| Les trois premières décennies du XVIIIe siècle ne font que prolonger les langueurs du siècle précédent. Le premier signal du renouveau de la littérature allemande est finalement venu de la Suisse. Bodmer (1698-1783), poète médiocre comme Gottsched, mais critique supérieur, adresse de véhéments appels à la culture germanique, réveille le sentiment national, oppose la poésie du nord à la poésie dans les langues néo-latines, et, cherchant à la fois le naturel et la grandeur, enthousiasme les esprits pour les hardiesses de Milton, en même temps qu'il met en lumière les grâces naïves des Minnesinger. Dès lors il y a deux camps dans la littérature allemande : d'un coté, Gottsched et ses amis, sa femme d'abord, Louise Gottsched, qui traduit Pope et travaille pour le théâtre d'après les modèles de la France, puis le baron de Schonaich, Joachim Schwabe, etc.; de l'autre, Bodmer, son compagnon d'armes Breitinger, et toute la jeunesse qui déjà frémit à leurs accents. On voit bien se former des écoles intermédiaires : Liscov , Gellert, Lichtwer, Zachariae, Ebert, les trois frères Schlegel (Jean-Élie, Adolphe et Henri), bien d'autres encore, soit dans la poésie lyrique, soit au théâtre, essayent de se maintenir à distance égale des deux écoles; mais leurs efforts mêmes attestent le progrès toujours croissant de l'esprit nouveau. La plupart de ces hommes avaient été, à leurs débuts, les partisans dévoués de Gottsched, et ce sont eux qui vont fonder un journal littéraire indépendant, le Recueil de Brême, où paraîtront, en 1748, les trois premiers chants de la Messiade de Klopstock. Avec la Messiade, Bodmer a trouvé son poète; il le proclame, il lui prodigue les encouragements et les hommages, il le fait venir en Suisse auprès de lui, et Klopstock, à peine âgé de 24 ans, est traité par le réformateur comme le pontife de la poésie. C'est un sacerdoce, en effet, que la carrière de Klopstock (1724-1803). Grave, austère, identifié, pour ainsi dire, avec son oeuvre, il élève toutes les imaginations vers les hauteurs que sa pensée habite; il ranime le goût des grandes choses. Les inspirations de la vieille Germanie se réveillent à sa voix. II glorifie Hermann et la Germanie des premiers âges, comme il glorifie le Messie et les premiers jours du christianisme. Le christianisme primitif et la primitive Allemagne, voilà donc les objets de son culte. On peut dire de toute la vie de Klopstock ce que Mme de Staël a dit seulement de la Messiade : "Lorsqu'on commence ce poème, on croit entrer dans une grande église au milieu de laquelle un orgue se fait entendre." Quelle différence entre Klopstock et Lessing! Rien n'atteste mieux la fécondité de la littérature allemande du XVIIIe siècle. Voilà deux écrivains absolument opposés, et tous les deux cependant sont les chefs d'un même mouvement de régénération pour leur pays. Ils se complètent l'un l'autre. Tandis que Klopstock élève les coeurs, purifie les imaginations, Lessing (1728-1781) aiguise et fortifia les intelligences; rien de plus précis que sa pensée, rien de plus net que son style. Poète, philosophe, érudit, journaliste, novateur plein d'idées, écrivain de premier ordre dans la polémique, il renouvelle tout ce qu'il touche, l'érudition et la critique, la théologie et le théâtre. Nul homme n'a plus vivement agi sur l'Allemagne. C'est le grand promoteur de l'esprit public au XVIIIe siècle. Soit qu'il encourage ses lecteurs, soit qu'il les provoque à la lutte, il suscite les talents qui s'ignorent eux-mêmes. Herder, dans sa première période, ne prendra la plume que pour refaire ou compléter les manifestes philosophiques de Lessing; Goethe deviendra poète en lisant le Laocoon. D'autres écrivains brillaient aussi vers cette époque : Gleim, qui glorifia les victoires de Frédéric II pendant la guerre de Sept Ans; Christian-Ewald Kleist, poète et soldat, qui chanta la nature printanière et mourut héroïquement à la journée de Kunersdorf (1759); Aamler, Sulzer, Willamow, Michaelis, Nicolai, etc. Une histoire détaillée de la littérature allemande doit tenir compte de tous ces noms; dans un tableau général, où les personnages secondaires doivent s'effacer, on peut se borner à mettre en relief les grandes figures de Klopstock et de Lessing. Ce dernier surtout résume d'une façon admirable toute l'activité de l'esprit allemand vers le milieu du XVIIIe siècle. Cette ardeur d'esprit qui se manifesta en Prusse sous l'influence de la guerre de Sept Ans, cette littérature virile qui, même en des sujets d'érudition, déploya tout à coup une verve si belliqueuse, c'est Lessing qui la conduit au combat, c'est lui qui la représente dans l'histoire. Miss Sara Sampson, Minna de Barnheim, le Laocoon, les Lettres sur la nouvelle littérature, la Dramaturgie de Hambourg, sans parler de ces milliers de feuilles légères, modèles de netteté, de science et de hardiesse, toutes ces oeuvres du futur auteur de Nathan le Sage aiguillonnaient les esprits et promettaient un grand siècle littéraire. Après 1767. La littérature allemande n'avait pas réalisé toutes les promesses de Klopstock et de Lessing. Une interruption s'était faite dans le mouvement des esprits. Tandis que Klopstock, établi à Copenhague, élevait, avec une majestueuse lenteur, son monument de la Messiade, tandis que Lessing, enfermé dans la bibliothèque de Wolfenbüttel, y fouillait avec ardeur des manuscrits oubliés, Wieland (1733-1813) s'emparait comme par surprise du sceptre de la littérature courante. Associé d'abord à la rénovation intellectuelle de son temps, il avait fini par en répudier les principes; avec lui reparaissaient la poésie de cour et l'imitation servile de la France. Légèreté factice, élégance menteuse, l'imagination germanique façonnée au ton de la monarchie de Louis XV, une espèce de voltairianisme poétique que ne rachète pas, comme chez le défenseur de Calas, le sentiment du droit et de l'humanité, voilà l'oeuvre de Wieland. C'est alors que Herder se lève (1744-1803). Disciple du profond Hamann, il détruit le prestige des siècles raffinés, et réveille le goût des littératures primitives. Personne n'a eu comme lui l'instinct des premiers âges du monde, l'amour et l'intelligence des premières inspirations de chaque peuple. Une magnifique source de poésie s'épanche dans tous les livres du grand critique. C'est un promoteur comme Lessing; moins net et moins précis que son puissant émule, il agit davantage sur l'imagination. Déjà éveillé à un monde nouveau par la lecture du Laocoon, Goethe (1749-1832) s'ignorait encore, lorsque Herder, l'ayant rencontré à Strasbourg, lui révéla tout son génie. Les premières oeuvres de Goethe, Goetz de Berlichingen (1772), les Souffrances du jeune Werther (1773), etc. expriment admirablement l'ardeur fougueuse que les prédications de Herder avaient éveillée chez le jeune poète. Ces années d'enthousiasme la littérature allemande se fraye impétueusement des voies nouvelles sont appelées par les historiens littéraires la période de l'assaut et de l'irruption (sturm und drang periode). Ce nom même, ce titre bizarre, déclamatoire, parfaitement dans le ton du moment, est emprunté à un drame dont l'auteur, Maximilien Klinger, émule de Goethe à ses débuts et prédécesseur de Schiller, représente une façon presque farouche l'esprit désordonné de cette époque. Cette exaltation se propage d'un bout de l'Allemagne à l'autre; elle éclate surtout à Göttingen, chez ces jeunes rêveurs Hoelty, Voss Berger, Hahn, Miller, Stolberg, qui se réunissent au fond d'une forêt pour prêter serment à la poésie, révèrent Klopstock à l'égal d'un pontife suprême, brûlent les oeuvres de Wieland, se jettent enfin dans le domaine de l'art comme des factieux dans une conjuration. Les premiers drames de Schiller, les Brigands (1782), la Conjuration de Fiesque (1784), Intrigue et Amour (1784), sont l'explosion dernière et le couronnement de cette tumultueuse période. - A ma soeur Sophie-Madeleine, enlevée par une mort prématurée « J'ai versé sur toi des larmes de sang; oui, et mon coeur pleurait toujours lorsque mes yeux se glaçaient, semblables à la haine que jamais ne rafraîchit le souffle de la consolation. Je ne m'étais pas longtemps bercé dans l'espérance que tu pouvais guérir... Ah ! Dieu, elle succombe; mon âme succombe avec elle! Oh! souris-moi, héritière des cieux! Souris une consolation à ton frère, de la plénitude de ton repos; une consolation mêlée de tristesse, car, voyageur que je suis encore, et faible, et dans le crépuscule de notre vallée, je ne pourrais supporter tes joies. Toi, tu marches dans les hauts sentiers, à travers la pourpre des fêtes célestes. Tu approches en tressaillant du divin Soleil dont tu vois les rayons.-» (Léopold de Stolberg, Poésies). | Une inspiration plus calme succède à ces poétiques fureurs. Goethe a vu le pays où les citronniers fleurissent (1788), et il est devenu amoureux de l'antique beauté. Toutes les oeuvres qu'il rapporte d'Italie sont aussi pures, aussi majestueuses de forme et de pensée que les productions de sa jeunesse étaient ardentes. Qui sait même si cette recherche d'une sérénité idéale n'a pas éteint chez lui le feu de l'imagination? Qui sait si le statuaire n'aura pas nui au poète? Egmont a gardé quelque chose de la jeune inspiration de l'auteur de Goetz; mais quelle absence de vie dans ces compositions si savantes, si profondes, Iphigénie (1787) et Torquato Tasso (1790)! La carrière de Goethe se prolonge bien au-delà des limites du XVIIIe siècle; elle s'étend jusqu'en 1832, sur un espace de plus de soixante ans. Dans cet intervalle, où il ne cessa de produire, il aborda tous les genres littéraires, le poème, le drame, le roman, la poésie lyrique; il participa même au mouvement des sciences physiques et naturelles, et il fit des découvertes dans l'anatomie comparée et dans la physiologie végétale ; enfin, il suivit avec un intérêt constant tout ce qui se publia chez les nations étrangères. Sainte-Beuve l'appelle le plus grand des critiques modernes, et, si l'impartialité est la première qualité du critique, il mérite en effet ce titre. Il eut même, dans sa vieillesse, l'idée de ce qu'il appelle Weltliteratur, c.-à-d. d'une littérature universelle, à laquelle contribueraient, sans distinction de langue, les esprits éminents de toutes les nations ; et si cette idée a quelque chose d'impraticable en elle-même, on peut dire qu'il la réalisa pour son propre compte, en tant qu'il est possible à un seul homme d'exprimer la pensée de tout un siècle. Ce fut surtout sous l'influence de Goethe que se compléta le groupe littéraire qu'on a désigné sous le nom d'école de Weimar. Ce ne fut pas, à vrai dire, une école, mais une réunion d'hommes distingués, qu'une sympathie naturelle, attirait l'un vers l'autre. Quelles furent les causes de la position prépondérante que prit, pendant un demi-siècle, dans la civilisation allemande, le chef-lieu du petit duché de Saxe-Weimar? Ce fut, avant tout, la constitution politique de l'Allemagne, mais il est juste d'ajouter que ce fut aussi l'action personnelle de la duchesse douairière Amélie et de son fils Charles-Auguste. Vienne, le siège de l'Empire, en repoussant le protestantisme, s'était mise en dehors du mouvement des esprits; Berlin annonçait à peine sa grandeur future, et, parmi les villes universitaires du Nord, aucune n'était la capitale d'un grand État. Weimar prit donc, sans peine, la suprématie littéraire que Leipzig avait exercée une trentaine d'années auparavant. La duchesse Amélie y appela d'abord Wieland, en 1772, pour faire l'éducation de ses deux fils. Charles-Auguste, trois ans après, y amena Goethe, au retour d'un voyage à Darmstadt, et l'éleva successivement jusqu'au rang de premier ministre. Goethe enfin, peu de temps après son arrivée, fit nommer Merder prédicateur de la cour. « Si les plans de Goethe se réalisent, disait Wieland, Weimar sera bientôt le mont Ararat où tous les hommes de mérite pourront prendre pied, tandis que le déluge envahira le reste de l'Allemagne. » En effet, d'autres écrivains, sans se fixer à Weimar, y séjournèrent quelque temps, comme pour prendre l'air de la ville. Même les frères Schlegel, avant de se poser eux-mêmes en chefs d'école, y firent leurs débuts. Parmi les écrivains qu'attira successivement la petite cité hospitalière, un dernier nom reste à nommer, le plus jeune, mais non le moins important : Schiller. Sa carrière littéraire ressemble à celle de Goethe; le développement de leur génie offre des phases analogues. Mais ce que l'un accomplit presque sans effort et comme par un heureux effet de sa nature, l'autre ne le dut qu'à un travail opiniâtre et sembla l'arracher à la fortune contraire. La vie de Schiller fut une lutte perpétuelle contre la destinée et contre lui-même. Il s'éleva dans les circonstances les moins favorables à l'éducation d'un poète; mais ses pires ennemis furent le mauvais goût, l'enflure malsaine, la vulgarité même, qui déparent ses premiers écrits. Les poésies de l'Anthologie, les drames en prose intitulés les Brigands, la Conjuration de Fiesque, l'Intrigue et l'Amour, comptent parmi les productions les plus désordonnées de la période Sturm und Drang; on n'y trouve même pas ce vif sentiment de la nature et cette énergique brièveté de style qui frappent dans les oeuvres de la jeunesse de Goethe. Don Carlos dénote encore une grande inexpérience dans le maniement de la forme dramatique, mais déjà la langue du poète s'élève et s'affermit. La lecture des anciens, les études historiques et philosophiques lui donnèrent enfin cette maturité, cette sûreté de coup d'oeil, cette étendue d'observation, cette pleine possession de lui-même que Goethe avait trouvées dans les sciences naturelles. Une étroite amitié unit les deux poètes, qu'un intervalle de dix ans séparait, mais qu'inspiraient un même amour de l'art et un même goût pour l'Antiquité. La double statue qui leur a été érigée à Weimar les montre debout, l'un à côté de l'autre, Goethe tenant la couronne et la présentant à son ami, Schiller la repoussant doucement vers celui qu'il a toujours eu un secret penchant à considérer comme son maître. Ils publièrent ensemble, en 1796, un recueil d'épigrammes, les Xénies, vrai manifeste de l'école qui s'était constituée sous leurs auspices; ils écrivirent, pendant les années suivantes, une série de ballades, dont les sujets étaient ordinairement arrêtés entre eux et discutés en commun ; enfin, ils s'occupèrent de la création d'un répertoire pour le théâtre de Weimar. Les huit dernières années de la vie de Schiller, de 1798 à 1805, où furent représentés la trilogie de Wallenstein, Marie Stuart, la Pucelle d'Orléans, la Fiancée de Messine, Guillaume Tell, marquent, dans les annales de la scène allemande, un moment unique et incomparable. Schiller acheva l'oeuvre de Lessing, en constituant le drame sérieux; mais, d'un autre côté, il s'écarta de la pensée de son prédécesseur en ramenant sur le théâtre la fatalité antique et en attribuant aux événements des causes surnaturelles. Schiller et Goethe avaient donné les modèles de la tragédie et du drame, de la narration épique et du chant lyrique; Schiller avait été un historien éloquent, Goethe avait été romancier à ses heures. Deux domaines restaient à explorer : celui de la comédie, où aucune oeuvre de premier ordre ne s'était produite depuis Lessing, et celui du roman, à cause de la variété même du genre. Iffland et Kotzebue ne relevèrent pas la comédie; le premier manquait de gaieté; le second, l'un des auteurs les plus fertiles de l'Allemagne, manquait surtout de style. Le roman se renouvela par l'imitation des humoristes anglais; Lichtenberg et Hippel s'inspirèrent parfois heureusement de Swift et de Sterne. Jean-Paul-Frédéric Richter, communément appelé Jean-Paul, fut le créateur d'un genre humoristique particulier, approprié à la culture de l'Allemagne, d'un genre où il entre plus de poésie que de satire, plus de rêve que d'observation, où des pensées ingénieuses et d'éclatantes images se détachent par intervalles sur un fond monotone et confus. Il fut un temps où l'on disait Goethe et Jean-Paul, croyant associer les deux plus grands noms de la littérature allemande. Aujourd'hui l'on ne considère plus Jean-Paul que comme un précurseur du romantisme; on lui reconnaît une imagination d'une prodigieuse fécondité, mais gaspillant ses trésors, parce qu'elle n'était pas guidée et soutenue par la réflexion et le goût. Il a défini lui-même sa manière d'écrire dans un passage du Titan : « Je fais un petit volume après l'autre, et j'y mets tout ce que je veux, tout excepté des événements. Je voltige de côté et d'autre, avec ma trompe d'abeille, que j'enfonce dans les nectaires de toutes les fleurs, et je rapporte dans mes cellules le miel que j'ai recueilli. Le livre que je compose ainsi est le résultat de mes excursions aventureuses; je pourrais l'appeler ma lune de miel; mais je mange moi-même tout le miel que je fais, et je ressemble moins à l'abeille travailleuse qu'au propriétaire qui taille les ruches. » Ce qui restera de Jean-Paul, ce ne sont pas ses grands romans, dont nous ne saisissons plus la portée philosophique ou même politique; ce sont quelques délicieux tableaux de genre, comme le Maître d'école Marie Wutz, ou le Professeur de cinquième Fixlein, qu'il peignait ingénument d'après ses expériences et ses souvenirs. Jean-Paul termina sa vie à Bayreuth, au milieu des sympathies que lui attirait son caractère autant que ses écrits. Tandis que le centre littéraire restait à Weimar, des écrivains plus on moins originaux propageaient l'action des maîtres dans les provinces éloignées. Collin faisait représenter à Vienne une série de tragédies, dont les sujets étaient empruntés pour la plupart à l'histoire ancienne, et dont la plus remarquable était le Régulus. Hoelderlin, originaire du Wurtemberg, pénétré d'une vive admiration pour Schiller, vint passer quelques années auprès de lui à Iéna; mais une incurable mélancolie usa son talent. Son idéal était la civilisation grecque, qu'il célébra dans son roman d'Hypérion et dans quelques pièces lyriques d'une forme délicate. Ernest Wagner, secrétaire particulier du duc de Meiningen, écrivit les Opinions de Wilibald, d'après les Années d'apprentissage de Willhelm Meister, et se fit même gloire de ce qu'il devait à Goethe. « Lorsqu'un virtuose se fait entendre, dit-il dans sa préface, il se trouve aussitôt des gens qui apprennent le même instrument que lui. » Seume a plus de personnalité; fils d'un pauvre paysan de la Saxe, d'abord étudiant en théologie, puis soldat dans les armées anglaises et prussiennes, enfin officier au service de la Russie, il raconta, dans ses ouvrages en prose, les aventures de sa vie; ses vers plaisent, malgré la rudesse du style, par la franchise et la noblesse des sentiments. Forster, dans ses voyages le long du Rhin et dans son grand voyage autour du monde, sut allier le charme pittoresque à l'intérêt scientifique. Jean de Muller enseigna, dans son Histoire de la Confédération suisse, la manière de coordonner de vastes recherches et de les soumettre à un plan méthodique. Quelques poètes se servirent encore, en pleine période classique, des dialectes provinciaux. Grübel, de Nuremberg, auteur de chansons et de ballades, apparut comme un dernier successeur de Hans Sachs. Ustéri, de Zurich, rivalisa, dans son poème idyllique du Vicaire, avec la Louise de Voss. Enfin Hébel, qui reçut à ses débuts les éloges de Goethe, se fit lire, malgré son langage particulier, dans toute l'Allemagne. Les Poésies allémaniques sont plus que la peinture fidèle des moeurs d'une région; l'heureux choix des sujets, la naïveté pittoresque du style, en font une oeuvre de premier ordre, qui ne perd presque rien à être traduite en haut-allemand littéraire. (SRT / GE.). | |