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Le zodiaque

Le zodiaque  est défini conventionnellement comme la zone céleste, large de 18°, qui s'étend de chaque côté de l'écliptique et dans laquelle se meuvent les planètes. On la divise dans sa longueur, à partir du point vernal ou équinoxe de printemps, en douze parties, égales chacune à 30°. Ce sont les douze signes du zodiaque, appelées aussi par les anciens maisons du Soleil, parce que cet astre, dans sa révolution annuelle apparente autour de la Terre suivant l'écliptique, les parcourt successivement. 

Le poète Ausone en a, dans deux vers bien connus, donné les noms, dans l'ordre de ce parcours :

Sunt Aries, Taurus, Gemini, Cancer, Leo, Virgo, Libraque, Scorpius, Arcitenens, Caper, Amphora, Pisces.
Les voici en français : 
Bélier, Taureau,  Gémeaux, Cancer (ou Écrevisse), Lion, Vierge, Balance, Scorpion, Sagittaire, Capricorne, Verseau et Poissons
Ces noms sont également ceux des douze constellations du zodiaque, et qui occupaient autrefois les douze divisions dont nous venons de parler, mais qui, depuis Hipparque, ont avancé d'environ un signe, du fait de la précession des équinoxes. Il ne faut donc pas confondre les signes du zodiaque avec les constellations dont ils portent le nom. Le signe du Bélier n'est autre chose que la première douzième partie, ou les trente premiers de degrés de l'écliptique; mais la constellation du Bélier est un assemblage d'étoiles qui, à la vérité, répondait autrefois dans le ciel, au même endroit que le signe du Bélier, auquel elle a donné son nom, mais qui est aujourd'hui plus avancée d'environ trente degrés, ou de la valeur d'un signe de sorte que la constellation du Bélier occupe à présent le signe du Taureau; la constellation du Taureau occupe le signe des Gémeaux, et ainsi des autres. Ainsi, tandis que le Soleil entre dans le signe du Bélier, maintenant comme autrefois, le 20 ou le 21 mars et en sort le 20 ou le 21 avril, il ne se trouve dans la constellation de même nom que du 15 avril au 15 mai, approximativement; et la coïncidence ne se rétablira que dans 26,000 ans. 
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Des animaux et des saisons

On a dit que les animaux symboliques qui caractérisent le zodiaque (au moins  la majorité de ses signes) et d'où lui viendrait son nom (en grec Zôdia = petits animaux) correspondaient aux travaux des champs ou à des phénomènes astronomiques. 

Le Bélier, le Taureau, les Gémeaux - ces derniers originairement figurés par deux chèvres -, aurait évoqué les trois mois du printemps, le Cancer aurait annoncé qu'en entrant dans ce signe le Soleil commence à rétrograder, le Lion aurait fait songer aux chaleurs, la Vierge tenant des épis aurait été l'emblème des moissons, la Balance aurait symbolisé l'égalité des jours et des nuits, le Scorpion, les maladies, particulièrement fréquentes à cette époque de l'année, le Sagittaire, les plaisirs de la chasse, le Capricorne aurait annoncé la montée du Soleil vers des signes supérieurs, le Verseau aurait symbolisé la période des pluies, les Poissons celle de la pêche. 

Des rapprochements  qui ne semblent pas dénués de pertinence; mais à condition de se souvenir que tout cela n'a pas constitué au départ un système de symboles aussi coordonnés qu'il l'est dans le zodiaque que nous connaissons aujourd'hui en Occident. Le symbolisme  peut également être très différent dans d'autres cultures, qui en ont élaboré des zodiaques. En Chine par exemple, des  talismans sur lesquels est frappé un zodiaque, montrent des signes  tels que la Souris, la Vache, le Tigre, le Lapin, le Dragon, le Serpent, le Cheval, le Bélier, le Singe, la Poule, le Chien, le Porc.

Des douze signes que renferme le zodiaque, six renvoient à des constellations situées dans la partie boréale du ciel, c'est-à-dire, qu'ils se trouvent entre l'équateuret le pôle nord céleste, et les six autres sont placés dans la partie centrale et se trouvent entre l'équateur et le pôle sud. Les six premiers se nomment signes septentrionaux, et les six derniers signes méridionaux. Les signes septentrionaux sont le Bélier, le Taureau, les Gémeaux, le Cancer ou Ecrevisse, le Lion et la Vierge; les signes méridionaux sont la Balance, Ie Scorpion, le Sagittaire, le Capricorne, le Verseau et les Poissons. 
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Signes du zodiaque.
Les signes du zodiaque mis en parallèle avec les travaux des champs.
Bas-reliefs de la cathédrale d'Amiens. 
Signes du zodiaque et calendrier agricole.

Les astrologues divisent aussi les signes du zodiaque en signes ascendants et en signes descendants. Les premiers sont ceux que le Soleil parcourt en montant vers le pôle qui est au-dessus l'horizon et en s'approchant conséquemment du zénith. Pour Ies habitants de l'hémisphère boréal de la Terre Ies sigles ascendants sont le Capricorne, le Verseau, les Poissons, le Bélier, le Taureau et les Gémeaux. Pendant le temps que le Soleil emploie à décrire ces six signes, les jours croissent et les nuits diminuent, parce que les arcs diurnes, des parallèles augmentent de plus en plus. Les signes descendants sont ceux que le Soleil décrit en descendant vers le pôle situé au-dessus de l'horizon, et conséquemment en s'éloignant du zénith.. Dans l'hémisphère boréal, ces signes sont l'Écrevisse, le Lion, la Vierge, la Balance, le Scorpion et le Sagittaire. Lorsque le Soleil décrit ces signes, les jours diminuent et Ies nuits croissent, parce que les arcs diurnes des parallèles diminuent de plus en plus.

L'entrée dans le signe du Bélier ou premier signe du zodiaque coïncide avec l'équinoxe de printemps. L'heure en varie donc, d'une année à l'autre, avec celle de cet équinoxe et, comme conséquence, l'heure de l'entrée dans les deuxième, troisième, quatrième... signes. Les astrologues les représentaient  par des sortes d'hiéroglyphes, analogues à ceux en usage pour les planètes :

L'origine du zodiaque.
Le zodiaque, qui n'est d'aucun usage en astronomie, a joué un grand rôle dans l'Antiquité : il y était la base de la formation du calendrier, de la fixation des fêtes publiques, de la constitution des ères. On a longtemps attribué son invention aux Égyptiens. En réalité, l'astrologie n'a acquis une importance dans ce pays qu'à l'époque hellénistique. Et s'il est vrai qu'il s'est constitué tardivement (le signe de la Balance, par exemple, n'apparaît qu'à l'époque romaine), ses bases en été plutôt jetées en Mésopotamie.

L'origine du zodiaque est une question qui a exercé au moins autant l'imagination que la science des érudits. Les figures en majeure partie animales qui le composent; les hiéroglyphes qui résument ces figures; la découverte de quatre zodiaques égyptiens - deux à Denderah, un à Esneh et un à Akhmîm - que l'on croyait remonter à une haute antiquité; le fait que les Égyptiens ont eu de temps immémorial une année solaire divisée en douze parties égales et réglée sur le lever des constellations; les textes nombreux qui revendiquent pour les Égyptiens la priorité de l'invention de l'astronomie ou astrologie et affirment notamment que les Égyptiens ont divisé le zodiaque en douzièmes égaux au moyen de la clepsydre : tout cela a paru d'abord faire tourner le débat à l'avantage des Égyptiens. Mais il a été irrévocablement démontré que les zodiaques égyptiens sont tous de l'époque romaine et librement imités du zodiaque grec - la prétendue astrologie égyptienne est en fait une astrologie hellénistique -, et du coup se sont écroulées les suppositions extravagantes échafaudées sur leur prétendue antiquité. 

On accepterait aujourd'hui, s'il n'y avait pas d'autre objection, les 2400 ans auxquels devaient remonter, d'après le calcul de la précession des équinoxes, des zodiaques qui plaçaient l'équinoxe de printemps dans le Taureau; mais on sourit du zèle de Dupuis, qui, faisant permuter équinoxes et solstices, réclamait les 13,000 ans nécessaires pour que l'écliptique eût tourné de 180 degrés. L'insouciance d'un artiste du temps des Antonins - l'auteur du zodiaque d'Esneh - avait déchaîné ce flot d'hypothèses, qui, en inquiétant les exégètes de la Bible, faillit, au XIXe siècle, transformer la discussion scientifique en querelle religieuse.

Quant aux textes qui attribuent aux Égyptiens l'invention du zodiaque, ils représentent l'opinion de scoliastes de basse époque, qui montrent naïvement leur ignorance. Macrobe explique tout au long comment s'y prirent les Égyptiens pour diviser, à l'aide de clepsydres, le cercle zodiacal en douzièmes égaux, sans se douter que son procédé, bon pour mesurer des douzièmes de l'équateur, donnerait des fractions très inégales du zodiaque. Il est tout à fait étranger au calcul des anaphorai ou estimation des ascensions obliques en degrés d'ascension droite. Servius a peut-être entendu parler des ascensions obliques, c'est-à-dire des arcs inégaux du zodiaque qui montent au-dessus de l'horizon en des temps égaux, mais il paraît confondre l'étendue réelle et le temps d'ascension; il assure que les Égyptiens divisent le zodiaque en douze parties égales, mais que les Chaldéens admettent onze signes seulement, et d'une inégalité qui peut aller du simple au double. Au temps de Servius et de Macrobe, il y avait six cents ans que les astrologues grecs étaient ou « Chaldéens » ou « Égyptiens », et l'on ne saurait appliquer de pareils textes aux Égyptiens d'Égypte ou aux Chaldéens de Chaldée, ou plus exactement aux Mésopotamiens de Mésopotamie.

Les égyptologues conviennent, du reste, que, si l'on trouve dans les documents beaucoup de noms de constellations et de décans, ou même la preuve que les constellations étaient enfermées dans des figures, ces constellations appartiennent à des parties très différentes du ciel et n'ont été remarquées, de préférence à d'autres, qu'en raison de leur éclat. On sait que le régulateur du calendrier égyptien était Sothis ou Sirius et son voisin Orion, qui n'appartiennent pas au zodiaque. De même les décans, que les Grecs feront plus tard entrer dans leur zodiaque, étaient inégalement et librement disséminés sur le pourtour de la sphère, de préférence dans la région équatoriale. En un mot, il n'y avait pas de zodiaque égyptien; et on le conçoit aisément, puisque les Égyptiens, peu curieux de suivre la marche des planètes, ne se préoccupaient pas de leur route oblique et avaient adopté une année réglée sur le lever des constellations équatoriales.

Pour la raison inverse, les Mésopotamiens, qui pratiquaient l'année luni-solaire, avec la Lune pour régulateur principal, et attribuaient une influence prépondérante aux planètes, ont dû distinguer de bonne heure, entre toutes les constellations, celles qui ont l'honneur d'héberger les astres errants. Si la Lune était toujours l'objet principal de leur attention, ce sont les étapes de sa route qu'ils ont dû noter tout d'abord, en tâchant d'égaler le nombre de ces étapes à celui des jours de la révolution sidérale de l'astre. La logique postule un premier zodiaque babylonien à 28 cases ou mansions lunaires, tel qu'on le rencontre chez les Hindous et les Chinois, zodiaque qui aurait été, ensuite et par surcroît, divisé en 12 étapes solaires. Nous ne saurions dire si les découvertes
des archéologues ont complètement satisfait la logique sur ce point et dans quel rapport se trouvent avec un véritable zodiaque lunaire les vingt-huit « étoilés normales », inégalement espacées, sur lesquelles les astronomes assyro-babyloniens du temps des Arsacides repéraient la marche des planètes. Ce que nous cherchons, c'est un zodiaque solaire dans l'antique Mésopotamie.

Le zodiaque grec se compose de deux éléments bien distincts les signes ou constellations qui se trouvent semées aux environs de l'écliptique ou route du Soleil, irrégulières en position et inégales en grandeur comme en éclat, et la répartition artificielle de ces signes dans des douzièmes (dôdekatemoria) égaux. Il est évident que, si l'on fait abstraction de ce dernier élément, le plus important des deux et la marque spécifique du zodiaque grec, on doit trouver dans l'uranographie mésopotamienne ou égyptienne mention des constellations zodiacales, sous des noms et, s'il y a lieu, avec des figures différentes. Pour savoir s'il y a eu imitation de la part des Grecs, il suffira de rechercher s'il y a analogie entre les caractères attribués aux constellations qui se correspondent de part et d'autre.

En ce qui concerne les douzièmes, la question paraît tranchée. Même à l'époque des Arsacides, les Mésopotamiens, ennemis des abstractions invisibles, n'avaient pas encore ramené les constellations zodiacales à une étendue égale pour toutes. On peut conclure de là, à plus forte raison, qu'ils ne connaissaient pas les dodécatémories uniformes au temps où ils étaient libres de toute influence grecque.

Restent les signes ou figures. Les assyriologues - ou du moins les plus prudents d'entre eux - n'ont pas encore découvert dans les anciens documents une série complète de constellations zodiacales comparables aux signes grecs; mais ils signalent un Bélier, un Taureau, des Gémeaux, un Scorpion, une Chèvre pisciforme qui répondrait au Capricorne, et deux Poissons ou hommes-poissons reliés par un ligament, comme ceux du zodiaque grec. Enfin, s'il n'y a pas de constellation du Lion, on trouve le dieu solaire Nergal qualifié de Lion, et l'Épi que tient la Vierge grecque est bien sémitique. La position présumée de ces groupes d'étoiles sur la sphère semble indiquer que leurs noms sont des métaphores suggérées par la température des parties de l'année solaire correspondantes. Ainsi, trente siècles avant notre ère, l'équinoxe du printemps était dans le Taureau. Le Taureau était alors le symbole de Marduk, du soleil de printemps qui sort des eaux hivernales et y est encore à demi plongé. Les signes d'hiver sont tous aquatiques, à partir du Scorpion, qui correspondait alors à l'équinoxe d'automne. Ce Scorpion pourrait bien être le monstrueux Homme-Scorpion qui, suivant les légendes cosmogoniques, avait aidé Tiamat à résister au démiurge Bel-Mardouk. L'épithète de Lion conviendrait bien au soleil furieux du plein été. Enfin, l'Épi pouvait être non pas le signe où se trouvait le Soleil au moment de la moisson - laquelle se faisait en Mésopotamie vers le mois de février - mais, au contraire, le signe qui se levait et souriait aux moissonneurs aussitôt le soleil couché.

Le zodiaque mésopotamien ainsi ébauché aurait été subdivisé et complété plus tard, peut-être par suite de l'adoption de l'année luni-solaire, qui exigeait au moins douze compartiments. Le dérangement de l'ancien système par le fait de la précession des équinoxes a pu aussi motiver des retouches. Ainsi, s'apercevant que l'équinoxe avait quitté le Taureau (2450 av. J.-C.), les Mésopotamiens auraient intercalé entre le Taureau et les Poissons un nouveau symbole solaire, le Bélier, pour marquer l'équinoxe du printemps, et affecté la partie antérieure du Scorpion à l'équinoxe d'automne, tandis que le dard de ce même Scorpion devenait le prototype du Sagittaire grec.

Si complaisantes que soient les hypothèses, elles ne vont pas toujours sans lacunes. Celle-ci explique mal ou l'absence d'un signe consacré au solstice d'été, ou la nature de ce signe, qui aurait été le modèle du Crabe (Cancer) grec, c'est-à-dire d'un animal aquatique, tout à fait dépaysé au point où le Soleil atteint son maximum de puissance. L'explication du signe des Gémeaux n'est pas non plus très avancée quand on a reconnu dans ces « Grands-Jumeaux » des hypostases du dieu solaire Nergal, symbolisant le caractère mixte de la température printanière.

En cherchant dans les légendes assyro-babyloniennes les preuves de cette haute antiquité du zodiaque, d'ingénieux érudits, tels François Lenormant, ont eu l'idée de considérer le poème en douze chants d'Isdubar  comme le modèle ou peut-être l'interprétation du cycle zodiacal. En effet, le premier type qui attire l'attention est le taureau divin, Marduk, coiffé de « cornes de souveraineté », et le Taureau est aussi le premier signe du Zodiaque. Le neuvième signe, le Scorpion, apparaît dans le IXe chant du poème, là où le héros solaire Gilgamesh rencontre des hommes-scorpions gardant la porte du mont Masu. Le XIe chant du poème, consacré au récit du déluge, donne l'explication du signe du Verseau, onzième du zodiaque. 
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L'hypothèse de Lenormant

François Lenormant (1837-1883) croyait pouvoir déduire la division du zodiaque en douze signes du Poème d'Isdubar, dans lequel la lutte d'lsdubar contre le taureau divin, l'amour de la déesse Ishtar pour ce Nemrod de la légende babylonienne, la descente d'Ishtar aux enfers et le récit du déluge forment d'importants épisodes. De fait, ce grand poème était bien divisé en douze tablettes ou douze chants, qui auraient pu correspondre aux douze mois de l'année et aux douze signes du zodiaque. Le résumé suivant de ce que contient chacune des tablettes, dans l'état de mutilation où elle nous est parvenue, permettra au lecteur d'apprécier cette hypothèse et en même temps de se rendre un compte exact de l'ensemble du poème dont nous avons détaché seulement quelques épisodes :

Tablette I. - Manque.

Tablette Il. - Le commencement est détruit. Dans ce qui vient après cette lacune, Isdubar voit en songe les étoiles tomber du ciel. Il envoie chercher, pour interpréter son rêve, le voyant Êa-bani, moitié homme et moitié taureau.

Tablette III. -  Êa-bani, séduit par Samhat et Harimat (la grâce et la persuasion personnifiées), se décide àvenir à Uruk, à la cour d'Isdubar. Fêtes pour le recevoir. Amitié qui se noue entre les deux héros.

Tablette IV. - Isdubar, sur le conseil d'Êa-bani, se met en route pour aller attaquer le tyran Humbaba dans la forêt des cèdres. Exploits des deux héros dans le voyage.

Tablette V. - Défaite et mort de Humbaba.

Tablette VI. - Ishtar se propose pour épouse à Isdubar : il la rejette en lui reprochant ses débauches. Ishtar irritée obtient de son père Anu qu'il crée un taureau terrible, qui va ravager Uruk. Isdubar tue le monstre, aidé d'Êa-bani.

Tablette VII. - Êa-bani consulte les arbres pour leur demander un oracle. Isdubar tombe malade et voit des songes effrayants. Il en cherche l'explication auprès d'Êa-bani, dont le pouvoir de devin s'affaiblit et qui ne peut les interpréter. Mort d'Êa-bani.

Tablette VIII. - Lamentation d'lsdubar sur la mort d'Êa-bani. Malade et effrayé par ses visions, il se décide à aller demander la guérison et le secret de la vie à Hasisatra. Voyage du héros. Il rencontre les deux hommes-scorpions qui gardent le lever et le coucher du soleil. Visite du jardin des arbres aux fruits merveilleux, gardé par les nymphes Siduri et Sabit.

Tablette IX. - Dialogue avec les deux nymphes pour obtenir de sortir du jardin en emportant des fruits. Isdubar rencontre le batelier Ur-Bel. Il continue son voyage par eau, sous la conduite de ce batelier; ils finissent par naviguer sur les « eaux de la mort-».

Tablette X. - Isdubar atteint le pays de l'embouchure des fleuves, au delà des « eaux de la mort, » où habile Hasisatra, devenu immortel. Il lui pose ses questions.

Tablette XI - Hasisatra répond en racontant le déluge. Purificafion et guérison d'Isdubar. Son retour à Uruk.
 

Tablette XII. - Lamentation d'Isdubar sur la tombe d'Êa-bani. Marduk, sur l'ordre de Êa, tire du « Pays sans retour » l'ombre du voyant et la fait monter dans les demeures célestes, au milieu des dieux.

Ainsi, dans cette épopée, l'homme-taureau entre en scène au « mois du taureau propice, » auquel préside Êa, le créateur de cet être merveilleux. Isdubar se révèle comme un véritable Hercule dans le mois qui est placé sous le gouvernement de Adar-Sandan. C'est au « mois du feu » qu'Isdubar triomphe de Humbaba et nous savons qu'Isdubar n'est autre que le dieu Feu; Ishtar demande Isdubar en mariage au « mois du message d'Ishtar; » Ishdubar rencontre les deux hommes-scorpions sous le signe du Scorpion; au « mois de la caverne, » il pénètre dans la retraite cachée où les dieux ont transporté Hasisatra. Celui-ci lui raconte le déluge dans le onzième chant, parce que le onzième mois est celui du signe du Verseau. Enfin le douzième mois, celui « des Poissons » du dieu Êa est celui de l'apothéose de l'ombre d'Êa-Bani, parce que ce sont les poissons du dieu Ea qui veillent au lit funèbre et protègent les morts.

L'hypothèse, aussi séduisante et ingénieuse qu'elle paraisse, ne parvient toutefois pas à convaincre. Il faudrait d'autres raisons que ces aventureuses conjectures pour admettre que les Mésopotamiens ont « catastérisé » les héros du poème, ou que le poète a mis en action les signes du zodiaque.

En somme, l'impression qui, pour un profane, se dégage de ces ténèbres, c'est que, faute de trouver dans la Grèce, à religion anthropomorphique, la raison suffisante du zodiaque, et considérant que les Grecs eux-mêmes reconnaissaient les poissons de l'Euphrate dans le signe du même nom, on est en droit de supposer des emprunts faits à la Mésopotamie. C'est de là sans doute qu'est venue l'impulsion initiale, l'idée d'enfermer les groupes d'étoiles dans des figurations animales et comme une première ébauche de l'uranographie grecque. Avec la promptitude et la fécondité de leur imagination, les Grecs ont fait le reste : ils ont décoré leur ciel à leur façon, sans plus savoir ni se soucier de savoir de qui ils tenaient ce qui leur était venu du dehors. L'instinct populaire d'abord, le travail des mythographes ensuite, ont rattaché tous ces catastérismes à la mythologie nationale et effacé ainsi ou rendu méconnaissables les caractères exotiques qui en auraient décelé l'origine. Même si tous les types du zodiaque grec étaient mésopotamiens, nous réclamerions encore pour les Grecs la construction du cercle ou anneau zodiacal, géométriquement tracé à travers les constellations, de l'échelle idéale dont les douzièmes réguliers empruntent les noms, mais non les dimensions des groupes d'étoiles traversés par elle.

La construction du zodiaque a été le dernier terme de ce travail d'assimilation et d'invention. Les anciens navigateurs, disciples des Phéniciens, n'avaient besoin que des Pléiades, dont le lever les invitait à reprendre la mer : leur attention se portait sur le pôle. Homère ne mentionne que « les Pléiades, le Bouvier lent à se coucher, l'Ourse, appelée aussi Chariot, qui tourne sur place en regardant Orion et seule ne se baigne pas dans l'Océan ». Il connaît aussi l'astre « appelé le Chien d'Orion, lequel est très brillant, mais se trouve être un signe fâcheux, car il apporte aux malheureux mortels une chaleur brûlante ». Hésiode, qui enseigne aux cultivateurs à connaître les saisons, se préoccupe du lever d'Arcturus, des Pléiades et Hyades, d'Orion et Sirius. D'où venaient ces noms? Étaient-ils indigènes, ou transcrits, ou traduits? Les Grecs appelaient « phénicienne » la Petite-Ourse, dite aussi « Queue du Chien »; mais Hésiode connaissait déjà des légendes qui faisaient des Ourses et d'Arcturus, dit aussi « Gardien de l'Ourse », des héros arcadiens catastérisés. Qui a fait d'Orion un chasseur, avec son chien Sirius, poursuivant les Pléiades ou poursuivi par l'Ourse et tué par le Scorpion? Cassiopée porte un nom phénicien; mais Sophocle l'englobait avec les Néréides et Andromède dans un drame de mythologie grecque. 

Le zodiaque devint nécessaire aux Grecs quand ils commencèrent à observer de plus près le cours du Soleil, de la Lune, ou même des planètes. Ils ne le reçurent pas tout fait et ne le confectionnèrent pas d'un seul coup, sur un plan d'ensemble. Il ne fut même parachevé qu'au temps d'Hipparque, lorsque, pour avoir douze signes, on se décida à séparer les Pinces du Scorpion et à en faire le signe de la Balance. Une mention échouée dans la compilation de Pline nous apprend que Cléostrate de Ténédos, vers la fin du VIe siècle, y introduisit le Bélier et le Sagittaire. On ne nous dit pas s'il empruntait aux traditions chaldéennes et si le zodiaque se trouva dès lors complet. La division en douzièmes égaux, qui est une violence faite à la nature, ne put venir que plus tard, avec les observateurs armés d'instruments d'une certaine précision, instruments inconnus avant la dioptre encore rudimentaire d'Eudoxe.

Ce qui est certain, c'est que les Grecs n'ont pas attendu d'être initiés par Bérose aux arcanes de l'astrologie pour couvrir leur ciel de figures symboliques, dessinées avec une minutie extrême. On sait qu'Aratus de Soles, contemporain de Bérose, qui a fixé pour toujours l'iconographie stellaire, n'a fait que versifier un traité homonyme composé près d'un siècle avant par Eudoxe de Cnide. Or, ce guide du musée céleste indique dans quelle partie du corps symbolique, tête, cou, épaules, oeil droit et gauche, etc., se trouvent les étoiles, et quelle est l'attitude de la figure, droite, couchée, agenouillée, tournée en avant ou en arrière, en dessus ou en dessous. Les astronomes grecs préparaient ainsi, sans s'en douter, toute espèce de prétextes aux spéculations astrologiques des futurs « Chaldéens » [= astrologues] grecs.

Les anciens zodiaques.
La sculpture et la peinture nous ont transmis un certain nombre de zodiaques antiques. Ceux de Dendérah et d'Ésneh, découverts par l'expédition d'Égypte, et le tableau astronomique trouvé par Champollion dans le Ramesseum de Thèbes,  montrent le Taureau sacré, le boeuf-Apis, qui ouvre la marche (Religion Egyptienne). Il est par ailleurs intéressant observer les zodiaques figurés dans l'art des premiers chrétien, même si les monuments où ce sujet apparaît sont peu nombreux. Car, si peu nombreux qu'ils soient, ils se rattachent assurément à un usage répandu dans la primitive Église, et incitent à faire le parallèle avec l'usage de même symbolisme qui était fait alors dans la religion concurrente de Mithra. On cite d'abord un bracelet qui est orné des douze signes du zodiaque :

On y verra plus tard, au jugement de l'abbé Cavedoni, une allusion à l'instabilité des choses humaines :
« Le Soleil se lève et se couche; il retourne au lieu d'où il est parti, et, renaissant au même endroit, il tourne vers le midi et revient vers le nord. Le vent court et visite toutes choses, et revient sur ses pas par de longs circuits. »
Mais ce n'est pas nécessairement l'idée que se firent les premiers Chrétiens de la place des astres dans le cours des choses. Une peinture mithriaque qui paraît avoir été inspirée par les idées chrétiennes (à moins que ce ne soit le contraire...) dont  l'imitation se retrouve si souvent dans les monuments de la secte, fait voir un homme debout près d'une montagne, indiquant du doigt un segment du cercle du zodiaque, sur lequel sont marquées quatre étoiles : à côté de ce personnage est une femme armée. On a vu dans cette peinture un emblème de la force nécessaire pour arriver au ciel, lequel est figuré par les quatre étoiles. La montagne, rapide et abrupte, peut être l'image du rude sentier de la vertu.

Dans les premiers siècles du Christianisme, les opinions au sujet de l'influence bonne ou mauvaise des astres préoccupaient vivement les esprits : ce qui le prouve, c'est qu'il existait entre les mains de tout le monde certaines tables astrologiques où étaient marqués les présages heureux ou sinistres qui s'attachaient à chaque heure du jour et de la nuit; et ces tables n'étaient point exclues des livres composés pour l'usage des chrétiens. Une curieuse inscription de l'an 364  nous donne la mesure de l'importance qu'avaient de tels présages. 
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Venise : zodiaque de la Tour de l'Horloge.
Zodiaque de la Tour de l'Horloge, à Venise. © Photos : Serge Jodra, 2009-2012.

C'est l'épitaphe d'un enfant nommé Simplicius, dont l'existence, selon la judicieuse observation de Michele De' Rossi (Dell' ampiezza delle Romane Catacombe, 1860), qui est ici notre guide, ne paraît pas s'être prolongée au delà du jour qui l'avait vu naître. Or l'épitaphe porte que ce double événement avait eu lieu,

 « à la quatrième heure de la nuit du VIII des ides de mai, le jour de Saturne, dans la vingtième Lune, sous le signe du Capricorne. »
Cette annotation de date si exceptionnellement minutieuse accuse une intention évidente de mettre sur le compte d'une influence néfaste une mort si prématurée et si affligeante pour des parents. Nous lisons en effet dans les tables astrologiques dont il a été parlé plus haut et que rapporte  Mommsen ( Rossi. ibid.) que 
« tout ce qui arrive en ce jour de Saturne, à telle heure que ce soit du jour ou de la nuit, est obscur et laborieux, et que ceux qui naissent sous une telle influence courent de grands dangers. »
Ces traditions se maintiendront avec persistance et traverseront tout le Moyen âge. Dante mêle sans cesse des idées astrologiques et astronomiques à ses conceptions chrétiennes; à chaque pas de son voyage à la fois mystique et cosmologique, il indique avec une minutieuse exactitude le signe du zodiaque où se trouve le Soleil. Les peintres contemporains et ceux des siècles suivants se sont en ceci inspirés de son esprit : Ainsi le Guariento a représenté, dans l'église des Ermitani de Padoue, les sept planètes à côté de la Passion et de la Résurrection.

Au siècle suivant (XVe), de curieux bas-reliefs de la cathédrale de Rimini offrent à l'oeil étonné, et sans aucun mélange d'allégorie, Saturne, Jupiter, Vénus, etc. Plus tard encore, en pleine renaissance, la chapelle Chigi, dans l'église de Ste Marie du Peuple à Rome, décorée de mosaïques exécutées d'après les cartons de Raphaël, fait voir les divinités des planètes, avec leurs attributs mythologiques, représentées chacune avec un ange auprès d'elle (Nous reproduisons ces dessins dans les pages des chronologies consacrées à la découverte du planètes du système solaire). (Martigny / L.S. / B.-L.).

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Dictionnaire Religions, mythes, symboles
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