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La pluie

On appelle pluie la chute de gouttes d'eau venant de l'atmosphère. Dans l'immense majorité des cas, ces gouttes sont produites non pas par une condensation brusque de la vapeur d'eau contenue dans l'air sans nuages, mais par la réunion des fines gouttelettes toutes formées qui constituent les nuages et qui flottent comme des poussières à cause de la faiblesse de leur poids. La surfusion, qui est l'état normal de la partie supérieure des nuages d'hiver et aussi des grands cumulus de la saison chaude, joue dans la formation des gouttes de pluie un rôle encore méconnu. Les gouttelettes en surfusion se réunissent et se congèlent, soit par simple rencontre réciproque, soit, plus ordinairement, par rencontre avec les petits cristaux de glace qui se trouvent forcément dans leur voisinage immédiat; les petites agglomérations d'eau glacée ainsi formées tombent, fondent en route et s'adjoignent, avant comme après la fusion, toutes les gouttelettes qu'elles rencontrent. La pluie ordinaire est de la neige fondue et les gouttes de pluie des averses sont de la grêle fondue.

La pluie ayant pour causes premières la formation des nuages et leur précipitation sur le sol, la quantité de pluie tombée doit nécessairement varier, d'un point du globe à un autre, avec les circonstances locales qui incluent sur ces deux ordres de phénomènes. C'est de la surface de l'Océan, et, plus particulièrement, de la surface des mers tropicales, ou l'évaporation, sous l'action de la haute température, est beaucoup plus rapide, que s'élève la plus grande masse de nuages. Aussi la quantité d'eau qui tombe annuellement est-elle relativement considérable dans les régions qui avoisinent ces mers ou dans les îles qui y émergent, et, comme là le Soleil a une influence décisive, la régularité de son action amène la régularité des pluies. Il existe notamment, aux environs immédiats de l'équateur, au-dessus du Pacifique et de l'Atlantique, une zone constante de nuages et de pluies, bien connue des navigateurs : c'est la zone des calmes équaloriaux; le cloud-ring des marins anglais, le pot-au-noir des marins français. Les deux alizés s'y rencontrent, apportant avec eux les énormes quantités de vapeurs d'eau prises au-dessus des mers surchauffées des tropiques; elles s'y condensent et il y pleut en moyenne neuf heures par jour. Sur les continents, la zone équatoriale des pluies oscille entre 5° N. et 3° S.; la saison des pluies s'y produit lorsque le Soleil est à sa plus grande hauteur, c.-à-d. au printemps et en automne, et on y distingue, par conséquent, dans chaque période de six mois, deux saisons, l'une sèche, l'autre pluvieuse. Il n'en est plus de même sous les tropiques. 

A mesure qu'on s'éloigne de l'équateur, les deux saisons pluvieuses, celle du printemps et celle de l'automne, vont, en effet, en se rapprochant; elles finissent par se confondre et il n'y a plus alors, chaque armée, qu'une seule saison de pluies, à l'époque de la canicule : c'est le temps de la mousson humide, qui correspond à l'été. Il pleut tous les jours, mais dans la journée seulement, principalement entre onze heures et cinq heures. Dans l'Océan Indien, la mousson du Nord-Est entraîne avec elle des pluies abondantes, qui vont se précipiter sur la partie orientale antérieure de l'Asie du Sud, toutefois la cause déterminante de la quantité de pluie extraordinaire qui tombe dans cette région est, en réalité, la mousson du Sud-Ouest, qui règne l'été et qui fait de la pente de l'Himalaya, à 300 ou 350 km au Nord de Calcutta, là où elle vient se heurter, le pays du monde où l'on recueille le plus d'eau (12.526 mm. par an à Tcherrapundji). En Europe, la pluie est amenée surtout par les vents du Sud-Ouest. Les époques des plus grandes pluies et les quantités d'eau tombées y présentent d'ailleurs la plus grande diversité. Dans le Sud, c'est l'hiver que les vents du Sud-Ouest dominent, et c'est aussi, par suite, la saison la plus pluvieuse. Sur la côte occidentale, au contraire, les vents du Sud-Ouest règnent à l'automne et c'est, dès lors, dans cette saison qu'il pleut le plus. 

Sur les côtes Sud et Ouest, en outre, la quantité d'eau annuellement recueillie est assez forte : de 1 m à 2,5 m. Elle est beaucoup plus faible dans l'intérieur : 500 mm en moyenne, et la majeure partie de la pluie y tombe en été, alors que les chaleurs, plus fréquentes, produisent des courants ascendants plus considérables. A l'intérieur de l'Asie, la quantité de pluie est également très faible, jusqu'à descendre sur certains points, à Barnaul, par exemple, à 190 mm. Sur la côte coréenne et chinoise, l'hiver est particulièrement sec, parce que, dans cette saison, règnent les vents de terre du Nord; mais l'été, où soufflent les vents de mer, ceux du Sud-Est, est très humide. Les quantités de pluie sont, du reste, moyennes : de 600 à 1100 mm environ. La partie Nord de la côte occidentale de l'Amérique du Nord offre, au point de vue qui nous occupe, une analogie très grande avec la côte Nord-Ouest de l'Europe. En Californie, au contraire, l'été est la saison la plus pluvieuse. Il en est de même sur les côtes du Canada et des Etats-Unis, où règnent, à cette saison, les vents de mer. En Amérique du Sud, il existe, au Sud du tropique, sur la côte occidentale, une région où tombent de grandes quantités de pluie, en juin et en juillet surtout ; la moyenne annuelle varie, par exemple, au Chili, de 2500 à 3500 mm. Sur la côte orientale, cette moyenne est beaucoup moindre, et elle diminue de proche en proche lorsqu'on descend vers le Sud. A Buenos Aires, par exemple, elle n'est déjà plus que de 1300 mm.

A mesure qu'on s'éloigne de la mer, dans la direction des vents dominants, la quantité de pluie va, avons-nous dit, en décroissant : ainsi il tombe à Bayonne, en moyenne, 1,25 m de pluie par an, à peu près autant à Gibraltar et à Nantes; il n'en tombe plus guère que 450 mm à Francfort, à Saint-Pétersbourg, à Vienne, et, en Sibérie, on n'en recueille plus que 200 mm. De 100 à 200 mm. sur la côte de l'Algérie, on tombe de même à 5 ou 6 mm à peine sur les confins du désert, aux environs de Biskra. 

Le relief du sol, autrement dit l'altitude, exerce, de son côté, une très grande influence. Là où les vents de mer se heurtent à une chaîne de montagnes hautes et escarpées, ils s'élèvent rapidement le long de ses flancs, avec les vapeurs d'eau qu'ils contiennent et, sous l'action de la condensation produite par le refroidissement, lequel peut être de 1°C par 120 m d'élévation, la précipitation a lieu, tandis que, sur le versant opposé, les mêmes vents n'arrivent que plus ou moins totalement privés de leur humidité, à l'état de vents secs. On en trouve un exemple sans s'éloigner beaucoup de Paris. Dans cette ville, la quantité d'eau que laissent annuellement les nuages passant au zénith est, en moyenne, de 550 mm; les mêmes nuages abandonnent à Langres, où les poussent les vents d'Ouest et qui est un peu plus élevé, 1 m d'eau; un peu plus loin, aux Settons, station supérieure du Morvan, on recueille 1,80 m. A Genève, en avant des Alpes, il tombe 825 mm d'eau, et au col du Grand Saint-Bernard, à une centaine de kilomètres à l'Ouest, 2 m.

Dans les régions de climat tempéré, comme celles de l'Europe occidentale, outre que les quantités de pluie tombées sont relativement faibles, les averses sont plutôt rares. A cet égard, la région parisienne correspond à un minimum : la moyenne annuelle d'eau tombée s'y tenant, en effet, aux environs de 550 mm, le nombre des jours de pluie s'élève néanmoins, non compris ceux, au nombre d'une soixantaine, où il ne tombe que quelques gouttes, à 140 environ, soit 4 mm d'eau à peine par pluie. Les averses elles-mêmes sont peu fortes, surtout à Paris. Depuis un siècle et demi, on n'en a pas observé qui aient duré plus de trente minutes avec un maximum de 2 mm d'eau à la minute. Il y en a bien eu qui ont donné jusqu'à 3,5 mm mais elles n'ont pas dépassé cinq à six minutes. Dans la région méditerranéenne, les grandes pluies sont plus communes, et sont même la règle; car, pour des moyennes annuelles sensiblement plus élevées, le nombre des jours de pluie est trois ou quatre fois moindre. On y observe, en outre, de véritables pluies torrentielles : telles celles, absolument extraordinaires, il est vrai, du août 1871, à Montpellier (154 mm en quinze heures) et du 21 octobre 1822 à Gênes (800 mm en vingt-quatre heures). Dans les régions tropicales, de pareilles pluies sont très fréquentes. Sur les bords du Rio Negro, notamment, il tombe presque tous les jours de 50 à 60 mm d'eau, et il arrive que, les gouttes se réunissant, la pluie forme comme une nappe. Dans l'Himalaya, il s'abattit, un jour, d'après Hooker, une trombe qui, en quatre heures, recouvrit le sol d'une couche liquide de 760 mm.

Il n'est pas aussi aisé qu'on serait tenté de le croire de connaître, avec quelque certitude, la quantité d'eau qui tombe en un lieu donné et la valeur moyenne de cette quantité à certaines époques. Il faut pour cela, réunir de longues et nombreuses observations, car la pluie est certainement, de tous les éléments météorologiques, celui qui est le moins assujetti à des règles fixes. C'est au moyen des pluviomètres que s'effectuent ces observations. Tous les observatoires et les nombreuses stations météorologiques y participent. (GE).

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