|
. |
|
La Russie au XXe siècle (1900 - 1991) |
Le
temps des révolutions.
C'est en 1900 que s'ouvrit cette longue période de troubles qui qui aboutira à la Révolution d'octobre 1917. Des milliers d'étudiants et d'ouvriers furent tués, emprisonnés, déportés. Malgré les exécutions, les déportations en Sibérie, les bannissements forcés et volontaires, les idées marxistes avec Lénine et le parti des Sociaux-démocrates, les doctrines anarchistes des disciples de Bakounine et du parti Socialiste Révolutionnaire, héritier des nihilistes du siècle précédent, gagnèrent du terrain et se manifester par des attentats retentissants. Au commencement de 1902, on a attenté à la vie du général Trépov, chef de la police à Moscou. Sipiaguine, ministre de l'intérieur, est assassiné par un étudiant de Kiev; le prince Sviatopolk Mirsky le remplace, puis Bouliguine, à qui succède Plehve, tué par la bombe de l'étudiant Sazonof, de l'université de Moscou (29 juillet 1904). Puis encore le grand-duc Serge, gouverneur général de Moscou, tué de même par une bombe (17 février 1905), au moment où il sortait du Kremlin en voiture. Il était l'oncle paternel du tsar. L'assassin, Kalaïev, fut exécuté le 17 mai. Le 23 du même mois, c'était le gouverneur de Bakou, prince Nakachidzé, qui succombait dans des conditions toutes pareilles. Dans le même temps, les milieux intellectuels, influencés par les idées occidentales, réclamaient des institutions représentatives; les groupements ouvriers devenus plus importants depuis le développement de la grande industrie en Pologne, Saint-Pétersbourg, à Moscou, revendiquaient sans cesse une amélioration de leur condition; les paysans, de plus en plus misérables du fait de l'accroissement de la population, commençaient de s'agiter. Le 22 janvier 1901, une foule composée d'ouvriers, à la tête de laquelle se tenait le pope Gapone, se présenta devant le Palais d'hiver, disant qu'elle désirait remettre directement une pétition au tsar. Elle fut dispersée par les charges des cosaques et les coups de fusil de l'infanterie. On compta plus de 500 tués ou blessas. Gapone échappa. On découvrit, une année après, qu'il était de connivence avec les chefs de la police, dont il avait reçu des sommes importantes, et on le trouva pendu (mai 1906), dans une maison des environs de Saint-Pétersbourg. En Pologne, à Varsovie, à Lodz, les émeutiers mettent le feu aux entrepôts d'alcool du gouvernement; tous les travaux sont suspendus. Dans le Caucase, à Bakou, Ies puits de pétrole sont incendiés, la ville saccagée, les pertes évaluées à 12 millions de roubles. En 1902, un mouvement ayant pour but le partage des terres entre paysans et l'attribution des usines aux ouvriers s'étendit à douze provinces. Les
premières réformes constitutionnelles.
« mais le principe fondamental de la propriété en commun (Ie mir) doit demeurer inviolable, tout en facilitant au paysan le moyen de se séparer de la communauté à laquelle il appartient ».Le 25 mars, un ukase abolissait, comme première mesure dans ce dernier sens, le système qui rendait les communautés paysannes collectivement responsables des contributions imposées à leurs membres. Le Messager officiel du 3 mars publie un manifeste réactionnaire qui exhorte le peuple à se serrer autour du trône pour le défendre contre les ennemis de l'intérieur et qui est aussitôt corrige par un rescrit impérial décidant que « les personnes les plus dignes, élues par le peuple et investies de sa confiance, seront appelées à participer à l'élaboration préparatoire des projets législatifs ». C'est un premier pas dans la voie qui doit conduire à la Douma nationale. Bouliguine avait été chargé d'élaborer un projet de constitution de cette assemblée : le tsar fixe la durée des sessions, la proroge ou la dissout; séances non publiques, où les journalistes pourront cependant être admis; les projets approuvés par la Douma et le Conseil d'empire sont soumis au tsar; une proposition d'initiative parlementaire doit porter 30 signatures et n'est prise en considération que sur l'avis favorable du ministre compétent; si cependant les deux tiers de l'assemblée l'appuient, la décision définitive appartiendra au tsar; toute demande d'interpellation doit porter 30 signatures, le ministre y répondra dans le délai d'un mois; les deputés reçoivent 10 roubles par jour, outre leurs frais de voyages, etc. La
guerre russo-japonaise.
Après la rupture des négociations diplomatiques (5 février), l'escadre japonaise, commandée par l'amiral Togo, attaqua traîtreusement, dans la nuit du 8 au 9 février, l'escadre russe mouillée dans la rade extérieure de Port-Arthur, et lui torpilla deux cuirassés et un croiseur. Ensuite, tant sur mer que sur terre, les Japonais remportèrent des victoires brillantes, mais coûteuses. En août 1904, les flottes russes du Pacifique étaient anéanties; en mai 1905, l'amiral Togo détruisait à Tsushima l'escadre russe venue de la Baltique. Port-Arthur capitula après un long siège au début de 1905. L'armée russe fut battue à Leao-yang (septembre 1904), puis à Moukden (mars 1905). Par le traité de Portsmouth (États-Unis), le Japon obtint la rétrocession de la péninsule de Leao-tong, l'abandon par les Russes de la Mandchourie, la cession de la partie sud de Sakhaline et enfin une pleine liberté d'action en Corée. La guerre, qui avait duré dix-neuf mois, avait coûté aux Russes 240.000 tués, morts de maladies, et prisonniers, et aux Japonais 190.000 hommes. La
révolution de 1905.
La feuille officielle publie (18 août 1905) : 1° la loi instituant une Assemblée représentative qui participerait à l'exercice du pouvoir législatif avec le Conseil de l'Empire, la sanction appartenant à l'empereur; cette Assemblée reçut le nom de Douma, qui désignait au Moyen âge le conseil du souverain. la Douma d'empire;Le manifeste du tsar est lu dans toutes les églises de l'empire. Mais en même temps, de nouvelles arrestations sont opérées de divers côtés. Au commencement d'octobre 1905,
une grève générale se déclarait à la fois à Saint-Pétersbourg
et à Moscou, où les désordres prirent le
caractère de la plus haute gravité. Le gouverneur général, amiral Doubassof,
fut blessé plus tard par une bombe. Dans les provinces baltiques, l'insurrection
est permanente pendant la seconde moitié de 1905 et le sera encore pendant
la première de 1906 ; les propriétés,
presque toutes aux mains de la noblesse d'origine allemande, sont saccagées
et incendiées.
Le 8 novembre 1905, le comte Witte constituait le premier ministère russe, homogène en ce sens qu'il ne contenait qu'un seul personnage de premier plan, le comte Witte lui-mème. Le comte Lamsdorf restait aux affaires étrangères. Mais ce cabinet ne dura que six mois. Il était remplacé le 1er mai par un autre que présida Goremykine, avec Stolypine à l'intérieur à la place de Dournovo. Kokovtsov aux finances, Stchevglovitov à la justice, Kauffmann à l'instruction publique, Golitsyne aux voies et communications, Shirinsky, procureur général du saintsynode. Isvolsky succédait au ceinte Lamsdorf. Le 5 mars 1906 un manifeste précisa les pouvoirs de Douma en conformité avec celui du 30 octobre; mais, le 6 mai le tsar promulgua les « lois fondamentales », qui restreignaient sensiblement les droits de l'Assemblée. D'après elles, l' empereur continue de posséder l'autorité suprême et autocratique; il a l'initiative légale et l'approbation des lois, bien qu'il légifère "en union avec le Conseil de l'empire et la Douma". Il décide de la paix ou de la guerre, dispose seul de la force armée. Il choisit les ministres et les hauts dignitaires, ce qui implique le droit de les congédier sans intervention de la Douma. La Douma, élue en mars-avril 1906, et le Conseil d'empire sont finalement ouverts le 10 mai suivant par le tsar, en grande cérémonie. La
valse des Douma.
A la suite de l'adoption par l'Assemblée d'une motion d'appel au pays (21 juillet 1906), le ministère Stolypine, qui avait succédé au cabinet Goremykine, dissolvait la Douma, tandis que les cadets, par le manifeste de Viborg, exhortaient le pays à refuser l'impôt et le service militaire, et que les révoltes, les séditions, les attentats, se multipliaient. Des élections de mars 1907 sortit une Assemblée où figuraient seulement 85 cadets, un nombre à peine supérieur de monarchistes, 46 modérés et octobristes, mais en même temps une forte extrême-gauche socialiste (77) et travailliste (98). A défaut d'une majorité gouvernementale,
la seconde Douma, où les cadets l'emportaient sur les octobristes, fut
également dissoute après quelques mois de débats impuissants. Mais la
troisième, élue après modification de la loi électorale et réduction
du nombre des députés urbains, fut de composition à peu près inverse
de celle des deux premières : les partis de droite l'emportèrent démesurément
sur
L'Assemblée témoigna de son respect pour la personne du tsar et de son désir de collaborer avec le gouvernement. Si, lors de la discussion de l'adresse, elle écarta l'amendement des monarchistes qui voulaient y introduire le mot « autocratie », la formule suivante fut votée Par une majorité où entraient les octobristes, les cadets, la droite modérée : « Nous emploierons toutes nos forces, toute notre expérience, toutes nos connaissances, pour fortifier le nouvel ordre de choses régénéré par la Volonté de Sa Majesté dans le manifeste du 30 octobre; pour pacifier la patrie, consolider l'ordre légal, développer l'éducation du peuple, augmenter le bien-être général et fortifier la puissance de la Russie indivisible. »Cette troisième Douma, qui siégea de 1907 à 1912 s'efforça de remédier à la crise agraire; elle travailla à la réorganisation de l'armée et à la reconstitution de la marine que la guerre japonaise avait réduite à néant; elle délibéra sur nombre de questions administratives et aussi, mais moins utilement, sur le statut des peuples allogènes. La situation politique se trouvant rétablie au profit du tsar, la condition des paysans ayant été améliorée, les manifestations révolutionnaires ou simplement libérales étant réprimées impitoyablement, la Russie paraissait tranquille. Mais l'assassinat de Stolypine à Kiev, en mars 1911, rendit le régime à sa fragilité. La quatrième Douma formée en 1912, fut, comme la précédente, animée de sentiments loyalistes, et n'apporta , comme elle que des améliorations de façade. A la cour, un charlatan, Raspoutine, avait pris de l'ascendant sur la famille royale, qui se trouvait ainsi chaque jour un peu plus déconsidérée. A la veille des événements de 1914, sous le relatif calme d'une population terrorisée, on sentait déjà gronder l'orage qui allait jeter bas le tsarisme. La
Première Guerre mondiale et la Révolution d'octobre.
Le 11 avril 1917
(29 mars), les soviets se réunissent pour constater leurs divergences
quant à la marche à suivre : les mencheviks (= minoritaires) et
les bolcheviks (= majoritaires). Les premiers sont dirigés par
Alexandre Kerenski (le seul socialiste, membre du gouvernement Lvov) et
parmi lesquels figure Léon Trotski (Lev Davidovitch Bronstein), revenu
d'exil après une récente amnistie. Ils sont partisans d'une collaboration,
au moins provisoire, avec le régime qui commence à se mettre en place;
les seconds, à la tête desquels se trouve Lénine (Vladimir IIitch Oulianov,
de son vrai nom), lui aussi de retour d'exil, en appellent à une prise
du pouvoir immédiate. Dans un premier temps les modérés obtiennent gain
de cause. Kerenski prendra même la tête d'un deuxième gouvernement de
coalition, le 18 mai (5 mai), puis d'un troisième gouvernement, le 6 août
(24 juillet), après que la répression d'un soulèvement bolchevik opposé
à la poursuite de la guerre ait conduit Lénine à se réfugier en Finlande.
Le croiseur Aurore dans le port de Saint-Pétersbourg. Un coup de canon tiré à blanc depuis ce navire a donné le signal du déclenchement de la révolution de 1917. Source : The World Factbook. Bien que désormais poussés à la clandestinité, les bolcheviks se renforcèrent. Lénine revint à Pétrograd, le 20 octobre (7 octobre). Il organisa, la nuit du 5 au 6 novembre 1917 (23-24 octobre, selon le calendrier julien, d'où le nom de «-Révolution d'octobre-» donné à ces événements), un coup d'Etat inauguré par les coups de canon du croiseur Aurore devant Pétrograd. Kerenski prit la fuite. Alors que la révolution de Février avait correspondu à un grand soulèment populaire, ce coup de force fut l'oeuvre des seuls bolcheviks. Le 7 novembre, ils mirent officiellement fin au gouvernement provisoire. Lénine, auquel s'étaient ralliés Trotski et Staline (Joseph Vissarionovitch Djougachvili), présida un Conseil des commissaires du peuple, désormais seul détenteur du pouvoir. Le lendemain, le Palais d'hiver fut pris d'assaut, le 10 novembre (28 octobre) les soviets, dans lesquels les idées de démocratie et de liberté avaient germé, furent placés sous le contrôle des bolcheviks. La
guerre civile.
Cette guerre aura été à la fois une guerre civile et une occasion de réduire les oppositions au sein même des « Rouges ». Une police politique, la Tchéka, avait déjà été créée à cet effet dès le 7 décembre 1917. Puis, quand les marins de Cronstadt (Kronstadt), une base navale près de Pétrograd, qui avaient été parmi les premiers à former des soviets, et qui avaient été utilisés comme troupes de choc contre les «-Blancs », se comprirent trahis par les bolcheviks qui imposaient leur dictature, ils se révoltèrent, le 17 mars 1921. Trotski et le général Toukhatchevski noieront dans le sang ce dernier sursaut des aspirations démocratiques, qui pourtant avaient été à l'origine de la Révolution. Cette guerre aura aussi été une guerre de conquête : une guerre fut déclenchée contre la Pologne en 1920 et 1921 pour une question de tracé de frontière; dans le même temps l'Ukraine, la Biélorussie et la Transcaucasie (Azerbaïdjan, Géorgie et Arménie), furent reconquises. On en fit des républiques soviétiques au même titre que la Russie, qui avait été rebaptisée en juillet 1918 (à l'occasion de la proclamation de la nouvelle constitution) : République socialiste fédérative des soviets de Russie (RSFSR). En décembre 1922, le 10e Congrès soviétique panrusse réunit toutes ces républiques (plus tard transformées en républiques fédérées) au sein d'une nouvelle structure : l'Union des républiques socialistes soviétiques (URSS ou Union soviétique). L'URSS.
L'ère
Stalinienne.
Kroutchchev,
Brejnev, Gorbatchev.
Sous la conduite de Brejnev, l'URSS resta un pays totalitaire soumis à un étroit contrôle policier, mais ne connut plus les excès de l'ère Stalinienne. Pendant quelques années, la politique de Détente initiée par Krouchtchev fut poursuivies; ce qui n'empêcha pas des crises comme celle suscité par l'écrasement du «-Printemps de Prague-», en 1968 . La Guerre froide ne reprit réellement qu'avec l'installation de nouveaux missiles en Europe de l'Est dans la deuxième moitié des années 1970 et de l'intervention soviétique en Afghanistan en décembre 1979. Quand Brejnev mourut, en 1982, les tensions avec le camp occidental étaient très vives, et, à l'intérieur, le système était grippé, miné par la corruption des administrations et la démoralisation de la population. Les successeurs immédiats de Brejnev, Youri Andropov (1982-1984), puis Constantin Tchernenko (1984-1985) firent bien le constat d'une nécessité de changement, mais, très âgés et malades, n'eurent pas le temps de mettre en oeuvre de véritables réformes. Mikhaïl Gorbatchev, qui accéda au pouvoir en 1985, allait, lui, pouvoir s'atteler à la tâche. A la tête du Parti communiste, Gorbatchev tenta de sauver le système soviétique par de profondes réformes économiques (perestroïka) et une ouverture démocratique (glasnost). Mais cette politique échoua. Elle aboutit à la dislocation de l'Empire soviétique, la plupart des républiques qui le composaient prirent ou revendiquèrent leur indépendance. La Russie, qui était la principale de ces républiques, dirigée par Boris Eltsine, ne fit pas exception. Elle se déclara indépendante de l'URSS. Après un putsch manqué contre Gorbatchev, mené par des éléments conservateurs du régime en août 1991, Eltsine s'imposa comme l'homme fort du pays. |
. |
|
|
||||||||
|