.
-

Héra

Héra est une déesse de la Mythologie grecque. C'est la reine grecque des dieux, fille de Cronos et de Rhéa, soeur et épouse de Zeus, dont elle eut Héphaïstos et Hébé. Elle était aussi mère d'Arès; mais elle le conçut seule, piquée de ce que Zeus avait seul produit Athéna. On attribue d'ordinaire à cette déesse un caractère fier et jaloux et des haines implacables. Irritée de ce que le berger troyen Pâris lui avait préféré Aphrodite en adjugeant à celle-ci la pomme d'or, elle excita la guerre de Troie et s'acharna à la perte de cette malheureuse ville. Elle persécuta continuellement les nombreuses maîtresses de son époux, Io, Léto, Callisto, Sémélé, Alcmène, ainsi que les fruits de leurs amours, surtout Héraclès. Zeus, irrité de ses reproches continuels, la fit un jour suspendre avec une chaîne d'or entre le Ciel et la Terre. Héra était particulièrement honorée à Samos, à Argos, à Olympie, à Carthage et à Rome où on l'avait assimilée à Junon. On la regardait comme présidant aux mariages et aux accouchements. Le paon, type de la beauté et de l'orgueil, lui était consacré.

L'animal consacré à Héra était la vache ou plutôt la génisse; on lui en immolait des hétacombes. Plus tard on lui consacra le paon.

Les érudits ont proposé des interprétations radicalement opposées du personnage d'Héra. Elles sont, comme toutes les hypothèses qui prétendent remonter au caractère initial des divinités grecques et en faire des personnifications de forces de la nature, très arbitraires et contestables. Pour les uns, l'épouse de Zeus, dieu du ciel, personnifie la terre; pour les autres l'air. Empédocle, Euripide, Plutarque, Creuzer, Welcker ont soutenu la première théorie; Platon, les stoïciens, Preller, la seconde. Schirenck, Gerhard et Boscher font d'Héra une divinité lunaire. De chacune des démonstrations proposées il n'y a lieu de retenir que la réfutation des autres.

La mythologie de Héra.
Héra est, par excellence, la divinité féminine. On place la menstruation, la grossesse, l'accouchement, sous son influence. On lui dédie les plantes qui sont réputées guérir les maladies féminines. D'une manière générale, elle est la protectrice des femmes et surtout du mariage. La fête de ses noces avec Zeus était supposée identique à celle de l'institution du mariage. On l'appelait mariage sacré théogamie, gamélie; célébrée au printemps, elle était très répandue; en Argolide, sur le Cithéron, en Eubée, à Samos, en Crète, on y représentait un véritable mariage avec le cérémonial usuel. En Afrique, le mois de cette fête était celui où l'on avait coutume de conclure les mariages; dans les contrées où se maintenait au moins symboliquement le mariage par capture, on simulait nu enlèvement d'Héra par Zeus. Comme déesse du mariage, Héra est surnommée Teleia, Zygia, Gamélia.

On lui attribue une beauté égale à celle d'Aphrodite et d'Athéna; On vante surtout ses beaux yeux de vache; l'épithète Bôopis lui est constamment appliquée; c'est une beauté calme; son expression est chaste, digne et même sévère; c'est la femme qui n'a jamais connu que l'amour légitime; elle n'en admet pas d'autre chez ses protégés. La grande cause de ses querelles de ménage avec son mari est l'infidélité de celui-ci; des légendes locales expliquent ainsi la haine dont elle poursuit Io, Léto, Sémélé, Dionysos, Héraclès. Comme déesse de l'accouchement, elle était surnommée Ilithye; plus tard, on fit des Ilithyes des filles d'Héra. Quelquefois on imagine une Héra nourricière, donnant le sein aux fils naturels de Zeus, Héraclès, Hermès et Dionysos, auxquels son lait procure l'immortalité.
-

Héra.
TĂŞte d'HĂ©ra, dite "Junon Ludovisi". Ce visage 
d'un ovale parfait, aux rands yeux, Ă  la bouche
sĂ©rieuse, rĂ©alise le type le plus parfait de l'HĂ©ra 
grecque. (Musée Ludovisi. Rome).

Le mythe d'Héra est complètement développé dans les poèmes homériques, et c'est de ceux-ci que se sont inspirés les écrivains postérieurs et les artistes. La déesse est fille de Cronos, donc soeur de Zeus; elle devient son épouse; elle est mère d'Héphaistos, d'Arès, des llithyes, d'Hébé. Le poète ionien la fait élever par Océan et Téthys; les Argiens par les filles d'Astéria; les Arcadiens par Téménos, d'autres par les Heures. Son mariage, d'après certaines traditions, aurait été clandestin; Zeus serait venu la trouver déguisé en coucou. Les querelles de Zeus et d'Héra sont décrites dans l'Iliade.

La dĂ©esse conspire contre le dieu souverain avec Poseidon et AthĂ©na. Une fois mĂŞme, Zeus l'aurait suspendue dans les nuages, chargĂ©e de lourdes chaĂ®nes et entraves. Des rĂ©cits posthomĂ©riques firent concevoir Ă  HĂ©ra plusieurs de ses enfants sans le concours de Zeus : HĂ©phaistos, mĂŞme Arès et HĂ©bĂ©, le monstre Typhaon ou Thyphaeus qu'elle enfante pour se venger de l'adultère de son Ă©poux avec LĂ©to. La dĂ©esse joue un rĂ´le dans un très grand nombre de mythes qu'on trouvera exposĂ©s aux articles spĂ©ciaux (Nonnus les a presque tous rĂ©unis dans ses Dionysiaques) : 
 

Aédon
Apollon
Arès
Antigone
Argus
Athamas
Dionysos
Echo
Endymion
Eurymédon
Galinthias
Gérana
Géants
Hébé
Héphaistos
Héraclès
Hydre
Ino
Iris
Ixion
Jason
Léto (Latone)
Macris
MaĂŻa
Médée
Oénée
Pâris
Pélias
Philoctète
Proetus
Prométhée
Sémélé
Sidé
Sphinx
Tirésias
Typhée
Zeus

HĂ©ra, quelles que puissent ĂŞtre ses dissentiments avec Zeus, demeure Ă  cĂ´tĂ© de lui la reine du ciel, la plus vĂ©nĂ©rĂ©e des dĂ©esses olympiennes, assise auprès de Zeus sur un trĂ´ne d'or; quand ils sont d'accord nul n'oserait leur rĂ©sister. Elle commande Ă  l'orage, Ă  l'Ă©clair; les Heures et Iris sont Ă  son service. On l'adore particulièrement sur les hauts lieux, ce qu'exprime l'Ă©pithète d'Acraia. D'humeur belliqueuse, elle prend une part active Ă  la guerre de Troie; elle est l'ennemie la plus acharnĂ©e de la citĂ© de Priam. Les cultes locaux sont conformes Ă  cette conception du poète. Desservis de prĂ©fĂ©rence par des femmes, ils donnent aussi lieu Ă  des danses guerrières, Ă  des jeux chevaleresques (Argos, Egine, Elis, Olympie, Crotone), qui contrastent avec les fĂŞtes fleuries du mariage d'HĂ©ra. 

Le culte d'Héra.
Son culte est un de ceux qui Ă©taient le plus universellement rĂ©pandus en Grèce. On cite ses sanctuaires Ă  Argos, Nauplie (source Kanathos), Mycènes, sur l'Arachneon, Ă  Hermione, Tyrinthe, MidĂ©e, Epidaure, Egine, Corinthe, MĂ©gare, Sicyone(deux temples), Phlionte, Aegium, Patras, Olympie, Elis, Sparte, MantinĂ©e, Stymphale (trois temples, lieu d'Ă©ducation de la dĂ©esse), MĂ©galopolis, Heraea, Athènes, Eleusis, PlatĂ©es, sur le CithĂ©ron, Ă  Thespies, CoronĂ©e, LebadĂ©e, Thèbes, Orchomème, Delphes, Crissa, Pharigae (en Locride), dans l'EubĂ©e (qui lui Ă©tait consacrĂ©e tout entière, particulièrement les monts Oche et Dirphys); dans plusieurs citĂ©s de Thrace, Ă  Thasos, Byzance, Lesbos, Kyme (d'Eolie), Samos, DĂ©los, Paros, TĂ©nos, Amorgos, AstypalĂ©e, Cos, Mycale, Aphrodisias, Mylasa et Stratonice de Carie, Ă  Rhodes, en Crète (Cnossos, Tylissos, Aptera); Termessos en Pisidie, Ă  Paphos et Amathonte,etc., dans l'Ă®le de Chypre, Ă  Naucratis, Ă  Cyrène, dans plusieurs localitĂ©s de Bithynie, de Paphlagonie, etc.; Ă  Ithaque, Syracuse, Acra, Hybla, Thermes, Panonne, SĂ©linonte, Agrigente, Crotone, Sybaris, MĂ©taponte, Tarente, Pandosia, chez les HĂ©nètes, etc. 

Le plus célèbre centre du culte d'Héra était Argos, que certains regardent même comme son berceau, remarquant qu'à Dodone et à Athènes l'épouse de Zeus s'appelait Dioné. Son temple le plus fameux était entre Argos et Mycènes sur la colline Euboia; c'est à lui que se rattachait le mythe d'Io transformée en génisse. On l'honorait sous différents vocables dans ses différents temples : Acraia, Prosymna, Anthéia, Basileis (souveraine), Energésia, Parthénos, etc. D'Argos, son culte avait rayonné sur toutes les cités environnantes.
-

Barry : Zeus et Héra.
Zeus et Héra sur le mont Ida, par James Barry (ca. 1795).

A Corinthe, on la rapprochait de Médée, et les Minyens d'lolcos en faisaient la patronne de leur héros Jason. Sans racines dans l'Attique, où il était importé, son culte était au contraire très vivace autour du Cithéron béotien et dans l'île d'Eubée. Dans les îles, les épithètes variaient; le temple de Samos était extrêmement renommé; on le faisait dériver du culte argien, qu'il éclipsait presque par l'éclat de ses processions, de ses fêtes. Enfin nous avons vu que les colonies achéennes d'Italie y avaient apporté leur déesse préférée. Le promontoire Lacinien, près de Crotone, possédait un temple magnifique où, lors des fêtes (panégyries), on affluait de toutes les cités de l'Italie hellénique.

Archéologie.
Les plus anciennes représentations d'Héra semblent avoir été de simples troncs d'arbre comme celui que Clément d'Alexandrie cite à Théspies; à Samos une planche peinte, à Argos un bloc décoré de rubans recevaient également les hommages des fidèles de la déesse. La première image à forme humaine aurait été celle que Dédale offrit à l'Héraeon d'Argos; on cite aussi celles que les Telchines donnèrent à lalysos et Camiros (Rhodes). Le plus ancien xoanon connu de Pausanias est celui de Tirynthe figurant la déesse assise; attribué à Peirasos, il fut plus tard transporté par les Argiens dans leur temple. Il en existait un autre analogue dans la ville et plusieurs à Samos; dans cette île, ce seraient les colons ioniens qui auraient apporté les effigies anthropomorphiques d'Héra. Elle était représentée en costume de mariage : de nombreuses monnaies conservent l'image de cette statue, plus ou moins surchargée de bandelettes et de voiles. On cite encore des xoana à Olympie, Sparte, Mégalopolis, Coronée, etc.
-

Mariage de Zeus et d'Héra.
Le mariage d'HĂ©ra et de Zeus.  Le dieu assis contemple avec amour 
sa nouvelle épouse qui défait lentement son voile nuptial.
Métope du temple de Sélinonte (musée national de Palerme).

Arrivés à l'époque de floraison de l'art grec, nous voyons les plus grands sculpteurs modeler la déesse; Alcamène sur la route de Phalère; Praxitèle à Platées et Mantinée; Polyclète à Argos; Callimaque à Platées; Lysippe à Samos, etc. Le type fut fixé par l'oeuvre de Polyclète : il avait assis Héra sur un trône d'ivoire et d'or, lui mettant sur la tête une couronne où étaient figurées les Charites et les Heures; dans une main une grenade, dans l'autre un sceptre surmonté d'un coucou; auprès d'elle se tenait Hébé. Des monnaies argiennes ont conservé les traits généraux de cette statue. Comme toutes celles dont nous venons de parler, elle a été perdue. Il ne nous est parvenu que fort peu de statues d'Héra, et la plupart ont été défigurées par l'ignorance des restaurateurs, notamment en les surchargeant des attributs de Déméter (Cérès); inversement plusieurs statues dénommées Héra sont d'attribution fort incertaine.

Les statues se rapportent à deux types principaux : avec ou sans voile. Du premier on peut citer un marbre du Vatican, deux petits bronzes à Paris, Florence, où la déesse est figurée les bras tombants (style attique); un marbre du Vatican, un marbre de Berlin, une statuette (bronze) de Vienne où elle est figurée, comme la Junon Capitoline, le bras droit levé, le gauche appuyé sur le sceptre.

Les statues avec voile sont plus nombreuses; Ă  cette classe appartiennent: le torse d'Ephèse (acadĂ©mie de Vienne), les statues de Florence (jardins Roboli), de Naples, du Vatican; le corps est posĂ© sur la jambe gauche; le bras droit est levĂ© tenant le sceptre, le gauche tombe le long du corps; une autre sĂ©rie analogue montre HĂ©ra TĂ©lĂ©ia. Les principales statues sont : l'HĂ©ra Barberini (Rotonde du Vatican), celle du Braccio Nuovo (d'abord appelĂ©e DĂ©mĂ©ter), de la villa Borghèse (Juno Pronuba), du musĂ©e du Capitole (surmontĂ©e d'une tĂŞte de Lucilla); la pose est la mĂŞme que pour les prĂ©cĂ©dentes; mais la tunique sans manches dĂ©couvre le haut de la poitrine, la main gauche Ă©cartĂ©e du corps tient une patère. 

En dehors des statues, nous possĂ©dons un certain nombre de tĂŞtes et de bustes d'HĂ©ra. On en a exhumĂ© une (en calcaire) Ă  Olympie de style archaĂŻque, la tĂŞte surmontĂ©e du polos, les yeux peints. Le buste de l'HĂ©ra Farnèse (musĂ©e de Naples) est d'une grande beautĂ©; l'expression est sĂ©vère sans duretĂ©; le buste colossal des Offices (Florence) est d'une expression sombre, due surtout au pli qui part des narines; l'HĂ©ra de Gugenti (British Museum) est plus douce. Le type accompli de la dĂ©esse est celui du buste colossal de la villa Ludovisi; la haute couronne dĂ©corĂ©e de palmettes, un ruban d'astragales surmontent la chevelure disposĂ©e en ondes rĂ©gulières. La dignitĂ© de l'expression, la puretĂ© du profil, sont universellement admirĂ©es. On attribue cette oeuvre Ă  la jeune Ă©cole attique. Les deux autres bustes de la villa Ludovisi sont Ă©galement remarquables, mais  moins parfaits; l'un manque d'expression; l'autre, caractĂ©risĂ© par la hauteur de la couronne, a quelque chose de rĂŞveur

HĂ©ra figure sur les bas-reliefs de la frise orientale du ParthĂ©non et sur ceux du ThĂ©sĂ©ion et d'un autel des douze dieux (Athènes). Elle est reprĂ©sentĂ©e sur plusieurs peintures murales ou mosaĂŻques dans les scènes du jugement de Pâris, gĂ©nĂ©ralement assise. Sur les vases peints, on trouve les principales scènes de sa lĂ©gende : HĂ©ra trĂ´nant avec son mari, assistant au retour d'HĂ©phaistos, Ă  la naissance d'AthĂ©na, au jugement de Pâris, le mariage de Zeus et d'HĂ©ra (figurĂ© Ă©galement sur les bas-reliefs, les peintures murales), etc. 
-

Bain d'Héra.
Le bain d'Héra. Relief Ludovisi. Musée des Thermes. On le considère comme les débris d'un lit
monumental sculpté par Polyclète pour l'Héraion d'Argos (Ve s. av. J.-C.). La déesse, assistée
de deux nymphes, sort de la source Canathos. (Ce bas-relief a longtemps été considéré
comme représentant la naissance d'Aphrodite).

Les attributs coutumiers d'Héra sont : le trône, la couronne, plus ou moins ornée; le sceptre, le voile, la patère, la grenade, le coucou, les ciseaux, le paon. (A.-M. B.).



En librairie - Pour les plus jeunes : Serge Le Tendre, Christian Rossi, La gloire d'Héra, Casterman (BD), 1996.
.


Dictionnaire Religions, mythes, symboles
A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V W X Y Z
[Aide][Recherche sur Internet]

© Serge Jodra, 2004 - 2011. - Reproduction interdite.