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Les Anciens appelaient sibylles certaines femmes auxquelles ils attribuaient la connaissance de l'avenir et le don de prophétie. Ce nom fut d'abord particulier à la prophétesse de Delphes; il fut donné ensuite à toutes les femmes qui rendaient des oracles. On le fait venir du verbe grec qui signifie être inspiré ou conseillé des dieux; mais nous sommes plus porté à croire que les verbes sibyllian et sibyllainein viennent au contraire du mot sibylle. On convient généralement qu'il y a eu des sibylles, mais on n'est pas d'accord sur leur nombre. Platon, le premier des anciens qui en ait parlé, semble n'en reconnaître qu'une, car il dit simplement la Sibylle. Quelques modernes ont soutenu, après ce philosophe, qu'il n'y avait eu effectivement qu'une Sibylle, celle d'Erythrées, en Ionie, mais qu'elle a été multipliée dans les écrits des Anciens, parce qu'elle a beaucoup voyagé et vécu très longtemps. Combien de sibylles? La sibylle Erythréenne. Sibylles représentées sur les stalles du choeur des chanoines dans la cathédrale de Saint-Bertrand-de-Comminges (Haute-Garonne). © Photo : Serge Jodra, 2013. La sibylle Idéenne. La sibylle Paléotroyenne. La sibylle d'Ancyre La sibylle de Colophon. La sibylle de Samos. La sibylle de Sardes. La Sibylle de Delphes. Les préoccupations principales sont de la maintenir dans la dépendance de l'oracle et de la déclarer plus ancienne que la sibylle Erythréenne. Sur sa biographie, on sait peu de chose; on l'appelle Daphné, on la rapproche de Manto, en la disant fille de Tirésias. Une autre version la fait venir de chez les Maliens et lui attribue pour mère Lamia, pour père Apollon. On combina cette légende avec celle de la sibylle Libyenne; elle fut aussi acceptée par les Thessaliens à qui elle procurait une sibylle indigène. La sibylle Thesprotique. La sibylle de Cumes. La Sibylle de Cumes. Elle fut appelée Mélankraera, Amalthée, et finalement reçut un nom qui lui appartient en propre, Démo ou Démophile; une autre version rapportée par Virgile en fait une fille de Glaucus du nom de Déiphobe. On lui accordait une vie de mille années; sa vieillesse devint légendaire, et comme elle était venue en Italie au déclin de sa vie, on se la représenta sous les traits d'une vieille femme usée. La plus populaire de ses légendes est celle qui la conduit à Rome auprès de Tarquin l'Ancien ou le Superbe, à qui elle apporte les livres sibyllins; toutefois, quand ceux-ci eurent été brûlés en 83 av. J.-C., c'est en Ionie qu'on recueillit les prophéties destinées à les reconstituer. Si longue que fût la vie accordée à la sibylle de Cumes, elle finit par ne plus suffire aux exigences de la chronologie, et Varron la dédoubla en sibylle de Cumes et sibylle Cimmérienne, celle-ci plus ancienne (les Cimmériens de l'Odyssée sont en Campanie); il partage les légendes entre ces deux sibylles. Virgile n'admet pas cette hypothèse; il se contente de faire rédiger les livres sibyllins par la sibylle de Cumes, contemporaine d'Enée, sans dire qu'elle les eût apportés elle-même à Tarquin. Mais le dédoublement était trop commode aux vanités locales peur qu'on n'y persistât pas. On trouva une sibylle Sicilienne, établie à Lilybée; elle fut identifiée avec celle de Cumes qui serait venue mourir là : lorsqu'on en distinguait deux, c'était celle de Lilybée qui avait rendu visite à Tarquin. Du moment que des érudits admettaient deux sibylles en Italie, chacune des épithètes adressées à la première pouvait prendre corps; on n'individualisa pas celles d'Euboïque et d'Éolienne qui rappelaient l'origine grecque de la population et des légendes campaniennes; mais celle d'Italique fut transportée à la nymphe Carmenta, et plus tard confondue par les Byzantins avec la Cimmérienne de Varron. Ce dernier mentionne encore une sibylle Tiburtine qui est la nymphe Albunea des eaux sulfureuses de Tibur, et resta toujours exclusivement latine, devant quelque notoriété au voisinage de Rome. La Sibylle Tiburtine annonçant à Auguste la venue de Jésus-Christ. Miniature de l'Historia romana excerpta ex libris Pauli Orosii, manuscrit italien exécuté au XVIe siècle, et attribué à Giulio Clovio. La sibylle Libyenne. La sibylle Egyptienne. La sibylle Persique. « Chaldéenne par son père, Grecque par sa mère, Hébraïque par son nom, identifiée tour à tour avec la sibylle Egyptienne ou Persique ou Cuméenne, la sibylle Sabbe flotte, comme ses congénères, dans les régions imaginaires où n'entrent ni la chronologie, ni la critique, et ce n'est qu'une ombre de plus dans ce groupe de fantômes. »Les oracles sibyllins. Il y avait un assez grand nombre d'oracles des sibylles répandus dans le public, sans parler, de ceux qui étaient extraits des Livres sibyllins. Ces oracles regardaient particulièrement le pays où ils avaient cours, et voilà sans doute ce qui a fait supposer une sibylle différente pour chaque contrée. Les politiques savaient faire usage de ces prétendues prophéties; souvent même ils en inventaient et les faisaient courir parmi le peuple comme anciennes, afin de les faire servir aux desseins de leur ambition. C'est ainsi que P. Lentulus Sura, un des chefs de la conjuration de Catilina, faisait valoir une prétendue prédiction des sibylles, que trois Cornéliens auraient à Rome la puissance souveraine. Sylla et Cinna, tous deux de la maison Cornélienne, avaient déjà vérifié une partie de la prédiction. Lentulus, qui était de la même famille, se persuada que la prédiction ayant été déjà vérifiée pour deux tiers, c'était à lui. à la compléter en s'emparant du pouvoir suprême; mais la prévoyance du consul Cicéron empêcha les effets, de son ambition. Pompée voulant rétablir Ptolémée Aulétès sur le trône la faction, qui lui était contraire au sénat, publia une prédiction sibylline portant que, si un roi d'Egypte avait recours aux Romains, ils ne devaient pas lui refuser leurs bons offices, mais qu'il ne fallait pas lui fournir des troupes. Cicéron, qui était dans le parti de Pompée, ne doutait pas que l'oracle ne fût supposé; mais, au lieu de le réfuter, il chercha à l'éluder; et fit ordonner au proconsul d'Afrique d'entrer en Egypte avec une armée, et d'en faire la conquête pour les Romains; ensuite on en fit présent à Ptolémée. Lorsque Jules César se fut emparé de l'autorité souveraine, sous le titre de dictateur perpétuel, ses partisans, cherchant un prétexte pour lui faire déférer le, titre de roi, répandirent dans le public un nouvel oracle Sibyllin, selon lequel les Parthes ne pouvaient être assujettis que par un roi des Romains. Le peuple était déjà déterminé à lui en accorder le titre, et le sénat devait en rendre le décret, le jour même que César fut assassiné. Pausanias rapporte dans ses Achaïques une prédiction des sibylles sur le royaume de Macédoine, conçue en ces termes : « Macé doniens, qui vous vantez d'obéir à des rois issus des anciens rois d'Argos, apprenez que deux Philippe feront tout votre bonheur et tout votre malheur : le premier donnera des maîtres à de grandes villes et à des nations; le second, vaincu par des peuples sortis de l'Occident et de l'Orient, vous perdra sans ressource, et vous couvrira d'une honte éternelle. »En effet, l'empire de Macédoine, après être parvenu à un très haut point de gloire sous Philippe, père d'Alexandre, tom ba en décadence sous un autre Philippe qui dévint tributaire des Romains. Ceux-ci étaient au couchant de la Macédoine, et furent secondés par Attalus, roi de Mysie, qui était à l'orient. Les sibylles, croyait-on, avaient aussi prédit le grand tremblement de terre qui ébranla l'île de Rhodes; car Pausanias dit à cette occasion que la prédiction de la sibylle ne se trouva que trop accomplie. Quelquefois on se flattait de pouvoir détruire l'effet des oracles sibyllins, au moyen d'expiations et de sacrifices sanglants. Nous lisons dans Plutarque que les livres sibyllins portant que les Gaulois et les Grecs s'empareraient de la ville de Rome, on imagina, pour détourner l'effet de la prédiction, et pour l'accomplir en quelque sorte, d'enterrer vifs, dans l'enceinte de la ville, un homme et une femme de chacune des deux nations, afin de leur faire prendre ainsi possession du territoire de Rome. Nous trouvons dans les lois romaines une constitution d'Aurélien, qui ordonne au sénat de rendre un arrêt pour que les prêtres consultent les Livres sybillins à l'occasion de l'invasion des Marcomans, qui, ayant traversé le Danube et forcé les Alpes, menaçaient Rome, non contents d'avoir ravagé presque toute l'Italie; et nous voyons, par le sénatus-consulte, qu'il fut décidé que les victimes humaines seraient même permises, si elles étaient jugées nécessaire. (GE). |
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