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Monnaies mérovingiennes. Dans la Gaule romaine, l'altération du type et du travail artistique de la monnaie romaine a suivi la décadence de l'Empire; mais tel est le prestige exercé par le nom de l'empereur, que les conquérants barbares le subissent eux-mêmes : ils n'osent changer la monnaie à laquelle les peuples sont habitués, et elle continue à circuler, à être le signe des échanges, avec la tête impériale au droit et la Victoire au revers, lorsqu'il n'y a plus ni Empire à Rome, ni empereur. Childebert Ier en Neustrie, Théodebert en Austrasie, sont les premiers qui ont osé mettre leur nom sur la monnaie, en conservant toutefois les anciens types. Cet exemple de l'usurpation du droit monétaire sur les empereurs fut bientôt suivi. Nous connaissons aujourd'hui de très nombreux triens mérovingiens, portant des noms différents de lieux et de monétaires. Le triens est le tiers du sou d'or ou aureus. C'est la moins rare des pièces mérovingiennes. Le saiga, monnaie d'argent, appelé aussi denier, était le douzième du sou d'argent, monnaie de compte. Peu usité au VIIe siècle, il le fut davantage au VIIIe, et devint la monnaie courante sous les Carolingiens, alors que disparaissait presque entièrement la monnaie d'or, le trions, tiers de sou, le semis, demi-sou, et l'aureus, sou d'or. Les monnaies mérovingiennes présentent d'ordinaire, au droit, une tête de profil, d'une exécution barbare; au revers, on voit une croix haussée sur des degrés, fichée sur un globe, et accompagnée d'objets accessoires, terminée par une espèce d'ancre qui n'est qu'un reste du chrisme dégénéré. Monnaies carolingiennes. Sous Charles le Chauve, le denier porte le monogramme Carolin CARLVS, entouré de cette légende GRATIA DI REX, avec le nom de la localité au revers et la croix haussée. Monnaie carolingienne. La légende adoptée par Louis le Bègue rend les pièces faciles à distinguer : MISERICORDIA DI REX. Du reste, de Charlemagne à Eudes, la monnaie a un caractère à peu près uniforme. Vers la fin des Carolingiens, les usurpations du droit monétaire et les falsifications se multiplient. Quelquefois elles amènent de bizarres rapprochements : ainsi, sur des monnaies de Hugues Capet, frappées à Senlis, on trouve la légende ordinaire : GRATIA Dl REX, et, dans le champ, des deux côtés de la croix, ODO DVX. D'autres deniers de Hugues Capet, frappés à Paris, portent la légende modifiée autour du monogramme : GRATIA DI DVX. 1°les seigneurs frappent monnaie au nom du roi (sous les Carolingiens );Avec Philippe-Auguste, cette situation change en même temps que le rôle du pouvoir royal. Le roi frappe monnaie comme roi; il veut que cette monnaie ait cours partout, tandis que celle des seigneurs ne pourra sortir de leurs domaines. En même temps il adopte pour ses États des empreintes uniformes. Il décide que les monnaies frappées à l'abbaye de Saint-Martin de Tours, au type tournois du portail carolingien, auront cours dans le Sud, et que les deniers frappés à Paris, les parisis, auront cours dans le Nord. Sous ses successeurs, on ne frappe plus dans le domaine royal que des parisis avec la légende : PARISIVS CIVIS , ou des tournois, de gros tournois, TURONVS CIVIS. Du reste le système monétaire établi par Charlemagne n'est pas changé essentiellement; seulement le sou, appelé désormais gros, devient monnaie réelle; la monnaie d'or reluirait sous les noms d'agnel, de masse, et de royal, valant 20 sous ou une livre. - Monnaie capétienne. La monnaie royale donne la mesure de la loyauté consciencieuse du caractère du souverain, ou révèle les fluctuations de la fortune de la royauté. D'un titre élevé et incorruptible sous Louis IX, elle s'altère fréquemment sous Philippe le Bel, Philippe de Valois, Jean, Charles VI, Charles VII. Cependant, ce qui prouve qu'elle est, malgré ses altérations, supérieure aux monnaies féodales et recherchée de préférence par les populations, c'est le soin que mettent les seigneurs qui possèdent encore le droit de frapper monnaie, de donner à leur monnaie l'aspect de la monnaie royale. Depuis Saint Louis, le sou d'argent s'appelait gros, le denier petit tournois. Il se trouve un assez grand nombre de ces monnaies frappées par Henri V et surtout par Henri VI d'Angleterre, où ils prennent le titre de roi de France.
De Louis XI à la fin de l'Ancien Régime. Mais le changement le plus grave, le plus radical, devait se produire dans la fabrication même de la monnaie. Rien d'irrégulier comme le flan des monnaies féodales et royales jusqu'à Henri II, et on conçoit combien cette irrégularité était favorable à la falsification et à la rognure des espèces, puisqu'il ne sortait pas du marteau deux pièces absolument semblables et du même poids. Henri II, en 1541, créa « un tailleur, sculpteur et graveur des formes et figures des monnaies de France », imposant à tous les ateliers monétaires les coins taillés, sculptés et gravés par le graveur général. Des hommes du plus grand mérite, comme Marc de Béchot, Aubin Olivier, et un artiste hors ligne, un des maîtres dans l'élégance suprême de la Renaissance, Étienne Delaulne, furent chargés de la composition et de la fabrication de la monnaie, qui, grâce au moulin substitué au marteau, arriva à l'uniformité, à la régularité de la forme et à l'identité du poids; on ignore les motifs qui, après l'année 1560, firent abandonner le moulin. Henri II, pour prouver quelle sollicitude il portait à la réformation des monnaies, avait érigé la Chambre des monnaies en Cour souveraine, par édit de janvier 1551. Mais cette circonstance qui paraissait favorable à la fabrication de la monnaie faillit en arrêter les progrès. Nicolas Briot, graveur général, ayant proposé, en 1610, le balancier qu'il avait inventé ou perfectionné, la Cour s'opposa par tous les moyens à son adoption. La magnifique collection de la Bibliothèque nationale possède un certain nombre de médailles, de monnaies et de jetons qui proviennent des essais faits par Briot entre 1616 et 1625, et qui, par la régularité parfaite de la tranche, la netteté de l'empreinte, l'excellence artistique du travail, sont bien supérieures aux espèces alors en circulation. Mais tous les efforts de Briot échouèrent contre l'entêtement stupide d'une Cour qui craignait peut-être de perdre en importance, si on adoptait un moyen mécanique dont la conséquence eût été de diminuer le nombre des ouvriers, ses subordonnés, et de faire monnayeurs ses justiciables. Dégoûté des obstacles insurmontables qu'il rencontrait, Briot passa en Angleterre en 1625, et il y reçut le titre de graveur de la monnaie de Londres. Alors, en voyant la beauté des monnaies d'Angleterre faites par un Français, on commença en France à apprécier l'invention de Briot. En 1634, « Louis XIII voulut, par le moyen d'une nouvelle fabrication au moulin, arrester le cours de l'abus qui s'estoit si fort glissé au rognement et à l'altération des monnoies. »En 1645, l'interdiction du marteau fut prononcée : « Nous avons résolu, est-il dit dans l'édit, pour rendre toutes nos monnoies uniformes, éviter le billonnement, et supprimer la fabrication au marteau et lieu d'icelles, d'introduire la fabrication desdites monnoies au moulin. »Le moulin ou balancier resta appliqué à la fabrication de la monnaie jusqu'à l'adoption de l'ingénieuse machine de Tonnelier : depuis cette époque, vers 1825 environ, il ne sert plus qu'à frapper les médailles. Les premiers louis d'or furent émis sous Louis XIII Jusqu'à Louis XVI, la monnaie se distingua par la beauté de la gravure : Dupré, contemporain de Henri IV et de Louis XIII, le plus habile de tous, Warin sous Louis XIV, les Duvivier sous Louis XV, furent des maîtres dans l'art de la gravure en médailles, qui, de nos jours, a bien décliné. -
Monnaies de la Révolution et du XIXe siècle. La Révolution fit fermer les derniers ateliers seigneuriaux, et substitua au système duodécimal le système décimal dans la répartition et la dénomination de la valeur des espèces. Aucun changement important n'a été fait depuis. Les seuls qu'on puisse signaler sont les conséquences des révolutions politiques dont notre pays a été le théâtre, tels que des changements de types conformes aux idées de chaque régime : sous la Révolution, les emblèmes d'égalité; sous l'Empire, la tête du souverain; sous la Restauration comme sous Louis XIV, les armes de la France, les fleurs de lis; sous le gouvernement de Juillet, le coq gaulois; sous la République de 1848, une tête de femme imitée des médaillons de Syracuse, et à partir de 1852, l'aigle impériale. Pour faire un historique complet des monnaies françaises, il faudrait parler des monnaies obsidionales émises pendant les sièges, et frappées quelquefois avec du cuir, avec du plomb, avec des cartes à jouer; des monnaies coloniales; du papier-monnaie de Law; de cette variété immense de monnaies courantes, d'essais et d'assignats, que firent naître les embarras au milieu desquels se trouva jetée la première République. (D.). |
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