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L'Abyssinie
Le nom d'Abyssinie a Ă©tĂ© donnĂ© Ă  une ancienne grande contrĂ©e de l'Afrique orientale, bornĂ©e au Nord par la Nubie, Ă  l'Est par la mer Rouge, Ă  l'Ouest par le Sennaar et au Sud par une haute chaĂ®ne de montagnes, est arrosĂ©e par plusieurs affluents du Nil, dont les principaux sont le Bahr el-Azrek ou fleuve Bleu, le Maleg, le TacazzĂ©.  Cela reprĂ©sente environ  788 000 km²  (Ă  comparer aux 1 127127 km² de l'Éthiopie actuelle, qui, avec l'ErythrĂ©e (121 320 km²) a reçu l'hĂ©ritage de l'ancienne Abyssinie. Autrefois toute cette contrĂ©e formait un vaste empire soumis Ă  un seul prince, qui portait le nom de Grand NĂ©gus; il a Ă©tĂ© depuis le XVIIe siècle divisĂ© en plusieurs États indĂ©pendants, dont les principaux sont les royaumes de TigrĂ©, de Choa, de Dankali (Danakil), d'Amhara, d'Angot, de NarĂ©a, de Samara. Gondar Ă©tait autrefois la capitale de l'Abyssinie; ce rĂ´le a ensuite Ă©tĂ© dĂ©volu Ă  Ankober, puis Addis Abeba est devenue la capitale de l'Éthiopie en 1894, sous MĂ©nĂ©lik

Au cours des siècles, les Gallas, installés un peu plus au Sud, ont fait de fréquentes incursions dans ce pays et en ont conquis une partie. Les Abyssins professaient le Christianisme; néanmoins ils pratiquaient la polygamie. Ils appartenaient, comme leurs descendants contemporains à la secte monophysite ou eutychéenne. Les principales langues parlées sont l'amharique, le galami et le Tigryina, qui toutes trois appartiennent à la branche couchitique des langues afrasiennes

On trouve en Abyssinie les vĂ©gĂ©taux et les animaux des zones tropicales, et aussi, Ă  cause des nombreuses montagnes, ceux des zones tempĂ©rĂ©es; le zèbre, la girafe, l'hippopotame y sont communs; les arbres propres au pays sont le colqual, le girgir, le ouansĂ©, le cĂ©dera, le ginous, le gaguĂ©di, le kousso, dont le fruit fournit un excellent aliment; on en tire aussi de la myrrhe. Le principal commerce a longtemps consistĂ© dans l'exportation de l'ivoire et de la poudre d'or et dans la vente des esclaves. 
L'Abyssinie, dont la tradition judĂ©o-chrĂ©tienne fait descendre les premiers habitants de Chus, fils de Cham, est connue dès la plus haute antiquitĂ©. Cambyse, les PtolĂ©mĂ©es, les Romains tentèrent vainement de les soumettre. Saint  Frumence porta le Christianisme chez eux vers 330; deux siècles plus tard, ils adoptèrent le monophysisme d'Eutychès. Au VIIe siècle, les Musulmans envahirent la partie orientale de l'Abyssinie et y fondèrent Zeilah. Au XVe siècle, les Portugais entrèrent en rapport avec les Abyssins : Jean, roi de Portugal, envoya, en 1490, un ambassadeur Ă  leur roi (Covilham). Les jĂ©suites travaillèrent dès lors Ă  rallier les Abyssins Ă  la foi catholique; ils y rĂ©ussirent un moment; mais, en 1632, le roi, qui s'Ă©tait converti, fut dĂ©trĂ´nĂ© et les missionnaires chassĂ©s ou mis Ă  mort. Depuis, l'Abyssinie est devenue d'un très difficile accès aux EuropĂ©ens. Louis XIV envoya au grand NĂ©gus une ambassade, mais elle ne produisit rien. Au XVIIe siècle, l'empire abyssin se divisa en plusieurs États indĂ©pendants. En 1868 une expĂ©dition anglaise, commandĂ©e par le gĂ©nĂ©ral Napier, fut envoyĂ©e contre le nĂ©gus ThĂ©odoros, qui fut battu et se tua. 

Aux XVIIIe et XIXe siècles, l'Abyssinie a Ă©tĂ© visitĂ©e par de nombreux voyageurs  : Bruce, Salt, Pearce, Ruppel, Combes et Tamisier, Foret, Galinier, Rochet d'HĂ©ricourt, les frères d'Abbadie, Th. Lefebvre. Ll'Abyssinie, de mĂŞme que la Chine Ă  la mĂŞme Ă©poque, commence Ă  s'ouvrir aux relations avec l'Europe occidentale, le port de Messouah devient alors centre important de commerce. Le roi d'Amhara fut dĂ©trĂ´nĂ©, en 1852, par un des chefs militaires du pays, qui parvint aussi â renverser le roi de TigrĂ©, et Ă  se faire proclamer empereur d'Abyssinie, sous le nom de ThĂ©odoros. Mais le nouvel empire en cours de reconstitution ne put ĂŞtre rĂ©ellement consolidĂ© qu'Ă  la fin du siècle par MĂ©nĂ©lik, après que celui-ci ait pu maintenir son pouvoir sur la rĂ©gion. Celui-ci conquit le pays des Galla, au Sud-Ouest, et l'Ogaden, Ă  l'Est pour donner Ă  l'Ethiopie les contours qu'elle aura pendant pratiquement tout le XXe siècle. Seule l'ErythrĂ©e, le long de la Mer Rouge, manque et n'est intĂ©grĂ©e Ă  l'Ethiopie qu'en 1952, pour s'en dĂ©tacher d'ailleurs en 1993, après une longue pĂ©riode de guerre, pour former un nouvel Etat indĂ©pendant.
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L'Abyssinie en 1900.
GĂ©ographie politique.
Jusqu'au moment du règne de MĂ©nĂ©lik II, la constitution politique du pays est une fĂ©odalitĂ© tempĂ©rĂ©e par l'influence du clergĂ© et qui remonte Ă  1255, lors du rĂ©tablissement des rois chrĂ©tiens. Selon cette constitution, le roi, appelĂ© nĂ©gus, n'a en principe qu'un pouvoir nominal; le pouvoir rĂ©el est entre les mains du ras, espèce de maire du Palais qui habite Gondar. Dans quelques cas cependant le ras renverse les rĂ´les et se fait proclamer roi. Les seigneurs hĂ©rĂ©ditaires qui gouvernent les provinces n'obĂ©issent au roi ou au ras qu'autant qu'ils ne sont pas assez forts pour lui rĂ©sister. Le système fĂ©odal est poussĂ© jusqu'Ă  sa dernière limite. Les seigneurs hĂ©rĂ©ditaires ont au-dessous d'eux d'autres seigneurs et ceux-ci d'autres encore, jusqu'au simple paysan qui supporte toutes les charges de ce coĂ»teux système. Les provinces les plus importantes sont : au Nord, Hamasen, AgamĂ©, SaraouĂ©, ChirĂ©, TigrĂ© proprement dit, oĂą se trouvent Aksoum et Adoua, et Enderta; au centre, Ouoggara, SĂ©mèn, Ouag, Lasta, DembĂ©a, qui donne son nom au lac oĂą se trouve la capitale, Gondar, et Alafa; au sud, Damot, Godjam et le royaume indĂ©pendant de Choa, capitale Ankober. Il faut se rappeler que ces noms rĂ©pondent plutĂ´t Ă  des populations qu'Ă  des provinces, les seigneurs Ă©tant presque toujours en guerre et, suivant la fortune des armes, agrandissant ou perdant leurs domaines. 
-Abyssins.
Abyssins.

Le système administratif, établi au commencement du XVe siècle, rend chaque ville ou village responsable pour la somme fixée par les seigneurs comme impôt collectif; il y a aussi un système de douanes prélevé sur les marchands, douanes affermées à six fermiers, appelés négadé ras ou chefs des marchands, qui résident dans six villes sur la route habituelle des caravanes : Yedjibbé, Derrita, Gondar, Sokota, Adoua et Dobarik; dans cette dernière ville, le négadé ras est chrétien, mais dans les autres villes il est musulman. Les impôts se paient en nature et en argent; dans certains cas, il y a aussi des corvées. La justice est administrée par les seigneurs et les chefs des villages, excepté dans les villes de refuge; ces juges prétendent appliquer le livre de la loi, Fitha ha Négoust, composé d'extraits mal traduits du code de Justinien, mêlé à une masse de prescriptions religieuses; mais, ignorant le code qui devrait les guider, ils suivent beaucoup plutôt leur caprice et leur intérêt. Il y avait eu à Gondar douze docteurs, nommés Licks, chargés de l'interprétation de ce code; mais en 1900 il reste à peine dans toute la contrée une douzaine de personnes capables de le comprendre. Les châtiments sont le fouet, la mutilation ou la mort; dans les cas d'homicide; le coupable est livré aux parents qui ont droit de mort sur lui, mais qui peuvent se contenter d'une amende.

La carrière des armes, comme on doit s'y attendre dans un pays fĂ©odal, est la plus estimĂ©e et les Abyssins sont passionnĂ©s pour la guerre Ă  ce point que pour le moindre motif ils prennent les armes les uns contre les autres; un aventurier courageux et intrĂ©pide trouve toujours des compagnons. Souvent des condottieri infestent les routes et prĂ©lèvent des impĂ´ts forcĂ©s sur les caravanes et sur les paysans; c'est ainsi que le roi ThĂ©odoros a commencĂ©. En temps de guerre ou pendant les guerres civiles, chaque seigneur conduit ses hommes Ă  la suite de son suzerain. Chaque soldat est lui-mĂŞme suivi de plusieurs serviteurs qui souvent prennent part an combat.  Un seigneur peut toujours avoir autant de soldats qu'il a le moyen d'en payer. (G. Bertin).

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