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Histoire de la Nouvelle-Calédonie
Arrivés il y a environ 3500 ans, les premiers habitants de la Nouvelle-Calédonie, étaient issus de populations principalement d'origine mélanésienne. Les Lapita étaient d'habiles navigateurs et les traces de leurs poteries dans le Pacifique ont servi de guide pour comprendre l'expansion humaine dans la région. Des vagues successives de migrants venus d'autres îles de Mélanésie se sont mariées avec les Lapita, donnant naissance au groupe ethnique Canaque (ou Kanak) considéré comme indigène en Nouvelle-Calédonie. Les Kanaks ont développé une culture distincte, basée sur l'agriculture (notamment la culture de l'igname, du taro et de la banane), la pêche et l'élevage de porcs. Ils vivaient dans des clans organisés en chefferies. Les échanges entre les différentes tribus étaient courants, tout comme les conflits pour le contrôle des ressources. Les Kanaks avaient également développé des pratiques artisanales, notamment dans la sculpture sur bois, qui reste un aspect important de leur culture.

L'Europe a connu cette Ă®le grâce Ă  James Cook qui dĂ©couvrit la Nouvelle-CalĂ©donie, Ă  laquelle il donna le nom latin de l'Ecosse, le 4 septembre 1774, ainsi que l'Ă®le des Pins, le 26. Il avait abordĂ© Ă  Balade. Ce fut en ce mĂŞme point que mouilla, le 17 avril 1793, Entrecasteaux, après avoir reconnu en 1792 l'Ă®le des Pins et explorĂ© ces parages, tandis que Beautemps-BeauprĂ© en dressait les cartes hydrographiques. II faut placer ici les nombreuses explorations dans l'Ă®le et sur ses cĂ´tes par les navigateurs baleiniers et sandaliers : les vexations que subirent alors les habitants expliquent leurs sanglantes reprĂ©sailles et ont inaugurĂ© une histoire politique souvent mouvementĂ©e. 

Le commerce du bois de santal, très recherchĂ© en Chine pour la fabrication d'encens et de meubles, a attirĂ© les premiers commerçants europĂ©ens vers la Nouvelle-CalĂ©donie dans les annĂ©es 1800. Les premiers missionnaires, notamment de la London Missionary Society, ont dĂ©barquĂ© en Nouvelle-CalĂ©donie en 1840. En 1843, Jules Dumont d'Urville a effectuĂ© une visite dĂ©taillĂ©e de l'archipel, soulignant son importance stratĂ©gique dans le Pacifique Sud. La mĂŞme annĂ©e, le BucĂ©phale y amena des missionnaires français, et hissa le drapeau français sur l'Ă®le. Le commandant, La Ferrière, dut ĂŞtre dĂ©savouĂ© par son gouvernement, par suite des rĂ©clamations de l'Angleterre. La Seine fut expĂ©diĂ©e pour faire retirer le pavillon français. Dans cette mission ce bâtiment se perdit sur les rĂ©cifs de PouĂ©bo (4 juilet 1846), l'Ă©quipage revint en France sur un navire anglais, comme pour combler la mesure. 

En 1851, la corvette française l'Alcmène, commandée par le comte d'Harcourt, étant au mouillage de Balade, une de ses embarcations fut attaquée par les Canaques, et ses officiers et matelots furent tués et dévorés; seul, un jeune novice de la marine échappa au massacre. Ce fait détermina la prise de possession de l'île, qui, d'ailleurs, semblait convenir, aux yeux des moralistes de l'époque, pour l'internement des condamnés. Ce fut encore à Balade qu'elle eut lieu, par l'amiral Febvrier Despointes le 24 septembre 1853. A ce moment, un commodore anglais, Taylor, commandant d'une mission scientifique sur l'Herald, négociait à l'autre extrémité, avec le chef Vandégou de l'île des Pins, le protectorat de cette île. Sur ces entrefaites, arrive, avec sa corvette le Phoque, l'amiral français, prévenu par le P. Montrouzier à Balade. Il agit sur Vandégou, mis dans les intérêts de la France par les missionnaires français; et ce fut le pavillon tricolore qui définitivement fut arboré sur ce point. Le drapeau anglais, qui avait été déjà hissé par un des compagnons de Taylor, un des savants, nommé Clarke, fut amené. Le malheureux commodore, sensible aux reproches de son état-major, à cause de sa faiblesse, se brûla la cervelle à l'arrivée de l'Herald à Sydney.

Au mois de janvier 1854, le capitaine de vaisseau Tardy de Montravel, commandant la Constantine, dĂ©couvrait l'excellente rade de NoumĂ©a et choisissait ce port naturel, le plus rapprochĂ© de Sydney, pour y Ă©tablir le chef-lieu ou capitale de la colonie : la ville reçut le nom de Port-de-France, qu'elle ne garda pas. De 1853 Ă  1860, la Nouvelle-CalĂ©donie fut placĂ©e sous les ordres du gouverneur des Ă©tablissements français de l'OcĂ©anie et dirigĂ©e pendant ses absences, par un commandant particulier. Un dĂ©cret du 14 juillet 1860 l'Ă©rigea en colonie distincte, sous l'autoritĂ© d'un commandant, Ă  dater du 1er juillet. Ce titre fut changĂ© peu après en celui de gouverneur. Le capitaine de vaisseau Guillain fut le premier gouverneur de la Nouvelle-CalĂ©donie et dĂ©pendances, ayant Ă©tĂ© nommĂ© par dĂ©cret du 14 dĂ©cembre 1861. Il dut pourvoir Ă  l'organisation, entreprendre des travaux, rĂ©primer des soulèvements des Canaques, un entre autres, en 1868. 

Du nickel a Ă©tĂ© dĂ©couvert en 1864. La France a fait venir alors des travailleurs sous contrat et de la main-d'oeuvre asservie d'autres rĂ©gions d'Asie du Sud-Est pour travailler dans les mines, empĂŞchant ainsi les Kanaks d'accĂ©der Ă  la partie la plus rentable de l'Ă©conomie locale. Mais ce sont les prisonniers français qui ont Ă©tĂ© chargĂ©s d'exploiter cette nouvelle ressource.  La sociĂ©tĂ© Le Nickel (SLN), fondĂ©e en 1880, est devenue une entreprise centrale dans l'exploitation du nickel, un minerai qui reste aujourd'hui une ressource clĂ© pour l'Ă©conomie calĂ©donienne. Ce fut dès 1864, en mai, que le premier convoi de condamnĂ©s, au nombre de 250 arriva et forma le noyau du pĂ©nitencier de l'Ă®le Nou. Par la suite, le nombre des condamnĂ©s expatriĂ©s a progressĂ© rapidement, il Ă©tait; Ă  la fin de 1884, de 14 358 individus; en 1875, il y en avait dĂ©jĂ  6 647, sans compter 3937 dĂ©portĂ©s. La dĂ©portation remontait Ă  l'annĂ©e 1871 (Commune) et a pris naissance dans des circonstances exceptionnelles. Environ 4000 de ces condamnĂ©s politiques furent placĂ©s, les uns Ă  la presqu'Ă®le Ducos, enceinte fortifiĂ©e, les autres Ă  l'Ă®le des Pins, dĂ©portation simple (4 octobre 1872). Leur concours pour la colonisation promettait de bons rĂ©sultats; nulle Ă©vasion, quoique facile, ne se produisit avant celle de Rochefort; bientĂ´t la perspective d'une amnistie prochaine annula tout service de leur part pour le dĂ©veloppement de la colonie jusqu'Ă  la fin de leur sĂ©jour, en 1880.

En 1878, le 25 juin, une insurrection plus sĂ©rieuse que les prĂ©cĂ©dentes, menĂ©e par le grand chef AtaĂŻ, Ă©clata, dĂ©terminĂ©e par les prĂ©judices causĂ©s, dans leurs propriĂ©tĂ©s et dans leurs idĂ©es religieuses, aux Canaques, malentendus qu'on aurait pu Ă©viter. Ceux-ci, Ă©tant divisĂ©s, ils furent rapidement rĂ©primĂ©s par les troupes, sous le haut commandement du gouverneur Olry. Cette insurrection n'en eut pas moins une rĂ©percussion fâcheuse sur la colonisation en montrant son insĂ©curitĂ©.  Les Kanaks furent relĂ©guĂ©s dans des rĂ©serves, ce qui a encore donnĂ© lieu Ă  des soulèvements pĂ©riodiques de moindre ampleur et aboutira Ă  une grande rĂ©volte en 1917, brutalement rĂ©primĂ©e par les autoritĂ©s coloniales.

Après le dĂ©part des dĂ©portĂ©s, des condamnĂ©s et libĂ©rĂ©s, bientĂ´t au nombre de 750, vinrent prendre leur place, qu'ils cĂ©dèrent Ă  leur tour Ă  la fin de 1886, car cette malheureuse petite Ă®le annexe reçut, le 28 janvier 1887, les 300 premiers relĂ©guĂ©s collectifs, un nouvel Ă©lĂ©ment pĂ©nal, les rĂ©cidivistes ou les incorrigibles, relĂ©guĂ©s loin de France, moins criminels que dĂ©shĂ©ritĂ©s et misĂ©rables, privĂ©s de toute Ă©nergie, «-parasites sociaux », selon les termes de l'Ă©poque, et qui s'avĂ©rèrent constituer  une cause d'encombrement et une gĂŞne plutĂ´t qu'une aide pour la colonisation, qui allait prendre un nouveau tournant après la dissolution complète de la colonie pĂ©nitentiaire en 1897, mais aussi accentuer les tensions et les conflits entre les anciens habitants de l'Ă®le et les nouveaux.

Au début du XXe siècle, la population européenne (ou caldoche) a continué à croître grâce à l'immigration de colons français, mais aussi d'autres Européens. Ces colons ont développé l'agriculture, notamment l'élevage, et ont consolidé leur position dans l'administration et l'économie de l'île. La ségrégation entre les Européens et les Kanaks s'est renforcée, les Kanaks étant de plus en plus marginalisés dans leur propre pays.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, la Nouvelle-CalĂ©donie, ralliĂ©e Ă  la France Libre dès 1940, est devenue une base importante pour les troupes alliĂ©es. Les États-Unis y ont transfĂ©rĂ© en 1942 leur quartier gĂ©nĂ©ral du Pacifique Sud.  Ce contact avec les forces alliĂ©es a accĂ©lĂ©rĂ© la modernisation de l'Ă®le et a ouvert les Kanaks Ă  de nouvelles idĂ©es, notamment celles liĂ©es Ă  l'autodĂ©termination.  En 1946, après la guerre, la Nouvelle-CalĂ©donie a bĂ©nĂ©ficiĂ© d'un dĂ©but d'autonomie en devenant un territoire d'outre-mer. La citoyennetĂ© française a Ă©tĂ© accordĂ©e Ă  tous les habitants en 1953, ce qui a permis aux Kanaks de quitter les rĂ©serves.  Mais cela n'a en rien permis de rĂ©soudre le conflit foncier latent entre Canaques et Caldoches. Dans la pratique, les Kanaks continuaient aussi Ă  ĂŞtre largement exclus du pouvoir politique et Ă©conomique.

Dans les annĂ©es 1950 et 1960, les inĂ©galitĂ©s persistantes et la marginalisation ont conduit Ă  la formation de mouvements autonomistes et indĂ©pendantistes. En 1956, l'Union CalĂ©donienne (UC) a Ă©tĂ© fondĂ©e, initialement un mouvement multiracial, qui prĂ´nait l'autonomie au sein de la RĂ©publique française. Cependant, au fil du temps, l'UC s'est orientĂ©e de plus en plus vers un agenda pro-indĂ©pendance sous l'influence de leaders kanaks comme Jean-Marie Tjibaou. Mais la plupart des Ă©lecteurs ont choisi de rester un territoire lors d'un rĂ©fĂ©rendum sur l'indĂ©pendance en 1958. 

La population europĂ©enne de la Nouvelle-CalĂ©donie a connu un boom dans les annĂ©es 1970, avec un regain d'intĂ©rĂŞt pour l'exploitation du nickel, ce qui a ravivĂ© le nationalisme kanak.  Les tensions ont progressivement conduit Ă  une polarisation politique, avec d'un cĂ´tĂ© les mouvements indĂ©pendantistes kanaks, et de l'autre, les partisans du maintien de la Nouvelle-CalĂ©donie dans la RĂ©publique française.  Le Front de LibĂ©ration Nationale Kanak et Socialiste (FLNKS),  dirigĂ© par Jean-Marie Tjibaou, a Ă©tĂ© crĂ©Ă© en 1984, regroupant plusieurs partis indĂ©pendantistes sous une mĂŞme bannière. Ce mouvement demandait l'indĂ©pendance complète de la Nouvelle-CalĂ©donie, mettant en avant les revendications des Kanaks pour la reconnaissance de leur identitĂ©, de leurs terres, et de leurs droits.

Cette période, connue sous le nom des Événements, a été marquée par une série de conflits violents entre les indépendantistes et les loyalistes, ainsi qu'avec les forces de l'ordre françaises. Les tensions ont culminé en 1988 avec la prise d'otages d'Ouvéa, où des militants du FLNKS ont attaqué une gendarmerie et retenu des gendarmes en otage dans une grotte. L'assaut final des forces spéciales françaises pour libérer les otages a conduit à la mort de 19 militants kanaks et de deux gendarmes, exacerbant encore les tensions.

Après la crise d'Ouvéa, des négociations ont été entamées sous l'égide du Premier ministre français Michel Rocard. Elles ont abouti aux Accords de Matignon en juin 1988. Ces accords, signés par Jean-Marie Tjibaou pour le FLNKS et Jacques Lafleur pour les loyalistes, ont instauré une période de paix relative et prévu un processus de développement économique et social pour réduire les inégalités entre Kanaks et non-Kanaks. Ils ont également prévu un référendum sur l'indépendance à l'issue d'une période de dix ans.

Des accords ont été signés à Paris en 1988 (accords de Matignon), et qui allaient dans le sens d'une plus grande équité dans la répartitions des pouvoirs et des ressources dans l'île. Ils ont en particulier conduit à la création des trois provinces (Sud, Nord, et Îles Loyauté), avec un certain degré d'autonomie, permettant une gestion plus décentralisée des affaires locales. Un an après, le 4 mai 1989, Jean-Marie Tjibaou et Yeiwéné Yeiwéné, un autre leader du FLNKS, ont été assassinés par un Kanak indépendantiste. Cela n'a cependant pas empêché la poursuite du processus d'apaisement.

L'accord de NoumĂ©a, signĂ© dix ans après les Accords de Matignon, le 5 mai 1998, a consolidĂ© et approfondit le processus engagĂ© par les Accords de Matignon. Il a reconnu officiellement l'identitĂ© kanak et a prĂ©vu un transfert progressif des compĂ©tences de l'État français vers la Nouvelle-CalĂ©donie sur une pĂ©riode de 20 ans. Il a Ă©galement prĂ©vu un ou plusieurs rĂ©fĂ©rendums d'autodĂ©termination après 2014. 

• Le 4 novembre 2018, le premier référendum sur l'indépendance a eu lieu. La question posée aux électeurs était : « Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante? » Le "non" l'a emporté avec 56,7 % des voix, tandis que le "oui" a obtenu 43,3 %. Bien que le "non" l'ait emporté, le résultat a montré un soutien important à l'indépendance, en particulier dans les provinces Nord et Îles Loyauté, où la majorité des Kanaks résident.

• Le 4 octobre 2020, un deuxième référendum a été organisé, comme prévu par l'Accord de Nouméa. Le "non" a de nouveau remporté la majorité avec 53,3 % des voix, tandis que le "oui" a progressé, obtenant 46,7 % des suffrages. Ce résultat a confirmé la division persistante de la population entre indépendantistes et loyalistes.

• Le 12 décembre 2021, un troisième référendum s'est tenu. Cette fois, le "non" à l'indépendance a largement triomphé avec 96,5 % des voix, mais le scrutin a été marqué par un fort taux d'abstention (56 %) en raison du boycott des indépendantistes, qui estimaient que la pandémie de covid-19 empêchait un vote équitable.

Après le dernier référendum, la Nouvelle-Calédonie reste un territoire français, mais les divisions politiques et sociales persistent. Les discussions sur l'avenir institutionnel du territoire se poursuivent, avec des enjeux liés à l'autonomie accrue, à l'identité kanak, et à la réconciliation. En mai 2024, de nouvelles et violentes émeutes ont éclaté à la suite d'une proposition de réforme électorale dans le territoire, dont les dirigeants kanaks disent qu'ils permettront à davantage de résidents français de voter aux élections locales et de diluer l'influence politique des autochtones. L'état d'urgence a été décrété.
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