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Abou
Zeïd Abd er-Rahman Ibn-Khaldoun (autres orthographes : Ibn Khaldun,
Ibn Haldun), surnommé Ouéli ed-Din, est un historien, littérateur
et philologue, né à Tunis, en l'année 732
de l'hégire (27 mai 1332) et mort au Caire,
le 17 mars 1406. Sa famille, originaire du Hadramaut,
s'était fixée d'abord à Séville où elle
avait occupé une importante situation, puis elle était venue s'établir
à Tunis auprès des princes Hafsides (Histoire
de la Tunisie)
qui lui prodiguèrent des marques de leur bienveillance et lui confièrent
de hauts emplois.
Après avoir étudié, dans sa ville natale, le Coran, les traditions, la grammaire, la poésie et la jurisprudence, auprès de son père, qui avait renoncé à la carrière politique pour exercer les fonctions de mufti, ainsi qu'auprès des hommes les plus célèbres de son temps, Ibn Khaldoun fut attaché, en l'année 749 (1348), au général Mohammed, fils de Tafarkin, qui exerçait une autorité presque indépendante à Tunis. Quatre ans plus tard, il entra au service du cinquième prince de la dynastie des Hafsides, le sultan Abou-lshaq-Ibrahim (Abou Ishâq II), en qualité de secrétaire. Son emploi consistait à écrire, en gros caractères sur les actes du gouvernement, la devise de ce prince. Sa haute intelligence l'avait très vite fait apprécier; mais, livré bien jeune encore aux intrigues des cours africaines, il ne sut pas résister aux sollicitations dont il était l'objet et, pour satisfaire son ambition, il ne craignit pas de passer du service d'un prince à celui d'un autre quand il y voyait son intérêt personnel. Ibn Khaldoun passa ainsi au service du souverain de Fès, Abou Othman (ou, comme le nomme Kasiri, Abou Anan) Farès, fils d'Ali, fils d'Othman, et ce prince le combla de faveurs. Après la mort de Farès, il s'attacha au sultan Abou-Salem, aussi roi de Fès et d'une grande partie de l'Afrique septentrionale, et fut employé par ce prince dans sa chancellerie, à cause de la beauté de son écriture. De Fès, Ibn Khaldoun passa en Espagne, d'Espagne à Bejaïa, puis à Tlemcen, tantôt ambassadeur ou premier ministre, tantôt disgracié et jeté en prison. Renonçant enfin à cette vie agitée et pleine de déboires (1374). Ibn Khaldoun se retira dans une de ses terres près de Tiaret et là il composa ses Prolégomènes. L'auteur nous apprend lui-même qu'il les composa en l'année 779 (1377), et n'y employa que cinq mois, qu'ensuite il les revit, y mit la dernière main et commença la rédaction de son Histoire universelle, qu'il ne put achever à ce moment faute de quelques renseignements. Il se décida alors à aller à Tunis consulter les ouvrages dont il avait besoin et, en l'année 781 de l'hégire (1382) poursuivit sa route dans le même dessein jusqu'à Alexandrie et de là au Caire, où il fixa sa résidence et enseigna publiquement dans divers collèges. En l'année 786 (1384),
le sultan d'Égypte
et de Syrie, Barkouk, nomma Ibn Khaldoun chef des cadis malékites (Islam)
en Égypte. Son intégrité, qui le portait à n'avoir, dans l'exercice
de ses fonctions, aucun égard aux recommandations et sollicitations des
hommes puissants, lui fit des ennemis; et le sultan, cédant à leurs instances,
le destitua en l'année 787 (1385). En 801 (1398), il fut de nouveau promu
à la même charge, et l'occupa jusqu'au commencement de l'année 803 (1400).
Il fut alors destitué par le sultan Faradj, successeur de Barkouk, et
il suivit ce prince, qui se rendait en Syrie pour s'opposer aux progrès
de Tamerlan.
Statue de Ibn Khaldoun, à Tunis. Photo : © Angel Latorre, 2008. Lorsque Tamerlan campait devant Damas, Ibn Khaldoun sortit de la ville et se fit présenter au conquérant turco-mongol, auquel il plut extrêmement par l'agrément de sa conversation. Tamerlan ayant quitté la Syrie, Ibn Khaldoun revint au Caire. Si nous en croyons Ahmed ben-Arabschah, historien arabe de Tamerlan, Ibn Khaldoun, qui avait fait assez bassement sa cour au conquérant, et n'avait rien négligé pour le flatter et s'attirer ses bonnes grâces, avait obtenu de lui la permission de se rendre au Caire pour aller chercher sa famille et ses livres et venir le retrouver au plus tôt. Quoi qu'il en soit, Ibn Khaldoun, de retour au Caire, y fut de nouveau investi des fonctions de grand cadi des Malékites en la même année 803; et après avoir encore été plusieurs fois destitué, puis rétabli dans cette charge, il mourut, en possession de cette magistrature, dans les derniers jours de ramadan de l'an 808 (1406), âgé de soixante-seize ans et vingt-cinq jours. L'oeuvre d'Ibn
Khaldoun.
Les
Muqaddimah.
Ibn Khaldoun (1332-1406). Nous croyons convenable de donner ici une idée de cet ouvrage. Après un court avertissement, qui indique le sujet du livre et son plan, vient une préface, où l'auteur traite de l'utilité de l'histoire, de la manière de l'écrire, et de la critique historique. Ibn Khaldoun y indique les diverses sources des erreurs dans lesquelles peuvent tomber ceux qui écrivent l'histoire. A cette occasion, il discute plusieurs faits importants de l'histoire ancienne des Israélites et des Arabes, ainsi que de l'histoire des califes; et il fait voir l'invraisemblance de divers récits répétés par la plupart des historiens. Cette préface se termine par quelques observations sur l'orthographe qu'Ibn Khaldoun a adoptée pour exprimer diverses articulations étrangères à la langue arabe. Des considérations générales sur l'origine de la société qui est naturelle à l'humain ouvrent la première section. A ces considérations succèdent une description succincte du globe et des réflexions sur l'influence physique et morale que la diversité des climats, de l'air, du sol et de la diète, exerce sur l'humain. Cette première section se termine par un long chapitre sur toutes les manières naturelles ou artificielles de connaître les choses secrètes ou futures, sur les révélations, les visions, les songes, la divination, les sorts, etc. Dans la deuxième
et la troisième section, la société et la civilisation sont considérées
dans leur état chez les peuples nomades et les Bédouins, c'est-à -dire
les habitants du désert, et particulièrement chez les Arabes le passage
de la société de famille à la formation des tribus et à leur confédération,
le genre de gouvernement, de domination, de conquête propre à cette constitution
de la société; l'influence de la religion
sur la formation de grands empires parmi les Bédouins; la manière dont
se forment ces empires, leurs limites naturelles, leur durée, les conditions
nécessaires à leur conservation, les causes de leur destruction, la condition
des princes, celle des sujets; les diverses natures d'autorité souveraine,
la définition du califat et de l'imamat, la conversion du pouvoir pontifical
des califes en une souveraineté monarchique
purement temporelle, la distinction entre la royauté et le sultanat, tels
sont les principaux objets traités dans ces deux sections.
Ibn Khaldoun auprès de Tamerlan, à Damas (1400). L'auteur parcourt ensuite toutes les parties essentielles de l'administration, le gouvernement général, la cour, la justice, la religion, les finances, les impôts, la guerre, le commerce, etc.; il fait connaître leur objet, leurs attributions, les formes avec lesquelles on les exerce, et les variations survenues dans chacune d'elles; puis il traite des vices qui s'introduisent dans le gouvernement, de leurs effets, des remèdes qu'on peut y apporter, et de la ruine inévitable qu'ils entraînent à la longue. La quatrième section considère l'état de la société et de la civilisation chez les humains réunis en grandes masses dans les villes, réunion qui prend sa source dans la tendance vers la monarchie temporelle : cet état de la société est le plus favorable à la construction des grands édifices et des monuments durables qui exigent le travail constant de plusieurs générations; il favorise les arts, le luxe et l'accumulation des richesses : il est, dans l'ordre de la civilisation, le dernier degré, et touche de près à la décadence et à la destruction des sociétés et des Etats. Dans la cinquième section, l'auteur traite du travail en général, considéré comme moyen de production et d'acquisition des choses nécessaires à la subsistance de l'humain; des diverses professions libérales ou mécaniques, telles que les sciences, les fonctions de la religion, de la magistrature, de l'administration, le commerce, l'agriculture, la médecine, l'architecture, l'écriture, l'art du tisserand, celui du tailleur, l'art des accouchements, la musique, etc. Enfin, dans la sixième
section, qui forme plus du tiers de l'ouvrage, Ibn Khaldoun parcourt tout
le domaine des diverses branches des sciences
: il en présente le système encyclopédique,
la classification et les divisions. C'est dans cette sixième section,
qui manque dans beaucoup de manuscrits,
que Hadj Khalfa a puisé les articles concernant les diverses sciences
dont il a enrichi son grand dictionnaire
bibliographique.
Ecriture manuscrite d'Ibn Khaldoun. (source : éd. Actes Sud, 1997). Toutes les parties de l'ouvrage dont on vient de lire une analyse bien imparfaite sont, entremêlées d'une multitude de faits curieux et d'exemples instructifs, pris chez les Arabes, les Persans, les Berbères et chez d'autres peuples anciens et modernes. On ne peut, en le lisant, que concevoir une très haute idée de la justesse d'esprit d'lbn Khaldoun, de sa sagacité, de son érudition, de la variété et de l'étendue de ses connaissances. Son style est serré, et quelquefois un peu obscur. Les idées manquent assez souvent des liaisons nécessaires, ou des développements que le lecteur pourrait désirer; les chapitres aussi ne sont pas toujours liés par des transitions bien sensibles. Nous avons déjà dit que ces Prolégomènes historiques ont été traduits en turc : l'auteur de cette traduction est Mohammed Pirizadeh, qui vivait sous le règne du sultan ottoman Achmet (Ahmed) III (L'Empire ottoman aux XVIIe et XVIIIe siècles). On assure que ce traducteur a remédié aux défauts de l'original, et que, par des additions et des suppléments placés à propos, et qu'il a eu soin de distinguer de ce qui appartient à l'auteur, il a encore ajouté, sinon au mérite essentiel, du moins à l'utilité de l'ouvrage, et en a rendu la lecture plus agréable et l'étude plus facile. La traduction turque est, dit-on, d'un tiers au moins plus longue que le texte original. Pour achever de faire connaître les annales d'Ibn Khaldoun, nous devons dire encore que le deuxième livre traite de l'histoire des Arabes avant et après l'Islam, jusqu'à la fin du VIIIe siècle de l'hégire; et que cette histoire est mêlée de notions plus ou moins étendues sur les Nabatéens, les Syriens, les Perses, les Juifs, les Egyptiens, les Grecs, les Romains et les Turcs. Le troisième livre est consacré à l'histoire des Berbères, ou peuples de l'Afrique septentrionale, de leurs diverses tribus, et des dynasties qui se sont succédé dans ce pays. Ces deux derniers livres ont été bien moins répandus que le premier, et n'ont pas joui de la même estime. (S. d. S-i).
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Abou Zalcarya Yahya lbn Khaldoun, frère du précédent, né à Tunis en 1334. Il vécut surtout à Fès et à Tlemcen et périt assassiné dans cette dernière ville par Aboû Tachfin, fils du sultan Aboû Hammoû. Il est l'auteur d'un ouvrage historique d'une forme très littéraire qui a pour titre : Nodjaet er-Rouwâdd fi Zikr el-Moulouk min Beni Abd el-Ouâd. Au milieu de périodes d'un style prétentieux, on y trouve quelques renseignements intéressants sur la dynastie des Abd el-Ouâdites. |
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