|
. |
|
Simon Bolivar (nom complet : Simón José Antonio de la Santísima Trinidad Bolívar y Palacios), l'émancipateur des colonies hispano-américaines, est né à Caracas le 24 juillet 1783, et est mort à Santa Marta le 17 décembre 1830. Son père, don Juan Vicente Bolivar y Ponte, était colonel de la milice des plaines d'Aragua et appartenait à une vieille et opulente famille du Venezuela. Devenu orphelin en 1789, Simon Bolivar fut emmené à Madrid par son oncle le marquis de Palacios. Il y étudia le droit, puis voyagea en Italie, en Suisse, en Allemagne, en Angleterre et en France. Il séjourna à Paris, où il suivit les cours de l'Ecole normale supérieure et de l'Ecole polytechnique. De retour à Madrid en 1802, il épousa la fille du marquis d'Ustaritz, et revint avec elle à Caracas, où elle mourut bientôt de la fièvre jaune. Bolivar revint alors à Paris (1804), puis visita les Etats-Unis. - Simon Bolivar (1783-1830). Au commencement de 1810 il était au Venezuela; c'est l'époque où un mouvement insurrectionnel contre l'Espagne se dessinait nettement. La capitainerie de Caracas se distinguait entre toutes les colonies par le nombre de prosélytes que les idées et les principes de la Révolution française y avaient faits . Les principales familles du pays s'étaient déclarées contre la métropole; Bolivar se mit résolûment à la disposition de la junte qui venait de déposer le capitaine-général espagnol (19 avril 1810). On l'envoya à Londres pour solliciter l'appui du gouvernement anglais. Celui-ci se déclara pour la stricte neutralité. Mais Bolivar ramena (septembre 1811) un vaisseau chargé d'armes et laissa à Londres un agent dévoué, Luis Lopez Mendez, avec mission de contracter des emprunts et de recruter des soldats au nom du Venezuela. Miranda le nomma colonel et gouverneur de Puerto Cabello. La révolution gagnait du terrain, lorsque survint le terrible tremblement de terre du 26 mars 1812. Le clergé, qui tenait pour la métropole, s'empressa de présenter cette catastrophe comme une punition du ciel et menaça les populations affolées de nouveaux châtiments. En vain Bolivar usa-t-il de tout son ascendant pour combattre les prédications des moines; le peuple en masse revint à l'Espagne. Le général Miranda, battu par Monteverde (24 juillet 1812), fut livré au vainqueur par Bolivar lui-même (cette accusation de trahison n'est pas absolument prouvée, mais aucun historien ne l'a réfutée sérieusement), qui obtint un sauf conduit du commandant espagnol et se retira dans l'île de Curaçao. Monteverde commit de telles atrocités dans la répression que Bolivar s'embarqua pour Carthagène, où s'étaient assemblés un certain nombre de patriotes Venezuéliens. Il y publia un mémoire sur les causes de l'avortement de la révolution et traça un plan de conduite pour en assurer le succès définitif. Bolivar y entra triomphalement sur un char traîné par douze jeunes filles. On lui donna le nom de Libérateur (Libertador), et il prit la dictature qui lui fut confirmée, le 2 janvier 1814, par un congrès des provinces confédérées. Les Espagnols aux abois firent appel aux llaneros du Venezuela, sorte de cavaliers des steppes colombiennes. Ils leur promirent les biens des patriotes et les lancèrent contre Bolivar, qui assiégeait Puerto Cabello et qui, forcé de lever le siège, fut battu à Barquisemeto. La guerre prit alors un caractère d'atrocité effroyable; les llaneros massacraient tous les indépendants, même les femmes et les enfants qui tombaient entre leurs mains, et Bolivar, dans le but avoué par lui, de séparer à jamais les deux partis « par un fleuve de sang », faisait égorger tous ses prisonniers. Après quelques succès, le Libérateur fut complètement battu par Boves à La Puerta (15 juin 1814). Il faillit être pris et gagna à grand-peine Carthagène. Il obtint quelques troupes du congrès de Tunja (septembre 1814), et vint attaquer Santa Marta. L'arrivée de renforts envoyés d'Espagne sous les ordres du général Morillo le surprit (mars 1815); les habitants de Carthagène refusèrent de recevoir son armée dans leurs murs et il fut contraint de se réfugier à la Jamaïque, puis à Haïti. Il fut bien accueilli de Pethion, qui lui fournit des secours. Avec son aptitude à trouver toujours de nouvelles ressources dans les moments désespérés et son génie d'organisation, il reconstitua rapidement une nouvelle armée et même une flotte. Il rallia à Cayes tous les réfugiés, recruta un grand nombre d'aventuriers; un riche négociant hollandais, Brion, qu'il nomma amiral, lui prêta son argent et ses bâtiments. Le 2 mars 1816, Brion battit la flotte espagnole; le 3, Bolivar débarquait à l'île Margarita. La révolution de nouveau triompha. Une assemblée générale proclama la République de Venezuela « une et indivisible », et choisit Bolivar pour chef suprême (7 mars 1816). Le Libérateur dut toutefois retourner à Haïti pour y chercher de nouvelles ressources; il ne put pénétrer que vers la fin de l'année dans la province de Barcelona. A ce moment, il essaya de grouper autour de lui tous les chefs insurgés : Piar, Arismendi, Marino, Bermudez, afin de donner à l'insurrection l'unité de direction. Il y réussit, à force d'énergie; mais, ayant voulu prématurément marcher sur Caracas, il tomba dans une embuscade et perdit tout son prestige. Les chefs reprirent leur liberté d'action, qu'ils n'avaient aliénée qu'avec peine et qui convenait mieux à leur caractère aventureux et à leur ambition. Bolivar jura de se venger. Il frappa d'abord un grand coup en s'emparant d'Angostura avec l'aide de Brion (mai 1817) et enleva toute la Guyane aux Espagnols. Puis il fit arrêter Piar et Marino, accusés d'avoir voulu élever un pouvoir en face du sien. Pier fut exécuté (16 octobre 1817). Cette attitude énergique entrava les progrès de l'anarchie. En février 1818, Bolivar créa une nouvelle armée de deux mille fantassins et de trois mille cavaliers, grace aux recrues expédiées de Londres par Luis Lopez Mendez. Mais il se fit battre à diverses reprises par Morillo. Il résolut alors d'entamer une lutte définitive avec les Espagnols, en les attaquant sur le territoire même de la Nouvelle-Grenade du Sud, où ils étaient fortement établis. Avant d'entreprendre cette expédition, il réunit un nouveau Congrès à Angostura (15 février 1819) et se fit confirmer la présidence de la République. Vers le mois de mai il se mit en marche avec toutes ses forces à travers les plaines du Bariñas. Il s'agissait de traverser les Andes pendant la saison des pluies. Après soixante-dix jours de souffrances, on parvint au faîte. Le 1er juillet Tunja était pris; le 7 août 3500 Espagnols étaient culbutés au pont de Boyaca; le 10, Bolivar entrait à Santa Fé (Bogota) et proclamait la fusion de la Nouvelle-Grenade et du Venezuela en un seul Etat, sous le nom de « République une et indivisible de Colombie ». De suite il retourna à Angostura et fit reconnaître par le Congrès l'union des deux Etats (17 décembre 1819). Survint la révolution de 1820 en Espagne. Cet événement consolida l'oeuvre encore chancelante de Bolivar. Dès lors on peut considérer les colonies comme définitivement séparées de la métropole. Les Espagnols subissent une longue suite d'échecs. Bolivar s'empare de Merida, de Trujillo, de Santa Marta (10 novembre 1820) et, après l'armistice de Trujillo (19 novembre 1820), remporte un brillant succès à Carabobo (24 juin 1821). Carthagène capitule (22 septembre 1824); Quito entre dans la confédération colombienne (22 mai 1822), Guayaquil l'imite (31 juilet). En novembre 1823, Paez prend Puerto Cabello; les Espagnols étaient expulsés du territoire de la Colombie. Bolivar, héros de cinéma et de BD. En même temps Bolivar, autorisé par le congrès national, intervenait au Pérou. Il entre à Lima (1er septembre 1823), obtient la dictature (25 novembre), bat à Junin (août 1824) les Espagnols qui avaient repris Lima, et les oblige à capituler, après les victoires du général Sucre à Ayacucho (8 décembre 1824) et à Tumurla (1er avril 1825). Le pays entier se déclare indépendant et prend le nom de Bolivie en l'honneur du Libérateur. Le 11 janvier 1826 la capitulation du Callao enlevait aux Espagnols leur dernière possession. Les colonies avaient conquis leur indépendance. Il fallait leur donner une organisation intérieure. Dès le 25 mai 1826, Bolivar présentait au congrès de Lima son fameux Code Bolivien. Il avait conçu un projet grandiose il voulait former sous le nom d'Etats-Unis du Sud une seule et immense république, composée de la Colombie, du Pérou, de la Bolivie, de La Plata (Argentine) et du Chili. Le 22 juin il réunit à Panama un grand congrès composé des représentants de tous ces Etats. Mais les plénipotentiaires, décimés par les fièvres, durent se séparer après avoir seulement signé un traité de confédération. Statues de Bolivar à Guayaquil (à gauche), à Lima et, au-dessous, à Caracas. Le projet de Bolivar fut connu. On l'accusa aussitôt de vouloir créer un empire à son profit, de vouloir jouer le rôle de Napoléon. On rappela les mesures de centralisation excessive qu'il avait prétendu imposer au congrès d'Angostura en 1819. La Colombie fut agitée par les partis. Les uns, avec le général Paez, réclamaient l'autonomie; les autres voulaient adopter le code Bolivien. Bolivar accourut, s'empara de la dictature, convoqua pour le 2 mars 1828, à Ocaña, une Assemblée nationale, avec mission d'examiner si « la constitution devait être réformée, et procéder dans ce cas à sa réforme». Ce congrès ne put aboutir; après quelques séances tumultueuses, la majeure partie des députés se dispensa de venir et l'assemblée dut se dissoudre. Bolivar qui avait empêché ses partisans de siéger, rédigea une adresse dans laquelle il inculpait indirectement l'assemblée et déclarait que tous les embarras de la République étaient causés par la faiblesse du pouvoir exécutif. Puis il visita les départements, réunit des assemblées populaires à Bogota, à Carthagène, à Caracas, où on le supplia de prendre l'autorité suprême. Sur ces entrefaites les Péruviens rejetaient le Code Bolivien (26 janvier 1827), et retiraient à Bolivar son titre de président à vie. Le Pérou et la Bolivie lui échappaient; la Colombie traversait une crise des plus graves. Le 20 juin 1828 Bolivar entrait à Bogota, ou il résida avec le titre de chef suprême de la Colombie. Le 25 septembre, les fédéralistes conjurés pénètrent dans son palais, égorgent ses sentinelles; Bolivar leur échappe avec peine. Le peuple se déclare pour le Libérateur, ce qui fait avorter le complot. Le vice-président Santander, chef de la conjuration, est condamné à mort, puis banni, avec soixante-dix de ses complices. L'anarchie redouble en 1829; plusieurs chefs militaires se disputent le pouvoir, entre autres le général Cordova et Paez. Le 25 novembre, à Caracas même, 486 notables prononcent la séparation du Venezuela du gouvernement de la Colombie. L'oeuvre de Bolivar s'émiette et lui-même perd, peu à peu, toute influence et toute autorité. Au milieu de ses déboires, il perd jusqu'à sa dignité, faisant distribuer, à milliers d'exemplaires, des médailles commémoratives de l'attentat du 25 septembre. En janvier 1830, un Congrès se réunit à Bogota, pour doter la Colombie d'une nouvelle constitution. Bolivar en une adresse solennelle, se plaignit amèrement des soupçons injurieux qui, de toutes parts, en Amérique et en Europe, s'étaient élevés contre lui. Il répudia hautement les desseins monarchiques qu'on lui prêtait, et offrit une fois de plus sa démission, qu'on refusa. Alors il voulut tenter un dernier effort et marcha contre Paez. Celui-ci s'était établi si solidement dans la province de Maracaïbo, que Bolivar n'osa l'attaquer et renouvela sa démission (27 avril). Le 4 mai, le congrès élevait à la présidence Joaquin Masquera. Bolivar se retira à Carthagène; il adressa le 10 décembre des adieux éloquents à ses concitoyens, et mourut quelques jours après, désespéré, en s'écriant, paraît-il : « De l'union! De l'union! »En 1832, les cendres de Bolivar ont été transportées en grande pompe à Caracas, où un arc de triomphe a été dressé à la mémoire du Libérateur. On lui a érigé une statue à Bogota en 1846. La ville de Lima lui a élevé une statue équestre en 1858. D'autres statues existent : à Cadix, à Washington, à Ottawa, à Paris, à Berlin, à La Havane, à Buenos Aires, etc. On a publié sa correspondance : Correspondencia general de Libertador Simon Bolivar (New York, 1866, 2 vol.). (R. S.). |
. |
|
| |||||||||||||||||||||||||||||||
|