| La numismatique romaine se divise en deux périodes, embrassant, comme l'histoire même de Rome, la République et l'Empire. A la première se rapportent les monnaies consulaires ou de famille; à la seconde les monnaies frappées à l'effigie des empereurs, soit à Rome, soit dans les provinces. Monnaies consulaires. Les plus anciennes monnaies furent d'airain. On voit dans les cabinets des as, as liberalis ( parce qu'ils pesaient effectivement 12 onces de l'as, poids dont on fait remonter l'origine aux rois). Ce sont de lourds et massifs carrés d'airain marqués à l'empreinte du boeuf ou du trident, et d'une exécution qui ne manque ni de largeur ni de style. Le poids de l'as fut successivement réduit, à partir de l'époque où on commença à monnayer l'argent, c.-à-d. de l'année 269 av. J.-C. Il y eut trois monnaies d'argent : le denier, valant 10 as, ainsi nommé à cause de sa valeur même, de denis assibus ou dena oeris; le quinaire, valant cinq as; le sesterce, valant deux as et demi. Bientôt on ne compta plus par as, mais par sesterces, et le sesterce devint l'unité monétaire. L'or fut d'abord rare : les conquêtes l'ayant rendu plus commun à Rome on frappa des deniers d'or valant 25 deniers d'argent, et des quinaires valant la moitié du denier d'or. A cette époque (l'an 207 av. J.-C.), le rapport de l'or à l'argent était, comme 1 est à 17; en Grèce, où l'or était plus abondant, le rapport de l'or à l'argent ne paraît avoir été le plus souvent que de 1 à 70 ou à 13. Les monnaies romaines portent ordinairement le signe de leur valeur : le denier, un X, ou V, ou XVI, indiquant qu'il a valu X, et plus tard XVI as; le quinaire, Q (initiale de quinaire) ou V; le sesterce, IIS ou HS, indiquant sa valeur primitive, deux as, plus un semi ou demi-as. Rome ne donna jamais le droit de battre monnaie à un particulier; et jusqu'à César, jamais on n'osa mettre sur la monnaie l'effigie d'un homme vivant. Les souvenirs historiques, auxquels les médailles font fréquemment allusion, sont invoqués par les triumvirs monétaires, III. VIR. A. A. A. FF., trimviri auro, argento, aere, flando, feriundo, c.-à-d. triumvirs, magistrats chargés de faire mouler, frapper l'or, l'argent, l'airain. Ces fonctions étaient dévolues a des familles consulaires : de là le nom de monnaies consulaires donné aux monnaies de la République. Le droit de frapper monnaie est un des attributs de l'autonomie; cependant il arriva souvent que Rome, après s'être rendue maîtresse d'un pays, laissa l'exercice de ce droit aux peuples soumis; aussi voyons-nous l'image des empereurs sur les monnaies d'une infinité de villes. Quant aux colonies, elles ne purent en frapper qu'à la condition de stipuler qu'elles y étaient autorisées : PERM. PROC. (permisit proconsul), "par la permission du proconsul," et plus tard : PERM. AVG. (permisit Augustus), "par la permission de l'empereur". 1. Romulus | 2. Numa | Les monnaies consulaires ont un véritable intérêt comme oeuvres d'art, et un plus grand encore sous le rapport historique. Les faits qui y sont relatés présentent un caractère de véracité qui manque souvent aux monnaies impériales, où l'adulation prodiguait les mensonges pour plaire aux maîtres du monde. Tantôt ce sont des portraits traditionnels, comme ceux de Romulus et de Numa, qu'on trouve sur les monnaies des familles Memmia et Calpurnia (voir ci-dessus n° 1 et 2); tantôt des faits purement légendaires, comme sur un denier de la famille Pompeia, la louve et les jumeaux Romulus et Rémus (voir n° 3 ci-dessous); ou l'apparition des jumeaux divins, Castor et Pollux, à la bataille du lac Régille, sur un denier de la gens Postumia (voir n° 4). 3. Louve | 4. Dioscures | Le plus souvent la monnaie donne le portrait authentique d'un homme illustre, celui de Brutus (gens Junia), d'Ahala (gens Servilia), de Marcellus, n° 5 (gens Claudia); de Scipion l'Africain, n° 6 (gens Cornelia); ceux de Pompée (n° 7) et de César (n° 8), dans les monnaies frappées par des triumvirs monétaires, appartenant aux familles Pompeia et Julia; ou encore elle rappelle des événements glorieux pour la République et pour le monétaire qui évoque les exploits militaires et les services publics de ses ancêtres. 5. Pompée | 6. César | 7. Pompée | 8. César | Après et à son exemple, les généraux mettent hardiment leur effigie et leur nom sur la monnaie. En voici une émise par Brutus, qui rappelle les Ides de Mars, le meurtre de César, et qui donne l'image du libérateur de la République (n° 9). - 9. D. Brutus. Les triumvirs Marc-Antoine et Octave en font autant. Sur une belle pièce d'Antoine, frappée en Asie, figure d'un coté le triumvir, et de l'autre, au-dessus d'un cistophore, sa femme Octavie : - Antoine et Octavie Numismatique impériale. Les médailles impériales, depuis Auguste jusqu'à l'époque des Sévère, représentent la plus belle période de l'art. C'est surtout dans les médaillons, qu'on rencontre souvent encastrés dans une bordure et qui ne paraissent point avoir été mis en circulation avec une valeur légale, qu'on admire la finesse du travail, la perfection de la composition et de l'exécution. On peut en juger par le médaillon ci-dessous d'Antonin. - Médaillon d'Antonin. Le revers représente la fable légendaire de l'arrivée d'Enée et d'Ascagne en Italie. Les grands bronzes, moins rares, sont d'une exécution aussi soignée. Ils relatent l'histoire officielle des empereurs, les circonstances, les jeux ou fêtes publiques qui ont marqué leur avènement; de ce genre est le grand bronze de Galba, ci-dessous, dont le revers nous montre cet empereur haranguant les soldats après son élection au trône; et cet autre de Vitellius, dont le revers fait voir une naumachie dans le Cirque donnée à l'occasion de son avènement. Mais la plus souvent la monnaie célèbre les victoires remportées, les pays conquis, l'Empire fortifié, ou embelli par des monuments, édifices publics et religieux, ponts, temples, statues, palais. C'est une mine inépuisable de documents et de renseignements. - Grand bronze de Galba. Il existe des monnaies impériales en argent, en or et en bronze. Le titre de la monnaie d'argent fut altéré depuis le règne de Septime Sévère jusqu'à Dioclétien, qui rétablit la monnaie d'argent fin. La monnaie d'or antique est généralement d'une grande pureté. A Rome seulement on émettait des espèces dans ces deux métaux; la province ne pouvait faire que de la monnaie de bronze. Depuis Gallien, il n'y a plus de médailles d'empereurs frappées dans les villes grecques et dans les colonies, et le droit monétaire avait été enlevé bien plus tôt à certaines provinces : par exemple à l'Espagne par Caligula. La suite complète des grands bronzes ne va pas au delà de Postume. Celle des petits bronzes est la plus aisée à former : elle conduit jusqu'aux Paléologues. La suite du petit bronze, facile à réunir dans le Bas-Empire depuis Postume jusqu'à Théodose, difficile depuis Jules-César jusqu'à Postume, est impossible depuis Théodose jusqu'aux Paléologues. - Grand bronze de Vitellius. La décadence de l'art commence à Postume; elle produit, de Constantin à Théodose, des médailles sans relief; après Théodose elle est absolue. Dans le Haut-Empire, le nom des villes est souvent en légendes et en inscriptions; dans le Bas-Empire, principalement depuis Constantin, il se trouve toujours dans l'exergue : ainsi, CONOB (Constantinopli obsignata), S. M. A. (Signala moneta Antiochae), P. T. (Percussa Treveris). Ce n'est que dans le Bas-Empire qu'on a marqué les années du règne sur le revers des médailles. Mais on s'est servi de la langue latine, même sur les médailles frappées à Constantinople, jusqu'à Michel Rhangabé. Michel est le premier qui a repris la légende grecque, et qui s'est donné le nom de Basileus, équivalant à Auguste, comme despotès (en grec) équivalait à César. A partir de cet empereur, la langue s'altère, et n'est plus qu'un mélange de grec et de latin. (D.). | |