| Pise (ital. Pisa) est ville d'Italie, en Toscane, chef-lieu de la province de ce nom. Elle est située sur l'Arno, à 8 km de la mer, dans une plaine fertile, à l'intersection des lignes de chemin de fer de Gênes à Rome et de Florence à Livourne. La population totale de la ville s'élève à 87 500 habitants en 2012. - La cathédrale de Pise. Au fond, la tour penchée semble prête à tous les risques pour apparaître sur la photo. Les monuments. Pise renferme un grand nombre de monuments, notamment les quatre édifices, resserrés sur un étroit espace, à l'angle Nord-Ouest de la ville, et qui entourent la Place des Miracles (anc. Pl. du Dôme) : le Dôme (cathédrale de Pise), le Baptistère, le Campanile (Tour penchée), et le Campo Santo, qui comptent parmi les plus célèbres de l'Italie. Le Dôme. Le Dôme (Duomo) ou cathédrale Sainte-Marie de l'Assomption, bâtie à partir de 1064, après une victoire navale des Pisans près de Palerme, sur les plans par l'architecte Buschetto, continuée par Rainaldo, et consacrée en 1118 par le pape Gélase Il. Un incendie en dévasta plusieurs parties en 1596. C'est un monument unique pour son époque, et qui resta longtemps sans rival : il remit en honneur les ordres de l'architecture grecque, et fut le précurseur de la Renaissance; les bases, les chapiteaux des colonnes, les corniches, etc., sont des fragments antiques employés par l'architecte avec une rare habileté. L'édifice a la forme d'une basilique romaine (croix latine à cinq nefs) et l'aspect d'une maison ayant son pignon pour façade, ce pignon étant lui-même coupé à la cime pour porter une autre maison plus petite. Il a 95 m de longueur, 33 m de largeur, (72 m au transept), et 28 m de hauteur. Les assises alternatives de marbre blanc et noir à l'extérieur produisent un effet plutôt étrange qu'agréable : c'est une marqueterie qui éblouit le regard, et qui a l'inconvénient de rompre les lignes architecturales. La façade, éblouissante de blancheur, disposée en cinq ordres superposés, offre 58 colonnes et 4 galeries ouvertes. Les portes de bronze primitives, détruites par un incendie, à l'exception d'une seule, ont été remplacées en 1602 par les portes actuelles, exécutées d'après les dessins de Jean de Bologne. Les mosaïques qui les surmontent sont de Paladini. Sur le faite de la façade s'élève une statue en marbre de la Vierge avec l'enfant Jésus, ouvrage de Jean de Pise. - Une autre vue de la cathédrale de Pise (Dôme). A l'intérieur de l'église, 24 colonnes corinthiennes en granit rouge et monolithes soutiennent la grande nef; des arcs en plein cintre reposent sur les chapiteaux de ces colonnes, et au-dessus, séparé par une architrave, règne un second rang de colonnes plus nombreuses et plus petites, qui forment une galerie ou triforium. Les bas-côtés sont voûtés; mais la nef principale a un plafond de la Renaissance à caissons et richement doré. La coupole sur pendentifs bâtie au centre du transept est portée sur quatre piliers massifs et sur quatre arceaux très ouverts; elle a été restaurée et peinte par Riminaldi, au commencement du XVIIe siècle. Les objets d'art qui remplissent la cathédrale de Pise font de ce monument un véritable musée chrétien. Une célèbre chaire, que Jean de Pise avait sculptée, fut ruinée par la chute du toit lors de l'incendie de 1596 : quelques statuettes que l'on sauva ornent la chaire actuelle. Les douze autels latéraux ont été exécutés par Stagi di Pietra Santa. La tradition veut qu'ils aient été dessinés par Michel-Ange; mais la composition n'en est pas assez satisfaisante pour qu'on admette cette opinion, et ce qu'ils offrent particulièrement de remarquable, ce sont les ornements exécutés par Staggi de Pietra-Santa. La marqueterie des stalles du choeur est un admirable travail; les vitraux, dont quelques sujets ont été empruntés aux peintures du Campo-Santo, sont du XIVe et du XVe siècle; on voit encore dans le choeur plusieurs fresques de Beccafumi, de Ghirlandajo, et d'André del Sarto. - ULa façade principale de la cathédrale de Pise. Le maître-autel , derrière lequel est un Sacrifice d'Abraham par le Sodoma, est incrusté de pierres précieuses, ainsi que la balustrade en marbre qui le sépare du choeur; les deux statues et le crucifix en bronze sont de Jean de Bologne. Au fond du choeur, un grand christ en robe dorée, à figure immobile et mystique, occupe tout le creux de l'abside : c'est l'oeuvre de Cimabué (1302). En avant du choeur, sur le pilier de droite, est la célèbre Sainte Agnès d'André del Sarto. Au-dessus des portes des sacristies et au-dessous des orgues, on voit des bas-reliefs de F.-G. Agnelli, qui appartenaient autrefois à la façade et à une chaire de Saint-Michel-in-Borgo. Une grande lampe de bronze est suspendue dans la nef : on prétend que ses oscillations mirent Galilée sur la voie de la théorie du pendule. Les bras du transept contiennent deux chapelles : l'une renferme le sarcophage de Saint Renier par Foggini, et une statue antique de Mars; dans l'autre est un ciboire d'argent d'un travail précieux. Le Baptistère. Le Baptistère de saint-Jean (Battistero di San Giovanni), commencé en 1153 par Diotiselus, achevé seulement en 1278, est un dôme en marbre blanc de 30,50 m de diamètre et de 54,50 m de haut, revêtu en bas d'une rangée de pilastres, et dans le haut, d'une galerie de colonnettes. Il contient deux beaux morceaux de sculpture : les fonts, superbe bassin à huit pans, de Guido Bigarelli (1246) et la célèbre chaire de Nicolas de Pise (Nicolas Pisano,1260), supportée par sept colonnes et décorée de bas-reliefs. - Le Baptistère de Saint-Jean, à Pise. A l'arrière-plan, la cathédrale et la tour penchée. Le Campanile. Le Campanile ou clocher, séparé, suivant l'usage italien, est connu sous le nom de Tour Penchée. Commencé en 1174 par Bonannus-de-Pise et Guillaume d'Insbrück, terminé en 1350 par Tommaso Pisan, est une tour de marbre blanc, ornée de six galeries de colonnettes et haute de 54,50 m; elle dévie de 5,30 m de la ligne verticale. Cette inclinaison est attribuée à un affaissement de terrain au moment de la construction. - La Tour penchée de Pise. Images : The World Factbook. Le Campo Santo. Le Campo Santo, à la fois musée et cimetière, est un monument unique en Italie. L'archevêque Ubaldo (1488-1200) consacra le cimetière, qui fut rempli de terre apportée de Palestine. De 1278 à 1283, Giovanni Pisano entoura ce terrain d'un portique rectangulaire de 126 m de long sur 52 de large. Le pourtour extérieur a été décoré de fresques, et l'intérieur orné de monuments funèbres. Les fresques sont l'oeuvre des écoles de Florence et de Sienne, du XIVe et du XVe siècle. Les plus remarquables sont : sur le coté sud, le célèbre Triomphe de la mort et le Jugement dernier, attribués longtemps à Orcagna, et restitués aux frères Ambr. et P. Lorenzetti de Sienne (1340); sur le côté nord, vingt-trois scènes de l'Ancien Testament, qui passent pour le chef-d'oeuvre de Benozzo Gozzoli, de Florence. Les monuments funéraires sont de toutes les époques. On y trouve, à coté de sarcophages romains, des statues de Giovanni et Tommaso Pisano (XIVe siècle) et des bustes modernes de Dupré. La tradition qui veut que galilée ait utilisé la tour de Pise pour ses expériences sur la chute des corps n'a pas de fondement historique. - Le Campo Santo de Pise. Ci-dessous, la Galerie des Inconsolables (intérieur d'église). Le reste de la ville. La ville même de Pise présente un moindre intérêt que cet ensemble de monuments. Elle est divisée en deux portions inégales par I'Arno, que borde une majestueuse suite de quais (le Lungarno). La partie méridionale, plus moderne, doit son animation à la gare, et ne contient qu'un seul monument véritablement artistique : Santa Maria della Spina, sur le Lungarno. C'est un bijou de style gothique français, construit en 1230 pour les marins en partance, agrandi en 1323 et décoré de sculptures d'élèves de Giovanni Pisano. La partie septentrionale est sillonnée par des rues étroites et bordées de maisons basses. On y remarque pourtant une place et quelques monuments curieux. La piazza dei Cavalieri, située dans le voisinage de l'ancien forum de la République, est ornée d'une statue de marbre du grand-duc Cosme Ier, d'après Jean de Bologne (1596), l'une des faces en est occupée par San Stefano ai Cavalieri, construit de 1565 à 1596 sur les plans de Vasari, et par le palais des Cavalieri. San Sisto, fondé en 1089, contient de belles colonnes antiques de marbre et de granit. Santa Caterina (1253) a une façade intéressante du style gothique propre à Pise. San Francesco (XIIIe siècle) a été transformé en musée municipal où se voient des oeuvres des plus anciens peintres et sculpteurs toscans. L'Université (fondée en 1359 et réorganisée en 1542) occupe le beau palais de la Sapienza, bâti en 1493 et agrandi en 1543. La bibliothèque (ouverte en 1752) contient plus de cent mille volumes et 61 incunables. Parmi les édifices civils, les principaux sont des palais particuliers, parmi lesquels le palais Carovana, près duquel s'éleva la Tour de la Faim où périrent Ugolin et ses enfants. Histoire. Pise (anc. Pisae) aurait été fondée par des Grecs de Pise dans le Péloponnèse (Les Colonies grecques). C'était une des douze villes étrusques et se trouvait au confluent du Serchio et de l'Arno, dont le cours est maintenant séparé. En 180 av. J.-C., elle devint colonie romaine : Auguste en fit un municipe et lui donna le nom de Colonia Julia Pisana. Hadrien et Antonin l'ornèrent de splendides monuments. Ravagée par les Goths, elle appartint aux Lombards, à Charlemagne, puis se constitua en république au IXe siècle. Elle devint, grâce à la profondeur de l'Arno, qui portait de gros vaisseaux, une importante cité maritime, rivale de Gênes et de Venise et redoutée des Musulmans. En 1016, les Pisans arrachent la Sardaigne aux Sarrasins, grâce à l'appui des Génois; ils les battent encore en 1035 près de Bône (Annaba) et en 1063 près de Palerme. Leur commerce prend dès lors un développement inattendu, leur ville devient un des entrepôts de la Méditerranée, et leurs entreprises s'étendent avec, leur puissance. Après la première croisade, ils fondent des comptoirs et obtiennent des privilèges dans les villes de Syrie; en 1114, ils s'emparent des Baléares; en 1135, ils prennent et détruisent Amalfi, leur rivale dans l'Italie du Sud. Leur prospérité atteint son apogée aux XIIe et XIIIe siècles; pour prix de leur dévouement aux Hohenstaufen, ils ont obtenu une pleine liberté communale et la nomination de leurs consuls; leur souveraineté s'étend sur toute la côte de la péninsule, depuis la Spezia jusqu'à Civita Vecchia. La chute des Hohenstaufen, les progrès constants de Gênes et la perte des colonies d'Asie vont interrompre cette période de succès. En 1284, une guerre éclate avec Gênes, qui se termine par le désastre naval de la Meloria (6 août 1284), la flotte est détruite, les cités voisines, Lucques, Pistoie, Florence, Prato, en profitent pour s'unir à Gênes. Le parti guelfe, dirigé par Ugolino della Gherardesca, relève la tête et n'est réduit qu'au prix d'une lutte atroce; de nouveaux revers (1290-1292) contraignent les Pisans à signer une paix par laquelle ils renoncent à la Corse, à une partie de la Sardaigne ils ne devaient jamais s'en relever. Uguccione della Faggiola, qui s'empare de la ville en 1313, assiège Lucques en 1314, bat les Florentins en 1315, mais est banni en 1316. De 1316 à 1347, la signoria est exercée par les membres de la famille de la Gherardesca. Le plus célèbre d'entre eux, Gaddo Gherardo, perd et reprend Lucques (1220-1252), mais ne peut prévenir les dissensions qui s'élèvent entre guelfes (Raspanti) et gibelins (Bergolini). Ces derniers arrivent au pouvoir après la mort de Ranieri della Gherardesca (1347) et leur chef, Andrea Gambacorta, prend le titre de capitaine général (1348); ses descendants devaient le conserver jusqu'en 1392, date à laquelle la signoria passe à la famille d'Appiano. - Conciles de Pise En 1131, un premier concile fut tenu à Pise, sur la convocation du pape Innocent II, obligé de quitter Rome. On y excommunia l'antipape Anaclet et l'hérésiarque Henri et on y déposa Alexandre, usurpateur de l'évêché de Liège. Le deuxième concile de Pise, qui se tint du 25 mars au 7 août 1409 fut le premier des trois conciles dits réformateurs. Ce qui fait l'intérêt particulier de ce concile, c'est qu'il tenta, comme après lui ceux de Constance et de Bâle, de donner à l'Eglise une constitution représentative; mais la constition monarchique était seule dans la logique des principes de l'Eglise, et elle existait de fait, bien longtemps avant d'être proclamée par le concile du Vatican de 1870. Aussi toutes les tentatives de réforme devaient-elles forcément échouer. En 1408, le schisme de 1378 durait encore; Grégoire XII était pape à Rome (et plus tard à Rimini) et Benoît XIII à Avignon (et plus tard à Perpignan). Pour mettre fin à cette situation, les cardinaux des deux papes se réunirent à Livourne et convoquèrent les représentants de l'Église à un concile général qui devait se réunir à Pise, le 25 mars 1409. On répondit à la convocation avec le plus grand empressement. Le concile compta 22 cardinaux, 4 patriarches, 200 archevêques ou évêques présents ou représentés par des délégués, 287 abbés (on leurs délégués), 41 prieurs, les généraux des 4 ordres mendiants, les grands maîtres des ordres chevaleresques, les représentants de 13 universités et de plus de 100 chapitres, plus de 300 docteurs en théologie ou de droit canonique. Le concile s'occupa d'abord de mettre fin au schisme. Dans sa 15e session, le 5 juin, il destitua les deux papes, comme « schismatiques et hérétiques, fauteurs, défenseurs, approbateurs opiniâtres du schisme, coupables du crime de parjure, scandalisant l'Eglise de Dieu par leur obstination manifeste ». Avant de procéder à l'élection d'un nouveau pape, les cardinaux jurèrent que celui d'entre eux qui serait élu ne dissoudrait pas le concile avant d'avoir fait, de concert avec lui, « une réforme raisonnable et suffisante de l'Eglise universelle dans son chef et dans ses membres ». Le 26 juin, les 22 cardinaux élurent Pierre Philargi, un Grec de Candie, appartenant à l'ordre des franciscains, et qui prit le nom d'Alexandre V. Gerson, bien qu'absent, avait exercé quelque influence sur le concile par ses écrits; mais c'est en vain que Pierre d'Ailly s'était efforcé de faire passer la réforme avant l'élection. Il ne fut pas écouté. Aussi la « réforme suffisante » futelle ajournée à un concile futur, et Alexandre V, en dépit de son serment, renvoya celui de Pise qui lui était importun, le 7 août 1409. Au lieu de deux papes on en eut trois. Un troisième concile fut convoqué à Pise, le 1er novembre 1511, par Louis XII, pour combattre le pape Jules Il. L'assemblée dut se retirer à Milan, où, dans sa quatrième session (4 janvier 1512), elle suspendit Jules II, puis à Asti et à Lyon. | En 1398, Pise perd son indépendance après sa liberté, Gherardo d'Appiano la vend au duc de Milan, Jean Galéas Visconti, dont le fils naturel, Gabriel, la vend, à son tour, à sa vieille rivale, Florence (1403). En vain les Pisans se soulèvent-ils sous la conduite de Gambacorta. Ils sont étroitement assiégés, et, après la prise de la ville (1406), une partie d'entre eux doit s'exiler. En 1494, une nouvelle occasion s'offre à eux de secouer le joug de Florence; Charles VIII descend en Italie et se montre favorable à leurs voeux; ils s'insurgent, reconquièrent leur indépendance pour la perdre avec le départ des armées françaises; le 8 juillet 1509, ils doivent capituler. A cette date se termine l'existence politique de Pise. Elle suit dès lors les vicissitudes de la Toscane; incorporée à l'Empire français de 1807 à 1814, elle est définitivement réunie au royaume d'Italie en 1860. Pise a occupé dans l'histoire des arts une place plus importante encore que dans l'histoire politique. Au XIIe et au XIIIe siècle, l'architecture s'y est développée plus vite que dans les autres villes de la toscane; en sculpture, Nicolas et Jean de Pise ont été des initiateurs et des chefs d'école. Pise a vu aussi naître André de Pise, le savant Galilée, etc. (Ch. Pfender / NLI / B.). - L'Arno à Pise, sur une ancienne photographie. | |