| Mort d'une civilisation Dans les premiers siècles de notre ère, la Grèce, si longtemps couverte par la Macédoine et les provinces danubiennes, fut envahie par les Goths; les guerres serviles se renouvelèrent, apportant au Barbares un concours redoutable. Les Goths et les Hérules embarqués sur mer, pillèrent les côtes et îles de la Mer Egée et s'avancèrent dans les terres sans rencontrer de résistance. Sparte, Argos, Corinthe furent incendiées, Athènes rançonnée et pillée; la population des campagnes égorgée ou emmenée en masse. La dépression économique ne permit pas de réparer ces désastres. et la décadence de la Grèce fut rapide. Elle fut toutefois enrayée par Dioclétien et Constantin, les restaurateurs de I'Empire. Constantin était l'ami des Grecs et dans le Bas-Empire les éléments helléniques devinrent prépondérants. La fondation de Constantinople eut cependant pour effet le dépeuplement de nombreuses cités et îles à son profit et la spoliation d'une quantité d'oeuvres d'art. Mais entre le gouvernement nouveau et la vieille Hellade se manifesta un dissentiment profond. L'Hellade restait fidèle à ses dieux (La religion grecque) et ne voulait pas adopter le christianisme. Les communautés chrétiennes étaient peu nombreuses au IIe siècle; même après l'édit de tolérance, la masse de la population resta fidèle aux anciens dieux. L'université d'Athènes (L'École d'Athènes) fut le dernier foyer de la philosophie païenne. Julien, restaurateur du paganisme, fut regardé comme le bienfaiteur de la Grèce. Le triomphe de la religion nouvelle fut marqué par de violentes persécutions, surtout au temps de Théodose : les temples antiques d'Hélios, d'Artémis, d'Aphrodite furent transformés en hôpitaux, en maisons de jeu, en maisons de prostitution. Les jeux Olympiques furent interdits. C'était la fin de l'hellénisme antique : il fait place à la civilisation byzantine (L'Empire byzantin). Mais il ne lui fut pas donné de descendre paisiblement au tombeau. Il fut noyé dans le sang par une nouvelle invasion, celle des Wisigoths d'Alaric. Les villes furent presque toutes détruites, les temples démolis, les habitants égorgés ou emmenés en esclavage. A partir de ce moment se perd la trace de la plupart des chefs-d'oeuvre de l'ancienne Grèce (396). Athènes seule avait été épargnée. Son université ne fut fermée que par Justinien (529). La culture antique n'était plus qu'un souvenir. La Grèce byzantine Dans l'empire byzantin, la Grèce proprement dite ne joua qu'un rôle très effacé. La civilisation byzantine, malgré l'emploi de la langue grecque, représente un compromis entre des éléments d'origines très diverses : les vieilles civilisations orientales. l'esprit romain, le christianisme y ont autant contribué que la Grèce païenne. Après l'invasion gothique, seules quelques villes se relèvent de leurs ruines, Corinthe, Sparte, Argos. Le plat pays reste inculte; la population subsistante afflue le long des côtes. Après un siècle et demi de calme relatif vinrent les Bulgares qui ravagèrent jusqu'à l'Isthme (540); puis les Slaves dont les incursions se multiplièrent à partir de 577 et qui prirent pied dans quelques districts. Justinien abolit le proconsulat d'Achaïe et le divisa en quatre provinces ou stratégies Hellade, Nicopolis, Péloponnèse, îles. Le nom d'Achaïe disparut ainsi avec l'organisation romaine. Le VIIIe siècle fut marqué par des troubles et des guerres ruineuses. En 727, la Grèce se souleva en masse contre l'empereur iconoclaste Léon l'Isaurien. Puis vint la peste de 746-747 qui fit périr la moitié des habitants. Elle fit de larges vides ou s'introduisirent les Slaves, particulièrement dans le Péloponnèse central. A côté des cites grecques ou romaïques de la côte s'organisèrent a l'intérieur les tribus slaves avec leurs districts. Les rapports furent assez pacifiques entre les deux populations. Au IXe siècle, les Slaves, domptés par les empereurs, adoptèrent le christianisme. A cette époque, la Grèce repeuplée était prospère; les cités maritimes du Péloponnèse retrouvaient une activité qui leur était inconnue depuis plus de mille ans. La défense avait été bien aménagée, l'Isthme fortifié. Les attaques des Arabes furent repoussées en Eubée, à Corinthe, Patras, Méthone. Vers la fin du IXe siècle ils firent pourtant des progrès, conquirent Samos (888), Démétriade (896), Lemnos (901). Mais les Byzantins reprirent l'avantage et les chassèrent même de Crète (961) (Les îles grecques au Moyen âge). Au Xe siècle, ce fut le tour des Bulgares et de leurs alliés les Valaques; ils s'installèrent à Nicopolis (933), envahirent la Thessalie (978) et saccagèrent Larisse. Vainqueurs de Basile, ils firent une nouvelle invasion en Thessalie, Béotie, Attique et dans le Péloponnèse (995), mais furent complètement battus au retour. Les Normands d'Italie furent de plus redoutables adversaires. Robert Guiscard se posa en champion de l'empereur Michel Parapinakes et envahit l'Epire (1081). Son fils, Boémond, se fit battre devant Larisse (1084) et reperdit ses conquêtes. Il revint à la charge et s'empara de Corfou et des villes voisines. Après ce premier assaut, le second fut dirigé contre la Grèce propre. Le roi Roger prit et pilla Thèbes et Corinthe, alors très riches (1146). Ces expéditions étaient le prologue de la grande entreprise qui substitua un empire latin à l'empire grec de Constantinople. A partir de ce moment, l'histoire de la Grèce est sans cesse mêlée à celle des puissances occidentales, particulièrement de Venise. Les Byzantins ne purent en redevenir maîtres. La Grèce franque et vénitienne La prise de Constantinople et la fondation de l'empire latin furent suivis du partage de l'Empire entre les vainqueurs. Boniface de Montferrat, roi de Thessalonique, conquit la Macédoine, la Thessalie, défit aux Thermopyles l'armée grecque de Léon Sgouros, conquit Thèbes, Athènes et l'Eubée. Guillaume de Champlitte conquit le Péloponnèse. Le régime féodal fut transporté par les Francs dans la Grèce qui reçut une organisation nouvelle. Elle fut divisée entre le despotat d'Epire des Comnène, le duché d'Athènes et la principauté d'Achaïe, en face de laquelle s'établirent les despotes grecs de Patras et de Misitra (Sparte) aux mains de la famille des Paléologues. Dans le même temps, Venise se constituait un empire maritime dans les îles grecques tout en se dotant de points dappuis sur le continent. La principauté d'Achaïe. - La principauté d'Achaïe a été une principauté formée en 1205 par Guillaume de Champlitte au milieu de la dissolution de l'empire grec, conquis par les armes des Croisés latins. Elle embrassait le Péloponnèse (que l'on appela la Morée au XIIIe siècle) entier avec la suzeraineté d'Athènes et de Thèbes. Elle fut bientôt usurpée par Geoffroi de Villehardouin. Isabelle de Villehardouin porta la souveraineté d'Achaïe à diverses maisons, tandis que Baudouin II, empereur détrôné de Constantinople, cédait ses droits sur ce domaine à Charles Ier d'Anjou, roi de Naples. Marie de Bourbon, veuve de Philippe de Tarente la légua en 1387 à son neveu Louis, duc de Bourbon, qui ne put s'en mettre en possession. La principauté se scinda depuis en État de Corinthe, duché de Sparte, Messénie, Élide, etc. Enfin l'Élide, possédée par les Génois, conserva seule le nom de principauté d'Achaïe. Le duché d'Athènes. - Après la prise de Constantinople par les croisés, en 1204, Athènes forma avec Thèbes, une seigneurie, vassale du royaume de Thessalonique, fondé par Boniface, marquis de Montferrat, qui créa Othon de la Roche duc d'Athènes. Ce duché devint ensuite vassal la principauté d'Achaïe qui appartint successivement aux seigneurs de La Roche et aux Brienne, qui en restèrent en possession jusqu'en 1312, où il fut conquis par des aventuriers aragonais et catalans (les Almogavares), venus en Orient pour se mettre à le solde de l'empire grec. En 1326, les nouveaux maîtres du duché se soumirent au roi de Sicile, Frédéric II. Vers 1370, Renier Acciajuoli, de Florence, conquit ce duché à l'aide des Vénitiens et d'Amurat I (Mourad I), mais en 1456 Mehmet II le dépouilla de ses possessions (L'Empire Ottoman d'Osman à Bayézid II). Depuis ce temps Athènes resta aux Turcs jusqu'à l'insurrection de 1821.. Les îles grecques. - Au partage de l'empire romain, les îles grecques (Chypre, la Crète et les autres les îles de l'Archipel égéen, ainsi que les îles ioniennes) avaient elles aussi été attribuées à l'empire d'Orient, et s'étaient trouvées ensuite placées sous la souveraineté de l'empire byzantin. A quelques exceptions près, leurs histoires se ressemblent : souvent reprises aux Chrétiens par les Arabes au début du Moyen Âge, elles sont généralement reconquises ensuite par les Croisés, qui se les partagent et se les distribuent faisant régulièrement la meilleure part à la République de Venise, qui établit ses postes avancés un peu partout en Méditerranée orientale. Après diverses péripéties, les îles tombent entre les mains des Turcs, qui les garderont jusqu'à que l'indépendance de la Grèce au XIXe siècle, lui en fasse récupérer la plupart. Les Ottomans mirent fin à la domination franque et vénitienne sur la Grèce et ses îles. Nous nous bornons à rappeler les dates principales. En 1462, Mehmet Il s'empara de Lesbos. Sa guerre contre les Vénitiens (1464-79) leur coûta I'Eubée (1470) et la moitié des îles. En 1480, le sultan leur céda Zante et Céphalonie, moyennant un tribut annuel. La guerre reprit en 1499 et finit en 1503 par la perte d'Egine, Coron, Navarin et Lépante (Le siècle de Soliman). En 1540, Venise perdit le reste de la Morée; en 1571, Chypre. Elle ne gardait que la Crète et les îles Ioniennes. (A19). |