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L'histoire de l'Italie
L'Italie antique
Aperçu L'Italie antique Le haut Moyen âge Le Moyen âge Du XIVe s. à 1815 Le XIXe siècle
Les Osques, les Ombriens, les Sabins, les Tyrrhéniens, les Sicules, les Vénètes, et les Oenotriens sont parmi les populations les plus anciennement installées en Italie dont les noms soient connus. Un autre peuple, peut-être apparenté aux Ibères, occupa, au Nord des Tyrrhéniens, la partie occidentale du Nord de l'Italie, qui reçut d'eux le nom de Ligurie. L'Italie reçut également très tôt, vers le XIe siècle av. J.-C., des Hellènes venant de la péninsule grecque et qui occupèrent le sud de l'Italie (Grande-Grèce) et la Sicile, puis l'émigrations de conquérants germaniques, les Cimbres. Peu après, les Étrusques ou Rasena, qu'on fait descendre parfois des monts de la Rhétie, fusionnèrent avec les Tyrrhéniens, et formèrent un État fédératif, le plus puissant de l'Italie. La contrée précédemment habitée par les Tyrrhéniens prit alors le nom d'Etrurie. Cette confédération des Étrusques fonda deux colonies : l'une au Nord, sur les bords du Pô, et l'autre au Sud, dans la Campanie. Une nouvelle émigration celte, composée de Gaulois Senones et d'autres Celtes, compagnons de Bellovèse, pénétra en Italie, environ 600 ans av. J. C., et y conquit, dans l'Italie septentrionale, que l'on appellera plus tard la Gaule Cisalpine

Le Latium, contrĂ©e de l'Italie centrale qui a jouĂ© le principal rĂ´le dans l'histoire des peuples italiens, Ă©tait habitĂ© par les Latins, peuple issu du mĂ©lange de populations aborigènes, lorsque, si l'on en croit les historiens romains, une colonie de la ville d'Albe la Longue, capitale de la confĂ©dĂ©ration latine, fonda la ville de Rome, sur une colline près du Tibre, l'an 753av. J. C (plutĂ´t vers 600, pense-t-on aujourd'hui). La nouvelle ville, gouvernĂ©e par des rois, de l'an 753 Ă  l'an 509, devint le centre de la confĂ©dĂ©ration latine, et s'appropria plusieurs institutions des Latins et des Sabins, et une partie de la civilisation des Étrusques. Rome eut ensuite Ă  lutter contre les Gaulois au Nord, et les Samnites au Sud, devenus, avec les Romains, les plus fortes nations de la pĂ©ninsule. Mais de 391 Ă  350 av. J.-C., les Gaulois Ă©puisent inutilement leurs forces. De 343 Ă  267, Rome soumet non seulement les Samnites, mais toute l'Italie du centre et du sud. L'Italie du Nord fut subjuguĂ©e pareillement de 221 Ă  173, sauf quelques districts, et forma une province romaine. L'histoire de l'Italie entière se confond dès lors avec celle de Rome, dont elle suit les destinĂ©es  jusqu'Ă  la chute de l'empire d'Occident, en l'an 476 de notre ère, quand Odoacre, un Germain au service de Rome, mit fin Ă  l'Empire.

Les peuples de l'Italie antique

L'histoire de l'Italie ne commence à pouvoir s'écrire - et encore bien imparfaitement - qu'avec la colonisation grecque, au VIIIe siècle av. J.-C.; elle ne devient authentique qu'à partir du IVe siècle; mais les documents fournis par les Grecs permettent de remonter plus haut et de se représenter approximativement, et de façon très peu assurée, les mouvements de peuples à partir du XIIe siècle. Les rapprochements faits par les mythographes soucieux de procurer des généalogies hellénistiques aux peuples, cités et familles de l'Italie, ont encombré les histoires d'une foule de légendes rattachant à l'Asie ou à la Grèce les origines italiennes, et dont on se débarrasse pas si aisément.
L'Italie, suivant les traditions mythologiques romaines, fut d'abord appelĂ©e Saturnie, Ă  cause de Saturne, qui, chassĂ© de Crète par son fils Jupiter, y trouva un asile auprès de Janus, roi du pays, Ă  qui il enseigna l'usage des lettres et de l'agriculture. Plus de 400 ans avant la guerre de Troie, une colonie d'Arcadiens vint s'Ă©tablir en Italie, sous la conduite d'Oenotrus, de qui le pays prit le nom d'Oenotrie. ltalus l'un de ses successeurs, lui donna celui d'Italie. Évandre, obligĂ© de quitter le PĂ©loponnèse, y mena vers le XIIIe s. av. J.-C. une nouvelle colonie d'Arcadiens, et bâtit la petite ville de Pallanteum, sur le mont appelĂ© depuis Palantin. Peu de temps après, ÉnĂ©e, Ă  la tĂŞte d'une troupe de Troyens qui avaient Ă©chappĂ© Ă  la fureur des Grecs, aborda Ă  l'embouchure du Tibre et ayant Ă©pousĂ© Lavinia, fille du roi Latinus, bâtit la ville de Lavinium, etc. 
Pour nous en tenir Ă  l'histoire, on trouve Ă  ses dĂ©buts, des peuples tels que les Oenotriens de la Campanie et de la Lucanie ultĂ©rieures asservis par les Grecs; les TyrrhĂ©niens asservis par les Rasenas en Etrurie et les Sicules qui formèrent un des Ă©lĂ©ments de la population latine et furent la principale composante, avant les Grecs, dans l'Ă®le de Sicile. Ces premiers peuples connus d'Italie, ou du moins leurs ancĂŞtres directs dès le NĂ©olithique, furent des marins et des constructeurs de forteresses; plusieurs de ces forteresses nous Ă©tonnent encore par la force de leurs murailles : Norba, Segni, Alatri, etc. On leur rattache encore les populations du Sud-Est de la pĂ©ninsule, proches parentes des Grecs, celles des bouches du PĂ´, etc. 

La Sicile. 
En Sicile, les Grecs trouvèrent trois peuples les Sicules, les Sicanes et les Elymes. Malgré la similitude de nom, les témoignages formels des historiens anciens ne permettent pas de douter que les Sicanes fussent très différents des Sicules; occupants antérieurs de l'île, ils sont rattachés par Thucydide aux Ibères. Les Sicules, qui n'auraient passé dans l'île que vers l'an 1000 av. J.-C. étaient connus d'Homère; il cite (Odyssée, I, 185) leurs mines de cuivre de Temesa (Tempsa en Calabre); d'autre part, un interpolateur de l'Odyssée (XXIV, 307) appelle Sicania l'île de Trinacrie (Sicile). Les Sicules auraient habité précédemment les deux rives du Tibre inférieur; ils en auraient été, raconte Denys, expulsés par les Aborigènes, descendus de l'Apennin central; chassés de leurs cités de Tibur, Ficulea, Antemnes, Tellène, Faléries, Fescennium, ils reculèrent vers le Sud de la péninsule, où nous les trouvons à l'époque homérique (vers le VIIIe siècle); les Oenotriens, les Morgètes, les Italiens proprement dits qui peuplaient la presqu'île sud-occidentale, étaient de même origine qu'eux; Locres fut bâtie sur leur territoire au VIIIe siècle (Polybe, XII, 5, 6). On a signalé aussi des Sicules à Ancône; mais il s'agit probablement des Grecs de Sicile qui colonisèrent cette ville. En Sicile, les Sicules formaient le principal élément indigène.

Les Sicanes avaient été refoulés à l'Ouest et au Nord-Ouest de l'île. Quant aux Elymes, ils étaient confinés à l'angle occidental, autour d'Eryx et de Ségeste; on leur attribuait une origine asiatique; il est possible qu'ils fussent apparentés de longue date aux premiers colons phéniciens. Ils disparurent assez vite. Les Phéniciens et leurs successeurs les Carthaginois ne s'implantèrent en nombre que sur la côte Nord-Ouest, à Motye, Panorme et Seloeis (Soluntum). La colonisation grecque commença au milieu du VIIIe siècle. D'abord vinrent les Chalcidiens à Naxos (735), puis les Corinthiens à Syracuse (734); les premiers étaient de des Ioniens, les seconds des Doriens; l'antagonisme entre les deux fut un des faits dominants de l'histoire sicilienne. Les Chalcidiens fondèrent Leontini, Catane, puis Himera (648) et Myles, Zancle. Sur le rivage Nord, les Syracusains, Acrae (664), Casmenae (644), Camarina (599). Les Doriens de Mégare fondèrent Megara Hyblaea, puis Sélinonte (628), ceux de Rhodes et de Crète, Gela (690) sur la côte méridionale; de celle-ci partirent les colons d'Agrigente (580). Ces colonies prospérèrent rapidement; la côte orientale et méridionale de l'île fut donc entièrement peuplée de Grecs. Les indigènes restèrent à demi indépendants dans l'intérieur. Les tyrans d'Agrigente, puis ceux de Gela et de Syracuse acquirent l'hégémonie de la plus grande partie de l'île; à partir du Ve siècle, l'histoire de celle-ci se confond avec celle de Syracuse.


L'Italie ancienne.
(cliquer sur la carte pour l'agrandir).
La Grande-Grèce. 
Dans la pĂ©ninsule, les colons grecs abordèrent dès le XIe siècle; si l'on admet du moins que Cumes fut fondĂ©e en Campanie par des Ioniens d'EubĂ©e vers l'an 1050 av. J.-C.; elle forma, avec ses colonies de Naples (Neapolis) et Dicaearchia (Pouzzoles), un groupe Ă  part qui exerça une influence considĂ©rable sur les Italiens, mais eut peu de rapports avec les colonies grecques ultĂ©rieures. Celles-ci remontent Ă  la seconde moitiĂ© du VIIIe siècle. Les AchĂ©ens ouvrirent la voie, fondant Sybaris vers 720 et Crotone en 710 av. J.-C. Ces deux citĂ©s devinrent les plus puissantes de toutes. En face de leur rivale Tarente, fondĂ©e par les Spartiates (708), elles créèrent MĂ©taponte (entre 700 et 680); Ă  l'Ouest de celle-ci les Ioniens fondèrent Siris (vers 680); vers l'extrĂ©mitĂ© de la presqu'Ă®le s'Ă©leva Lucres EpizĂ©phyrienne (710), colonie des Locriens. Sur le dĂ©troit existait depuis un certain temps Rhegium, colonie chalcidienne; plus tard, les Ioniens d'Asie fondèrent sur le rivage tyrrhĂ©nien Velia ou ÉlĂ©e (vers 540). 

Les citĂ©s que nous venons d'Ă©numĂ©rer ayant rapidement grandi essaimèrent Ă  leur tour : Posidonie, LaĂĽs, Scidrus sont des colonies de Sybaris; Terina et Caulonia, de Crotone; Hipponium et Medina, de Locres; sur ce rivage tyrrhĂ©nien d'autres villes oenotriennes furent hellĂ©nisĂ©es : Pandosia, Petelia, Scylletium. Les citĂ©s grecques de l'Italie mĂ©ridionale eurent une fortune rapide et brillante, Ă©clipsant Ă  ce point la Grèce proprement dite qu'on leur appliqua le nom de Grande-Grèce. Les colonies achĂ©ennes tinrent le premier rang. La richesse de Sybaris devint proverbiale; elle commandait Ă  vingt-cinq citĂ©s et quatre peuplades italiennes. Celles-ci, apparentĂ©es aux Hellènes, s'assimilaient aisĂ©ment, ce qui permit la constitution d'États agricoles très peuplĂ©s, oĂą les indigènes et les colons se mĂ©langeaient, partageant le droit de citĂ©. Ce dĂ©veloppement atteignit son apogĂ©e au VIe siècle. Malheureusement il nous est presque inconnu, les Ă©crits historiques consacrĂ©s Ă  cette pĂ©riode Ă©tant perdus. C'est d'autant plus dĂ©plorable qu'alors s'Ă©laborèrent les premiers modèles de constitutions, telles que celles de Zaleucus Ă  Locres, de Pythagore Ă  Crotone, etc. 

La Grande-Grèce fut aussi un des foyers primitifs des sciences et de la philosophie, en particulier des mathématiques, et ses philosophes eurent un rôle prépondérant (pythagoriciens, Éléates, Empédocle, etc.). Cette splendeur fut ébranlée par des guerres civiles implacables. Tout d'abord les trois grandes villes achéennes se coalisèrent pour exterminer les Ioniens de Siris. Après la destruction de cette opulente cité, les discordes suscitées par les pythagoriciens provoquèrent une guerre entre Crotone, où ils prévalaient, et Sybaris; celle-ci fut détruite (510) et sa chute produisit une profonde sensation. Les guerres civiles continuèrent si bien que la Grande-Grèce resta étrangère au grand duel des guerres médiques; comme la Sicile, d'ailleurs, Rhegium crût en force sous la tyrannie d'Anaxilaos (496-476) et grâce à son union avec Zancle ou Messine (renforcée par les immigrants messéniens). Les Rhégiens et Locriens avaient infligé une sanglante défaite aux Crotoniates. A partir du Ve siècle commence le déclin de la Grande-Grèce. La fondation des nouvelles colonies de Pyxus (Buscentum) par les Rhégiens (473), de Thurii (près des ruines de Sybaris) par les Athéniens (443), d'Héraclée (près des ruines de Siris) par les Tarentins (432) ne peut l'enrayer. La réaction des peuples de l'intérieur fait reperdre aux Grecs presque tout le territoire qu'ils s'étaient agrégé. De ce moment il est certain que l'Italie serait aux Italiens.

La péninsule.
Dans la péninsule, les Grecs avaient rencontré un grand nombre de peuples dont plusieurs ne sont guère connus que par leur nom. On peut les répartir en quelques groupes ethniques : Italiotes (comprenant les Osques, Sabelliens et Ombriens), Illyriens, Étrusques. On classe parmi les Osques les peuples du rivage occidental depuis le Tibre jusqu'à la Grande-Grèce; Opiques ou Osques de la Campanie dont on étendait le nom à toute la zone centrale de la péninsule au Nord de ce qu'on appelait Italie; Ausones de la Campanie qu'il faut, probablement identifier avec les précédents; Aurunces entre le mont Circé et la Campanie; Sidicins entre le Loris et le Vulturne; au Sud de la Campanie, les Oenotriens avec lesquels les Grecs furent en contact pourraient être rattachés au groupe osque; de même, au Nord, les Latins; ceux-ci nous sont représentés comme le produit de la fusion de Sicules et de montagnards (Casci ou Aborigènes); Lavinium aurait été le centre des premiers, Albe celui des seconds. On rattache encore à ce groupe les Herniques, dans le bassin du Sacco (affluent du Liris [Garigliano]). La distinction entre les Osques et les Sabelliens d'Ombriens est assez faible; la langue était la même; la principale différence, c'est que les Osques habitaient la plaine et le littoral, les Sabelliens la montagne; les Ombriens étaient au Nord des précédents.

Les Sabelliens.
Les Sabelliens reprĂ©sentent la fraction la plus belliqueuse des Italiotes : celle qui s'agrandit aux dĂ©pens des autres dans la pĂ©riode prĂ©cĂ©dant la conquĂŞte romaine. On s'accorde Ă  dire que le peuple primitif, duquel dĂ©riveraient les autres, serait celui des Sabins. Ceux-ci occupaient la rĂ©gion la plus haute de l'Apennin, la vallĂ©e de l'Aterno entre le Gran Sasso et le Velino, et celle du Nar (Nera); leur centre Ă©tait, dans la haute plaine d'Amiternum (Aquila), la ville de Testrina. La grande extension que prirent les tribus issues des Sabins s'explique par la coutume du « printemps sacrĂ© ». Dans les calamitĂ©s, pour s'assurer la protection des dieux, on leur vouait tous les ĂŞtres Ă  naĂ®tre dans le printemps suivant : le bĂ©tail Ă©tait sacrifiĂ©; les hommes arrivĂ©s Ă  leur majoritĂ© s'expatriaient, comme un essaim d'abeilles. Ces Ă©migrants fondaient une nouvelle peuplade. Ainsi se seraient constituĂ©es celles des Picentins sur le versant adriatique entre l'Esino et le Toraino; des Vestins sur les pentes du Gran Sasso; des Marruccins au Sud de la Pescara; des Palignes autour du mont Majella; des Marses dans le bassin du lac Fucin. Ils formaient avec les Sabins le groupe sabellien septentrional. Au Sud de celui-ci s'Ă©taient Ă©panchĂ©s sur l'Apennin mĂ©ridional d'autres peuples de mĂŞme famille : les vaillants Samnites, confĂ©dĂ©ration de quatre tribus : CaracĂ©niens sur le haut Sangro (Sagrus); Pentriens entre les monts Matese et Montauro; Caudiniens dans la rĂ©gion de BĂ©nĂ©vent; Hirpins aux sources du Calore. A l'Est du Samniurn, les Frentans, le long de l'Adriatique, entre le Sangro et le Fortore; au Sud, les Lucaniens, par delĂ  le Silarus (Sele), complètent le groupe sabellien mĂ©ridional. Sa grande pĂ©riode d'extension fut le Ve et le IVe siècle, lorsque les Samnites conquirent la Campanie, et les Lucaniens le pays entre le Silarus et le golfe de Tarente, auquel leur nom est restĂ© durant toute l'AntiquitĂ©. 

On rattache à la famille sabellienne les montagnards pillards établis dans les montagnes qui dominent le Latium : les Eques dans la vallée de l'Anio; les Volsques dans celle du Léris, les monts Lepini et la plaine Pontine. Au Sud des Latins, le petit peuple des Rutules, absorbé dès le VIe siècle, occupait Ardée; on ne sait de qui les rapprocher : des Latins, des Étrusques ou d'autres?

Les Ombriens.
Les Ombriens s'étendaient au Nord des Osques et des Sabelliens. Les peuples que nous avons énumérés jusqu'ici ne formèrent jamais de système politique compact; au contraire, il semble bien que les Ombriens aient constitué une nation homogène à laquelle appartint à une époque reculée la domination de l'Italie centrale et même septentrionale. Ils partageaient celle-ci avec les Ligures. Ils furent refoulés par les Étrusques ou Rasenas; ceux-ci leur enlevèrent le bassin du Pô, puis les plaines ondulées de la Toscane où l'Ombrone conserve le nom des anciens maîtres du pays. Les Ombriens ne se maintinrent que dans la montagne, dans le bassin du Tibre, région qui conserve encore leur nom, autour de Sarsina, Camerinum, Iguvium, Nuceria, Spoletium, Tuder, Narnia, etc. Ils avaient d'abord vécu dans des villages ouverts, de sorte qu'à leur défaite par les Étrusques, ils perdirent d'un coup 300 villes; mais ensuite ils fortifièrent leurs bourgs montagneux. Ils entrèrent d'ailleurs dans l'orbite des Étrusques, les suivant en Campanie et s'associant à leurs luttes contre les Gaulois et contre Rome. La pression qui les rejeta vers le Sud fut évidemment la cause du mouvement général des populations sabelliennes; les Ombriens allèrent jusqu'au mont Gargano; mais surtout ils durent fournir de nombreux contingents aux peuples issus des Sabins; ces émigrations contribuèrent à les affaiblir. Ils restèrent divisés en tribus nombreuses; Pline en compte 47 de son temps. A l'époque historique, ils furent encore amoindris par l'invasion gauloise qui leur enleva la bande côtière entre le Rubicon et l'Ésino (Aesis).

Les Étrusques. 
Les Étrusques sont incontestablement le peuple le plus important de l'Italie jusqu'à l'époque romaine. Ils ne ressemblent à aucune des autres populations européennes. Une hypothèse les fait descendre des Alpes, où une partie de leurs descendants se seraient retirés plus tard en Rhétie. Les Rasenas, comme ils s'appelaient eux-mêmes, supplantèrent la nation ombrienne, lui enlevèrent le bassin du Pô, refoulèrent les Ligures dans les vallées des Apennins et des Alpes occidentales; ils franchirent l'Apennin, s'établirent dans les bassins de l'Arno, de l'Ombrone, à droite du Tibre, se superposant aux Ombriens et aussi aux Tyrrhéniens; ceux-ci eurent sur leurs vainqueurs une grande influence, au point que les voisins leur appliquèrent le même nom (grec Turseis, ombrien Turscum, latin Etrusci). L'Etrurie méridionale surtout demeura toute tyrrhénienne et conserva des rapports frappants avec la Grèce. L'arrivée des Étrusques était placée par leurs annales vers l'an 1200; elle correspondait dans une certaine mesure à l'expansion thessalo-dorienne en Grèce.

L'Étrurie septentrionale forma une confĂ©dĂ©ration de douze citĂ©s, dont nous ne savons pas grand-chose. Felsina (Bologne), Mantoue, Melpum sur l'Adda, Adria qui donna son nom Ă  la mer Adriatique, furent les plus cĂ©lèbres. Au nom des Étrusques se rattachent les immenses travaux d'endiguement, de canalisation et de drainage qui assainirent et mirent en valeur le bassin infĂ©rieur du PĂ´. Dans l'Etrurie proprement dite, la Toscane actuelle, ils en accomplirent d'aussi importants; le val de Chiana, la Maremme connurent alors une richesse qu'elles n'ont jamais retrouvĂ©e. Constructeurs de villes, guerriers, agriculteurs, commerçants, marins, les Étrusques se distinguaient en tout des autres peuples de l'Italie. Leurs marins parcouraient les mers Adriatique et TyrrhĂ©nienne auxquelles on garde justement leur nom. Ils y dominèrent pendant des siècles avant les Grecs et les Carthaginois qui leur enlevèrent la prĂ©pondĂ©rance dans la MĂ©diterranĂ©e orientale. La confĂ©dĂ©ration des douze citĂ©s qui se partageaient l'Etrurie toscane formait probablement une vĂ©ritable nation; le lien fĂ©dĂ©ral se relâcha plus tard et le morcellement prĂ©para la ruine de ce peuple Ă©nigmatique. 

Au temps de sa puissance, il s'Ă©tait Ă©tendu sur le Picenium, sur le Latium oĂą il colonisa Fidènes, Crustumeria, Tusculum; soumit les Volsques et les Rutules, sur la Campanie, oĂą, vers l'an 800 av. J.-C., s'organisa une troisième fĂ©dĂ©ration Ă©trusque; les principales citĂ©s Ă©taient Volturnum (Capoue), Nola, Acerrae, Herculanum, PompĂ©i; on y ajoute Nuceria, Calatia, Teanum, Cales, Suessa, Aesernia, Atella, pour complĂ©ter la douzaine. En Campanie, les Étrusques se trouvaient juxtaposĂ©s aux Grecs Ă©tablis lĂ  depuis le XIe siècle. Les rapports militaires et commerciaux furent continus et exercèrent sur l'Etrurie une action d'autant plus grande que la population tyrrhĂ©nienne y offrait un champ plus favorable et conservait un dialecte voisin du grec. Les citĂ©s de Caese, Pyrgi Ă©taient presque grecques; Tarquinies et Caese eurent leur trĂ©sor Ă  Delphes, comme Athènes. Vers le VIIIe siècle avant l'ère chrĂ©tienne, les Étrusques semblaient les maĂ®tres de l'Italie; leur marine dominait sur les deux rivages; le bassin du PĂ´, la Toscane, la Campanie leur appartenaient. 

Les Latins, les Ombriens subissaient leur ascendant. On ne peut méconnaître l'énorme influence exercée par les Étrusques sur les peuples voisins et en particulier sur les Romains. Ils ont fourni à L'État romain et à l'esprit romain plusieurs de leurs caractères essentiels. Leur puissance fut brisée par les Gaulois et les Grecs. Les Carthaginois avaient été de dangereux rivaux sur mer, s'installant en Sardaigne et en Corse, fermant le détroit de Gadès (de Gibraltar); mais ils laissaient aux Étrusques la mer Tyrrhénienne. Les Grecs vinrent les y attaquer. Des corsaires cnidiens s'établirent aux îles Lipari au milieu du VIe siècle et vainquirent la flotte étrusque. Les Rhodiens, les Phocéens lui infligèrent des défaites analogues; bien qu'avec l'alliance carthaginoise elle ait expulsé les premiers de Corse, Anaxilaos de Rhegium ferma aux Étrusques le détroit entre la Sicile et l'Italie. Les Syracusains furent des ennemis encore plus redoutables. Vainqueurs des Carthaginois à Himère, ils s'allièrent aux Ioniens de Cumes; auprès de cette ville, les Étrusques essuyèrent un désastre naval irréparable (474). Ils perdirent la mer; au siècle suivant, Denys de Syracuse put promener ses navires dans la mer Adriatique (387) et piller Pyrgi sur la côte toscane (383). Mais à cette époque la décadence des Étrusques était consommée. Les coups mortels leur furent portés par les Celtes.

L'Italie septentrionale.
Les Celtes. 
Au commencement du VIe siècle, les Celtes (Gaulois) passent les Alpes. Leur grand chef aurait été un Biturige, Bellovèse; on évalue leur nombre à 300 000. Ils défirent les Étrusques sur les bords du Tésin et leur enlevèrent la rive septentrionale du Pô; les Insubres s'y établirent entre le Tésin et l'Adda. Puis vinrent les Cénomans qui s'établirent entre l'Adda et l'Adige; les Boïes qui franchirent le fleuve et s'étendirent de la Trebbia au Reno; les Lingons, du Reno à la mer. Les cités étrusques succombèrent les unes après les autres; un dernier flot amena les Sénons qui détruisirent Melpum (396) et prirent pied le long de l'Adriatique entre le Rubicon et Ancône. Les Rasenas se retirèrent au Sud de l'Apennin, d'autres en Rhétie; leur civilisation disparut de la plaine septentrionale, où seule l'imprenable Mantoue en conserva quelque chose.

« Comme conquérants, les Gaulois ne dépassèrent pas les limites où s'était arrêtée l'invasion des Sénons. Mais cette peuplade vigoureuse, ces hommes avides de bruit, de butin, de combats, troublèrent longtemps la péninsule, comme tout l'ancien monde, avant que les légions pussent les saisir au milieu de leurs forêts et les fixer au sol. Ils habitaient des bourgs sans murailles, dormaient sur l'herbe ou la paille, ne savaient que combattre et un peu labourer. Vivant surtout de chair, ils n'estimaient que les troupeaux et l'or, richesses mobiles qui ne gênent point le guerrier et qu'il transporte partout avec lui. Sous leur domination, la Cisalpine retourna à la barbarie d'où les Étrusques l'avaient tirée : les forêts, les marécages s'étendirent; les portes des Alpes surtout restèrent ouvertes, et il en descendit continuellement de nouvelles bandes, qui réclamèrent leur part du pays de la vigne. Leur haute taille, leurs cris sauvages, leurs gestes emportés et menaçants, et cette ostentation de carnage qui, les jours de, bataille, leur faisait dépouiller tout vêtement. pour combattre nus, effrayèrent si fort les Italiens, qu'à leur approche il n'était personne qui ne s'armât. » (Duruy).
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Ils fournirent des mercenaires à quiconque les payait. Ils n'achevèrent même pas la conquête de l'Italie septentrionale. A côté d'eux subsistèrent à l'Ouest les Ligures, à l'Est les Vénètes.

Les Ligures.
Les Ligures, dont on ignore l'origine, qu'on a rapprochĂ©s des Ibères, mais dont l'origine est controversĂ©e, occupaient les montagnes riveraines de la MĂ©diterranĂ©e, depuis le RhĂ´ne jusqu'au PĂ´ et Ă  l'Arno; ils peuplaient aussi la Corse. Ils auraient refoulĂ© vers le Sud les Sicanes Ă  une Ă©poque très ancienne. Eux-mĂŞmes se seraient vu enlever la rĂ©gion entre l'Arno et la Macra par les Étrusques, mais plus tard la reprirent jusqu'aux portes de Pise. Ils se divisaient en une foule de petites tribus parmi lesquelles nous citerons de l'Est Ă  l'Ouest en Italie, le long de la mer, les Apuans, Ilvates, Ingaunes, IntĂ©mĂ©liens; dans l'intĂ©rieur, les Celelates, Statielles, Bagielles (sur le Tanaro), plus au Nord les Taurins sur le PĂ´, dans la rĂ©gion oĂą leur nom est restĂ© Ă  Turin. Dans les gorges inaccessibles de l'Apennin, les Ligures, Ă©miettĂ©s en autant de petits États qu'ils avaient de vallĂ©es, conservèrent leurs moeurs rustiques et leur Ă©nergie indomptable. 

« Point de villes, si ce n'est GĂŞnes, leur marchĂ© commun. Peu de peuples eurent une telle rĂ©putation d'activitĂ© laborieuse, de sobriĂ©tĂ©, de vaillance. »  (D.).
Il fallut quarante ans aux Romains pour en venir à bout, et ils n'y réussirent qu'en transplantant au loin les plus réfractaires.

Les Vénètes.
A l'Est de l'Adige, les Vénètes occupaient depuis un temps immémorial le pays où vivent encore leurs descendants. Ils paraissent avoir refoulé dans la montagne les Euganéens, desquels nous ne savons d'ailleurs absolument rien. Nous ne sommes guère mieux renseignés sur les Vénètes qu'on a rapprochés tour à tour de leurs homonymes gaulois, des Vendes slaves des bords de la Baltique, des Hénètes de Paphlagonie. Il paraît vraisemblable qu'ils se rapprochaient plutôt des Illyriens. Ils avaient apparemment une civilisation moins fruste que celle des Celtes contre lesquels ils guerroyaient sans cesse; ils combattaient aussi au Nord les Carnes, qui peuplaient les Alpes dites aujourd'hui Carniques, et à l'Est les Istriens et Liburnes, deux populations illyriennes. Alliés à Rome contre leurs ennemis les Gaulois, ils acceptèrent son hégémonie sans résistance et ne se rebellèrent jamais. Leur capitale était, dit-on, Patavium (Padoue), la plus belle de leurs cinquante villes.

Les autres peuples.
Le long du rivage de l'Adriatique s'échelonnaient une série de peuples qu'on rattache aux Illyriens ou aux Grecs, et parfois aux deux ensemble. Outre les Praetutii du Picenum méridional, il faut nommer les habitants de la belle plaine du Sud-Est, Dauniens, Peucétiens, Sallentins, Messapiens ou Iapyges. Les derniers étaient proches parents des Grecs.

La décadence des colonies grecques.
L'histoire générale de l'Italie s'éclaircit à partir du Ve siècle. A ce moment se produit une réaction des éléments italiotes contre les Étrusques et les Grecs. Affaiblis par leurs luttes, par leurs divisions intestines, par les attaques des Gaulois, les deux nations maritimes reculent. Les Samnites conquièrent la Campanie; en 424, ils s'emparent par trahison de Volturnum, qui reçoit le nom de Capoue; en 420, ils sont maîtres de Cumes. Les Étrusques de Campanie disparaissent; les Grecs sont asservis et ne se maintiennent péniblement qu'à Naples. Puis entrent en scène les Lucaniens, les pires ennemis de la Grande-Grèce. Déjà les Iapyges avaient infligé un désastre sanglant aux Tarentins. Les Lucaniens s'étendent sur l'ancien domaine de Sybaris, entrent en conflit avec Thurii, après avoir pris Posidonia. Les cités achéennes et ioniennes forment une ligue pour résister (393). Mais elles sont prises à revers par le tyran de Syracuse, Denys, qui vient de s'emparer des cités chalcidiennes de Sicile. En 390, les confédérés essuient un désastre sur le Laüs; les Lucaniens vainqueurs s'emparèrent de l'extrémité méridionale de la péninsule, réduisant les cités grecques à leur banlieue. Denys, allié aux Lucaniens et à Locres, défit à son tour les confédérés sur l'Hélore (389) et s'empara de Caulonia et d'Hipponium, puis de Rhegium (387). Les Lucaniens devinrent si redoutables que Denys le Jeune dut renoncer à la politique de son père et les combattre. Puis les indigènes de la péninsule, exaspérés des pillages sans fin, se soulevèrent, formant un nouveau peuple sous le nom de Bruttiens (356); mais ceux-ci se rendirent aussi redoutables aux Grecs que les Lucaniens; Terina, Hipponium tombèrent entre leurs mains; Crotone, abaissée par Denys l'Ancien, se défendit péniblement. Les cités du golfe de Tarente résistèrent mieux, surtout Tarente qui hérita de la fortune des colonies achéennes. Ses richesses lui permirent de soudoyer des mercenaires : Archidamus, roi de Sparte, vainquit d'abord les Messapiens et Lucaniens, mais finit par une défaite à Mandiona (338); Alexandre, roi d'Épire, eut plus de succès (332-326). Il infligea une série de défaites aux Lucaniens et aux Bruttiens, reprit Terina, Consentia, se querella avec les Tarentins, leur enleva Héraclée et finit par être assassiné. En 303, les Tarentins appelèrent de Sparte- Cléonyme, qui imposa la paix aux Lucaniens et s'empara de Métaponte. Le tyran de Syracuse, Agathocle, reprit le projet de Denys de constituer un empire italo-sicilien; il occupa Crotone, Hipponium, s'allia aux Iapyges et aux Peucétiens, combattit Tarente et disparut sans rien laisser de durable (289). Bientôt après, les Romains parurent dans la Grande-Grèce, et en dix ans la soumirent. Ils étaient déjà maîtres du reste de la péninsule.

L'hégémonie de Rome

La conquĂŞte romaine.
Le retour offensif des Ă©lĂ©ments indigènes inaugurĂ© par les Sabelliens fut continuĂ© par les Romains. Ce n'est pas ici le lieu de retracer l'histoire des origines de la citĂ© du Tibre et de sa grandeur. Nous nous contenterons de rappeler les faits essentiels. Le peuple romain rĂ©sulte d'un mĂ©lange de Latins et de Sabins, auxquels s'ajoutèrent des Étrusques; sous une dynastie toscane fortement hellĂ©nisĂ©e, elle acquit une puissance dont tĂ©moigne l'Ă©tendue de l'enceinte de Servius Tullius. La chute de cette dynastie (509), suivie d'une guerre malheureuse contre le monarque de Clusium, rĂ©duit Rome Ă  son territoire propre. Elle conserve une partie de son importance Ă©conomique, et son caractère composite, n'ayant et n'excitant chez aucun des peuples voisins de haine xĂ©nophobe, les  absorbant aisĂ©ment et propageant sa nationalitĂ© par le système des colonies. Elle guerroie au Ve siècle contre les Étrusques de Veies et Fidènes, contre les Sabins, les Éques et les Volsques, alliĂ©e aux Latins qu'elle protège. Après avoir dĂ©truit Veies, elle subit le choc des Gaulois SĂ©nons (Senones). Ceux-ci, continuant de refouler les Étrusques, se heurtent aux Romains; ils les Ă©crasent et brident leur ville. Pendant plusieurs annĂ©es, les bandes gauloises dĂ©vastent la rĂ©gion du Tibre. Quand elles se retirent, Rome qui s'est relevĂ©e et a rĂ©organisĂ© son armĂ©e, profite de l'affaiblissement gĂ©nĂ©ral de ses voisins. Quand elle a consommĂ© la fusion de ses patriciens et plĂ©bĂ©iens (366), sa grandeur est assurĂ©e. Les nouvelles incursions gauloises (367-49) sont repoussĂ©es; les Herniques et les Latins renouvellent leur alliance avec Rome; les Volsques et les Éques sont presque exterminĂ©s; l'Étrurie mĂ©ridionale est subordonnĂ©e. L'État romain Ă©tend en 343 de la forĂŞt ciminienne au Liris sa domination ou son protectorat.

Rome engage avec les Sabelliens une guerre acharnée qui décidera de la suprématie en Italie. L'État romain leur arrache la Campanie, écrase les Samnites; successivement tous les peuples de l'Italie centrale sont impliqués dans la lutte : Étrusques et Ombriens y jouent leur indépendance comme les Samnites. Mais leurs divisions, le manque d'unité dans leurs opérations assurent la victoire aux Romains. Lorsqu'il se forme enfin une coalition générale à laquelle participent les Gaulois Sénons, elle est vaincue dans la terrible bataille de Sentinum (295) qui décide le sort de l'Italie. Rome entre alors en conflit direct avec les Grecs et les Gaulois. La grande cité de l'Italie méridionale, Tarente, lui tient tête. Les Sénons, après une brillante victoire, sont exterminés. Les Boïens levés pour les venger sont massacrés au lac Vadimon; pendant un demi-siècle les Gaulois resteront en paix avec Rome. Elle dompte les Lucaniens et Bruttiens et, malgré le talent de Pyrrhus, conquiert la Grande-Grèce et Tarente (272). La défaite des Picentins (268) et des Sallentins (266) consomma l'unité italienne. La frappe d'une monnaie d'argent atteste l'entrée de l'Italie romaine dans le système économique des grandes nations du monde antique (269). Elle se crée une flotte, et, profitant de sa situation au centre de la Méditerranée entre l'Occident barbare et l'Orient anarchique et démoralisé, elle va étendre sa domination sur tout le bassin de la Méditerranée. L'unification de l'Italie par les Romains consommée en 266 devait durer plus de huit siècles, jusqu'à l'invasion lombarde. Cependant, l'unité politique précéda l'unité morale; les résistances des Italiens se manifestèrent encore à plusieurs reprises durant deux siècles.

La lutte qui livra aux Romains l'empire du monde antique fut engagĂ©e pour la possession d'une annexe de l'Italie, la Sicile. La première guerre punique la leur donna, et bientĂ´t après ils y ajoutèrent la Sardaigne et la Corse, dont la soumission ne fut achevĂ©e qu'un siècle plus tard. Puis vint celle de la rĂ©gion continentale, du bassin du PĂ´. CommencĂ©e, en 232, interrompue par la seconde guerre punique, elle fut reprise; en 191, la Cispadane est conquise; la Transpadane le fut ensuite. Les VĂ©nètes ne rĂ©sistèrent pas. L'Istrie fut subjuguĂ©e en 177. Les Ligures, combattus depuis 236, ne furent domptĂ©s qu'en 158. A cette date, toute l'Italie continentale obĂ©it aux Romains. Dans la pĂ©ninsule, Hannibal avait soulevĂ© les Sabelliens et les Grecs; les effroyables ravages de la Seconde Guerre punique eurent une influence nĂ©faste pour l'avenir de l'Italie. La Grande-Grèce en sortit ruinĂ©e; le centre de la pĂ©ninsule fut dĂ©peuplĂ©. La concurrence du blĂ© de Sicile, puis d'Égypte, ruinant les laboureurs italiens, les pâturages Ă  esclaves s'agrandirent au dĂ©triment des champs. L'antagonisme croissant au IIe siècle entre les Italiens et les Romains se traduisit par la guerre sociale, rĂ©volte des Italiens qui tentèrent de se constituer en nation Ă  cĂ´tĂ© de Rome (90-89). Ce fut encore une insurrection des Sabelliens; on la noya dans le sang; après ces rĂ©pressions et les massacres qui signalèrent la victoire de Sylla sur les partisans de Marius, le Samnium fut rĂ©ellement un dĂ©sert. La dernière opposition collective de l'Italie contre ses maĂ®tres se manifesta contre les triumvirs, Ă  l'occasion des expropriations faites pour donner des terres aux vĂ©tĂ©rans. Elle provoqua la rĂ©volte de l'an 41 (guerre de PĂ©rouse) qu'Octave rĂ©prima fĂ©rocement. L'Etrurie et l'Ombrie furent dĂ©peuplĂ©es. Après cette longue sĂ©rie de guerres et de proscriptions, l'immense majoritĂ© des anciens Italiens avaient pĂ©ri. Les esclaves importĂ©s du dehors, Celtes, Phrygiens, Syriens, Africains, Ibères, Germains et leurs descendants affranchis formaient la majoritĂ© de la population des villes et des campagnes. 
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La conquĂŞte de l'Italie par les Romains.

L'Italie romaine.
L'Italie conserva dans l'Empire romain une place Ă  part. Elle ne fut pas assimilĂ©e aux provinces, aux pays conquis; elle avait participĂ© avec Rome Ă  la conquĂŞte du monde connu et fut traitĂ©e en vassale plutĂ´t qu'en sujette. A la suite de la guerre sociale, tous les Italiens avaient reçu le droit de citĂ© romaine, ce qui les assimilait aux Romains. Sans doute, une foule de citĂ©s furent, par les assignations de terres aux vĂ©tĂ©rans, transformĂ©es en colonies; mais les autres gardèrent Ă  titre de municipes leurs institutions locales. En fait, le rĂ©gime des uns et des autres fut le mĂŞme. L'Italie, comparĂ©e aux provinces, gardait tous ses privilèges. Soumise directement aux magistrats de Rome, elle relève de leurs tribunaux (SĂ©nat, empereur, consuls, prĂ©teurs, prĂ©fets de la ville et du prĂ©toire). Le service militaire n'est plus obligatoire (en fait sinon en droit) depuis le règne d'Auguste; les gardes prĂ©toriennes et urbaines sont formĂ©es en grande majoritĂ© d'Italiens. L'esprit militaire se perd; les milices municipales ne sont mĂŞme pas en Ă©tat de rĂ©primer le brigandage qui compromet partout la sĂ©curitĂ© personnelle, jusqu'aux portes de Rome. L'immunitĂ© financière que le SĂ©nat avait laissĂ©e aux Italiens pour Ă©viter leurs rĂ©voltes, ne fut suspendue que du triumvirat de 43  Ă  l'Ă©tablissement dĂ©finitif de l'Empire, après la bataille d'Actium. Le tribut, impĂ´t, extraordinaire, ne fut pas exigĂ©; l'or coronaire ne fut votĂ© que pour la forme et remis par le prince; l'impĂ´t du vingtième sur les affranchissements Ă©tait le seul que payât rĂ©gulièrement l'Italie Ă  la fin de la RĂ©publique. Une taxe de 1%  sur les ventes, une taxe du vingtième sur les hĂ©ritages et donations, l'impĂ´t sur les cĂ©libataires furent crĂ©Ă©s par Auguste. L'Italie resta dispensĂ©e de l'impĂ´t provincial, parce que celui-ci reposait sur la thĂ©orie que le peuple romain Ă©tait propriĂ©taire des pays conquis, n'en laissant aux provinciaux que l'usufruit, moyennant un tribut. Les travaux publics, routes, postes, furent confiĂ©s Ă  des dĂ©lĂ©guĂ©s de l'empereur.

La grande innovation du nouveau régime fut la division de l'Italie en régions; ce fut une première atteinte à l'unité. Auguste institua onze régions :

La première comprit les plus anciennes conquêtes de Rome, le Latium ancien et nouveau (pays des Volsques, Herniques et Aurunces) et la Campanie avec Salerne et les cités du haut Vulturne (AIlifae, Callifae, Telesia, Venafrum) on l'appela Latium et Campanie, puis Campanie seulement. Elle eut pour limite méridionale le Silarus (aujourd'hui Sele).

La deuxième, appelée Apulie et Calabre, comprit les populations iapygiennes ou messapiques, plus une fraction des Samnites, les Hirpins et Larmates (détachés des Frentans). Elle eut pour limite occidentale le Bradanus.

La troisième région comprit la Lucanie et le Bruttium au Sud du Silarus et à l'Est du Bradanus.

La quatrième, le Samnium (moins les cantons des Hirpins, des Larinates et du haut Vulturne) et les Sabelliens septentrionaux, Marses, Marruccins, Vestins, PĂ©ligniens, Sabins (avec Tibur et Fidènes). 

La cinquième, la plus petite, ne comprit que le Picenum, de l'Aternus Ă  l'Aesis. 

La sixième, l'Ombrie proprement dite (Vilombrie) et l'Olombrie, ancien pays des Gaulois SĂ©nons entre l'Utens (aujourd'hui Montone) et l'Aesis; mais on en retira Ariminum (Rimini). 

La septième correspondait à l'Etrurie ou Toscane (Tuscia), de la Magra au Tibre.

Le huitième était l'ancien territoire des Boiens, remplacés par des colons latins, auquel on adjoignit Ravenne et Arimmum; on l'appelait Gaule cispadane; mais peu à peu le nom de sa grande route (via Aemilia), prévalut et le nom usuel fut celui d'Émilie.

La neuvième, qu'on appela Ligurie, s'Ă©tendait du Var Ă  la Magra et de la MĂ©diterranĂ©e au PĂ´; seules Nice et Monaco Ă©taient grecques. 

La dixième qu'on appela Vénétie (et souvent Transpadane) comprit l'Istrie, entre le Formio et l'Arsa, les cités des Vénètes, des Carnes et d'une partie des Cénomans.

La onzième rĂ©gion comprit la plupart des citĂ©s gauloises du Nord du PĂ´ et d'autres Ă  demi ligures comme Verceil et Ticinum (Pavie); on l'appela Transpadane. 

Cette division, à peu près conforme au passé historique, eut une grande importance et demeura la base des remaniements ultérieurs.

L'Italie impériale.
Le programme des empereurs Ă©tait d'unifier l'Empire et par consĂ©quent d'assimiler l'Italie aux provinces, mais il ne s'exĂ©cuta que lentement. Au Ier siècle ap. J.-C. la pĂ©ninsule est toujours gouvernĂ©e par les magistrats de Rome. Au IIe siècle, les Antonins rĂ©gularisent l'administration par la crĂ©ation des « curateurs des citĂ©s  », qui contrĂ´lèrent les budgets municipaux, et des « juges des rĂ©gions », qui joignirent au pouvoir judiciaire la haute administration des rĂ©gions qu'on leur confiait. Au IIIe siècle s'accomplit la transformation de l'Italie en province. De nouveaux fonctionnaires, les correcteurs, y exercent les fonctions de gouverneur, joignant aux pouvoirs administratifs, financiers et judiciaires, l'autoritĂ© militaire. Après DioclĂ©tien, on renonce Ă  la fiction qui distingue l'Italie du reste de l'Empire; ses rĂ©gions prennent le nom de provinces Ă  partir du règne de Maximien. L'Italie est divisĂ©e alors en huit provinces :

La Transpadane (dont on a détaché Bergame); la Vénétie et Istrie;

L'Émilie et Ligurie réunissant les anciennes 8e et 9e régions ;

La Flaminie et Picenum comprenant :

1° l'ancien territoire gaulois sénon qu'on avait détaché de l'Ombrie dès la fin du Ier siècle sous le nom de Flaminie (emprunté à la voie Flaminienne);

2° le Picenum proprement dit (5e région);

3° les Sabelliens du Nord, soit la moitié de la 4e région, annexée au Picenum;

La Toscane et Ombrie; 

La Campanie et Samnium (auquel on rendit le district des Larinates);

 La Lucanie et Bruttium (accrue au Nord du pays des Picentins du Sud ou canton de Salerne enlevĂ© Ă  la Campanie);

L'Apulie et Calabre qui comprend toujours BĂ©nĂ©vent et les pays des Hirpins. 

On ajouta Ă  ces huit provinces les Ă®les (provinces de Sicile, de Sardaigne, de Corse), la RhĂ©tie et les Alpes Cottiennes pour former le diocèse d'Italie. La capitale administrative fut Milan. On laissait subsister le diocèse urbain, comprenant Rome et sa banlieue; pour certaines prĂ©rogatives, la limite Ă©tait le centième mille Ă  partir de Rome; pour d'autres affaires l'enceinte de la ville. Les combinaisons administratives varièrent : Ă  partir de 320 on gĂ©nĂ©ralisa la division en Italie urbicaire (comprenant la pĂ©ninsule et les Ă®les), administrĂ©e par le vicaire de Rome, et Italie annonaire ou proprement dite comprenant la Gaule cisalpine. Le mot d'Italie dĂ©signe soit le diocèse unique d'Italie, soit l'un des deux (quand il y en avait deux) et de prĂ©fĂ©rence celui du Nord (auquel on rĂ©unit l'ancien diocèse de Pannonie), l'autre s'appelait diocèse de Rome; soit encore la prĂ©fecture du prĂ©toire, embrassant outre ces diocèses ceux d'Afrique et d'Illyrie occidentale. 

L'Italie supporte, au Bas-Empire, toutes les charges des autres provinces: service militaire, impôts sont les mêmes. Quand la capitale fut transportée à Constantinople, l'Italie ne différa plus des autres parties de l'Empire; elle fut, comme la Gaule ou l'Espagne, un agrégat de provinces. La vie municipale et provinciale avait été favorisée par les empereurs. Si elles déclinent, c'est en dépit de leurs efforts. Les vieilles divisions nationales tendent à reparaître dans les limites antiques. Durant le courant du IVe siècle le Samnium recouvre les cités du haut Vulturne et Bénévent. On sépare l'Émilie de la Ligurie; la Sabine reparaît à part sous le nom de Valérie, emprunté à la voie qui la traverse; la Flaminie est également constituée en province distincte. Puis la séparation de l'Italie en deux diocèses se traduit par le fractionnement de l'Etrurie en Tuscie annonaire (septentrionale) et Tuscie urbicaire; d'autre part, on remanie encore l'ancienne Ombrie, séparant d'une part la province de Flaminie et Picenum annonaire, région côtière (aujourd'hui Marche), de celle de Flaminie et Picenum urbicaire, région de l'Apennin. Dans l'Italie proprement dite, c.-à-d. continentale, on réunit la Transpadane à la Ligurie. Plus tard, entre 538 et 555, on découpera cette Ligurie comprise entre les Alpes, l'Adda et la mer; le nom de Ligurie restera à la région au Nord du Pô (ancienne Transpadane) tandis qu'on appliquera celui d'Alpes Cottiennes à l'ancienne Ligurie au Sud du Pô (Gênes, Robbio, Tortone, Acqui). Sous des noms parfois nouveaux subsistent les divisions naturelles et historiques. Lorsque le pouvoir central va s'affaisser et que l'intrusion des Barbares dans les cadres de l'Empire l'aura disloqué, le fractionnement de l'Italie se fera de lui-même. Toutefois, il faut tenir compte des circonstances qui l'aggravèrent et détruisirent pour quinze siècles l'unité réalisée par les Romains.

Durant les deux premiers siècles du Bas-Empire, l'Italie est encore le centre d'un des gouvernements qui se partagent l'Empire. Maximien, Constant y résident, puis Valentinien, Gratien, Honorius et ses faibles successeurs. Mais de plus en plus on délaisse Rome; la résidence impériale est d'abord Milan; quand l'Italie est devenue frontière, les empereurs s'abritent derrière les canaux et la forte enceinte de Ravenne. La première invasion fut celle d'Alaric (402); puis vinrent les bandes de Radagaise (405); après l'assassinat de Stilicon, le retour d'Alaric et le pillage de Rome (410). Son successeur Ataulf emmène hors d'Italie les Wisigoths (412). En 452 vient Attila; en 455, Genséric saccage Rome. Les derniers empereurs d'Occident sont les jouets de leurs mercenaires barbares. L'un de ceux-ci, Odoacre, envoie les insignes imperiaux à Constantinople (476) et essaye de fonder un royaume en Italie. Mais cette histoire appartient déjà au Moyen âge. (F. Henneguy).

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