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Tiberius Claudius
Nero (Tibère) est un empereur
romain
(14-37 ap. J.-C.), né en 41 av. J.-C., mort à Caprée
(Capri )
le 16 mars 37 ap. J.-C. Il était fils de T. Claudius Nero et de
Livie.
Lorsque Livie devint la femme d'Octave, Tibère
resta, comme son frère Drusus, dans la
maison de son père (38); mais à la mort de celui-ci (34),
il rejoignit leur mère auprès du fondateur de l'empire. Nommé
questeur en 24 av. J.-C., cinq ans avant l'âge légal, il parcourut
très rapidement la carrière des honneurs. Dès l'année
20 av. J.-C., Auguste le chargea d'une mission en Arménie ;
Tibère rétablit Tigrane
sur le trône de ce pays. Gouverneur de la Gaule en 15 av. J.-C.,
il fut consul deux ans plus tard. En 12, il dut répudier, sur l'ordre
d'Auguste, sa première femme Agrippine,
fille d'Agrippa, qu'il aimait, afin d'épouser
Julie, fille d'Auguste, veuve d'Agrippa. Puis il partit pour l'Illyricum
et la Pannonie ,
où des troubles très graves avaient éclaté.
Il combattit les rebelles avec une énergie remarquable et rétablit
dans cette région accidentée la domination romaine. En 9,
après la mort de son frère Drusus, il gagna la Germanie,
ramena à Rome le corps de son frère et prononça son
oraison funèbre sur le Forum. Il fut ensuite envoyé par Auguste
contre les Germains; il remporta sur eux plusieurs victoires et reçut
les honneurs du triomphe. En l'an 6 Auguste l'associa au pouvoir suprême,
en lui conférant pour cinq ans la puissance tribunicienne. Pourtant
aucune sympathie n'existait entre l'époux et le fils de Livie. Tibère
s'exila à Rhodes, où il vécut pendant sept ans dans
une retraite complète. Lorsqu'il revint à Rome, après
la mort de Caïus et de Lucius Caesar, petits-fils d'Auguste, Auguste
l'adopta et lui conféra de nouveau la puissance tribunicienne, cette
fois pour dix ans. Peu de temps après, Tibère fut encore
envoyé en Germanie ; il y remporta de brillants succès. Enfin,
lorsque Auguste mourut, il fut proclamé empereur (14 ap. J.-C.).
Tibère régna de 14 à
37 ap. J.-C. Il inaugura son règne en faisant tuer le seul membre
de la famille d'Auguste qui pût lui porter
ombrage, Agrippa Posthume, en condamnant à mort Julie, fille d'Auguste,
et son séducteur, un certain Sempronius Gracchus, enfin en rappelant
de Germanie son neveu Germanicus, que les
légions avaient voulu proclamer empereur et qui s'était couvert
de gloire en reprenant aux Germains les aigles perdues par Varus.
Germanicus, envoyé en Orient, y mourut subitement. Malgré
les insinuations produites par certains historiens contre Tibère,
il paraît peu probable qu'il soit coupable de cette mort. Mais deux
ans à peine après son avènement, Tibère tomba
sous l'influence d'un chevalier romain, Séjan,
qui fut pour ainsi dire son mauvais génie.
Séjan était
devenu préfet du prétoire en 16 ap. J.-C. Le pouvoir exceptionnel
qu'il exerçait, surtout lorsque Tibère se fut retiré
en Campanie, inspira à ce parvenu l'ambition de monter sur le trône
impérial. Pour mettre ce projet à exécution, il ne
recula devant aucun crime. Il fit empoisonner le propre fils de l'empereur,
Drusus; de nombreux parents ou amis de l'empereur, même Agrippine,
la veuve de Germanicus, et ses jeunes enfants,
furent, les uns exilés, d'autres jetés en prison, d'autres
même réduits à se donner la mort. Mais Séjan
se perdit lui-même par l'excès de son audace. Il osa demander
à Tibère la main de sa belle-fille Livie,
veuve de Drusus. L'empereur la lui refusa et commença à le
soupçonner.
En 31, Tibère, qui ne quittait
plus l'île de Caprée ,
dans le golfe de Naples, envoya au Sénat une lettre accusatrice
contre Séjan : le porteur de la lettre,
Macron, gagna l'appui de la garde prétorienne, et Séjan fut
massacré. Après Séjan lui-même, la plupart de
ses amis furent poursuivis et condamnés. Dès lors les accusations
de lèse-majesté se multiplièrent, et Tibère
fut vraiment pendant les cinq dernières années de son règne
le prince cruel que
Tacite a dépeint. De
très nombreux sénateurs, plusieurs personnages illustres
se donnèrent la mort pour échapper au supplice. Tandis que
le sang coulait ainsi et que la terreur régnait à Rome, Tibère,
dans sa retraite, se livrait, dit-on, à d'ignobles orgies.
-
Tibère.
Pourtant, on jugerait mal le règne
de Tibère si l'on s'en tenait là. Pendant les vingt-trois
ans qui s'écoulèrent entre la mort d'Auguste
et celle de son successeur, le régime impérial s'affermit
et le monde romain vécut en paix. Tibère donna au principat
sa forme durable; il fit disparaître quelques-uns des vestiges républicains
qu'Auguste avait respectés. Ainsi il enleva aux comices le droit
de désigner les magistrats de Rome, consuls, préteurs, édiles,
tribuns de la plèbe, questeurs, et transféra ce droit au
Sénat; en 23, les cohortes prétoriennes, jadis cantonnées
séparément dans divers quartiers de Rome, furent réunies
et occupèrent aux portes de la ville un seul et même camp,
connu sous le nom de Castra Praetoria.
Cependant Tibère se montra toujours
respectueux des attributions et des droits du Sénat. Les finances
furent bien administrées; à sa mort, l'empereur laissa un
trésor de 2700 millions de sesterces. Pour les provinces, le règne
de Tibère fut une époque de justice. Une surveillance rigoureuse
pesa sur tous les gouverneurs, légats impériaux et proconsuls;
elle les empêcha de commettre trop d'exactions. Contre les peuples
barbares, Tibère suivit une politique ferme, mais prudente et mesurée.
Il combattit sans faiblesse l'insurretion du chef de bandes numide
Tacfarinos, et la révolte des Gaulois Florus et Sacrovir : il surveilla
avec attention tout ce qui se passait en Asie, sur les confins de la Syrie,
de la Cappadoce
et de l'Arménie ,
décidé à ne pas laisser entamer les frontières
nécessaires de l'empire; mais, d'autre part, il renonça à
annexer la Germanie; après les brillantes campagnes de Germanicus,
qui effaçaient l'humiliation du désastre de Varus,
il ramena tout près du Rhin la frontière de l'empire, renonçant
à l'étendre jusqu'à l'Elbe.
Tibère ne mérite pas d'être
comparé à Caligula, Néron
ou Commode. S'il fut odieusement cruel pendant
les cinq dernières années de son règne, il ne faut
pas oublier qu'il fut avant son avènement un des capitaines les
plus brillants du siècle d'Auguste; et
que, devenu empereur, il administra le monde romain avec ,justice et rigueur.
Tacite
s'est fait trop complaisamment l'écho de cette aristocratie romaine,
qui fut durement frappée par Tibère, mais dont les vices
et la lâcheté écartent toute sympathie. Pour bien juger
le successeur d'Auguste, il convient de se rappeler le vainqueur des Germains,
des Pannoniens
et des Dalmates révoltés, l'homme d'État qui sut maintenir
et consolider l'édifice élevé par Auguste. (J.
Toutain). |
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