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La langue arabe
est une des langues sémitiques.
A l'époque du grand développement de l'empire des califes,
cette langue fut parlée depuis l'Inde jusqu'au Maroc, et, pendant
huit siècles, elle domina en Espagne. Aujourd'hui elle s'étend
encore - mais avec des variantes dialectales très marquées
- sur tout le nord de l'Afrique, l'Égypte, l'Arabie, la Syrie, et
toutes les contrées où le Coran a pénétré.
L'importance de l'étudier fut comprise en France dès le XVIe
siècle : en 1587, Henri III établit la première chaire
spéciale pour l'enseignement de l'arabe. Depuis lors cette langue
a continué d'être enseignée au Collège de France;
mais ce fut surtout après la création de l'École des
langues orientales vivantes, en 1795, que l'enseignement fut constitué
scientifiquement par Sylvestre de Sacy.
L'arabe est une langue savante et très
compliquée; elle a 28 lettres, toutes consonnes, qui, deviennent
voyelles à volonté au moyen de trois motions ou signes suscrits,
souscrits ou postcrits. Les noms et les adjectifs sont presque toujours
dérivés de la racine
des verbes, par l'addition de quelques lettres ou le changement des voyelles.
Ils se modifient par trois cas : le nominatif, le génitif et l'accusatif.
Il y a trois nombres : singulier, duel et pluriel. Les verbes forment 17
conjugaisons, dont 13 pour les verbes sains ou parfaits, c. -à-d.
réguliers; ils sont, suivant la conjugaison, actifs, passifs, neutres,
ou réfléchis. Chaque conjugaison a sa nuance ou signification
propre; par exemple, deux conjugaisons, la 9e
et la 11e, peignent les couleurs et les
difformités; la 10e exprime le désir
de faire une action, etc.
Dans la syntaxe, l'accord du substantif
avec l'adjectif, du relatif avec l'antécédent,
et du sujet avec le verbe, est le même que dans les langues
indo-européennes, sauf quelques exceptions. La construction
est généralement directe.
L'arabe est une langue très riche
: s'il repousse les compositions de mots, s'il doit recourir à des
circonlocutions pour exprimer certaines
idées complexes, il possède un vocabulaire fort étendu
et une rare souplesse de formes. Il y aurait 80 termes différents
pour exprimer le miel, 200 pour le serpent, 500 pour le lion, 1000 pour
le chameau, autant pour l'épée, et jusqu'à 4000 pour
rendre l'idée de malheur. C'est qu'une foule de nuances d'idées,
dont la subtilité fait qu'elles sont traduites par des termes spéciaux,
et que, dans le grand nombre d'expressions employées pour une même
idée, il y a une foule de figures et de tropes. Un grammairien arabe
dit qu'il faudrait 6 chameaux pour transporter le recueil des racines de
la langue; un autre auteur prétendit avoir compté 12 305
052 mots, en prenant sans doute pour des mots différents les modifications
que subit une même racine selon les cas, les nombres, les personnes,
les temps, les modes, etc. Il est certain que les racines arabes sont au
nombre de 6 000 environ, et que le vocabulaire comprend 60 000 mots.
On a l'habitude en Europe de diviser l'arabe
en littéral et dialectal : il n'y a qu'une langue arabe; mais il
faut la considérer sous les deux points de vue du style et de la
parole. L'arabe écrit est identique dans tous les pays musulmans.
Les altérations qu'on lui fait subir dans les rapports purement
oraux varient seules d'une localité à l'autre, comme cela
a lieu pour tous les idiomes; si elles sont introduites dans les écrits,
c'est par des infractions à la règle. Il y a deux différences
saillantes entre l'arabe écrit et l'arabe parlé, véritable
et seule distinction à faire, et qui d'ailleurs existe dans toutes
les langues vivantes. La première, c'est que l'arabe, ne s'écrit
pas comme il se parle. La seconde consiste en ce que presque tous les mots
de l'arabe écrit sont terminés par des voyelles brèves
ou motions qui servent à marquer les inflexions grammaticales, telles
que les cas dans les noms, les personnes, le nombre, le genre, les temps
et les modes dans les verbes. Dans l'arabe parlé ces motions n'existent
pas, les mots ne sont terminés par aucune voyelle. Cette suppression
a beaucoup simplifié le mécanisme grammatical : aussi les
règles de la grammaire se réduisent dans le langage à
un petit nombre.
L'écriture.
L'arabe s'écrit de droite à
gauche. Il se sert aujourd'hui d'une écriture appelée neskhi
; celle des Arabes du Hedjàz, au Ier
siècle de l'hégire, en différait peu. Un des anciens
caractères arabes est le coufique. Celui dont se servent les Arabes
d'Afrique a plus de rapport avec l'ancien coufique qu'avec le neskhi; les
Égyptiens ont adopté ce dernier.
Le coufique, un des alphabets
de l'écriture arabe, est ainsi nommé de la ville de Coufa,
où sans doute on avait commencé d'en faire usage. Il a une
si grande ressemblance avec l'ancien caractère des Syriens, nommé
estranghelo, qu'il n'est pas douteux que les Arabes ne l'aient emprunté
aux peuples de la Syrie. On ne saurait affirmer si l'alphabet dans lequel
fut originairement écrit le Coran
était en caractère coufique; toutefois, dans les collections
de la Bibliothèque nationale de Paris, on trouve des feuilles de
très anciens Corans écrits dans ce caractère.
Les lettres coufiques n'ont pas de points sur ou sous elles pour les distinguer,
comme dans l'écriture arabe ordinaire; leur allure semble s'être
conservée dans l'écriture des Africains. Ce caractère
se prête aisément à l'ornementation; il figure dans
un grand nombre d'inscriptions arabes de l'Alhambra.
Quelques écrivains se sont servis d'un alphabet coufique dont toutes
les lettres sont carrées. Quand le caractère coufique eut
été abandonné pour le neskhi dans l'usage ordinaire,
on continua de l'employer pour les monnaies
et les inscriptions.
Le neskhi, c.-à-d. écriture
des copies, est l'alphabet dont on se sert aujourd'hui pour écrire
l'arabe, et qui, avec l'addition de quelques signes, a été,
jusqu'à l'adoption de l'alphabet latin
au début du XXe siècle, commun
aux Turcs et à presque toutes les populations musulmanes de l'Asie.
C'est une écriture plus cursive à la fois et plus complète
que le coufique, dont elle dérive, sans lui être cependant
postérieure de beaucoup. L'écriture de l''iranien
(farsi) est une une manière élégante de le neskhi,
à laquelle on donnent le nom de talik (= suspendue). L'invention
du neskhi est généralement attribuée au vizir Ibn-Moklah,
dans la première moitié du Xe siècle;
mais il est employé sur des médailles plus anciennes. (G.
D.).
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