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Les Phénomènes
Aratus 

Les Pronostics


Aratus
Ne voyez-vous pas, quand la Lune paraît du côté de l'occident en cornes amincies, qu'elle marque le commencement du mois? et quand sa première lueur devient assez forte pour causer de l'ombre, elle est à son quatrième jour. Au huitième, son disque coupé en deux moitiés n'en montre qu'une seule; mais au milieu du mois, elle montre sa face entière; et dans son déclin, ces phases revenant dans un ordre inverse, disent, à chaque aurore [Les Jours et les Nuits] quelle partie du mois elle va commencer.

Les douze portions du zodiaque suffisent pour montrer la durée des nuits, et pendant toute l'année [a], les saisons  [L'Année et les saisons] propres au labourage des terres, aux semailles et aux plantations. Toutes ces annonces nous ont été manifestées en tous lieux par la divinité. Et quiconque a éprouvé sur un vaisseau la tempête et la pluie, se ressouvient du violent Arcturus [Bouvier] ou de toutes autres étoiles qui se lèvent le matin du sein de l'Océan, et de celles qui en sortent au commencement de la nuit. Le Soleil les parcourt chaque année, en faisant un circuit, il s'approchera tantôt de l'une, tantôt de l'autre, tantôt en se levant, tantôt en se couchant, comme en un temps une étoile, et en un autre une autre étoile caresse l'aurore. Vous le savez par les dix-neuf révolutions annuelles du Soleil éclatant, bien égales entre elles, et par les étoiles de la nuit depuis la ceinture jusqu'au bout des pieds d'Orion et à son chien hardi. Les astres même de Poséidon et ceux de Zeus annoncent aux humains qui les observent ce qui doit naturellement arriver : ayez donc soin, si vous vous confiez à un navire, d'apprendre a connaître les signes précurseurs des vents d'hiver et de la mer orageuse. Vous y aurez peu de peine, et l'humain prudent y trouve une grande utilité. En se précautionnant d'abord lui-même, il avertit les autres de l'approche de la tempête, car souvent dans une nuit sereine, craignant la mer dès le matin, il remet son vaisseau à terre; d'autres fois il prolonge jusqu'au troisième jour et quelquefois jusqu'au cinquième le moment de son départ. Mais aussi en d'autres temps il s'expose au danger qu'il n'a pas prévu, car les hommes n'ont pas reçu de Zeus la connaissance de toutes choses; il y en a plusieurs encore qui leur sont cachées, et qu'il leur fera connaître dans la suite, quand il lui plaira; car révéré en tous lieux, il aime les mortels, et sa protection éclate dans les signes qu'il leur donne. Ainsi la Lune, quand elle ne paraît qu'à moitié, nous apprend certaines choses, et d'autres choses encore à mesure qu'elle se remplit deux côtés, et encore quand elle est pleine. II en est de même aussi du soleil, à la fin de la nuit et quand il se lève. Et nous pourrons tirer encore d'autres pronostics des autres astres, tant la nuit que le jour.

Observez donc d'abord la Lune avançant ses deux cornes : le soir diversifie beaucoup sa lueur en différents temps. Elle prend en croisant des apparences bien variées, les unes le troisième, les autres le quatrième jour, et par elles vous pouvez juger de la température du mois qui commence. Car si elle est bien effilée et claire, le troisième jour, elle sera sereine; si elle est fine et presque rouge, elle présage des vents; si ses bords ne se terminent pas net, et que ses cornes ne soient pas bien pointues, mais que sa lueur au troisième jour soit faible, c'est signe que le vent viendra du midi, ou que la pluie est près de tomber. Si dans le troisième jour, ses deux cornes n'éprouvent aucun changement, et qu'elle ne brille pas par le haut, mais que les pointes de son croissant s'inclinent également droit de part et d'autre, les vents du soir s'élèveront pendant cette nuit; mais si c'est dans son quatrième jour, qu'elle a cette apparence, elle désigne de la pluie amassée dans l'air; et si la corne supérieure du croissant est abaissée, attendez-vous à un vent du nord. Si au contraire cette corne se relève, vous aurez un vent du midi; si quand, le troisième jour, elle montre un cercle entier  [Halos et Couronnes], elle est pleinement rouge, il survienda un orage qui sera autant plus grand, que le rouge qui la colore sera plus fort. Considérez pareillement la Lune quand elle est pleine et quand elle est dichotome [b], quand elle est croissante, et quand elle va reprendre ses cornes; vous trouverez encore dans sa couleur des annonces de la température du mois quel qu'il soit. Car si elle est pure, vous aurez du beau temps; si elle est rouge, vous n'aurez que des vents; et si elle est plus ou moins obscurcie et terne, vous pouvez prévoir de la pluie.

Ces annonces ne se font pas tous les jours, il n'y a que celles du troisième et du quatrième avant la dichotomie, et de la dichotomie à la Lune de la moitié du mois, ainsi que de cette moitié à la dichotomie décroissante, qui soient signifiantes. On atteint bientôt le dernier quart du mois, et ensuite le troisième on compte de la fin. Si elle est alors entourée de deux ou trois cercles, ou même d'un seul, le cercle unique est un signe de vent ou de calme; si le cercle n'est pas bien formé, il y aura du vent; s'il est faible, on aura du calme, mais deux cercles qui entourent la Lune sont les avant-coureurs d'un orage qui sera bien plus fort s'il y a un troisième cercle plus sombre et plus déchiré. Tels sont les présages que vous pouvez tirer de la Lune pour le mois.


 
 
 
 
 
 
 

[a] Un ancien astronome, Méton, a trouvé par des calculs exacts la petite année, relativement à la grande où tout se confond. Après lui, les astronomes ont affiché dans les villes, des tables des révolutions du Soleil, en périodes de 19 ans, avec tel hiver, tel printemps, tel été et tel automne en chaque année, tels vents et autres circonstances utiles à savoir, et tout cela bien avéré a été connu d'Aratus comme les Grecs l'avaient appris des Égyptiens et des Chaldéens. En observant le cours du Soleil pendant 19 ans, on le trouve constamment le même. Et pareillement le lever de la ceinture d'Orion jusqu'au coucher de cette constellation entière. Ainsi que le lever ci le coucher du Chien, correspondent dans les années égales. (Théon).
 

[b] La lune dichotome, ou coupée par le milieu, est la quadrature, entre la nouvelle et la pleine Lune, ou entre la pleine et la nouvelle C'est ce que nous nommons vulgairement premier et second quartier, parce que nous ne voyons que la moitié de la face tournée vers le Soleil. (Halma).

Ayez soin aussi de consulter le Soleil aux deux points opposés, car les signes qu'il présente sont les meilleurs. D'abord il faut que son disque soit bien pur quand il touche les terres à l'horizon; si le jour doit être serein, il faut qu'il n'ait aucune tache, mais qu'il paraisse avec le même éclat sur toute sa surface. S'il est bien pur le soir, et qu' il se couche sans nuages, avec une splendeur adoucie depuis le milieu du jour, l'aurore du lendemain sera belle, mais non s'il se lève comme creusé en apparence, ni quand ses rayons se partagent en se dirigeant les uns vers le midi, les autres vers le nord, en même temps qu'entre eux il en reste d'autres très brillants, car alors c'est de la pluie ou du vent qu'il vous annonce. Voyez donc si les rayons du Soleil retournent sur lui, c'est une observation très bonne à faire. S'il a de la rougeur, comme souvent il devient rouge par l'attraction des nuages, c'est un signe de vent, s'il devient noir, c'est signe d'une pluie prochaine; et s'il est noir et rouge en même temps, c'est signe de pluie et de vent. Si lors de son lever ou de son coucher, ses rayons se réunissent et forment un faisceau épais, ou s'il est chargé de nuages, quand il passe de la nuit à l'aurore, ou du jour à la nuit, tous ces jours là n'auront que des pluies continuelles : et de même, quand quelque petite nuée précédera son lever, et qu'il montera ensuite paré de ses rayons, attendez-vous à de la pluie; quand son disque mat paraît comme dilaté à son lever, et se rétrécit ensuite, le jour sera beau, quand même il y aurait eu un peu de pluie, et qu'il aurait été pâle à son coucher.

Après une pluie qui a duré tout le jour, examinez les nuées, cers le Soleil couchant. Si une nuée noirâtre obscurcit le Soleil, et qu'elle soit traversée par des rayons qui paraissent autour, de part et d'autre, vous aurez besoin de vous mettre à couvert quand il se lèvera. Mais s'il se plonge sans nuée dans le flot du soir, et que pendant qu'il se couche et qu'il disparaît, des nuées rougeâtres s'approchent de lui, vous pouvez ne pas trop craindre de pluie pour la nuit ni le lendemain. Quand au contraire les rayons du Soleil en s'affaiblissant se dardent rapidement du ciel, comme pour s'éteindre, lorsque la Lune opposée à la Terre et au Soleil, répand une ombre, et qu'il ne paraît pas de nuages rouges dispersés çà et là, pendant qu'il tarde à briller avant l'aurore, les terres deviennent arides, ce jour là. Pareillement, si, pendant qu'il est encore sous l'horizon, il n'envoie que des rayons ternes avant l'aurore, n'oubliez pas que vous aurez bientôt de la pluie; et plus ces rayons seront obscurs plus vous serez certain qu'il ne manquera point d'en tomber. Mais si les rayons ne sont que peu ternis, comme ils le sont souvent par des nuages légers, ils s'obscurcissent davantage à l'approche du vent. Les cercles qui entourent le disque solaire, ne montrent pas qu'il soit serein; plus ils en sont proches et noirs, plus ils annoncent d'orages; et s'il  n'y en a que deux, ces orages seront encore plus violents. Observez donc, quand le Soleil se lève, et quand il se couche, si les nuages nommés parhélies [Halos et Couronnes] qui l'entourent, sont rouges du côté du midi ou du côté opposé, ou des deux côtés à la fois; et ne regardez pas cette observation comme vaine, car quand ils entourent de toutes parts le Soleil, près de l'océan, la pluie ne tarde pas à tomber; s'il n'y en a qu'un qui rougisse du côté du nord, c'est de là que viendra le vent; mais du midi, si elle est de ce côté là, surtout si en même temps il tombe des gouttes de pluie, ces signes seront plus certains du côté de l'occident, car c'est de là qu'ils annoncent toujours sans varier. 

Observez la Crèche : semblable à un petit nuage elle est placée dans le ciel boréal sous le Cancer; mais autour d'elle a une distance médiocre qu'on peut estimer d'une coude au plus, marchent deux étoiles peu apparentes, l'une boréale, l'autre australe. On les appelle les ânes, et au milieu d'elles est la Crèche, qui s'évanouit bientôt quand l'air est pur. Si ces étoiles qui marchent ensemble des deux côtés paraissent proches l'une de l'autre  elles inondent les campagnes d'un déluge d'eau : si le ciel s'obscurcit, et que ces deux étoiles conservent leur couleur, c'est encore un signe de pluie; si l'âne plus boréal que la Crèche n'a qu'une lueur languissante et sombre, tandis que l'austral est brillant, prenez garde au vent du midi; et si, au contraire, l'austral parait s'obscurcir, observez surtout le boréal.

La mer gonflée et les sifflements qui se font entendre au loin sur ses rivages, dans un temps serein, et les sons aigus et prolongés qui viennent du haut des montagnes, sont encore des signes de vent.

Quand le héron blanc vient à grands cris, de la mer à la terre, contre sa coutume, la mer sera fort agitée. Et souvent les foulques ou poules d'eau, quand elles volent par un temps serein, se portent en foule contre les vents qui vont souffler. Souvent aussi les canards sauvages ou les plongeons de mer, qui battent la terre de leurs ailes, et les nuées qui se prolongent sur les sommets des montagnes, et les fleurs qui tombent des plantes, avec le duvet des acanthes blanches, et nageant à la surface de l'eau, avant ou après, sont autant de signes de vent. En observant aussi, en été, d'où partent les tonnerres et les éclairs, vous saurez par là doit vient le vent. Et dans l'obscurité de la nuit, vous aurez du vent des points où sont les étoiles tombantes, qui laissent après elles un sillon blanchâtres, mais si elles filent les unes et les autres de divers côtés, comptez sur des vents variés qui s'entrebattront et se confondront les uns dans les autres, de sorte qu'alors on ne peut avoir rien de certain.

Quand les éclairs [La Foudre et les Éclairs] partent du sud-est et du midi, ou bien de l'ouest et quelquefois du nord, le pilote en mer a sujet de craindre la tourmente ou la pluie qui amène tous ces éclairs. Souvent, à l'approche des pluies, les nuées paraissent comme des toisons de laine, ou une double iris [L'Arc-en-ciel] s'étend sous toute la courbure du ciel, ou quelque étoile s'entoure d'un espace noirâtre; les oiseaux de mer ou de marais plongent sans cesse, et sans pouvoir se rassasier de ces bains perpétuels; ou les hirondelles voltigent sur les marais, en rasant de leurs ventres la surface de l'eau en vain soulevée; ou l'espèce la plus persécutée des grenouilles, qui sont la pâture des serpents, croasse au bord des eaux; ou le hibou solitaire bugle dès le matin; ou la corneille bruyante au-dessus du rivage, s'abat sur la terre quand l'orage va commencer, ou bien elle enfonce sa tête dans l'eau jusqu'aux épaules, ou elle s'y plonge toute entière en nageant, ou elle s'y tourne et retourne en criant.

Les boeufs même, sentant la pluie qui va tomber, élèvent leurs têtes vers le ciel. Les fourmis emportent au plus vite leurs oeufs de leur trou; les iules [c] rampent sur les murs, ainsi que les vers qu'on appelle les entrailles de la terre.

Les poules domestiques, engendrées par le coq, grattent et gloussent avec un bruit semblable à celui de l'eau qui tombe par gouttes sur de l'eau.

Toutes les espèces de corbeaux, et les familles des geais, donnent aussi en se rassemblant, et par leurs cris qui ressemblent à ceux des éperviers, des signes de la pluie prête à tomber; les corbeaux imitent par des croassements réitérés et ils se rassemblent en retournant le soir à l'étable tumultueux et par les battements fréquents de leurs ailes, le bruit des grandes gouttes de la pluie qui commence. Les canards et les geais domestiques, perchés sur les endroits les plus élevés, agitent leurs ailes, ou le héron court vers l'eau en jetant des cris aigus; ce sont pour vous, qui voulez prévoir la pluie, autant de signes que vous devez ne pas négliger, non plus que l'acharnement des mouches, qui piquent avec plus d'avidité pour le sang; ni les flocons qui s'amassent au bord des bougies qui brûlent dans les ténèbres de la nuit; ni en hiver, le mouvement extraordinaire et irrégulier de leurs flammes, qui se jettent çà et là comme en bouillons; ni leur lumière mate et sans rayons. N'oubliez pas aussi d'observer si les canards volent par troupes nombreuses; s'il sort beaucoup d'étincelles du feu où vous aurez mis un pot ou un vase à trois pieds; si, pendant que les charbons sont ardents les cendres sont parsemées de points brillants comme de grains de millet, à tout cela tous reconnaîtrez des marques de pluie. 

Mais si les sombres nuées s'étendent le long des vallées des grandes montagnes, pendant que leurs sommets restent découverts, vous aurez un temps serein, de même que quand la nuée sera basse sur la vaste mer, et ne s'élèvera pas au-dessus de la surface de l'eau où elle restera étendue au niveau de la plage maritime. 


[c] L'iule, dit Théon est un ver à plusieurs pieds, il en a mille, comme les scolopendres et pourquoi on lui en donne le nom. On les nomme les entrailles de la terre, parce qu'ils y vivent, et à cause de leur forme longue et ronde. Tous ces signes, dit Théon sont causés par la disposition de l'air qui agit sur les objets intérieurs comme sur les extérieurs. (Halma).
Quand donc l'air est serein, observez s'il ne se troublera point; et quand il est orageux, observez s'il doit bientôt s'éclaircir. Pour cela, consultez la Crèche que le Cancer entoure, quand elle vient d'être dégagée de tout nuage, car elle s'en délivre à la fin de l'orage. La tranquillité des flammes des luminaires, et le cri lent et paisible du hibou pendant la nuit, et de la corneille le soir, vous annoncent la fin de la tempête, de même qu'aux cris des corbeaux, se répondant les uns aux autres, et ensuite croassant tous ensemble, en se ressemblant et regagnant leurs nids, on peut penser qu'ils se réjouissent, si on en juge par le bruit qu'ils font, sur les arbres ou ils sont perchés, en secouant leurs ailes mouillées.

Avant le retour du calme, les grues s'envolent ensemble sans crainte, mais n'espérez point de beau temps si elles reviennent, non plus que si la clarté du ciel s'obscurcit sans qu'il y ait de nuées, ni d'autre obscurité d'ailleurs, ni de la Lune, mais si les étoiles sont sans éclat, tout cela ne peut vous présager un beau temps, mais de l'orage; ainsi que quand vous voyez des nuées dans un même lieu, et d'autres près d'elles, celles-ci passant, et les premières les suivant; et aussi quand vous entendez les oies qui crient en allant aux pâturages.

Le cri nocturne de la corneille qui vit neuf âges, de la chouette qui se fait entendre le soir, et du passereau le matin tous les oiseaux qui s'éloignent de la mer, l'orchile et le rouge-gorge qui se retirent dans des trous, et les troupes de geais qui reviennent le soir de paître, vous offrent encore des signes de tempête.

Les abeilles fauves ne sortent pas avant un orage pour aller chercher leur nourriture, mais elles s'occultent au-dedans à leurs ouvrages, et en l'air les longues bandes de grues ne continuent pas leur vol, mais elles retournent et cessent de voler. Il en est du même quand, dans le repos des vents, les toiles légères sont agitées, et que les flammes des bougies sont ternes, ou lorsque le feu prend avec peine et sans faire de cendre, aux torches d'ailleurs nettes et sèches, attendez-vous à des orages.

A quoi bon rapporter tous les autres signes que les humains  peuvent remarquer? Il n'est pas jusqu'à la cendre que vous pouvez observer comme une neige légère, comme des grains de millet autour de la mèche ardente de la lampe allumée; ou comme de petits grêlons autour d'un charbon brûlant avec un nuage léger qui paraît au milieu tandis que le feu le consume en dedans.

Les chênes chargés de leurs fruits, et les noirs lentisques, ne sont pas exempts de nous donner des signes à leur manière. Le cultivateur les examine souvent pour ne pas perdre ce que  l'été lui promet. Les chênes bien garnis de glands annoncent un hiver rigoureux; que les campagnes ne soient donc pas trop couvertes, afin que les épis ne soient pas trop serrés. Le lentisque produit trois fois, et il porte en trois temps qui servent d'indications pour autant de sortes de culture.

En effet, on divise en trois le temps de travailler à la terre, celui du milieu, et ceux du commencement et de la fin. D'abord ce sont le labourage et les semailles, ensuite la production des fruits, et enfin le terme. Tout cela est bien signifié par le lentisque dont la fécondité l'emporte sur tous les autres végétaux. Ses premiers fruits sont petits, les seconds sont moyens entre les premiers et les derniers. La squille, par ses trois temps de floraison, nous montre la même distribution des travaux de la terre; car ce que le cultivateur remarque dans la fructification du lentisque, il le retrouve dans la blanche fleur de la squille.

Quand, dans la saison de l'automne, les guêpes se ramassent en plusieurs groupes, avant le retour des Pléiades au soir, on peut être certain que l'hiver suivant sera proportionné à la grosseur de ces pelotons. Les accouplements des truies, des brebis et des chèvres, recevant encore le mâle, au retour du pâturage. annoncent, comme les guêpes, une grande intensité de froid. Le pauvre se réjouit quand il voit les chèvres, les brebis et les truies ne s'accoupler que tard, parce que n'ayant pas de quoi se chauffer beaucoup, il prévoit par elles, que l'hiver sera doux cette année. 

Le laboureur aime aussi â voir des troupes de grues venir en leur temps, car quand elles se montrent hors de saison, les hivers arrivent aussi d'autant plus irrégulièrement, qu'elles se font voir avec plus de variations; car plus tôt et plus serrées elles paraissent, plus tôt aussi ils viennent après elles. Mais quand vous ne les voyez que tard et non en troupes, qu'elles volent plus longtemps et en petit nombre, le délai de l'hiver vous permettra d'achever vos derniers travaux.

Si les boeufs et les béliers, à la fin de l'automne, frappent la terre de leurs cornes, et élèvent leurs têtes contre le vent du nord, les Pléiades à l'occident vous amèneront un hiver orageux: qu'on n'ouvre pas trop la terre, car il sera long et excessif; et il ne sera favorable ni aux plantes, ni à la culture. Qu'une neige abondante couvre les vastes campagnes, mais qu'elle ne tombe pas sur les moissons déjà fortes et montées, afin qu'on puisse jouir de la fertilité de cette année. Mais il ne faut pas qu'on voie au ciel une ou plusieurs comètes, comme il s'en forme dans les années sèches.

Le cultivateur ne voit pas non plus avec plaisir, de dessus le continent, des troupes d'oiseaux se jeter des îles sur ces terres ensemencées, à l'approche de l'été; car il craint pour sa moisson, qu'elle ne soit dépouillée de grains, et frappée d'une rouille stérile. Mais le pasteur voit volontiers ces oiseaux, quand ils viennent en assez grand nombre, dans l'espérance qu'ils lui donnent qu'il y aura abondance de lait pendant l'année. 

C'est ainsi que nous vivons nous autres humains, en divers lieux, mais dans les mêmes variétés de peines, toujours attentifs à étudier les signes qui s'offrent devant tous, pour nous donner la connaissance de l'avenir. 

Les bergers observent les agneaux quand ils vont aux champs : d'un côté les béliers du troupeau, si de l'autre les agneaux jouent à se frapper, ceux ci avec leurs quatre pieds légers, ceux-là avec leurs deux cornes; ou si quelques-uns ne marchent pas volontiers hors du troupeau, broutant l'herbe çà et là, en retournant le soir à l'étable, quoique souvent rappelés par de petits cailloux qu'ils leur jettent.

Les laboureurs et les bouviers apprennent aussi des boeufs à prévoir l'orage qui va s'élever; quand les boeufs lèchent les cornes de leurs pieds de derrière, ou s'étendent dans l'étable couchés sur le côté droit, le laboureur prudent diffère d'ouvrir la terre; ou quand mugissant plus que de coutume, ainsi que les vaches tristes au retour du pré et du pâturage, en signe de vouloir se rassasier avant l'orage; et ni les chèvres, si elles broutent les branches de chêne ni les cochons, s'ils se vautrent dans la boue, n'annoncent du beau temps. 

Quand le loup hurle fortement, seul à l'écart, ou qu'il s'approche imprudemment des endroits habités pour s'y faire une retraite, tandis qu'il devrait se cacher, attendez-vous à un orage dans trois jours. Ainsi vous pouvez par les premiers signes que vous voyez, prédire les vents qui souffleront, la tempête un la pluie, pour le jour même, ou pour le lendemain ou le surlendemain.

Ni les rats même avec leurs cris sourds, n'ont paru aux Anciens ne pas vouloir annoncer quelque changement dans l'air, quand par un beau temps, on les entend ou qu'on les voit courir plus fréquemment comme dans une espèce d'agitation; ni les chiens, quand ils grattent la terre avec deux pattes, car alors le chien sent l'approche de la pluie. L'écrevisse alors sort de l'eau pour se retirer sur la terre avant que l'orage éclate. Les souris dans les maisons se préparent de leurs pattes un lieu pour s'y reposer quand elles ont un pressentiment de pluie, et c'est ainsi qu'elles la présagent.

Ne négligez aucun de ces signes. Comparez-en deux l'un à l'autre; s'ils conspirent ensemble, vous serez plus sûr de l'avenir, mais assurez vous-en plus encore par un troisième. Vous pouvez compter tous les signes pendant le cours d'une année, en les comparant les uns aux autres pour voir au lever ou au coucher de quelle étoile un jour commence comme un signe l'annonce. Il sera plus sûr de faire ces observations aux quartiers de chaque Lune qui sont les temps des mois consécutifs, où l'air est le plus difficile à juger pendant les huit nuits de la présence ou de l'absence de la Lune. Ces observations faites sans interruption pendant toute une année, vous mettront en état de ne rien dire d'incertain sur l'état de l'air.

Épilogue du scholiaste - Voilà mon cher Julien, ce que j'ai brièvement rassemblé pour vous. D'autres peuvent y ajouter beaucoup d'autres choses, comme l'a fait Aratus, qui, à l'occasion de Persée, rapporte tout ce qu'on a dit de ce héros; en parlant du Bouvier, tout ce qu'on en sait déjà; et en décrivait le vaisseau Argo, l'expédition des Argonautes. C'est l'usage de ceux qui veulent faire de gros livres. Pour moi, content de ne dire que ce qui est à propos et nécessaire, j'ai négligé tout le reste comme superflu. Je n'ai donné de détails que ceux qui conviennent à la science mathématique, sans égard pour les fables et les fictions; car à quoi bon s'engager dans les détails d'une érudition déplacée, réciter le nombre et l'espèce des étoiles de chaque constellation, marquer les positions des cercles divers qui n'importent en rien au sujet, et écrire sans fin et sans mesure, moins encore pour paraître savant, que pour faire parade de science? (Théon).
Et que serait-ce donc s'il n'eût pas voulu être court? n'eût- il pas mieux fait, quoiqu'il en dise, de nous donner le nombre des étoiles de chaque constellation auquel il faut que je supplée maintenant par Eratosthène? (Halma).
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