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On appelle Conceptualisme
la doctrine philosophique qui soutient que
les idées générales n'ont aucune
réalité
en dehors de l'esprit; il s'oppose par
là au Réalisme;
mais qu'elles sont bien véritablement un concept,
une idée dans l'esprit; il s'oppose par là au Nominalisme,
Abélard
est le philosophe auquel on rapporte le premier système conceptualiste
cohérent ; le système de Kant est
aussi un véritable conceptualisme.
Avec son système, Abélard
cherchait à concilier, en les corrigeant, les prétentions
excessives et opposées du Réalisme et du Nominalisme. Les
Universaux
ne sont ni des choses, comme le prétendent les Réalistes,
ni des mots, comme le veulent les Nominalistes : ce sont des conceptions
de l'esprit, des notions collectives formées
par voie de comparaison et d'abstraction.
Cependant Abélard, en définitive, se rapproche du Nominalisme,
en déclarant qu'il n'existe que des individus,
et, dans les individus, rien que d'individuel, l'essence
ou la forme, aussi bien que la substance ou
la matière. Ex. : la socratité
n'est nulle part hors de Socrate; et le sujet,
la matière de la socratité n'est pas non plus l'humanité
en général, mais quelque chose de la nature humaine, la nature
propre de Socrate. Ainsi, la matière, dans l'individu, est tout
aussi individuelle que la forme, et c'est la similitude
entre la matière des différents individus, similitude perçue
par l'esprit, qui constitue l'universel.
En vain Abélard s'efforçait
de frapper également sur le Réalisme
et sur le Nominalisme. C'est surtout le Réalisme
qui se trouvait atteint par sa polémique. Et quand il prétendait
que les Universaux sont des conceptions de l'esprit et non des mots, parce
que s'ils n'étaient que des mots ils ne seraient rien, les Nominalistes
pouvaient répondre qu'apparemment quand la bouche prononce un mot,
l'esprit y attache un sens, lequel est une conception
de l'esprit. Conservez-lui son nom de conception ou donnez-lui le nom du
signe qui la représente dans le langage,
au fond, c'est la même chose, et la doctrine est la même. (B-E.).
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En
bibliothèque - Sur le sens,
la portée et les conséquences du Conceptualisme, voir L'Introduction
aux ouvrages inédits d'Abélard, par V. Cousin, et le
livre de Résumat, Abélard. 2 vol. in-8°, 1845. |
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