémont). Le règne des Stuarts n'est qu'un long conflit entre les Parlements et les souverains. Jacques Ier prétend ne voir dans les deux Chambres que le grand conseil du roi. Les Communes protestent, revendiquent le droit exclusif de valider les élections contestées (1604), recouvrent leur ancien droit d'impeachment, votent la célèbre protestation de 1621, demeurée l'un des monuments de l'histoire constitutionnelle de l'Angleterre. Ce document affirmait notamment le droit des Communes d'examiner toutes les affaires de l'Etat et dans l'ordre qu'il leur plaisait d'adopter, et leur privilège exclusif d'ordonner l'arrestation de leurs membres. Jacques ler déchira la page du journal des Communes qui portait ces décisions et jeta en prison sir Ed. Coke, sir Rob. Philipps, Pym, et même le comte d'Oxford. Dans la Chambre des pairs elle-même, où le roi avait fait entrer de nombreux pairs, un parti s'éleva contre lui. J. Eliot, J. Pym, Dusdey, Pigges, Hampden continuent la lutte sous Charles Ier, et amènent le Parlement de 1628 à voter la Petition of rights, document d'une importance capitale qui, sous forme de protestation contre la violation des lois et privilèges, embrasse l'ensemble des droits politiques et civils du peuple anglais. Quand, après onze ans de gouvernement sans contrôle, Charles Ier convoque le Court puis le Long Parliament, le conflit dégénère en guerre civile. Au cours de la période révolutionnaire, les évêques sont exclus de la haute Assemblée (1640), puis les Communes assument tout le pouvoir législatif. Cromwell revient en 1657 au principe des deux Chambres. Le Parlement-Convention de 1660 comprend deux Chambres, mais les évêques ne reprennent leur siège que dans le Parlement de 1661, lequel renoue la tradition des Assemblées régulièrement constituées. Cette Assemblée s'écarte rapidement du roi et reprend la politique de revendication, refuse au roi le droit de suspendre l'application des statuts par simple déclaration royale (1673), à la Chambre des lords celui d'amender les lois de finance (1671-1678).
Les Parlements suivants inaugurent les termes de whig et tory, votent l'habeas corpus, luttent contre les ministres de Charles II et de Jacques II. Quand celui-ci perd la couronne, les Anglais, en dépit des écrits de Filmer et de Hobbes en faveur du dogme du pouvoir absolu, considèrent comme nécessaires l'union indissoluble et le mutuel contrôle de la couronne et du Parlement, les Communes constituant l'élément prépondérant dans le Parlement. Ces principes triomphent avec Guillaume III; le Parlement-Convention de 1688 se livre à d'intéressants débats constitutionnels, vote le Bill of rights qui contient une énumération des actes illégaux du dernier règne et détermine ainsi les limites du pouvoir confié au nouveau roi.
Il n'est plus désormais de question importante qui ne soit discutée au Parlement dont l'histoire se confond de plus en plus avec celle de la nation et des partis politiques. Nous signalerons seulement les lois en usage qui affectent le rôle ou la composition des Chambres. Le Triennal bill proposé par les lords, voté avec difficulté par les Communes, ratifié tardivement par le roi (1694), fixe à trois ans la durée des Assemblées. Les rivalités de partis s'accentuent, accompagnées d'incessants conflits dans les Chambres et de nombreux cas de corruption électorale. Sur les conseils de Sunderland, Guillaume prend l'habitude de choisir ses ministres dans la majorité des Communes, usage qui donne naissance au cabinet. Toutefois, et pendant plus d'un siècle encore, le Parlement conservera le droit de mettre en accusation les ministres sans se reconnaître celui de les renverser. Plusieurs points de droit constitutionnel sont fixés dans les premières années du XVIIIe siècle : l'union de l'Angleterre et de l'Ecosse (1707) supprime le Parlement écossais. Les pairs écossais (tous temporels) deviennent pairs de Grande-Bretagne, conservent leurs titres et privilèges, élisent 16 d'entre eux pour les représenter à chaque session du Parlement de Grande-Bretagne. La Chambre des communes reçoit 45 députés écossais dont les deux tiers élus par les comtés, un tiers par les bourgs. Quatre ans plus tard, le Property qualification act exige 300 livres de revenu foncier annuel des représentants des bourgs, 600 des chevaliers de comté, assurant ainsi la majorité aux grands propriétaires. Le Septennal act porte à sept ans la durée des Parlements. Les lords essaient de limiter le pouvoir que possédait le roi de modifier par des nominations de pairs la majorité de la haute Chambre, mais le Peerage bill échoue devant les Communes. Bien que les débats parlementaires offrissent un intérêt grandissant, leur publication demeura longtemps interdite; sous Guillaume III, les Communes assignent à leur barre Dyer coupable d'avoir résumé les débats dans ses News Letters. La publication des discours prononcés en séance est déclarée illicite en 1729, de nouveau en 1738. Certains écrivains réussissent seulement à publier des comptes rendus incomplets, pendant les intersessions, en remplaçant par des initiales les noms des députés (Boyer, Political state of Great Britain, Historical Register; R. Raikes, Gloucester Journal; Cave, Gentleman's Magazine; Gordon, London Magazine). Mais, bien que le Parlement ait toléré la publication des débats à partir de 1674, on vit encore des écrivains poursuivis pour ce motif en 1801. Le règne de Georges III inaugure une période nouvelle dans l'histoire du Parlement anglais; l'agitation politique est multipliée sous des formes diverses : la création d'une presse active et agressive, de grandes associations politiques, l'usage des meetings publics et du droit de pétition, la publicité donnée aux débats parlementaires accroissent la responsabilité des députés en face de leurs électeurs. Un vaste mouvement se dessine en faveur de la réforme d'un système électoral caduc et corrompu dont les traits principaux sont les suivants : inégale répartition du droit de vote (franchise) considéré comme un privilège, accordé dans les comtés à certains freeholders, dans les bourgs parfois aux seuls membres de la corporation municipale, parfois aux freeholders et même aux potwallopers, existence de nombreux bourgs de poche et bourgs pourris dans lesquels un nombre d'habitants très restreint, sinon réduit à l'unité, possède la franchise, enfin libre pratique de la vente des sièges parlementaires. Ce système favorisait l'influence de l'aristocratie et aussi l'omnipotence des gouvernements énergiques; nombre de députés pour lesquels l'achat d'un siège était une spéculation financière vendaient leurs votes aux ministres (Walpole achète en quelques jours une majorité favorable à la paix, 1762). Dès 1770, Chatham demande une réforme de la représentation des bourgs, « la partie pourrie de notre constitution ». Les désastres de la guerre d'Amérique continuée en violation des sentiments de la nation par un gouvernement tout-puissant sur les Communes ont pour conséquence le County movement de 1779-1780, les propositions de réforme électorale du duc de Richmond (1780), de W. Pitt (1782); des tentatives analogues sont faites par Flood (1790), Grey (1793-1797). Des sociétés démocratiques (Society for Constitutional information, London corresponding Society), ou modérées (Society of the friends of the people) popularisent la cause de la réforme ; la Resolution society fondée originairement pour commémorer la révolution de 1688 se mêle à l'agitation politique. Tout le mouvement radical est arrêté par la sévère législation qu'inspire au Parlement le spectacle de la Révolution française. Intérieur de la Chambre des Communes. A défaut de réforme électorale, l'Union de l'Angleterre et de l'Irlande (41800) apporte une modification nouvelle dans la composition des Assemblées; le Parlement irlandais est supprimé : 4 évêques désignés annuellement, et 28 pairs temporels élus à vie par les lords irlandais siègent à la Chambre des lords; 100 députés irlandais siègent à la Chambre des communes dont le nombre se trouve porté à 658 membres. C'est au milieu des troubles luddites, des réclamations en faveur des catholiques, en pleine agitation radicale, que la question de la réforme électorale est replacée devant le Parlement par Burdett (1817, 1818-1819). Le leader whig J. Russell présente ou fait présenter de nombreux projets; secondé par les radicaux, il dirige la campagne qui aboutit à la réforme de 1832, réforme partielle, conforme au programme des whigs, aussi hostiles que les tories à l'idéal démocratique, et destinée surtout dans l'esprit de ses auteurs à affranchir les Communes de l'influence du gouvernement et de l'aristocratie tory. 143 sièges étaient enlevés aux bourgs et redistribués; 65 étaient attribués aux comtés; 22 villes de plus de 25.000 habitants obtenaient chacune deux sièges, 21 villes de plus de 12.000 habitants 1 siège, le pays de Galles 8, l'Irlande 5. Le droit de vote (franchise) est uniformément accordé dans les bourgs aux locataires d'une maison de 10 livres de revenu, dans les comtés aux propriétaires d'une maison de 10 livres de revenu et aux tenanciers d'une maison de 50. Des actes spéciaux sont votés pour l'Irlande et l'Ecosse. Le nombre des députés ne change pas, celui des électeurs s'élève en Angleterre de 435.000 à 656.000, mais sans bénéfice pour la classe ouvrière; plus de 40 bourgs de poche demeurent à la discrétion de patrons. Si incomplète que fut cette réforme, elle augmentait le nombre des électeurs de 50% dans les comtés, 200 dans les bourgs, accordait le suffrage à de nombreux ouvriers, inaugurait le régime démocratique. Elle fut complétée par diverses mesures, notamment le Ballot Act (1872), qui établissait le vote secret, le Corrupt practices Act (1883), qui limite d'après le nombre des électeurs la somme des dépenses électorales des candidats. Les libéraux ont enfin obtenu la réforme d'ensemble de 1884-1885; le nombre des députés est alors élevé à 670; une redistribution assigne aux bourgs et aux comtés, subdivisés en circonscriptions électorales, un député par 50.000 habitants; le scrutin uninominal est imposé à presque toutes les catégories d'électeurs, le régime de franchise des bourgs étendu aux comtés. Cette réforme a établi un système de suffrage très rapproché du suffrage universel, mais sans faire disparaître toutes les inégalités, ni mettre fin à la complication de la législation en matière de droit électoral. Les progrès de la Chambre des communes, ses transformations successives ont gravement modifié le rôle respectif des deux Assemblées au XIXe siècle. La classique et toujours orthodoxe théorie de la balance des trois pouvoirs a cessé de correspondre à la réalité. La Chambre des communes, représentant réellement la nation, est devenue, en fait, la véritable dépositaire de l'autorité suprême. Des conflits ont éclaté entre les deux Chambres, de violentes campagnes, au cours desquelles J. Morley formula (1884) la sommation célèbre « Mend or end », se sont , produites contre l'existence de la haute Assemblée. Les partis avancés réclament alors l'extension du droit de vote à tous les adultes (pauvres, femmes), l'indemnité parlementaire pour les députés, la suppression de la Chambre des lords. Celle-ci existe toujours. Mais un conflit apparu, à partir de 1908, entre le gouvernement libéral d'Asquith et la Chambre de lords (qui alors possédait un droit de veto lors du vote du budget) a mis en route un processus qui a abouti en 1911, au terme d'une période parlementaire troublée, à la fin de l'égalité des deux Chambres (Parliament Act 1911 complété par l'Act de 1949). La Chambre des lords n'a pas eu d'autre prérogative, à partir de cette date, que de ralentir le fonctionnement législatif. La Chambre des Communes devenait la seule branche Parlement à détenir un vrai pouvoir. (GE). |
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