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Les
Geckos
Geckonoïdes |
Les Geckos,
Ascalabotes, Tokais ou Tarentes, apartiennent au groupe des Sauriens.
Ce sont des animaux qui n'arrivent jamais à
une grande taille, dont le corps est déprimé, trapu, le cou
très court, la tête large et aplatie, enfoncée entre
les épaules, la queue très fragile, généralement
épaisse, les pattes courtes garnies de doigts presque égaux
en longueur et le plus souvent aplatis en dessous, où ils sont garnis
de lames régulières et entuilées.
Ils sont, en outre, remarquables par la
brièveté et la grande largeur de leur langue
charnue, à peine protractile, par la largeur de leur bouche; par
la grandeur de leurs yeux, dont la pupille offre
le plus souvent une fente linéaire, comme celle de tous les animaux
nocturnes et dont les paupières, fort réduites, laissent
entre elles une large ouverture par laquelle on voit se mouvoir une membrane
clignotante.
Un Gecko de l'Alabama. Photo : Carol Highsmith. Les vertèbres sont amphicéliennes, c'est-à-dire creuses à leurs faces articulaires. On remarque, au crâne, que l'os jugal est rudimentaire et que le squamosal est fort petit; l'arc temporal supérieur, pas plus que l'arc inférieur, n'est ossifié, le postfrontal étant uni au squamosal par un ligament, de même que le maxillaire à l'os carré. Les dents sont petites, égales, comprimées, tranchantes au sommet, entières, implantées au bord interne des mâchoires; il n'y a jamais de dents au palais. Le peau est garnie d'écailles granuleuses, le plus souvent parsemées de tubercules plus gros à pointes mousses et anguleuses; ces écailles peuvent parfois se réunir, de manière à former des sortes de plaques, ainsi qu'on le voit chez un Geckotien de la Nouvelle-Calédonie, l'Eucydactyle. Il existe le plus souvent des pores aux cuisses et au devant du cloaque. Caractères
spéciaux.
On peut, en effet, les partager en deux groupes assez naturels; chez les uns les pattes ont les doigts élargis sur toute ou presque toute leur longueur, et supportent des ongles rétractiles; chez les autres les doigts sont arrondis ou même légèrement comprimés et les ongles ne sont ni crochus, ni susceptibles de rentrer dans une sorte de gaine destinée à les recevoir. Chez les Thécadactyles et les Platydactyles, qui font partie du premier groupe, les doigts sont élargis plus ou moins sur toute leur largeur et garnis en dessous de lamelles transversales, imbriquées, entières ou divisées par un sillon longitudinal et médian. Parfois les ongles font défaut; d'autres fois le pouce est très court ou rudimentaire; il peut exister quatre ou cinq ongles; chez certaines espèces on ne voit que deux ongles ; les doigts sont ou palmés et réunis par une membrane, ou complètement libres. Le sillon qui divise les lamelles sous-digitales peut être assez profond en avant pour que l'ongle puisse s'y loger, ainsi qu'on le voit chez les Théconyx. Les Hémidactyles, qui sont voisins des Platydactyles, ont les doigts élargis à leur base en un disque du milieu duquel s'élèvent les deux dernières phalanges, qui sont grêles; la face inférieure de ce disque est revêtue de feuillets entuilés, le plus souvent échancrés en chevron. Le pouce peut être élargi en toute sa largeur et garni de lames sous-digitales ou être, au contraire, rétréci à la pointe; dans ce dernier cas, le pouce est parfois allongé, parfois très court; chez certaines espèces les doigts sont à demi palmés; chez d'autres, ils sont absolument libres. Chez les Hémidactyles c'est, venons-nous de le dire, la base du doigt qui est élargie; la disposition inverse se voit chez les Ptyodactyles chez lesquels l'extrémité des doigts est dilatée en un disque offrant une échancrure en avant, et en dessous des lamelles imbriquées et disposées comme les lames d'un éventail; tous les doigts; sont garnis d'ongles, placés au fond d'une fissure qui sépare en deux la partie élargie. La même disposition générale se trouve chez les Phyllodactyles; chez ceux-ci toutefois le disque est garni de deux plaques seulement. Les Sphériodactyles, qui, sont des animaux de très petite taille, n'ont pas d'ongles; les doigts sont presque arrondis ou cylindriques, excepté à leur extrémité libre qui présente de petites lames transversales à peine imbriquées et qui se terminent par une partie lisse et entière. Les doigts ne sont plus élargis chez les Gymnodactyles et chez les Sténodactyles. Chez les premiers la face inférieure des doigts est striée en travers; elle est granuleuse et dentelée sur les bords chez les seconds. Les Geckotiens étant des animaux essentiellement nocturnes ont généralement des couleurs ternes et sombres; leur apparence est peu agréable. Les ornements consistent le plus souvent en petites taches, en gouttelettes d'un blanc laiteux ou des ocelles d'un bleu céleste, ainsi qu'on voit, par exemple, chez le Platydactyle d'Égypte; on voit d'autres fois des taches brunâtres, rouges. La coloration est parfois plus agréable et relevée de bandes brunes se détachant en un fond violacé, ainsi qu'on peut le voir chez le Platydactyle à deux bandes de la Nouvelle-Guinée, ou d'une bande blanche se bifurquant en avant, comme chez le Platydactyle à ban des de la Polynésie. Certains Geckotiens, plus particulièrement cantonnés dans la partie la plus chaude de l'ouest de l'Afrique, ont, contrairement aux autres membres de la même famille, des habitudes plus diurnes, aussi leur coloration est-elle plus brillante que chez les animaux nocturnes, dont la livrée est toujours plus ou moins terne. Quelques Geckotiens présentent des sortes de franges, de plis sur certains points du corps. Un des animaux les plus curieux sous ce rapport est le Ptychozoon homacéphale. Chez ce singulier reptile, plus particulièrement abondant à Java, bien qu'on le rencontre dans quelques îles voisines, les tempes, les flancs, les membres et la queue sont bordés d'une membrane; le dessus du corps est de teinte vert-jaunâtre, les flancs étant rougeâtres; le dos est orné de bandes transversales de couleur brune ou noire qui forment, par leur ensemble, une série de zigzags; la peau plissée des joues offre une teinte claire avec des mouchetures d'un beau bleu foncé; les yeux sont bordés d'un cercle jaune doré; les bras portent un anneau blanchâtre. La taille de cet étrange animal est d'environ 0,20 m. Distribution géographique.
Grâce à la facilité avec laquelle ces animaux; qui s'attachent à tous les objets, peuvent être transportés à bord des bateaux avec les marchandises, certaines espèces, telles que le Platydactyle des murailles, ont une très large distribution géographique et ont pénétré avec l'humain, dans les localités les plus éloignées. Habitat.
Tous ces Geckotiens ont à peu près les mêmes habitudes. Ils habitent les parois des rochers et les arbres, les pierres éboulées, les habitations. Certaines espèces semblent être plus particulièrement arboricoles, tandis que d'autres préfèrent les endroits rocheux ou les maisons. Là où ils se trouvent, ils trahissent leur présence par des cris souvent assez forts; ce sont les seuls Sauriens qui aient réellement une voix. Moeurs, habitudes,
régime.
Ainsi que nous venons de le dire, les Geckos se nourrissent principalement d'insectes et d'animaux semblables qu'ils trouvent le plus souvent en se mettant en embuscade ou en les chassant et les poursuivant dans les trous et les cavités obscures où ceux-ci cherchent leur refuge. Leurs pattes, munies en dessous de lamelles imbriquées qui s'appliquent exactement et adhèrent sur la surface des corps même les plus lisses, leur permettent de courir, avec la plus grande prestesse, sur tous les plans et dans toutes les directions, en se tenant même suspendus sous la face inférieure des feuilles. Le plus souvent des ongles crochus, acérés et rétractiles, comme ceux qui forment les griffes des chats, leur donnent la facilité de grimper sur les écorces des arbres, de pénétrer dans les fentes et les trous des rochers, de gravir les murailles à pic, d'en rechercher les moin dres cavités pour s'y tapir et y rester immobiles pendant des heures entières, accrochés et somme soutenus en l'air par les pattes, contre leur propre poids. Leur tronc aplati, flexible dans tous les sens, semble se mouler dans les creux où ils n'offrent presque aucune saillie, et la teinte variable de leurs téguments semble se confondre et s'accorder avec les couleurs des surfaces sur lesquelles ils reposent. Cette faculté leur est utile pour masquer leur présence à la proie qu'ils épient, aussi bien que pour les soustraire à la vue de leurs ennemis et surtout à la recherche de quelques petits oiseaux de proie, les seuls ennemis qu'ils aient à craindre. Leur pupille jouit d'une mobilité semblable à celle qu'on observe dans les yeux des oiseaux et des mammifères nocturnes qui peuvent dilater excessivement leur prunelle quand ils ont besoin de recueillir les effets d'une lumière peu abondante, et qui ont la faculté de la resserrer pour la réduire à une simple fente linéaire; c'est dans les climats chauds que les Geckotiens habitent; ils sont appelés à supporter le plus grand éclat d'un soleil ardent, et cependant comme leur proie cherche à éviter aussi l'excessive chaleur, du jour, ils sont obligés d'attendre la nuit pour aller à la chasse ou à la poursuite des insectes qui profitent eux-mêmes de l'obscurité et de l'abaissement de la température, afin de pourvoir à leurs besoins particuliers. Les mouvements des Geckos sont extrêmement vifs; ils s'élancent soudain en se tortillant avec rapidité. D'après les observations de Cantor, le Ptychozoon homolocéphale, Gecko pourvu de replis cutanés, peut à l'aide de ces membranes, qui lui servent de parachute, exécuter des bonds assez considérables; les autres espèces, au contraire, lorsqu'elles veulent sauter, entraînées qu'elles sont par l'ardeur de la chasse; perdent généralement l'équilibre et tombent lourdement sur le sol. C'est à l'aide des feuillets qui se trouvent aux doigts que, faisant le vide, le Gecko peut se tenir dans toutes les positions, et non pas en se collant aux corps à l'aide d'une substance visqueuse, comme on le croyait autrefois à tort. Ceux qui ont admis de confiance cette dernière explication ne réfléchissaient pas à cela que le Gecko ne tarderait pas à ne plus pouvoir se servir de ses pattes, attendu que la viscosité ferait adhérer aux pelotes lamelleuses toutes sortes de poussières et de corps étrangers. D'après des observations de Brehm, faites sur le Gecko des murailles, espèce qui se trouve dans le sud de l'Europe, le Gecko peut diriger le premier et le cinquième doigt de telle sorte que ceux-ci forment avec le deuxième et le quatrième un angle très obtus; en outre, le deuxième doigt de chaque main est assez mobile pour pouvoir décrire un arc de cercle assez grand, tandis que le quatrième et le cinquième ne peuvent pas s'écarter beaucoup. On doit regarder les troisième et quatrième doigts comme servant à l'animal pour se cramponner lorsqu'il grimpe, tandis que les trois autres doigts peuvent être considérés comme des doigts adhésifs. Si l'amplitude des mouvements latéraux des doigts est d'une grande utilité, la flexion, toute particulière des trois premiers doigts rend des services non moins appréciables. Les feuillets cutanés des disques des orteils se superposent en faisceaux pendant le repos; de telle sorte que leurs tranches ne sont plus visibles; on les distingue, au contraire, très nettement lorsque l'animal se dispose à grimper. Le contact de cette pelote adhésive produit la sensation du velours sur la main qui saisit le Reptile. Les Geckos sont aussi courageux, et aussi querelleurs que les Lézards. Ceux qui vivent en société, loin de demeurer en paix, se poursuivent et se mordent fréquemment. Les espèces les plus grandes se mettent même sur la défensive vis-à-vis de l'humain, ouvrent largement la gueule et se jettent avec courage sur la main qui veut les saisir. Les Geckos qui vivent dans les habitations deviennent promptement très familiers, lorsqu'on ne les inquiète pas. Captivité.
Légendes
et préjugés.
Voici ce qu'Aristote dit du Gecko : « Cet animal séjourne sur les fenêtres, s'introduit dans les appartements, vit dans les fossés; il erre le long des murailles et tombe fréquemment sur la table et dans les mets; il s'introduit dans les narines des ânes qu'il empêche de manger; sa morsure est venimeuse; pendant les quatre mois les plus froids de l'année, il demeure caché et ne prend aucune nourriture; au printemps et à l'automne, il mue et mange sa dépouille.»Grezner, pour sa part, écrit : « Cet animal dévore la peau qu'il vient de quitter, ce qui prive l'homme d'un remède souverain contre l'épilepsie, c'est pourquoi les juristes ont désigné sous le nom de stellionat le vol qui consiste à priver quelqu'un d'un objet par ruse ou par fourberie. Le Stellion est en hostilité naturelle avec le Scorpion; sa vue lui inspire une, frayeur extrême. On utilise le Stellion en le faisant macérer dans de l'huile, ce qui donne un remède efficace contre la piqûre du Scorpion. »Pline affirme que l'Ascalabote donne un médicament fort dangereux, attendu que chez les gens qui se servent du vin dans lesquels un de ces animaux a été noyé ou d'onguent dans lequel il a été incorporé, on voit se produire des taches de rousseur. « Certaines personnes coupables, écrit-il, offrent des onguents de cette sorte à des jeunes filles, pour les enlaidir à tout jamais. »L'auteur romain indique comme antidote le jaune d'oeuf, le miel, les sels alcalins. Au dire du même naturaliste, la morsure du Gecko serait presque toujours mortelle en Grèce, mais inoffensive en Sicile. Pendant très longtemps on a, raconté des histoires tout aussi fantaisistes sur le compte des Geckos. Bontins, auquel on doit certains renseignements fort exacts sur les animaux qu'il a été à même d'observer, écrit à propos d'un Gecko de Jakarta « que sa morsure est tellement venimeuse qu'elle est suivie de mort au bout de peu d'heures si on ne retranche ou si on ne brûle pas de suite la partie mordue. Le simple passage d'un de ces Sauriens courant sur la poitrine nue suffit à produire une vésicule semblable à celle que ferait paraître l'eau bouillantes. Ce Reptile a les dents si aiguës, qu'il les imprime dans l'acier; sa gueule est rouge comme une fournaise ardente. Au grand effroi des habitants, ce dangereux animal erre souvent dans les huttes, de telle sorte qu'on est obligé de lesdémolir pour forcer le Gecko à déguerpir. Les Javanais empoisonnent leurs armes avec son sang et sa bave; d'infâmes empoisonneurs, comme il y en a beaucoup dans le, pays, suspendent le Gecko par la queue et reçoivent dans des vases de terre, pour la faire sécher au soleil, la bave visqueuse et jaunâtre qui s'écoule lorsque l'animal est irrité; on nourrit même des Geckos dans ce seul but. L'urine seule de cet animal produit des pustules. »Hasselquist prétend que le Gecko qui vit en Égypte laisse suinter un redoutable poison entre les sillons de ses doigts. Il affirme avoir vu, au Caire, trois femmes en danger de mort , pour avoir mangé d'un fromage sur lequel un Gecko avait déposé son poison. Un de ces Lézards ayant couru, sur la main de quelqu'un qui voulait s'en emparer, toute la partie sur laquelle l'animal avait passé se couvrit de petites pustules, accompagnées de chaleur, de rougeur et de douleur, comme celles que l'on éprouve quand on a touché des orties. Il est difficile de dire ce qui a donné naissance à des légendes aussi infondé que si généralement répandues. Les Geckotiens sont des animaux absolument inoffensifs, qui cherchent tout au plus à mordre lorsqu'on veut les saisir, comme le font tous les autres Sauriens du reste. Ajoutons que les Geckos sont des animaux essentiellement utiles, car ils détruisent un grand nombre de moustiques et d'autres insectes bien autrement désagréables qu'eux; il en est de ces animaux comme d'une foule de bêtes déshéritées de la nature et sottement calomniées, telles que l'Orvet et le Crapaud que l'on tue sans pitié et sans discernement. (E. Sauvage / Duméril et Bibron / A.E. Brehm). |
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