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Robert Guiscard

Guiscard ou Wiscard (Robert), né vers 1015, mort le 16 juillet 1085, fils de Tancrède de Hauteville, seigneur normand. Les frères aînés de Robert, Guillaume Bras de Fer, Drogon, Humfroy, viennent en Italie chercher les aventures peu après 1030. Robert, plus jeune (il était né d'un second mariage), suit leur exemple vers 1047. Mal reçu par ses frères, il entre au service de Pandolfe, prince de Capoue, puis vit quelques temps de brigandages; devenu célèbre par des exploits merveilleux, il s'associe à un chevalier normand, Girard di Buon Albergo, épouse la soeur de ce seigneur nommée Advérarde et commence à se tailler une seigneurie en Calabre

En 1053, après l'assassinat de son frère Drogon, Robert Guiscard prend une part décisive à la victoire de Civitate, remportée le 18 juin sur l'armée pontificale, commandée par le pape Léon IX en personne. Les années suivantes sont employées par lui en escarmouches contre les Grecs de Calabre et Gisulfe, prince de Salerne. En 1057, il devient comte de Pouille après la mort de son frère Humfroy; en 1059, il est nommé duc de Pouille et de Calabre et futur duc de Sicile par le pape Nicolas II, à Melfi, prête serment de fidélité au saint-siège et s'engage à lui payer un tribut annuel. Ce traité réconciliait définitivement les Normands et l'Église et consacrait les prétentions de la papauté sur l'Italie méridionale. Devenu peu après beau-frère du prince de Salerne, Gisulfe, il expulse son propre frère Guillaume des terres du prince lombard. En 1068, il enlève Tarente aux Grecs, prend Reggio, et met fin à la domination byzantine dans le sud de la péninsule.

Robert Guiscard se tourne alors vers la Sicile, qu'occupaient encore les Sarrasins; en 1061, il prend Messine et plusieurs autres forteresses du pays, mais c'est à son jeune frère Roger que revient principalement d'avoir reconquis l'île presque entière, après une rude campagne contrariée par de longues et sanglantes dissensions entre les deux chefs normands. Enfin le 16 avril 1071 , après un siège de près de trois ans, Bari, dernière ville occupée par les Grecs, ouvre ses portes à Robert. L'année suivante voit la chute de Palerme, enlevée aux Sarrasins après un long siège (20 janvier 1071), et Robert Guiscard devient duc de la majeure partie de la Sicile.
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Robert Guiscard.
Robert Guiscard.

L'année suivante Grégoire VII est élu pape; il veut intervenir dans le Sud de l'Italie, obliger Robert Guiscard à respecter Bénévent, possession du saint-siège, et lui interdire la conquête de Salerne. Le chef normand refuse; il est excommunié au concile de Rome de 1074 et Grégoire VII marche contre lui avec une grosse armée; l'expédition échoue piteusement et Robent Guiscard, qui veut absolument soumettre Salerne et humilier son parent le prince de Capoue, ne tient aucun compte des foudres pontificales. Il se garde bien au surplus de prendre parti dans la querelle entre l'empereur et Grégoire et se contente de poursuivre sa pointe. Didier, abbé du Mont-Cassin, s'entremet, Grégoire VII proteste pour la forme contre les usurpations de Robert Guiscard, Salerne est conquise le 13 décembre 1076 après un long siège et le duc Gisulfe trouve un asile à Rome, ou le pape le charge un peu plus tard d'une légation, singulier choix à coup sûr. 

En 1080, les deux adversaires se réconcilient (entrevue de Ceprano), Grégoire VII laisse Robert Guiscard maître de Salerne et de Melfi, mais, par contre, le chef normand renouvelle le serment de 1059; dès lors, il tourne ses armes vers l'Orient; il rêve la conquête de Byzance et dès l'année suivante il passe en Epire (mai 1081). En vain le pape l'appelle à son secours; maître de Durazzo, Robert fait une courte apparition à Rome, puis emploie dix-huit mois à combattre le nouveau prince de Capoue, Jourdain. Longtemps sourd aux appels de Grégoire VII, il se déride pourtant à marcher sur Rome, quand Henri IV, déjà maître de la ville, tient le pape assiégé dans le château Saint-Ange. Le roi de Germanie fuit devant lui, le 27 mai 1084; Rome est occupée, le pape délivré, mais Robert Guiscard, qui ne veut pas partir les mains vides, traite la ville éternelle en ville prise d'assaut, la population est massacrée ou emmenée en esclavage, les églises incendiées, la plupart des monuments antiques détruits.

Pressé de reprendre la guerre d'Orient, que soutient à grand-peine son fils Bohémond, Robert Guiscard évacue Rome; le pape, dès lors exécré des Romains, le suit et s'arrête à Salerne où il meurt en 1085. Le duc a cependant passé la mer; il se prépare à attaquer Céphalonie, quand une maladie subite l'enlève à l'âge d'environ soixante-dix ans. Transporté en Italie, son corps est inhumé à Venouse.

De tous les aventuriers qui fondèrent les principautés normandes de l'Italie méridionale, Robert Guiscard fut certainement le plus remarquable à tous égards. Aussi actif que Drogon et Humfroy, il leur était infiniment supérieur comme politique. Rien de plus habile à coup sûr que sa conduite envers le saint-siège, et Grégoire trouva en lui un adversaire redoutable et digne de lui. Ces qualités étaient chez Robert alliées à des défauts non moins extrêmes; il était habile, mais fourbe et rusé, entreprenant et brave, mais cruel et impitoyable. C'est, en un mot, un digne émule de Guillaume le Bâtard, peut-être même, si on tient compte des faibles ressources dont il disposait, faut-il estimer le vainqueur des Grecs, des Lombards et des Sarrasins supérieur au conquérant de l'Angleterre. (A. Molinier).

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Dictionnaire biographique
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