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La dynastie des
Qing
est la dynastie mandchoue qui régna sur la Chine de 1644 à 1912.
C'est la dernière dynastie impériale de Chine.
Les Qing, originaires
de la région de la Mandchourie,
ont conquis progressivement l'ensemble de la Chine. Shunzhi, leur chef,
fait finalement tomber la dynastie Ming et se proclame
empereur d'une nouvelle dynastie en 1644. Ses successeurs immédiats vont
porter cette dynastie à son apogée.
Règnes de Kangxi, Yongzheng
et Qianlong (1661-1796)
Kangxi (1661-1722).
L'empereur Kangxi,
né Xuanye, a régné sur la Chine de 1661 à 1722. Son règne, le
plus long de l'histoire chinoise (61 ans), est considéré comme une période
de consolidation, de prospérité et de culture.
Kangxi est monté
sur le trône à l'âge de 7 ans après la mort de son père, l'empereur
Shunzhi. Durant les premières années, la régence était exercée par
quatre princes mandchous. À 15 ans, il a pris le contrôle personnel du
gouvernement. Une des premières actions de Kangxi fut d'éliminer l'influence
du régent Oboi, qui avait accumulé trop de pouvoir. Kangxi l'a fait emprisonner
en 1669.
Réalisations
militaires.
La rébellion des
Trois Féodaux a été un défi majeur pour Kangxi. Après huit ans de
lutte, l'empereur a réprimé la révolte et réaffirmé le contrôle centralisé.
La victoire des Qing a permis à l'empereur Kangxi de renforcer considérablement
le contrôle centralisé sur l'ensemble de l'empire. Les pouvoirs locaux
des princes féodaux ont été abolis, et l'administration impériale a
été réorganisée pour éviter de telles menaces à l'avenir. Avec la
fin de la rébellion, l'empire Qing a connu une période de stabilité
relative, permettant des développements économiques et des réformes
administratives qui ont contribué à la prospérité de la Chine sous
le règne de Kangxi.
La
rébellion des Trois Féodaux (1673-1681) était dirigée par trois
princes féodaux : Wu Sangui, Shang Kexi et Geng Jingzhong. Nommés par
les Qing en reconnaissance de leur soutien militaire crucial, c'étaient
des seigneurs de guerre puissants qui gouvernaient respectivement les provinces
du Yunnan, du Guangdong et du Fujian. Ils disposaient d'une grande autonomie,
de leur propre armée et d'un contrôle quasi absolu sur leurs territoires,
ce qui constituait une menace potentielle pour le pouvoir central des Qing.
Aussi, l'empereur Kangxi, soucieux de renforcer l'autorité centrale et
de réduire les pouvoirs des féodaux, a-t-il ordonné le retrait progressif
de ces princes de leurs postes militaires et administratifs. Cette décision
a été perçue comme une tentative de démanteler leur pouvoir. Craignant
donc pour leur survie politique et personnelle, ils se sont rebellés contre
l'autorité impériale. En 1673, Wu Sangui a été le premier à prendre
les armes, rapidement suivi par Shang Kexi et Geng Jingzhong. Wu Sangui
a proclamé la restauration de la dynastie Ming et a commencé à mobiliser
ses forces. La rébellion a rapidement pris de l'ampleur, les troupes des
féodaux avançant vers le nord et gagnant du terrain face aux forces Qing.
Les rebelles ont réussi à contrôler de vastes régions du sud de la
Chine. L'empereur Kangxi a alors organisé une contre-offensive, mobilisant
des ressources importantes pour écraser la rébellion. La guerre a été
longue et coûteuse, mais les Qing ont progressivement regagné du terrain
grâce à leur supériorité militaire et à leur stratégie. En 1681,
les forces Qing ont finalement vaincu les armées des Trois Féodaux. Wu
Sangui est mort la même année, et les autres princes rebelles ont été
capturés ou tués. La rébellion a pris fin avec la pacification complète
des régions affectées.
C'est sous le règne
de Kangxi que Taïwan, qui était contrôlée par le royaume des
Zheng, a été annexée à l'empire Qing après une campagne militaire
dirigée par l'amiral Shi Lang (1683) . Cette conquête a éliminé une
menace potentielle et a étendu l'autorité de Qing sur l'île.
Afin de consolider
la frontière nord-ouest de l'empire et de sécuriser les routes commerciales,
Kangxi a également mené plusieurs campagnes contre le khanat Zunghar
en Mongolie et au Xinjiang.
Réalisations
administratives et économiques.
Kangxi a renforcé
l'efficacité de l'administration impériale, ce qui est passé, comme
souvent dans l'histoire de la Chine, par la promotion du système des examens
impériaux pour recruter des fonctionnaires compétents. Il a également
mené des recensements réguliers et mis en place des systèmes de taxation
plus justes.
Son règne a vu une
expansion de l'agriculture, de l'artisanat et du commerce. Kangxi a encouragé
la réhabilitation des terres agricoles et a réduit les taxes pour soulager
les paysans. Le commerce intérieur et extérieur s'est épanoui, notamment
grâce à la paix et à la stabilité rétablies dans l'empire.
Contributions
culturelles et scientifiques.
L'empereur a été
un promoteur fervent de l'éducation et de la culture. Lui-même
cultiva les sciences, les lettres et la poésie, et composa divers d'ouvrages,
dont plusieurs ont été traduits en français et en anglais dès le XIXe
siècle. Il a supervisé la compilation de l'Encyclopédie
dite de Kangxi, une vaste collection de connaissances sur divers sujets,
et un Dictionnaire ,
qui est devenu une référence lexicographique standard pour le chinois.
Il a a favorisé
les échanges culturels et scientifiques avec les missionnaires jésuites ,
qui ont apporté leurs connaissances en astronomie, en mathématiques et
en médecine. Il autorisa aussi, en 1692, le libre exercice de la religion
chrétienne.
Relations
extérieures.
Kangxi a maintenu
des relations diplomatiques avec les puissances étrangères, notamment
la Russie. Le traité de Nertchinsk (1689) a été signé avec la Russie,
définissant les frontières entre les deux empires et ouvrant des voies
de commerce pacifique.
Yongzheng (1722-1735).
L'empereur Yongzheng,
né Yinzhen, a régné sur la Chine de 1722 à 1735. Quatrième fils de
l'empereur Kangxi, il est monté sur le trône après une lutte de succession
controversée, entourée de suspicions de manipulation de l'acte de succession.
Néanmoins, il a rapidement établi son autorité en éliminant les opposants
potentiels. Son règne, bien que court comparé à celui de son père,
est marqué par une série de réformes administratives et financières
visant à consolider encore l'autorité centrale et à renforcer
l'efficacité de l'empire Qing, notamment en jetant les bases d'une administration
moins corrompue.
Réformes
administratives.
Yongzheng a renforcé
le pouvoir central en réorganisant l'administration impériale. Il a mis
en place un système de surveillance stricte pour lutter contre la corruption.
Il a notamment créé le Bureau des inspections, qui était une institution
chargée de surveiller les gouverneurs et autres fonctionnaires provinciaux.
Ce bureau avait pour mission de signaler directement à l'empereur tout
abus de pouvoir ou acte de corruption.
Yongzheng a également
introduit des réformes pour améliorer le système des examens impériaux,
rendant le recrutement des fonctionnaires encore plus méritocratique.
Il a également promu l'efficacité administrative en rationalisant les
procédures bureaucratiques.
Réformes
financières.
L'empereur a entrepris
une réorganisation du système fiscal pour augmenter les revenus de l'État
et réduire la corruption. Il a mis en place des mesures pour assurer une
collecte plus équitable et efficace des impôts.
Yongzheng a simplifié
le système fiscal en fusionnant certains impôts et en éliminant les
taxes arbitraires imposées par les fonctionnaires locaux. Cela a permis
de réduire le fardeau fiscal sur les paysans et d'améliorer l'économie
rurale.
Réformes
sociales.
Il a introduit des
politiques visant à protéger les paysans contre l'exploitation et à
améliorer leur bien-être. Par exemple, il a instauré des mesures pour
réguler les taux d'intérêt et protéger les terres agricoles contre
les saisies abusives.
Bien que confucianiste,
Yongzheng a montré, comme son père, une certaine tolérance envers les
missions chrétiennes et les autres religions. Il a cependant appliqué
une politique de contrôle très strict sur les activités missionnaires
pour éviter les troubles sociaux.
Réformes
juridiques.
Yongzheng a travaillé
à la codification et à la clarification des lois impériales, rendant
le système juridique plus cohérent et accessible. Cela a aidé à réduire
les abus judiciaires et à renforcer l'autorité de l'État.
Soucieux de restaurer
l'ordre et d'intruduire un peu plus justice dans l'empire, il a adopté
une approche sévère envers la corruption et la criminalité, punissant
strictement les fonctionnaires corrompus et les criminels.
Relations
extérieures.
Le règne de Yongzheng
a été caractérisé par des relations relativement pacifiques avec les
puissances étrangères. Il a maintenu des relations diplomatiques stables
avec la Russie et a continué les politiques de son père concernant le
commerce extérieur.
Qianlong (1735-1796).
À la mort en 1735
de Yongzheng, son fils, né Hongli, et devenu l'empereur Qianlong ( = Grandeur
Céleste), lui a succédé. Formé dans les arts militaires, littéraires
et culturels, recevant une éducation rigoureuse qui l'avait préparé
à ses responsabilités impériales, il allait devenir l'un des empereurs
les plus célèbres de la dynastie Qing. Son règne, de 1735 à 1796, en
tout cas va marquer l'apogée de la dynastie avec un empire à son expansion
maximale et une grande prospérité culturelle, bien qu'il ait été également
marqué par les défis posés par la corruption, les rébellions internes
et le manque d'ouverture aux changements mondiaux. Autant de graines du
déclin de la dynastie, qui deviendra plus apparent sous ses successeurs.
Expansion
territoriale.
Qianlong a mené
plusieurs campagnes contre les Zunghars, qui ont permis à la Chine d'annexer
le Xinjiang et de sécuriser les frontières nord-ouest de l'empire. Il
a consolidé le contrôle sur le Tibet, confirmant
le pouvoir des dirigeants locaux tout en renforçant l'autorité impériale.
Sous son règne, les forces impériales ont également réprimé des rébellions
à Taïwan, et renforcé le contrôle sur l'île.
Qianlong a également mené des campagnes militaires au Vietnam
et en Birmanie. Mais, dans cette direction,
ces efforts aient eu des succès limités et aient parfois entraîné des
revers.
Prospérité
économique.
Sous le règne de
Qianlong, l'agriculture, le commerce et l'artisanat ont prospéré, et
la population a augmenté de manière substantielle. Des réformes fiscales
et des projets d'infrastructure (construction de canaux et de routes),
ont renforcé l'économie.
Richesse
culturelle.
Qianlong s'est voulu
un protecteur des arts. Il a commandé de nombreuses oeuvres d'art, de
calligraphie
et de poésie, et a encouragé les
artistes et les lettrés à la cour impériale.
Sous son règne,
la compilation de la grande encyclopédie Siku Quanshu
(Bibliothèque complète des quatre trésors) a eu lieu, rassemblant
des milliers de textes classiques. Il était lui-même l'auteur de plusieurs
ouvrages.
Qianlong a aussi
supervisé la construction et la rénovation de nombreux palais et jardins,
notamment le Palais d'Été à Pékin et le
jardin impérial de Chengde.
Défis
internes.
Vers la fin de son
règne, la corruption au sein de l'administration impériale est devenue
un problème croissant. Le favoritisme et la mauvaise gestion ont affaibli
l'efficacité de l'administration. L'un des exemples les plus connus de
corruption était le fonctionnaire He Shen, qui a accumulé ainsi une immense
fortune.
La seconde moitié
du règne de Qianlong a été marquée par des rébellions internes, notamment
celle des rébellion des Miao, qui se poursuivra et s'amplifiera sous son
successeur. Ces soulèvements ont mis en lumière les tensions sociales
croissantes et les mécontentements parmi les différentes populations
de l'empire.
Relations
extérieures.
L'empire Qing est
resté relativement fermé aux influences occidentales, et a maintenant
une posture de supériorité culturelle et politique. Qianlong a ainsi
entretenu des relations limitées avec les puissances occidentales. Les
missions diplomatiques britanniques, par exemple, telles que celle de Lord
Macartney en 1793, ont échoué à obtenir des concessions commerciales
significatives.
Fin
de règne et abdication.
En 1796, Qianlong
a abdiqué en faveur de son fils, l'empereur Jiaqing, tout en conservant
une influence considérable en tant que Grand empereur retiré jusqu'à
sa mort en 1799. Cette abdication était en partie motivée par son respect
pour la tradition de ne pas régner plus longtemps que son grand-père,
l'empereur Kangxi.
Déclin et troubles
internes (1796-1850)
Le règne de Jiaqing
(r. 1796-1820), le successeur de Qianlong, est marqué par plusieurs révoltes.
Les deux plus importantes ont été la rébellion des Miao (1795-1806)
et la rébellion des Lotus Blancs (1796-1804). Cette période est aussi
celle de l'accroissement de la corruption.
La rébellion
des Miao.
La rébellion
des Miao a eu lieu dans le sud-ouest de la Chine entre 1795 et 1806.
Elle tire son nom de ce que les Miao (connus aussi sous le nom de Hmong),
un groupe ethnique principalement concentré dans les provinces du Guizhou,
du Hunan, du Yunnan et du Sichuan, étaient la force majeure de ce soulèvement.
Mécontents de la domination Qing, ainsi que des politiques oppressives,
des impôts lourds et de la corruption des fonctionnaires locaux. Ils se
sont également rebellés contre l'exploitation et les abus de la noblesse
locale et des propriétaires terriens chinois Han.
La rébellion a été
dirigée par un chef miao nommé Zhang Xiumei, qui avait réussi à unifier
plusieurs groupes miao sous sa bannière. Les Miao ont pris le contrôle
de vastes zones du sud-ouest de la Chine et ont infligé des défaites
aux forces Qing à plusieurs reprises. Cependant, les Qing ont finalement
réussi à réprimer la rébellion en mobilisant une grande armée et en
employant des tactiques brutales. Zhang Xiumei a été capturé et exécuté
en 1806, et la rébellion a été écrasée. Les conséquences de cette
rébellion ont été graves pour les Miao, avec des milliers de morts et
des répressions sévères de la part des autorités Qing.
La rébellion
des Lotus Blancs.
La rébellion
des Lotus Blancs, quant à elle, a été un soulèvement millénariste.
Il s'est déroulé entre 1796 et 1804. Elle a été initié par un groupe
appelé les Lotus Blancs, qui étaient des adeptes d'une secte religieuse
syncrétique mêlant des éléments du bouddhisme,
du taoïsme et du christianisme,
avec des influences antimanichéennes. Les membres de la secte croyaient
en l'arrivée imminente d'un messie qui viendrait sauver le monde. Ils
étaient également en désaccord avec le gouvernement Qing et les impôts
oppressifs qu'ils imposaient, si bie que les Lotus Blancs ont pu recruter
des partisans parmi les paysans et les marginalisés, en leur offrant l'espoir
d'un changement radical dans leur vie.
La rébellion a débuté
dans la province du Shandong en 1796 et s'est rapidement propagée à d'autres
régions de la Chine. Les rebelles ont pris le contrôle de vastes territoires
et ont défait à plusieurs reprises les forces Qing. Cependant, leur manque
d'organisation politique et militaire a finalement affaibli leur mouvement
tandis que les Qing mobilisaient leurs forces militaires pour les réprimer.
Après de nombreuses années de combats et de répression, les Lotus Blancs
ont été vaincus en 1804. La répression qui a suivi a été brutale,
avec des milliers d'exécutions et de répressions sévères contre les
sympathisants du mouvement. Cette rébellion, révélatrice des tensions
sociales et religieuses de l'époque, a laissé une marque importante dans
l'histoire de la Chine.
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Les sociétés
secrètes
Sous la dynastie
Qing, de nombreuses sociétés
secrètes ont joué des rôles dans la
politique et la société chinoises. Ces sociétés étaient des
mouvements clandestins qui résistaient au pouvoir impérial des Qing,
cherchaient à protéger des intérêts locaux, ou s'opposaient à des
injustices perçues. Elles avaient, dans le Nord de la Chine, un caractère
plutôt de secte religieuse; dans le Sud leur vocation politique était
plus nette. Ils existait des miliers de ses sociétés secrètes. A l'image
de celle des Boxers, dont il sera question plus loin et qui est issu d'une
scission du Lotus Blanc, beaucoup dérivaient plus ou moins directement
des suivantes :
• La Société
du Lotus Blanc ( 白莲教, Báiliánjiào). - Fondée en Chine du
Nord sous la dynastie Yuan (1271-1368) mais a continué son activité sous
les Qing. Un mélange de bouddhisme, de taoïsme et de croyances populaires.
Rébellion de Lotus Blanc (1794-1804) : Une insurrection majeure contre
le gouvernement Qing, causée par des taxes élevées et des souffrances
économiques. Mouvements mystiques et prophétiques, souvent prônant le
retour d'un bouddha sauveur. La rébellion a affaibli le contrôle des
Qing sur certaines régions et a contribué à l'instabilité du régime.
• La Triade
(三合会, Sānhéhuì). - Origines floues (peut-être fondée par des
moines bouddhistes au XVIIe siècle, dans
le Sud de la Chine), mais liée aux rébellions anti-Qing. Se revendiquait
de la résistance contre la dynastie mandchoue des Qing et de la restauration
de la dynastie Ming. Elle a dérivé pour devenir une entreprise de banditisme.
Ses "loges" ou filiales locales, connues sous le nom de triades,
se sont engagées dans l'extorsion, le trafic de drogues, la prostitution
et le jeu. Ses sociétés secrètes, restées initiatiques, mais dont la
raison sociale exclusive est le crime organisé, ont infiltré ensuite
des groupes d'immigrants chinois à l'étranger, notamment en Asie du Sud-Est
et en Amérique du Nord. Les triades ont encore aujourd'hui une influence
significative sur la criminalité et la société chinoise, ainsi que sur
les diasporas chinoises à l'étranger.
• La Société
du Ciel et de la Terre (天地会, Tiāndìhuì). - Fondée en 1761
en tant que société de résistance contre les Qing. Inspirée par des
idéaux taoïstes et populaires. Connue pour ses rituels secrets et son
engagement dans des révoltes locales. Participation à diverses rébellions
et mouvements contre le gouvernement Qing. Joua un rôle dans la
propagation de la résistance contre les Qing, notamment pendant la rébellion
de Taiping.
• La Société
des Huit Trigrammes (八卦道, Bāguàjiào). - Sorte de filiale du
Lotus blanc. C'était un mouvement mystique, végétarien, basé sur des
croyances ésotériques, dérivées du Yijing (Classique des
Mutations). Rébellion des Huit Trigrammes (1813) : Une rébellion
contre les Qing dirigée par Lin Qing et Li Wencheng. Utilisation de la
magie et des rituels pour galvaniser le soutien populaire. Bien que la
rébellion ait échoué, elle a mis en évidence les faiblesses internes
du régime Qing et la prévalence de la dissidence.
• La Société
du Grand Couteau (大刀会, Dàdāohuì). - Fondée à la fin
du XIXe siècle parmi les paysans appauvris.
Engagement dans des révoltes locales contre les autorités Qing. Participation
à la rébellion des Boxers (1899-1901), une insurrection anti-étrangère
et anti-missionnaire. Contribua à la résistance contre l'influence étrangère
et à l'instabilité du régime Qing. |
Les guerre de l'opium
et et les traités Inégaux (1839-1860)
On a donné le nom de
guerres
de l'Opium aux conflits armés entre la Chine et les puissances occidentales,
principalement la Grande-Bretagne, survenus
au milieu du XIXe siècle. Elles correspondent
à deux crises majeures, la Première guerre de l'Opium (1839-1842) et
la Seconde Guerre de l'Opium (1856-1860), sanctionnées par des défaites
humiliantes pour la Chine et la signature de traités qui ouvrent des ports
chinois au commerce étranger et cèdent Hong Kong
aux Britanniques. Des traités connus en Chine sous le nom de Traités
inégaux et qui ont entraîné des changements économiques, politiques
et sociaux significatifs dans le pays.
La Première guerre
de l'opium (1839-1842).
Au début du XIXe
siècle, la Grande-Bretagne importait de grandes quantités de thé, de
soie et de porcelaine chinoise, créant
un déficit commercial avec la Chine. Pour remédier à ce déséquilibre,
les marchands britanniques ont commencé à exporter de l'opium produit
par des compagnies britanniques en Inde
(Bengale) vers la Chine. La consommation
d'opium en Chine a rapidement augmenté, entraînant une crise de santé
publique et une fuite massive de l'argent chinois vers l'étranger.
En 1839, sur ordre
de l'empereur Daoguang (r. 1820-1850), successeur de Jiaqing, le commissaire
impérial Lin Zexu a été envoyé à Canton
(Guangzhou) pour mettre fin au commerce de l'opium. Il a ordonné la confiscation
et la destruction de plus de 20 000 caisses d'opium détenues par des marchands
britanniques. En réponse, la Grande-Bretagne a envoyé une force navale
pour protéger ses intérêts commerciaux, marquant le début de la guerre.
Les principales batailles
ont eu lieu le long des côtes chinoises, notamment à Canton, Ningbo et
Shanghaï. Les forces britanniques, bénéficiant d'une supériorité technologique
et militaire (navires de guerre modernes), ont infligé une série de défaites
aux troupes Qing et ont pu bloquer les ports chinois et détruire les défenses
côtières.
Le
traité de Nankin.
La guerre s'est
terminée en 1842 avec la signature du traité de Nankin.
Aux termes de celui-ci, la Chine a été contrainte d'ouvrir cinq ports
(Canton, Amoy, Fuzhou, Ningbo et Shanghaï) au commerce britannique; le
système de commerce contrôlé par les guildes a été aboli; l'île de
Hong Kong a été cédée à la Grande-Bretagne; la Chine a dû aussi payer
une lourde indemnité de guerre; enfin, les ressortissants britanniques
en Chine ont obtenu des droits d'exterritorialité, les mettant à l'abri
des lois chinoises.
Travail
de l'opium (cuisson).
La Seconde guerre
de l'opium (1856-1860).
Après la Première
guerre de l'opium et le traité de Nankin de 1842, et encore pendant le
règne de Xianfeng (1850-1861), qui a succédé à Daoguang, les tensions
entre la Chine et les puissances occidentales n'ont pas diminué. Les commerçants
britanniques et français se plaignaient des restrictions commerciales
et des mauvais traitements infligés par les autorités chinoises. Les
Britanniques cherchaient à réviser le traité de Nankin pour obtenir
plus de concessions commerciales et diplomatiques.
L'incident déclencheur
de ce que l'on a appelé la Seconde guerre de l'opium ou encore
la Guerre anglo-française en Chine, fut l'arraisonnement du navire
britannique Arrow par les autorités chinoises à Canton en octobre
1856, ce qui a conduit les Britanniques à exiger des réparations et des
excuses. Simultanément, les Français
ont rejoint les Britanniques après l'exécution par les Chinois d'un missionnaire
français en 1856. Ces incidents ont fourni un prétexte aux deux puissances
pour intervenir militairement.
Les troupes britanniques
et françaises, bien équipées et entraînées, ont capturé Canton, un
important centre commercial, en décembre 1857. En 1858, les forces alliées
ont progressé vers le nord, capturant les forts de Taku et menaçant la
capitale, Pékin. Les forces chinoises, incapables de résister, ont signé
une première séquence de traités à Tientsin (Tianjin).
Cependant, les hostilités ont repris en 1859 lorsque les autorités chinoises
ont refusé de ratifier ces traités et ont attaqué les navires britanniques
tentant d'entrer dans Pékin. En 1860, une expédition anglo-française
plus importante a pris Pékin. Les forces alliées ont pillé et incendié
le Palais d'Été, infligeant une humiliation durable à la Chine. La Seconde
guerre de l'opium a pris fin avec les traités de Pékin de 1860.
Leurs conditions étaient encore plus sévères pour la Chine.
Les
traités de Tientsin et de Pékin.
Les traités de
Tientsin (1858) ont été signés en 1858 entre la Chine, les Britanniques,
les Français, les Russes et les Américains,
qui commencaient à se découvrir des intérêts en Asie orientale. Ces
traités prévoyaient d'ouvrir onze nouveaux ports au commerce étranger,
d'autoriser les missions chrétiennes et de légaliser le commerce de l'opium.
Les étrangers devaient en outre pouvoir voyager à l'intérieur de la
Chine. La navigation sur le Yangzi, en particulier,
devait être libre.
Les traités de Pékin
obligeaient la Chine à ratifier les traités de Tientsin. Ils permettaient
par ailleurs l'ouverture d'ambassades britannique et française à Pékin,
la Grande-Bretagne se voyait céder la région de Kowloon et de lourdes
indemnités de guerre devaient être payées à la Grande-Bretagne
et à la France.
La révolte des Taiping
et l'auto-renforcement (1850-1875)
Les guerres de l'opium
ont mis en lumière les défis auxquels la Chine faisait face pour moderniser
ses forces militaires et administratives, un problème qui allait continuer
à hanter le pays tout au long du siècle suivant. Dans l'immédiat, elles
ont aussi été un facteur majeur dans la montée du sentiment anti-Qing
et l'éclatement rébellions internes, à commencer par la révolte des
Taiping qui a été contemporaine de la Seconde guerre de l'opium et s'est
prolongé au-dela, jusqu'aux premières du règne de l'empereur Tongzhi
(r.1861-1875).
La révolte des
Taiping.
La révolte des
Taiping (1850-1864) a été l'une des rébellions les plus sanglantes
de l'histoire chinoise. Ce soulèvement a été mené par une secte religieuse
millénariste appelée la Société des Adorateurs de Dieu, fondée
par Hong Xiuquan, un enseignant de la province du Guangxi. Hong Xiuquan
se considérait comme le frère cadet de Jésus-Christ et prêchait un
mélange syncrétique de christianisme, de taoïsme et de traditions chinoises.
Sa vision messianique lui a permis de mobiliser un vaste nombre de partisans,
principalement des paysans pauvres et des marginaux, en leur promettant
l'établissement d'un royaume céleste égalitaire et juste sur terre.
Dès le début de
la rébellion en 1850, les Taiping ont conquis de vastes territoires dans
le sud de la Chine, ainsi que des villes importantes. Nankin, par exemple.
Ils ont instauré un gouvernement théocratique et ont entrepris des réformes
radicales (redistribution des terres, abolition des classes sociales traditionnelles).
Cependant, les Taiping ont également été confrontés à une forte résistance
de la part des forces impériales Qing, ainsi que des seigneurs de guerre
locaux et des armées étrangères, notamment britanniques et françaises,
qui, ici, ont soutenu les Qing. Les combats ont été extrêmement brutaux,
avec des millions de morts des deux côtés et des ravages considérables
dans les régions touchées.
La rébellion des
Taiping a finalement été écrasée en 1864, principalement en raison
de conflits internes, de la pression militaire des Qing et de l'intervention
étrangère. Les conséquences de cette révolte ont été dévastatrices
pour la Chine. Des millions de vies ont été perdues, un grand nombre
de villes et de villages ont été détruits.
Le mouvement d'auto-renforcement.
En réaction aux
guerres de l'opium et de la révolte de Taiping, les Qing on engagé une
politique volontariste de réformes qui s'est déployée entre1861 et 1895,
et connue sous le nom de Mouvement d'auto-renforcement (de Mouvement
d'auto-renouvellement, ou encore de Mouvement d'auto-amélioration).
Le train de réformes qu'il a impulsées a posé les bases de la modernisation
en Chine. D'autres mesures, plus radicales seront encore nécessaires,
mais on a déjà là le début d'une prise de conscience plus large des
nécessités de modernisation.
Les objectifs étaient
de plusieurs ordres. Il s'agissait en premier lieu de moderniser
l'armée et la marine en adoptant des technologies occidentales. Cela impliquait
l'acquisition de navires de guerre modernes, la construction d'arsenaux
et la formation des troupes avec des techniques militaires modernes. Il
s'agissait aussi de développer l'industrie lourde, notamment les industries
du charbon, de l'acier et des textiles, ainsi que les infrastructures telles
que les chemins de fer et les télégraphes. Enfin, il s'agissait d'améliorer
l'administration et la gestion de l'État pour réduire la corruption et
augmenter l'efficacité bureaucratique. Cela nécessitait l'établissement
d'écoles pour former les fonctionnaires aux sciences et technologies occidentales.
Les principaux acteurs
de ce mouvement ont été le prince Gong, Li Hongzhang, et les deux généraux
Zeng Guofan et Zuo Zongtang. Le prince Gong (1833-1898) a joué un rôle
clé dans les négociations avec les puissances étrangères. Zeng Guofan
(1811-1872), un général et réformateur influent, a utilisé ses succès
militaires contre les Taiping pour promouvoir la modernisation de l'armée
et de l'industrie. Li Hongzhang (1823-1901), disciple de Zeng Guofan, a
été pour sa part l'un des principaux architectes des réformes industrielles
et militaires. Il a fondé des entreprises industrielles et modernisé
les arsenaux militaires. Enfin, Zuo Zongtang (1812-1885), général et
homme d'État, a contribué à la modernisation militaire et à la réintégration
du Xinjiang dans l'empire Qing après une série de campagnes militaires.
Cette politique a
abouti à quelques réalisations notables, comme la construction de chantiers
navals et d'arsenaux modernes,comme ceux de Jiangnan à Shanghaï, et le
éveloppement des chemins de fer, des mines et des usines modernes. L'achat
de navires de guerre modernes et formation de la marine Beiyang, ainsi
que la réorganisation et modernisation de l'armée, incluant l'utilisation
d'armes modernes et de nouvelles tactiques, sont aussi à l'actif de ce
mouvement de réformes. Et l'on peut encore ajouter ici la création de
la Tongwen Guan (Collège des langues étrangères) à Pékin pour
former des traducteurs et des experts techniques, ou encore l'envoi de
jeunes étudiants chinois à l'étranger, notamment au Japon et en Europe,
pour étudier les sciences et technologies.
Les réformes ont
pourtant été limitées. Elles ont rencontré une forte opposition de
la part des élites conservatrices derrières lesquelles se trouvent l'impératrice
douairière Cixi, et qui voyaient les changements
comme une menace à la tradition confucéenne et à leur propre pouvoir.
La Chine manquait aussi de ressources financières suffisantes pour soutenir
une modernisation à grande échelle. Problème agravé, d'ailleurs, par
les détournements de fonds par des fonctionnaires corrompus. L'organisation
des réformes elles-mêmes a été un obstacle. Ces réformes étaient
fragmentaires et mal coordonnées, ce qui a obéré leur efficacité globale.
Les défaites dans les guerres sino-française (1884-1885) et sino-japonaise
(1894-1895) vont démontrer bientôt les insuffisances des réformes
militaires et consacrer l'affaiblissement de la position de la Chine face
aux puissances étrangères.
Déclin et résistance
aux réformes (1875-1900)
Au cours du dernier
quart du XIXe siècle, la la dynastie Qing
est à bout de souffle. La Chine est confrontée à des pressions croissantes
de la part des puissances étrangères, après les guerres de l'opium
et les traités inégaux imposés par les puissances occidentales, elle
va bientôt être confrontée à l'expansionnisme japonais. La corruption,
de l'inefficacité administrative et des révoltes internes, avec lesquelles
il n'en, a pas fini, ne cessent d'éroder le pouvoir des Qing. Les défis
s'accumulent dans les dernières années du siècle, d'abord avec la Guerre
sino-japonaise, ensuite avec la rébellion des Boxers. Les tentatives
de réformes qu'ils suscitent n'empêcheront pas l'éclatement de la révolution
qui en faisant tomber le régime va aussi mettre fin à 2000 ans de Chine
impériale.
La guerre sino-japonaise.
La Guerre sino-japonaise
(Première guerre sino-japonaise), a opposé la Chine et le Japon
en 1894 et 1895. Ce conflit est survenu principalement à cause des rivalités
entre les deux pays pour le contrôle de la Corée,
qui était traditionnellement un État tributaire de la Chine sous la dynastie
Joseon. Au cours du XIXe siècle, le Japon
a cherché à y étendre son influence. Les réformes Gapsin de 1884 et
les troubles internes en Corée ont conduit à une intervention militaire
conjointe de la Chine et du Japon pour rétablir l'ordre.
En 1885, un
traité signé à Tientsin par la Chine et le Japon après les tensions
de 1884, stipulait que les deux nations retireraient leurs troupes de Corée
et n'interviendraient pas sans en avertir l'autre. Mais en 1894, une révolte
paysanne en Corée (révolte du Donghak) a poussé le gouvernement coréen
à demander de l'aide à la Chine. Le Japon a également envoyé des troupes
en Corée, conduisant à une confrontation militaire directe. En juillet
1894, après l'échec des négociations pour retirer les troupes respectives,
les hostilités ont éclaté.
Les Japonais ont
rapidement attaqué et occupé les positions chinoises en Corée. A la
bataille de Pyongyang (septembre 1894),
les forces japonaises ont infligé une défaite décisive aux troupes chinoises,
consolidant leur contrôle sur la Corée. Le même mois a lieu une bataille
navale majeure (bataille de la mer Jaune) où la flotte japonaise détruit
une grande partie de la flotte chinoise, démontrant la supériorité maritime
du Japon. En janvier-février 1895, les forces japonaises capturent
Weihaiwei, une importante base navale chinoise, marquant ainsi la fin effective
de la résistance navale chinoise.
La Chine est forcée
de signer un nouveau traité humiliant (Traité de Shimonoseki, 1895) qui
reconnait l'indépendance de la Corée, cède Taiwan, les îles Pescadores
et la péninsule du Liaodong au Japon, se trouve contrainte de payer une
indemnité de guerre considérable. Plusieurs ports chinois sont ouverts
au Japon qui obtient par ailleurs le droit d'implantation industrielle.
La guerre sino-japonaise aura ainsi marqué le début de la fin de l'influence
chinoise traditionnelle en Asie de l'Est, remplaçant la Chine par le Japon
en tant que principale puissance régionale.
La perte de Taiwan
et de la péninsule du Liaodong (bien que cette dernière ait été restituée
à la Chine sous pression des puissances occidentales lors de l'Intervention
des Trois Empereurs) a démontré la vulnérabilité territoriale de la
Chine. Au moins, le désastre militaire et les conditions humiliantes du
traité galvanisent-ils les réformateurs en Chine, conduisant à des mouvements
de modernisation tels que la réforme des Cent jours (1898) et, plus tard,
la Révolution de 1911 qui renversera la dynastie Qing.
La réforme des
Cent jours.
La réforme des
Cent jours correspond à une période de réformes ambitieuses qui a eu
lieu en Chine entre le 11 juin et le 21 septembre 1898. Ces réformes ont
été initiées par l'empereur Guangxu, influencé par des intellectuels
réformateurs tels que Kang Youwei et Liang Qichao. L'objectif principal
de ces réformes était de moderniser la Chine pour résister à l'influence
croissante des puissances étrangères et améliorer l'efficacité de l'administration
impériale.
Parmi le réformes,
on note la mise en place d'un système éducatif moderne basé sur le modèle
occidental. De nouvelles matières sont introduites, telles que les sciences
et les mathématiques. De nouvelles écoles et universités sont créées,
et les étudiants sont encouragés à étudier à l'étranger.
Au programme également,
la réorganisation des structures gouvernementales pour améliorer l'efficacité
et réduire la corruption. On introduit de nouvelles pratiques administratives
et de gestion. Le système judiciaire est révisé pour le rendre plus
juste et efficace. De nouvelles lois sont adoptées qui visent à protéger
les droits des citoyens et à encourager le développement économique.
L'industrie et le
commerce bénéficient aussi d'une attention particulière. L'accent est
mis sur la modernisation des infrastructures, chemins de fer et télégraphes,
notamment. L'investissement étranger est encouragé, mais des mesures
pour protéger les industries nationales sont également prises. L'armée
chinoise est modernisée en adoptant des techniques et des équipements
militaires occidentaux. Des académies militaires sont créées pour former
des officiers selon les standards occidentaux.
Cependant, ces réformes
se sont heurtées à une très forte résistance de la part de la faction
conservatrice de la cour impériale, menée par l'impératrice douairière
Cixi.
Celle-ci considérait ces changements comme une menace à son pouvoir et
aux traditions établies. Le 21 septembre 1898, un coup d'État soutenu
par Cixi a mis fin aux réformes des Cent jours. L'empereur Guangxu a été
placé en résidence surveillée, et les principaux réformateurs ont été
exilés, emprisonnés ou exécutés.
La révolte des
Boxers.
La révolte des
Boxers a eu lieu entre 1899 et 1901. Ce mouvement de rébellion a été
mené par une société secrète appelée Yihetuan, ce qui signifie
Poings
justes et harmonieux, et que l'on connaît plus communément sous le
nom de Boxers (= Boxeurs, parce qu'il pratiquaient le kungfu). Les
Boxers étaient animés par un fort sentiment anti-étranger et anti-missionnaire,
et ils s'opposaient à l'influence croissante des puissances occidentales
et du Japon en Chine.
Les tentatives de
réforme, comme celles initiées lors du Mouvement d'auto-renforcement
et la réforme des Cent jours, avaient échoué à moderniser suffisamment
la Chine et à renforcer son gouvernement central. Ces échecs avaient
également conduit à des troubles sociaux et à l'insatisfaction populaire.
Le ressentiment contre les missionnaires chrétiens et les entreprises
étrangères qui semblaient bénéficier de la protection des traités
inégaux a nourri un sentiment nationaliste et xénophobe. Les Boxers ont
émergé de ce contexte de frustration et de colère.
La révolte a commencé
dans les provinces du nord de la Chine, notamment dans le Shandong et le
Hebei, où les Boxers ont attaqué des missions chrétiennes, des convertis
chinois et des infrastructures liées aux intérêts étrangers. La cour
impériale, dirigée par l'impératrice douairière Cixi, a initialement
hésité à soutenir les Boxers. Cependant, face à la montée de la violence
et à la pression populaire, Cixi a fini par soutenir les Boxers, espérant
qu'ils pourraient aider à expulser les étrangers de Chine.
En 1900, les Boxers
ont convergé vers Pékin, où ils ont assiégé le quartier des légations
étrangères, abritant les diplomates et les missionnaires étrangers.
Le siège a duré environ 55 jours, pendant lesquels les Boxers ont tenté
de pénétrer dans les légations fortifiées. En réponse à la violence
et au siège de Pékin, une alliance internationale composée du Japon,
de la Russie, de la Grande-Bretagne, de la France, des États-Unis, de
l'Allemagne, de l'Italie
et de l'Autriche-Hongrie a été formée
pour intervenir militairement en Chine. Les forces alliées ont débarqué
à Tianjin et ont avancé vers Pékin, écrasant les forces des Boxers
et des troupes impériales Qing. En août 1900, les forces de l'alliance
des Huit Nations prenaient Pékin, mettant fin au siège des légations.
En septembre 1901,
la Chine a été forcée de signer le Protocole de Pékin, un traité
inégal de plus, qui imposait de lourdes réparations financières (indemnité
de 450 millions de taels d'argent), l'exécution de fonctionnaires pro-Boxers
et des concessions supplémentaires aux puissances étrangères. Des troupes
étrangères ont été autorisées à stationner en permanence à Pékin
pour protéger leurs intérêts.
-
Une
maison de thé dans le Shanghaï du début du XXe siècle.
La révolution de de
1911
Vers la fin de sa vie,
Cixi a dû se résoudre a introduire elle aussi quelques réformes limitées
visant à moderniser l'administration et l'armée, mais celles-ci sont
venues trop tard pour sauver la dynastie Qing. L'impératrice meurt le
15 novembre 1908. Un enfant de deux ans, Puyii, est placé sur le trône,
tandis que le pouvoir réel échoit à celui qui avait été l'un des plus
influents conseillers de l'impératrice et qui restait le chef de l'armée,
Yuan Shikai.
A cette époque,
le nationalisme, le républicanisme
et le socialisme, ont commencé à gagner
en popularité parmi les intellectuels chinois, inspirées par les mouvements
réformistes et révolutionnaires à travers le monde. Le 10 octobre 1911
(le 10 octobre étant le double dix dans le calendrier
chinois, d'où le nom de la Révolution du Double Dix), donné
aussi à cette révolution), un soulèvement militaire a eu lieu à Wuchang,
dans la province du Hubei. Les révolutionnaires Han se sont rebellés
contre le gouvernement Qing local.
Le soulèvement de
Wuchang a rapidement été suivi par des révoltes similaires dans d'autres
régions de la Chine, avec des seigneurs de guerre, des révolutionnaires
et des forces nationalistes ralliant leurs forces contre la dynastie Qing.
Face à une pression croissante et à une série de défaites militaires,
l'empereur Qing, Yuan Shikai change de camp et dépose l'empereur.
Pu Yi, abdique le 12 février 1912, mettant ainsi fin à plus de 2000 ans
de règne impérial en Chine. Sun Yat-sen,
un leader révolutionnaire et fondateur du Kuomintang (Parti nationaliste),
est devenu le premier président de la République de Chine, établissant
ainsi le premier régime républicain en Chine.
Les empereurs de
la dynastie Qing
La dynastie Qing, la
dernière dynastie impériale de Chine, a régné de 1644 à 1912. Voici
une liste de ses empereurs, accompagnée de quelques éléments marquants
de leur règne :
• Shunzhi
(1644-1661). - Fondateur de la dynastie Qing en Chine après la conquête
de la dynastie Ming. Son règne a marqué le début de l'intégration des
Mandchous ( Les Toungouses)
avec les Chinois Han. Proclamé empereur par les Mandchous qui venaient
de s'emparer de Pékin, n'avait que sept ans; ce furent ses quatre oncles
qui formèrent le conseil de régence et gouvernèrent. Ceux-ci parvinrent
à soumettre assez facilement la plupart des provinces du Nord et du Centre,
mais les provinces maritimes leur opposèrent une sérieuse résistance.
Quand, en 1651, Shunzhi fut déclaré majeur, il prit en main les rênes
du gouvernement et dut continuer la lutte sur mer contre les Chinois rebelles.
Le pirate Tching-tching-kong, qui combattait pour le prince de Koueï,
le dernier représentant de la famille des Ming,
désolait de plus en plus les côtes et restait imprenable; cependant,
le prince de Koueï ayant été fait prisonnier dans le Yun-nan par le
fameux général Wu Sangui, et peu après mis à mort, le pirate cessa
d'infester les côtes, se replia sur Taiwan, en chassa les Portugais, s'y
établit en 1662 et y mourut. La politique de Shunzhi fut celle d'un sage;
il laissa persister tous les anciens usages et n'apporta dans son vaste
empire que deux modifications importantes : la première consista à placer
à la tête de chacun des six ministères deux présidents au lieu d'un
seul, l'un chinois, l'autre mandchou; la seconde fut de contraindre tous
ses sujets à se raser le devant de la tête, à la manière tartare, et
à porter les cheveux tressés en une longue natte pendante, en signe de
soumission; ces deux usages se sont perpétués jusqu'au début du XXe
siècle, mais le second ne s'implanta que difficilement, et beaucoup de
Chinois préférèrent mourir plutôt que d'obéir à cet ordre. La plupart
des souverains de l'Asie envoyèrent des ambassades à la cour de Shunzhi;
la Russie et la Hollande suivirent même cet exemple en 1656, mais les
envoyés de ces deux puissances, ayant refusé de se conformer au cérémonial
de la cour chinoise, ne furent pas reçus. On prétend que Shunzhi avait
un goût très marqué pour les sciences et qu'il aurait placé à la tête
du tribunal des mathématiques le P. Adam Schall, jésuite allemand, auquel
on devrait l'établissement de l'astronomie européenne en Chine. On raconte
que vur la fin de son règne, Shunzhi s'éprit de la femme d'un des grands
de sa cour; quand elle mourut, il en conçut un si profond chagrin qu'il
prit aussitôt l'habit des bonzes. Atteint de
la petite vérole, serait mort après quelques jours de maladie, à l'âge
de vingt-quatre ans.
• Kangxi
(r. 1661-1722). - Fils de Shunzhi. Un des plus grands empereurs de Chine,
connu pour la stabilité et la prospérité de son règne. Il a étendu
les frontières de la Chine et encouragé les arts et les sciences. Né
en 1653, mort en 1722, il monta sur le trône à 8 ans (1661), et commença
à gouverner par lui-même à 13. Son long règne ne fut troublé que par
quelques expéditions contre les Mongols, dans lesquelles il eut l'avantage.
Il encouragea et cultiva lui-même les sciences et les arts, protégea
les jésuites et autorisa l'exercice de la religion chrétienne par un
édit (1692). Kangxi a composé, entre autres ouvrages, des Maximes
pour le gouvernement des États et des Instructions morales
pour son fils et successeur.
• Yongzheng
(1722-1735). - Quatrième fils de Kangxi, débuta en faisant emprisonner
son frère aîné qui commandait une armée en Tartarie et en qui il crut
voir un rival; il exila ensuite un autre de ses frères nommé Yesaké,
ambitieux sans valeur, ainsi que le missionnaire portugais Morao, son chef
de parti, et, plus tard, les fit périr tous les deux. Cet empereur est
surtout connu pour la persécution violente qu'il fit aux prêtres catholiques;
ayant appris que Sou-nan, son oncle maternel, avait embrassé le christianisme,
il le dépouilla de ses titres et l'envoya avec sa famille en disgrâce;
seuls quelques missionnaires, dont la présence était nécessaire à Pékin,
purent rester dans cette ville; tous les autres furent relégués à Macao.
Laborieux, très actif, Yongzheng tint les rênes du gouvernement d'une
main ferme; il se montra bon pour son peuple en maintes occasions, notamment
en 1725, après des pluies torrentielles qui détruisirent entièrement
les récoltes, et, en 1730, après un tremblement de terre qui causa les
plus grands ravages; pour encourager l'agriculture, il accorda le titre
de mandarin du huitième degré au laboureur le plus estimé de chaque
canton. Il mourut néanmoins, peu regretté de ses sujets, le 7 octobre
1735. Ce prince publia une instruction aux gens de guerre, intitulée les
Dix
Préceptes, et commenta les seize maximes de l'Édit sacré
de Kangxi. Les Dix Préceptes ont été traduits en français par
Amiot;
les maximes et le commentaire l'ont été en anglais par William Milne.
• Qianlong
(r. 1735-1796). - - Fils de Yongzheng. Il monta sur le trône en
1735, réprima en 1755 une révolte des Tartares et soumit à sa domination
toute la Tartarie jusqu'à la Perse. Se sentant vieux, il abdiqua en 1795
en faveur de son fils. Kien-long défendit en 1753 l'exercice de la religion
chrétienne
dans ses États. Ce prince cultivait les lettres avec succès; il forma
une bibliothèque de 600000 volumes. il avait composé entre autres écrits,
un Éloge de la ville de Moukden, que le P. Amiot a traduit en français,
Paris, 1770. Son règne a vu une grande expansion territoriale et
un épanouissement culturel. Cependant, les dernières années de son règne
ont été marquées par la corruption et l'affaiblissement de l'administration.
• Jiaqing
(r. 1796-1820). - Né en 1759, mort en 1820. Il était le dix-septième
fils de l'empereur Qianlong, qui abdiqua en sa faveur en 1796. Ce prince,
dans un état d'ivresse presque continuel, eut un règne très agité.
En 1818, à la suite d'une grande révolte causée par la famine, Jiaqing
fit mettre à mort une foule de séditieux. On tenta par deux fois de l'empoisonner
et, en 1818, le premier eunuque, Linjing, l'eût renversé du trône, sans
le fils de Jiaqing. Sous son règne, le débordement du fleuve Jaune, en
1818, causa la mort de plus de 100 000 personnes. Jiaqing persécuta les
missionnaires catholiques, et fut toujours hostile aux influences étrangères.
Son règne a aussi été marqué par des tentatives pour réprimer la corruption
et des révoltes internes, notamment la Révolte des Lotus Blancs.
• Daoguang
= lumière de la raison
(1820-1850). - Deuxième fils de Jiaqing, né en 1782, succéda à son
père. Son règne fut des plus agités; en 1828, il se rendit maître d'un
soulèvement qui s'était produit dans les provinces d'Ili, sous l'instigation
d'un officier du Turkestan, ce qui eut pour résultat de rattacher plus
intimement le Tibet à l'empire; de 1831 à 1833, il dut lutter contre
une nouvelle insurrection qui éclata à Taiwan et parmi les montagnards
du Guangdong. Mais l'événement le plus important de son règne fut la
guerre qu'il soutint contre l'Angleterre, à partir de 1839, au sujet de
l'importation de l'opium (Première guerre de l'opium), et qui se termina
par le traité de Nankin, du 29 août 1842; le traité de Wanghia (Wàngxià
tiáoyuē), conclu avec les États-Unis, le 3 juillet 1844, et celui de
Huangpu (Wam-pou), conclu avec la France, le 24 octobre de la même année,
permirent à ces deux puissances d'établir en Chine de nouveaux consulats
et d'y faire librement le commerce. En 1847, on vit apparaître à Pékin
un chef de la secte des adorateurs du Dieu unique, qui fut aussitôt arrêté;
le 20 mars 1848, Hong Xiuquan, qui devint plus tard le chef des insurgés
chinois connus sous le nom de Taïping, ayant obtenu sa liberté, tous
deux s'installèrent dès lors dans la province de Kouang-si et préparèrent,
avec l'aide de plus de trente associations secrètes, l'insurrection qui
devait entraîner la Chine dans une longue suite de guerres intestines;
cette insurrection n'éclata que sous le règne suivant. Daoguang qui,
au début de son règne, avait chassé les missionnaires catholiques de
Pékin, se montra, sur la fin, assez tolérant pour les chrétiens; les
relations commerciales y gagnèrent et donnèrent d'heureux résultats.
Ce prince réorganisa les ministères et fit paraître, à partir de 1815,
un annuaire impérial ainsi que plusieurs encyclopédies et grandes collections
littéraires et scientifiques. Il mourut le 25 février 1850.
• Xianfeng
(r. 1850-1861). - Né en 1831, mort en 1862. Il succéda à son père Daoguang
en 1850. Dès son arrivée au pouvoir, il s'adonna à une vie de débauche,
et faillit être victime d'un assassinat. Croyant à un complot, il fit
aussitôt décapiter un grand nombre de hauts dignitaires. Pour se procurer
de l'argent, Xianfeng vendit les dignités publiques et créa un monopole
pour le commerce de l'opium. C'est sous son règne qu'eut lieu la grande
révolution des Taïping, et, en 1856, l'expédition franco-anglaise contre
la Chine (Seconde Guerre de l'opium), qui se termina par les traités de
Tientsin et Pékin (1858 et 1860) et l'entrée des alliés à Pékin, en
1860, après leur victoire à Baliqiao (Pali-Kao.) Au cours de ces événements,
Xianfeng s'était réfugié en Mongolie, puis en Mandchourie, et ce fut
son frère, le prince Gong, qui dut négocier avec les alliés. Il mourut
peu après, usé par la débauche, et eut pour successeur son fils aîné
Tongzhi, sous la régence de sa mère.
• Tongzhi,
littéralement Union dans l'ordre; (r. 1861-1875). - Né en 1856,
mort en 1875. Il n'avait que cinq ans lorsqu'il fut appelé, le 21 août
1861, à succéder à son père Xianfeng. Il fut déclaré majeur
en 1873. Les luttes contre les Taïping et les musulmans, l'intervention
des étrangers en Chine, la création de l'arsenal de Fuzhou (1867), le
massacre de Tientsin (1870), les nombreux traités conclus avec les puissances
européennes et l'établissement définitif des légations à Pékin, constituent
les principaux événements de ce règne, placé sous la régence de sa
mère l'impératrice douairière Cixi.
• Guangxu
(r. 1875-1908). - Né à Pékin en 1872. Petit-fils de l'empereur Daoguang.
Guangxu est connu pour la réforme des Cent Jours en 1898, un effort avorté
pour moderniser la Chine. Le pouvoir a été exercé, au cours de sa longue
minorité (1875-1889), par l'impératrice douairière Cixi, dont la politique
xénophobe amena, dès 1884, le conflit avec la France au sujet du Tonkin.
Après 1889, l'influence de Cixi est restée considérable, en raison de
la débilité physique et de l'incapacité politique du jeune empereur.
Après la guerre du sino-japonaise, terminée par le traité de Shimonoseki,
et la concession aux étrangers de nombreuses voies ferrées et lignes
télégraphiques, destinées à ouvrir la Chine à l'influence et au commerce
européens, la vieille impératrice a repris par un véritable coup d'État
(1897) la réalité du pouvoir, et la réaction xénophobe qui a suivi,
couronnée par le soulèvement des Boxers, peut-être encouragés par le
pouvoir impérial, a amené, en 1900, l'intervention de l'Europe, du Japon
et des États-Unis, et l'occupation militaire de Pékin par les puissances.
• Xuantong
ou Puyi. - Né en février 1906, mort en octobre 1967. Il est monté
sur le trône en 1908 (il avait donc deux ans) et a été empereur jusqu'en
1912, date de la proclamation de la République de Chine. En 1934, lors
de la création en Mandchourie par les Japonais du Manchuoko (Manzhuguo),
il prit pendant onze ans le titre d'empereur de cet État fantoche. Après
1945, Puyi a vécu en Chine sans titre et occupa, entre 1964 et sa mort,
des fonctions consultatives au sein de la République populaire.
(A.
Thomas).
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