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L'organisation
interne des abeilles
anatomie, reproduction |
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L'anatomie
des Abeilles
L'organisation interne des Abeilles est celle de beaucoup d'autres Hyménoptères, surtout des Apidés. Elle présente cependant quelques particularités intéressantes. L'appareil digestif se compose d'un oesophage grêle, cylindrique, accompagné, à son origine, de glandes salivaires complexes; d'un jabot piriforme, servant de réservoir au miel et concourant peut-être à son élaboration; d'un estomac allongé, cylindrique, plissé en travers, séparé du jabot par un rétrécissement très marqué; d'un intestin grêle court, sur lequel s'insèrent un grand nombre de canaux de Malpighi, longs et très grêles, terminés en cul-de-sac; enfin, d'un gros intestin court et d'un rectum plus étroit, terminé par un anus muni d'un sphincter. Chez l'ouvrière, les glandes salivaires, très volumineuses, sont au nombre de trois paires : une paire thoracique, signalée par Ramdohr, dès 1811, et deux paires cervicales, l'une supérieure, l'autre postérieure, découvertes par Meckel en 1846; ces trois paires de glandes ont commencé à être étudiées au point de vue histologique, par Leydig, en 1859. L'appareil à
venin.
Le venin lui-même est toujours acide; il est constitué par le mélange de deux liquides, l'un fortement acide, l'autre faiblement alcalin, et n'agit que par la présence de ces deux liquides ( Dr G. Carlet, Sur le venin des Hyménoptères et ses organes excréteurs, dans les Annales de la Société entomologique de France, 1884, Bulletin, p. 108). A l'autre extrémité du réservoir, s'ouvre un canal excréteur étroit qui se termine à l'appareil vulnérant. Celui-ci est fixé au corps par quatre muscles spéciaux, deux protracteurs, deux rétracteurs, et pénétré par des trachées et des filets nerveux; il offre : une base, constituée par plusieurs pièces (8 d'après Swammerdam et Audouin, 6 d'après Réaumur, 9 d'après Duméril) unies entre elles par des membranes résistantes; un étui ou gorgeret, sorte de tige cornée cylindrique, diminuant progressivement de grosseur jusqu'à son extrémité qui est aigus; enfin, un dard ou aiguillon, formé de deux stylets longs et grêles, adossés l'un à l'autre par leur face interne, qui est plane et creusée d'un étroit sillon. Ces deux stylets sa terminent en une pointe acérée, munie de dents microscopiques barbelées, dirigées en arrière, au nombre de neuf chez les ouvrières, de cinq seulement chez les femelles fécondes. D'après les observations faites par le Dr. G. Carlet (loc. cit. p. 109), « les deux stylets ont à leur base, du côté dorsal, un organe appendiculaire qui fait complètement défaut chez les Diploptères. Cet organe occupe toute la profondeur de la partie renflée du gorgeret et se meut dans toute la longueur de cette base de l'aiguillon; c'est un véritable piston dont le stylet est, la tige et le gorgeret le corps de pompe. Il a la forme d'une épaulette dont les filets chitineux sont réunis en une membrane qui se développe sous la pression du liquide quand le piston descend, et se rabat ensuite lorsqu'il remonte pour laisser passer le liquide situé au-dessous de lui. Les deux stylets de l'aiguillon se meuvent tantôt simultanément, tantôt alternativement; mais, dans les deux cas, chaque coup de piston lance une goutte de venin dans la plaie, en même temps qu'il produit, à la base du gorgeret, un nouvel afflux de liquide, L'appareil d'inoculation du venin, chez les Abeilles et autres mellifères, est donc à la fois un aspirateur et un injecteur : sa forme est celle d'une seringue â canule. perforante qui, munie de deux pistons à parachute, lance par la canule le liquide qu'elle aspire par la base du récipient; autrement dit, c'est une seringue à canule perforante qui se charge et se décharge à chaque coup de piston. »L'aiguillon est, avant tout, un appareil de défense. Cependant, il sert probablement aussi d'auxiliaire dans la ponte des oeufs et présente par cela même, au point de vue anatomique, une certaine analogie avec la tarière des Hyménoptères térébrants; mais tandis que celle-ci est fixe et, en général, plus ou moins saillante au dehors, l'aiguillon est rétractile et toujours caché dans l'abdomen pendant le repos. |
La douleur vive et aiguë que l'on ressent au moment où l'on est piqué par une Abeille est due à l'action irritante du venin sécrété par l'insecte et presque toujours aussi à la présence de l'aiguillon dans les tissus. Cette piqûre, en général peu grave dans ses conséquences, donne naissance à une petite tumeur ronde, d'un rouge érysipélateux, souvent oedémateuse. Il se produit un peu de frisson, quelquefois même un peu de fièvre, surtout chez les jeunes enfants; mais ces symptômes disparaissent promptement et, quelques heures après l'accident, il n'en reste plus de trace. Le traitement consiste d'abord à extraire l'aiguillon, si celui-ci est resté dans la plaie, et en prenant soin de ne pas presser la poche à venin si celle-ci est restée accrochée à l'aiguillon, puis à faire, sur le point lésé, des fomentations avec de l'ammoniaque, du vinaigre, de l'eau de Cologne et même des solutions salines. |
Le
système nerveux.
Le système nerveux se compose de deux ganglions cérébroïdes, beaucoup plus développés chez les ouvrières que chez les mâles, d'un ganglion sous-oesophagien, de deux ganglions thoraciques et de ganglions abdominaux au nombre de cinq chez l'ouvrière, de quatre seulement chez le mâle et la femelle féconde. Outre ce système nerveux principal, il en existe deux autres plus réduits, destinés aux appareils de la vie organique et que l'on considère comme les analogues des nerfs pneumogastriques et du grand sympathique des Vertébrés. L'un, situé au-dessus du tube digestif, est le système stomato-gastrique, dont les ganglions distribuent des filets nerveux aux organes de la digestion, de la circulation et de la respiration ; l'autre, que Newport a désigné sous le nom de surajouté, est médian, impair et superposé à la chaîne abdominale; il offre, par chaque anneau, un petit ganglion triangulaire, d'où partent des nerfs latéraux rejoignant par anastomose les nerfs latéraux issus des ganglions de la chaîne abdominale. A la base des antennes, se trouve chez les Abeilles une petite cavité que Leydig a considérée comme un organe de l'olfaction, mais qui, selon Lanessan, pourrait bien être l'organe de l'audition, s'il est vrai, dit-il, que l'organe de l'odorat ait son siège près de la bouche, comme le pensait Huber et comme l'assurait le Dr Wolf. D'après ce dernier auteur (Aperçu préliminaire sur l'organe de l'odorat dans l'Abeille, dans le journ. l'Apiculteur, 1875, p. 240), l'organe olfactif, extrêmement développé chez les femelles fécondes, se composerait d'une paire de cavités s'ouvrant dans le pharynx, avec des mouvements rythmiques pour la rentrée et la sortie de l'air, et offrant une membrane pituitaire, ainsi que de nombreux filets d'un nerf olfactif; à la racine de chaque mandibule existerait un gros follicule sécrétant un liquide âcre, qui rougit la teinture de tournesol et répand une odeur aromatique.Les appareils circulatoire et respiratoire. L'organe de la circulation est un vaisseau dorsal ou coeur, logé dans l'abdomen et formé de cinq chambres allongées, dont la plus antérieure se continue en avant par une aorte droite, non contractile, qui se prolonge au-dessus de l'oesophage jusque dans la tête, où elle se termine près des ganglions cérébroïdes. |
La respiration
s'effectue au moyen de trachées naissant des stigmates ou orifices
respiratoires, que l'on observe sur les côtés du thorax
et sur les parties latérales de l'abdomen. Les trachées présentent,
dans la cavité abdominale, deux vastes dilatations ou vésicules
trachéennes, qui se terminent en culs-de-sac et communiquent avec
deux autres vésicules analogues, mais beaucoup moins développées,
situées dans le thorax. Ces vésicules trachéennes
tiennent en réserve l'air nécessaire non seulement à
l'hématose, mais encore à la production de force musculaire
et de chaleur liées à la puissante locomotion de l'insecte;
elles servent également, suivant leur extension et le poids variable
d'air qu'elles renferment, à ralentir ou à accélérer
le vol, par variation de la densité spécifique moyenne. Les
stigmates
sont entourés d'un cadre chitineux ovalaire
appelé péritrème. Chacun d'eux est pourvu,
en dedans, d'un appareil obturateur auquel Strauss-Durckheim a donné,
le nom d'épiglotte et qui peut
se fermer à la volonté de l'animal de façon à
empêcher l'entrée ou la sortie de l'air. En avant de cet appareil
obturateur et entre les bords de l'orifice stigmatique, se trouve placé
l'organe principal du bourdonnement; cet organe est constitué par
une petite vésicule trachéenne et un prolongement de la membrane
interne du stigmate, formant deux lamelles plus ou moins plissées
et frangées, qui vibrent par l'air et donnent, suivant leur tension,
un son de hauteur variable, mais toujours plus aigu que celui produit par
le mouvement des ailes. Le bourdonnement n'est donc
pas dû uniquement à la vibration des ailes pendant le vol.
D'après H. Landois, qui a donné la notation musicale des
bourdonnements (Zeitschrift für
Wissensch. Zool. , Siebold et Kölliker, 1868, p. 173), le ton
stigmatique est si5 et le ton alaire la4,
dans l'Abeille domestique.
L'appareil reproducteur.
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Appareil
génital mâle de l'Abeille.
T,
T, testicules; C, O, canaux déférents avec les vésicules
séminales;
V,
glandes mucipares; H, pénis rétracté dans son fourreau;
E,
rectum, (d'après Lanessan).
Les femelles fécondes ou mères-abeilles possèdent deux ovaires conoïdes, placés, comme les testicules des mâles, de chaque côté de l'intestin. Chacun de ces ovaires est formé par la réunion d'un grand nombre de tubes terminés en culs-de-sac, et dont toutes les extrémités sont reliées par deux ligaments supérieurs communs fixés à la paroi antérieure de l'abdomen. Les oeufs se forment dans les culs-de-sac ovariens, mais ils ne possèdent en ce point qu'un très petit vitellus; à mesure qu'ils descendent dans l'ovaire, ils augmentent de volume en absorbant des cellules produites par la multiplication de l'épithélium qui tapisse le tube glandulaire; ils sont alors d'un blanc jaunâtre et disposés dans chaque tube à la file les uns des autres comme les grains d'un chapelet. Tous les tubes ovariques d'un même côté se réunissent, à leur extrémité postérieure, en un oviducte cylindrique peu allongé qui rejoint celui du côté opposé et forme, par sa réunion avec lui, un vagin cylindrique, large et court, dont les parois sont pourvues de fibres musculaires et parsemées çà et là de cellules agglomérées sécrétant un liquide visqueux destiné, d'après Leuckart, à fixer chaque oeuf au fond de l'alvéole dans lequel il doit être déposé. Dans le vagin s'ouvre, par l'intermédiaire d'un petit tube ou conduit séminal, une poche arrondie (spermathèque ou poche copulatrice d'Audouin), de la grosseur d'un grain de millet, dans laquelle s'accumulent les spermatozoïdes après la copulation. |
Chez les ouvrières,
la spermathèque, de même que les ovaires, reste à l'état
rudimentaire. Quelques-unes cependant possèdent parfois des ovaires
suffisamment développés pour qu'il s'y forme des oeufs. Dans
ce cas, les oeufs sont pondus sans fécondation préalable
et ne donnent exclusivement naissance qu'à des mâles. Ce phénomène,
désigné sous le nom de Parthénogénèse,
peut se produire également chez les mères vierges, ainsi
qu'il résulte des observations faites, en 1845, par Dzierzon, curé
de Carlsmark, en Silésie.
La reproduction des Abeilles Dans le genre Apis, la femelle féconde ne s'accouple jamais qu'une seule fois, et cette copulation unique suffit pour féconder les oeufs qu'elle pond pendant les trois ou quatre années que dure ordinairement son existence; ceci s'explique par la quantité énorme de spermatozoïdes (25 000 000, d'après Leuckart) que renferme la spermathèque. L'accouplement a lieu dans les airs à une très grande hauteur. Avant qu'il fût exactement connu, ce mode de fécondation avait donné lieu à diverses hypothèses. Suivant Swammerdam, l'odeur forte que les mâles répandent à certaines époques devait être considérée comme un aura seminalis qui, en pénétrant subtilement dans le corps de la femelle, opérait la fécondation. Réaumur supposait bien qu'il y avait accouplement, mais il ne put réussir à en acquérir la preuve. Huber père éprouva le même insuccès. De Braw affirmait, de son côté, que les oeufs étaient fécondés par les mâles à la . façon de ceux des Batraciens et de certains Poissons (Saumon, Brochet, etc.). Enfin, Moufet, le premier, émit l'opinion que la mère-abeille devait être fécondée en dehors de la ruche, et cette opinion fut confirmée par Jonska, en 1770,. par François Huber, en 1791, et ultérieurement, par plusieurs observateurs américains ( Langstroth, Copulation de l'Abeille-mère, dans le journ. l'Apiculteur, 6e année, p. 79), notamment par Carey, qui put constater directement les diverses circonstances dans lesquelles s'opère l'acte de la copulation. Cet acte accompli, la mère-abeille rentre à la ruche, le plus souvent en portant, suspendu à son orifice génital, un petit fil blanc qui n'est autre chose que l'extrémité postérieure du pénis du mâle.Environ deux ou trois jours après avoir été fécondée, la mère-abeille commence à pondre. Préalablement, elle examine avec soin toutes les cellules en y enfonçant sa tête et en les visitant en tous sens. Cette précaution prise, elle introduit l'extrémité de son abdomen dans la cellule et y laisse tomber un oeuf qui se fixe dans le fond par la matière visqueuse dont il est enveloppé. Cet oeuf, d'un blanc de perle un peu bleuâtre, est presque toujours un oeuf de sexe approprié à la grandeur de la cellule dans laquelle il est déposé; car la mère-abeille peut, à volonté, par l'action des fibres musculaires de la spermathèque, laisser sortir le sperme sur l'oeuf ou, au contraire, le retenir. Dans le premier cas, elle pond des oeufs de femelles (mères ou ouvrières); dans le second cas, des oeufs de mâles. Une fois commencée, la ponte se continue presque sans interruption pendant toute la belle saison; elle cesse vers le milieu d'octobre, dès que les premiers froids se font sentir, pour recommencer au printemps suivant. Elle s'effectue avec une grande célérité, bien qu'un certain ordre y préside. Les oeufs d'ouvrières sont pondus les premiers; d'ordinaire, la mère n'en pond pas d'autres pendant les dix premiers mois de son existence; viennent ensuite les oeufs de mâles dont le nombre s'élève de 1500 à 3000; le tour des oeufs d'ouvrières revient de nouveau, et dix jours après cette ponte, qui comprend également un certain nombre d'oeufs de mâles, commence la ponte dans les cellules royales, mais à des intervalles de un à deux jours, afin que les jeunes mères ne puissent pas éclore toutes en même temps. Quand parfois, trop pressée de pondre, la mère-abeille laisse tomber plus d'un oeuf dans une même cellule, des ouvrières qui la suivent, et semblent la surveiller, retirent aussitôt les autres et les détruisent. De l'oeuf sort, au bout de trois jours (cela aussi bien pour les mâles que pour les ouvrières et les femelles fécondes), une larve ovalaire, molle, blanchâtre et apode, qui se tient roulée au fond de la cellule. Des ouvrières appelées nourrices, par opposition à celles nommées cirières, parce qu'elles ont pour occupation spéciale de construire les gâteaux, se chargent de veiller à ses besoins; elles la visitent à différentes heures de la journée et dégorgent dans la cellule où elle repose la bouillie destinée à son alimentation. Cette bouillie se compose d'un mélange de miel, d'eau et de pollen qui a déjà subi, dans le jabot des nourrices, un commencement de digestion; elle est assimilée si complètement que la larve ne fait pas d'excréments dans sa cellule. Les larves de mâles et d'ouvrières n'en reçoivent pas d'autre; elle leur est distribuée par égale portion et en quantité strictement nécessaire. Il n'en est pas de même à l'égard des larves destinées à devenir des femelles fécondes; une bouillie toute spéciale, qui exerce une influence remarquable sur le développement des ovaires et des organes génitaux, leur est distribuée à profusion. Cette bouillie; appelée pâtée royale ou prolifique, ressemble à une épaisse gelée; elle contient un peu de cire et de sucre et au moins les neuf dixièmes d'albumine et de fibrine azotées. C'est à cette nourriture particulière que les femelles doivent d'atteindre leur développement parfait; c'est également ce qui explique comment les ouvrières, qui ont perdu leur mère féconde, peuvent la remplacer à volonté, lorsqu'elles ne voient pas de mère nouvelle prête à éclore; elles choisissent alors une larve d'ouvrière, agrandissent, en démolissant les cellules environnantes, la cellule dans laquelle elle est enfermée, et lui préparent de la pâtée royale; cette nourriture en fait une mère féconde appelée mère de sauveté. Telle est encore son influence que, s'il vient à en tomber quelques parcelles sur les oeufs d'ouvrières placés autour des cellules royales, les larves qui s'en nourrissent deviennent aptes à propager leur espèce, mais elles ne pondent jamais que des oeufs de faux-bourdons; on les désigné alors sous le nom de mères bourdonneuses. Quand les larves, après avoir subi plusieurs mues, ont acquis leur entier développement (La métamorphose des insectes), les ouvrières cessent de leur apporter de la nourriture et ferment les cellules au moyen d'un petit couvercle en cire, de forme bombée pour les larves d'ouvrières et de faux-bourdons, en forme de cloche guillochée pour celles des femelles fécondes. Chaque larve s'enveloppe alors d'un cocon soyeux, dans lequel elle se transforme peu à peu en nymphe, puis en insecte parfait. La durée de ces transformations varie suivant les différents sexes. Les ouvrières restent sept ou huit jours à l'état de nymphe; le vingtième jour à partir du moment où l'oeuf a été pondu, elles déchirent leur enveloppe soyeuse, rongent, avec leurs mandibules, le couvercle de leur cellule, et sortent pourvues d'ailes. Dans cet état, elles sont encore humides et se tiennent sur le bord des gâteaux; mais d'autres ouvrières les entourent, les lèchent, absorbent leur humidité et leur offrent du miel; vingt-quatre heures après avoir quitté leurs cellules, elles vont à leur tour butiner dans la campagne. Les mâles, au contraire, ne se métamorphosent en insectes parfaits que le vingt-quatrième jour à compter du moment où l'oeuf a été pondu. Ils ne vivent environ que deux ou trois mois, car, aussitôt que la fécondation de la mère-abeille a eu lieu, les ouvrières s'en débarrassent, comme de consommateurs désormais inutiles, en les tuant ou en les chassant hors de la ruche. Quant aux femelles fécondes, l'enveloppe qu'elles se filent à l'état de nymphe n'entoure qu'une partie de leur corps, laissant à nu l'extrémité de l'abdomen. Elles parviennent à l'état ailé dès le seizième jour à dater de la ponte de l'oeuf. Mais si la mère-abeille habite encore la ruche, elles restent prisonnières et sont gardées à vue. Les ouvrières rétrécissent leurs cellules en fortifiant le couvercle par un cordon de cire et n'y laissent qu'un petit trou par lequel elles dégorgent du miel sur la trompe des jeunes femelles captives; aucune d'elles n'est rendue à la liberté avant le départ de la mère-abeille. L'essaimage.
« D'abord, un bourdonnement se fait entendre par intervalles, la soir et pendant la nuit ; la plupart des Abeilles s'entassent à l'entrée de la ruche ; celles qui reviennent chargées conservent leur pollen et se réunissent aux divers groupes ; peu d'ouvrières vont butiner, la plupart volent devant la ruche. A l'intérieur, tout est agitation. Au bruissement produit par les jeunes femelles captives, la mère-abeille est prise d'une sorte de fureur, elle parcourt avec inquiétude les gâteaux; visite les alvéoles et cherche à se jeter sur les cellules royales pour y tuer ses rivales. Arrêtée dans ce projet par les ouvrières, elle entre en délire et le communique au reste de la ruche. Plus de soin de larves, plus d'approvisionnements; les butineuses, à peine revenues des champs, partagent l'effervescence.. générale et courent à travers la ruche sans chercher à se , débarrasser de leur butin. Tout à coup, la température de la ruche s'élève à 31° et parfois même à 35°; le tumulte est à son comble; enfin, un certain nombre d'ouvrières s'envolent au dehors, suivies par la mère et par quelques faux-bourdons. L'essaim, ainsi constitué, s'élève dans les airs en tourbillonnant, puis, après s'être balancé pendant quelques instants, va se fixer, le plus ordinairement, sur une branche d'arbre; de minute en minute, le peloton se grossit des retardataires qui n'avaient pas quitté la ruche au départ. Quand presque tous ont rejoint, le calme se fait dans cette masse tout à l'heure si bourdonnante, et l'essaim pend en grappe immobile, escorté seulement de quelques éclaireurs qui voltigent à l'entour. C'est le moment de le recueillir, car si on le laisse trop longtemps à lui-même, il finit par prendre sa volée et va s'établir dans le creux d'un arbre, dans le creux d'un rocher, dans le trou de quelque vieil édifice ou une toiture de maison abandonnée. » (V. Rendu, Moeurs pittoresques des Insectes, p. 30).Après cette émigration, un grand vide s'est fait dans la ruche; mais, d'une part, les ouvrières en expédition et qui, par cela même, n'ont pu accompagner l'essaim, rentrent au gîte; de l'autre, les éclosions se succèdent d'instant en instant, de sorte qu'au bout de quelques jours, la population se trouve être reconstituée. C'est alors que les ouvrières, n'ayant plus intérêt à retenir captives les jeunes femelles fécondes, rendent la liberté à celle d'entre elles qui est éclose la première, et, aussitôt qu'elle est fécondée, elles lui abandonnent les femelles contenues dans les cellules royales; la nouvelle reine les tue toutes sans pitié les unes après les autres. Deux reines, en effet, ne peuvent exister à la fois en liberté dans la même ruche, attendu que les ouvrières, malgré leur activité, ne pourraient suffire à tous leurs travaux si elles avaient affaire à deux femelles douées toutes deux d'une prodigieuse fécondité. Du reste, la prééminence de la nouvelle reine ne s'établit pas toujours sans difficultés. Il arrive parfois que, dans le trouble occasionné par le départ de l'essaim, deux jeunes femelles fécondes, imparfaitement surveillées, sortent en même temps de leurs cellules respectives; elles fondent, alors l'une sur l'autre, et se battent jusqu'à ce que la plus habile ou la plus heureuse ait tué sa rivale d'un coup d'aiguillon. (Ed. Lefèvre). |
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