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Les Géants
sont des personnifications mythiques de la force
brutale. On les trouve mêlés à toutes les inventions
par lesquelles l'imagination cherche à se rendre compte du jeu des
éléments dans le monde, de leur lutte accidentelle contre
la loi d'ordre et d'harmonie, et aussi des civilisations barbares qui ont
préludé par des chocs violents à l'organisation des
sociétés policées.
On rencontre des géants dans le folklore et les littératures populaires : Gayant, le géant de Douai; le Géant à barbe d'or de Picardie; Lydéric le grand forestier des Flandres; Antigonus, le géant d'Anvers; le Pâtho, en Suisse romande; Saint Christophe; Hok-Braz et Rannou, en Bretagne; le Tailleur géant de Salisbury; Dame Hutt, au Tyrol; les géants de Guildhall (Gogmagog et Corineus Gog); Einheer; le Géant de Crussolio; celui de Dessoubre; celui du vallon de Servance, dans les Vosges; celui de Châtillon-le Duc, dans le Doubs; celuide la Pierre-qui-Vire, dans le Jura; et bien sûr aussi les Ogres et Gargantua. Gargantua, géant issu, semble-t-il, de la mythologie celtique, est entré dans la littérature écrite avec Rabelais. L'Arioste, de son côté a conservé le souvenir d'un autre géant présent dans les légendes du Moyen âge, Ferragut, que Roland assomma d'un coup de sa Durandal, et Pulci en a chanté un autre, Morgante. Plus tard Swift, entraînera son Gulliver dans un pays de géants, le royaume de Brobdingnag... La Bible
fait mention de plusieurs peuples de géants. Ils habitaient
la terre promise avant l'arrivée de Moïse
: Og, roi de Basan, l'un d'eux, n'avait pas moins
de neuf coudées. On connaît également l'épisode
de David contre Goliath, un géant, que
l'on voudra faire d'autant plus grand que la victoire - fondatrice de sa
puissance politique - de David doit être éclatante.
Un des Géants du grand palais de Bangkok (Thaïlande). Source : The world Factbook. Les géants sont présents dans les mythes nordiques (Ymir, Burr, Skadi, Angroboba, Gedr, de façon générale, les trolls), dans les mythes finnois (Kaleva). Ils sont très nombreux dans les mythologie orientales, qui les représentent comme les premiers êtres de la création. Dans les mythes hindous on peut mentionner : les Asouras, Ougra, Hiranyakasipou, Virabhadra, Pouroucha, etc. Mais c'est sans doute la mythologie grecque, qui plus que toute autre a eu le sentiment de la faiblesse humaine, en même temps que le souci de la démarcation entre le barbare et le civilisé, qui a fait à ses personnages la place considérable. Hésiode fait naître les géants du sang qui sortit de la plaie d'Ouranos. Les poètes les représentent avec une taille monstrueuse, une force proportionnée à leur taille, cent mains, des serpents énormes au lieu de jambes, etc. Ils assiégèrent Zeus jusque sur son trône, et, afin d'escalader le ciel, entassèrent le mont Ossa sur le mont Pélion, et le mont Olympe sur le mont Ossa. Les quartiers de roc qu'ils lançaient, suivant qu'ils retombaient sur la terre ou dans la mer, y formaient des montagnes ou des îles. Les Géants
de la mythologie grecque.
L'épisode capital de la légende des Géants est leur lutte contre les dieux; la Gigantomachie est une matière épique qui, après avoir défrayé les traditions des peuples, est sans cesse exploitée par la poésie, puis par l'art grec sous toutes ses formes. C'est à l'instigation de Gaïa que le combat s'engage contre les habitants de l'Olympe; Pindare est le premier, par ordre de date, d'entre les poètes connus, qui ait fait de cet épisode un drame animé, lui donnant pour conclusion la glorification de la lignée des dieux, à laquelle Zeus préside. Le théâtre de la lutte varie suivant les traditions locales; Pindare le place dans la plaine de Phlegra en Thrace; d'autres sur la côte Nord-Ouest de la mer Égée, d'autres, plus tard chez les Latins, dans les régions tourmentées de Cumes en Campanie; il n'y a pas de hauts sommets, soit sur le continent hellénique soit dans les îles, qui ne rentrent, chez quelque poète, dans la sphère d'action des Géants révoltés contre l'Olympe; et le plus souvent l'art se fait sur ce point l'écho de la légende populaire. Pour déloger les dieux de leur empire, les Géants entassent des montagnes, les lancent comme autant de projectiles contre le palais de l'Olympe, manient les grands arbres devenus des torches, vomissent la flamme et font entendre d'effrayantes clameurs. Ce symbolisme est emprunté, semble-t-il, aux phénomènes volcaniques, aux souvenirs des éruptions et des tremblements de terre. Vaincus, c'est sous les rocs tourmentés, là surtout où persistent des manifestations du volcanisme, que les Géants sont confinés comme dans une prison, soit ensemble, soit isolément. L'histoire d'Encelade racontée par Pindare puis par Virgile, qui le relèguent dans les profondeurs de l'Etna, peut être considérée comme L'expression typique de cette partie du drame. Tous les dieux prennent part au combat dont l'enjeu est le gouvernement du monde; ceux qui s'y distinguent le plus sont Zeus qui, fait agir la foudre et l'aigle, puis Athéna avec l'égide et Poseidon avec le trident. Une des particularités curieuses de la légende est celle qui fait dépendre la divinité d'Héraclès et même celle de Dionysos, considérés jusque-là comme des héros mortels, de leur intervention dans la lutte et de leur influence sur la victoire. L'être particulier de chaque divinité, ses rapports avec Zeus ou avec les Géants eux-mêmes, ont permis aux poètes de varier à l'infini les épisodes; c'est ainsi que pour les uns Aphrodite seule s'enfuit de l'Olympe avec Éros, au moment où la bataille s'engage, alors que pour d'autres l'arc d'Eros suffit à dompter les Géants et à leur faire tomber les armes de la main. Si l'on remarque que le nombre des Géants est porté lui-même jusqu'à vingt-quatre et que la poésie des Alexandrins, puis celle de leurs imitateurs latins, s'ingénie à mêler le monde divin tout entier au drame, on comprendra sans peine quelles ressources un pareil sujet pouvait offrir à la manie des descriptions mythologiques. Du côté des Géants, il faut signaler comme s'étant surtout distingués, Alcyoneus tué par Héraclès; Porphyrion, qui succombe sous les traits combinés de Zeus et d'Apollon, Ephialtos, Encelade, etc. Combat des dieux et des géants. Athéna terrassant le géant Encelade. Détail de la frise du grand autel de Zeus, à Pergame (musée de Berlin). La Gigantomachie a défrayé la peinture de vases et les arts plastiques au moins autant que la poésie; on la voit représentée dès le VIe siècle avant notre ère sur les vases peints à figures noires et rouges. Le groupement le plus célèbre en ce genre est celui d'une coupe, oeuvre d'Erginos et Aristophane, aujourd'hui au musée de Berlin; l'intérieur nous offre l'image de Gaïa qui, voyant tous ses fils massacrés, lève en vain des mains suppliantes vers Poseidon en train d'achever Polybotes avec son trident. Ces premières oeuvres donnent encore aux Géants la figure humaine sans mélange; peu à peu leur caractère sauvage s'accentue en ce qu'ils sont vêtus de peaux de bêtes; puis ils sont représentés avec des jambes transformées en serpents. La même progression s'observe dans les représentations plastiques; le fronton du Trésor mégarien à Olympie nous offre encore les Géants sous les traits humains; de même ce qui est accessible parmi les métopes de Sélinonte et sans doute aussi celles du Parthénon qui, cependant, les revêtent de peaux d'animaux. Au contraire, un bronze qui est à placer vers la fin du IVe siècle, nous montre Athéna aux prises avec un géant aux pieds de serpent : serpentipes. Nous possédons les restes d'une gigantomachie sculptée en haut-relief sur les frises de l'autel de Pergame, au IIe siècle, où l'artiste a exploité, avec autant de vigueur que d'habileté, les ressources physiques du sujet; tous les types de géants y figurent, les uns sous la forme humaine, les autres diversement mélangés de formes animales. La gravure ci-dessus représente Athéna qu'une Victoire ailée couronne, tandis qu'elle tient courbée sous sa main un géant ailé lui-même, au torse compliqué d'un serpent qui s'enroule autour d'une des cuisses; Gaïa est au pied de la déesse, dans l'attitude que lui prête la coupe du musée de Berlin : l'ensemble est d'une rare beauté décorative. (J.-A. Hild).- Les géants
dans la Bible.
Les
Nefîlîm.
« Les Nefîlîm étaient sur la terre en ces jours-là, et aussi après que les fils d'Elohim s'unirent aux filles des hommes et qu'elles leur engendrèrent : ce sont là les gibborim (les forts), qui autrefois furent hommes de renom. »L'étymologie du mot nefîlîm (Nephilim) n'est pas assurée. Gesenius, Thesaurus, p. 899, tire ce nom de nâfal, « tomber, » Les Nefîlîm seraient, non pas, comme pensent quelques hébraïsants, ceux devant qui l'on tombe, par crainte ou par faiblesse, mais ceux qui tombent sur les autres par violence et avec la supériorité de leur force. Ce sens est adopté par Aquila et Symmaque. D'autres rattachent nefîlîm à pâlâ, « distinguer, » d'où le niphal, « être remarquable, grand, étonnant ». Ces étymologies ne s'imposent pas, et ni les Septante, ni la Vulgate (gigantes), ne paraissent s'en être inspirés. Dans la mythologie grecque, les géants étaient des hommes sauvages et d'énorme stature que Zeus détruisit (Odyssée d'Homère), des fils de Gaïa, personnification de le Terre (Théogonie d'Hésiode); pour les Romains, ils étaient des fils de la terre et du Tartare, qui se revoltèrent contre Jupiter, voulurent escalader le ciel, furent foudroyés et ensevelis sous I'Etna (Métamorphoses d'Ovide, et chez Cicéron et Lucrèce) Les traducteurs de la Bible se servent donc ici, comme dans d'autres passages, d'un terme mythologique pour rendre, par analogie, un mot hébreu qui exprime une idée positive et historique. Il suit de cette interprétation que les Nefîlîm constituaient un peuple d'hommes remarquables par leur force, peut-être leur stature plus haute que celle des autres hommes, et la domination qu'ils exerçaient sur le monde de leur temps. Saint Jérôme, In Is, VI, 14, t. xxiv, col. 219, remarque que les Gentils appelaient « géants » ceux qui sont nés de la terre, tandis que nous donnons ce nom à ceux qui accomplissent des oeuvres terrestres. Dans les livres postérieurs de le Bible se retrouvent quelques allusions à ces êtres antédiluviens. Dans le cantique qui termine le Livre de Judith, XVI, 8, il est dit que l'ennemi a été terrassé par une femme, non par les fils des Titans, ni par les hauts géants. Les Titans étaient, selon la mythologie grecque, issus de Titan, fils d'Ouranos, et de la Terre. Révoltés contre Cronos, frère aîné de leur père, ils furent foudroyés par Zeus et précipités dans le Tartare. C'étaient donc des êtres analogues aux géants, et le Livre de Judith évoque probablement, sous ces noms d'emprunt, le souvenir des nefulîm d'autrefois. Le Livre de la Sagesse, XIV. 6, désigne plus clairement les orgueilleux géants, qui prirent dans les eaux du Déluge. Ces textes supposent une population forte, audacieuse et orgueilleuse et en révolte contre Dieu : mais rien n'indique en eux, comme caractère saillant, l'idée de stature énorme que nous attachons au mot « géants ». Du texte de, la Genèse, VI, 4, on peut tirer d'inportantes conclusions. Tout d'abord, les Nefîlîm préexistaient sur la Terre à l'union des « fils de Dieu » et des « filles de l'homme », puisque le texte dit formellement qu'il y en eut aussi, vegam, après cette union. En fait, les fils qui sortirent de cette union ne furent pas des Nepjîlîm, comme leurs ancêtres, dont beaucoup existèrent encore jusqu'au Déluge, mais seulement des gibbôrîm, « des forts. » Ces derniers se firent un nom. Les auteurs des textes bibliques ne disent pas à quel titre. Josèphe les appelle « des fils déshonorés, qui, se fiant à leur valeur, méprisèrent toute honnêteté ». C'est seulement en raison de leur audace contre Dieu qu'il les compare aux Gigantes des Grecs. Au livre des Nombres, XIII, 33, apparaît pour la seconde et dernière fois le nom de Nefîlîm. Voici en quelles circonstances. Moïse avait envoyé en avant, dans le pays de Chanaan, des espions chargés de l'explorer. Ceux-ci s'avanccrent jusqu'à Hébron, et en rapportèrent une grappe de raisins si considérable que deux hommes le porlaient sur une porche. Caleb et Josué. seuls parmi les envoyés, déclarèrent au retour que les Hébreux pouvaient parfaitement se rendre maîtres du pays. Mais les autres dirent : « Le pays dévore ses habitants. Tous ceux que nous y avons vus sont des hommes de haute taille. Là, nous avons vu des Nefîlîm, fils d'Enac (issus) de Nefîlîm, et nous étions à nos yeux comme des sauterelles, et nous l'étions à leurs yeux. »Pour interpréter eu texte, il faut d'abord se souvenir que les espions hébreux ne pouvaient connaître les Nefîlîm d'avant le Déluge que par ouï-dire. On peut donc dire que les Nefîlîm contemporains de Moïse ne sont ainsi nommés que par analogie. A leur époque, le mot nefîlîm désignait des hommes de haute taille. D'autre part, il faut peser le témoignage de ceux qui en parlent. Ce sont des gens effrayés, qui veulent faire partager leur frayeur à tout le peuple. L'expression dont ils se servent : « Nous étions auprès d'eux comme des sauterelles, » doit donc être débarrassée du caractère hyperbolique dont l'ont revêtue le génie oriental, l'effroi des espions et le complot que ceux-ci avaient formé de détourner leurs compatriotes de la conquête de Chanaan. Il reste alors une hypothèse qui a tenté quelques historiens modernes. Certains Chananéens (vestige des Peuples de la Mer égéens?) étaient des hommes de plus haute stature que les Hébreux; ils constituaient une population physiquement plus forte et d'apparence redoutable. En les rencontrant, les Hébreux les auraient assimilés à aux Nefîlîm, de leur mythologie. Quoi qu'il en soit cette croyance des anciens Hébreux que les premières générations humaines possédaient une stature plus élevée que leurs descendants demeura fixée dans le souvenir. On en retrouve l'expression dans le quatrième Livre d'Esdras (Apocalypse d'Esdras), v. 52-55 (oeuvre apocryphe où il est expliqué que la taille des hommes s'abaissa peu à peu, à mesure que les générations se succédaient. L'Ecclésiastique, XVI, 8, parle de ces antiques géants qui ne surent pas implorer le pardon de leurs péchés et périrent avec leur puissance. Les
Gibbôrîm.
Nemrod « commença à être gibbôr (gigas potens) sur la Terre et fut un gibbôr (gigas robustus) chasseur devant Yahveh ». Genèse., X, 8, 9. Dans ce texte, et quelques autres où les Septante traduisent par gigas, Psaumes XIX (XVIII), 6; Isaïe, III, 2. etc.. il n'y a pas lieu de donner à gibbôr un sens différent de celui qu'il a communément. Les
Refâ'îm.
Il résulte de là que le mot refâ'îm ne peut rappeler l'idée de géants que quand il est question du peuple des Raphaïm, et encore faut-il seulement entendre par ces géants des hommes de taille, plus élevée que celle des Hébreux, et redoutables aux yeux de ces derniers par leur sauvagerie et leur férocité. Parmi ces peuples, la Bible mentionne, avec les Raphaïm, les Emim, les Enacites et les Zuzim. Baruch, III, 26, rappelle ces géants d'autrefois, qui étaient d'une taille élevée et savaient la guerre, et que cependant le Seigneur ne choisit pas pour leur révéler le chemin de la sagesse. Quelques
géants particuliers.
Quant aux livres rabbiniques, ils donnent une telle dimension à Adam, que sa tête dépassait la hauteur de l'atmosphère, tandis que d'une main il touchait au pôle arctique et de l'autre au pôle antarctique. Ils affirment aussi qu'Og, mentionné ci-dessus,, avait une taille si prodigieuse, que les eaux du Déluge ne lui vinrent qu'au genou, et ils donnent à l'os do sa cuisse, une longueur de 40 à 48 kilomètres. (H. Lesêtre). Les géants
dans la mythologie nordique.
Les géants étaient considérés comme les premiers en date de tous les êtres vivants. Ils étaient antérieurs aux dieux eux-mêmes. Ils avaient gardé dans leur corps et dans leur apparence quelque chose de la rudesse et de la brutalité des temps où le monde surgissait lentement du néant glacé. Les noms dont on les désignait variaient selon les contrées. Il est un de ces noms qui a pénétré dans d'autres langues : c'est celui de troll, usité dans les pays scandinaves. Comme les nains, ils étaient répartis dans la nature entière. On croyait les voir passer dans les lourdes nuées que chasse le vent d'orage; on les accusait de faire tomber la grêle sur les moissons; on croyait entendre leur voix dans les roulements de tonnerre au fond des vallées ou dans les échos des montagnes. On racontait, en voyant passer des nuages fouettés par le vent, que tel géant pourchassait une belle jeune fille dont il voulait s'emparer par force. C'est un trait de ressemblance avec Odin (Wotan). Mais cette ressemblance n'est pas fortuite : Odin n'était, à l'origine, qu'un géant des tempêtes élevé peu à peu au rang de dieu supérieur. Ces géants, si proches des dieux, n'hésitaient pas à leur tenir tête. C'est avec beaucoup d'audace que Thrym vola le marteau de Thor. Un autre géant, Geirroed, ayant réussi à attirer Thor dans sa demeure, n'hésita pas à lui proposer une sorte de combat singulier, dans l'espoir de le réduire à merci. De l'un des feux gigantesques qui brûlaient au milieu de la grande salle, Geirroed retira avec de grandes pinces un morceau de fer incandescent, en forme de coin, que les deux adversaires devaient se lancer à tour de rôle. Le géant commença. Sans reculer, sans esquiver le coup, Thor saisit au vol le fer rouge dans ses gants de fer. Le géant, qui avait pensé le tuer, ne songea plus qu'à se protéger lui-même et, d'un bond, se dissimula derrière une colonne de fer. Mais Thor lança le bloc ardent avec tant de force que le bâtiment tout entier en fut ébranlé; le projectile monstrueux traversa d'abord la colonne de fer, puis le corps du géant, et passa encore à travers le mur du palais avant d'aller s'enfoncer en terre. Le symbole est clair le démon et le dieu ont tour à tour lancé la foudre l'un contre l'autre; mais, malgré sa puissance, le géant ne peut l'emporter sur le dieu du tonnerre. D'autres géants
habitent les monts. La Chanson des Nibelungen
a conservé en Allemagne
le souvenir de douze géants, qui, soumis aux ordres des rois Nibelung
et Schilbung, ont leur demeure au milieu de montagnes
sauvages. Les grondements que l'on entend parfois au fond des gorges, les
effondrements de rochers, les débordements brusques de torrents
sont produits par des géants irrités.
Aegir a une épouse, qui porte le nom de Ran, c'est-à-dire la Ravisseuse. Elle possède un vaste filet avec lequel elle essaie de capturer et d'attirer à elle tous les hommes qui vont en mer. C'est elle qui soulève les flots et les fait s'entre-choquer véhémentement, dans l'espoir de mettre les barques en péril. La terreur qu'elle inspire est si grande qu'elle a fini par s'élever, dans l'imagination populaire, du rang de simple démon à celui de déesse véritable. Elle accueille d'ailleurs avec magnificence les noyés et leur fait servir, dans sa grande salle, des poissons à la chair délicate. Neuf filles sont nées de son mariage avec Aegir - les noms que leur ont donnés les scaldes montrent que ce n'étaient là que des personnifications des vagues - : ce sont des séductrices, qui tendent aux jeunes gens des bras tentateurs et qui les entraînent au fond de l'eau, s'ils répondent à leur appel. Le sage Mimir, dont il est si souvent question dans les mythes scandinaves, et que le maître des dieux, Odin, consulte si volontiers, est luimême un géant des eaux. Mais son domaine est limité aux sources, aux étangs et aux lacs qui se trouvent à l'intérieur des terres; il ne va pas jusqu'à la mer. Mimir vit d'ailleurs en si étroite communion avec les dieux qu'il est souvent considéré comme un des leurs. Les géants du feu sont plus rares dans les mythes et les légendes et n'ont peut-être jamais été des figures véritablement populaires. Pourtant il y avait eu en Islande des bouleversements d'origine volcanique, que l'on attribuait aux géants. Deux de ces géants sont mentionnés dans des légendes dont les Ases étaient les héros principaux : quand le dieu Thor se rend dans le royaume d'Utgardloki avec trois compagnons dont l'un est Loki, ce dernier se vante d'être un mangeur inégalable; il est pourtant forcé de reconnaître la supériorité du géant Logi, qui dévore non seulement le contenu d'un cuveau de viande et d'os, mais le cuveau lui-même. Logi personnifie la flamme, dont l'appétit ne fait que grandir à mesure qu'on la nourrit. Un autre géant, Surt, allume l'incendie universel dans lequel va périr le vieux monde. Mais ces figures sont plutôt des créations de l'imagination des scaldes que de celle du peuple proprement dit. On attribuait fréquemment aux géants le don de se métamorphoser, à leur gré, en animaux divers. L'exemple le plus connu est celui de Fafnir, qui prend la forme d'un dragon pour mieux veiller sur son trésor. Mais il faut aussi compter parmi les géants métamorphosés le grand serpent de Midgard et le loup Fenrir, irréconciliables ennemis des Ases. (MG).
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