|
. |
|
![]() |
On
trouve très anciennement la flagellation et la fustigation
parmi les peines infligées par voie de correction religieuse. La
synagogue![]() Dieu, qui est miséricordieux, condamne l'iniquité, mais il n'extermine pas le pêcheur; il a détourné sa colère et n'a point allumé sa fureur.Comme le texte hébreu n'a que treize mots, il le répétait trois fois, accompagnant d'un coup chaque mot. Pendant ce temps, le pénitent confessait ses péchés, en se frappant la poitrine. Puis, les rôles étaient intervertis : le confesseur devenait le pénitent; il se prosternait, se confessait et recevait les trente-neuf coups de lanière (Synagoga judaica; Bâle, 1603). Une lettre de saint
Augustin (Epist. 159 ad Marcellum) atteste que, dans l'exercice
de leur juridiction, les évêques prononçaient des condamnations
au fouet. Trois fouets étaient appendus à un pilier de l'église
du mont de Nitrie, un pour les moines fautifs, un autre pour les voleurs,
le troisième pour les étrangers qui se conduisaient mal.
Un concile Au mot Disciplina, Du Cange cite, d'après un manuscrit, l'art. 33 du Liber ordinis sancti Victoris indiquant la manière dont la discipline pénale devait être administrée aux religieux. « Celui qui doit recevoir la discipline se relèvera sur les genoux et retirera modestement ses vêtements; puis, les ramenant au-dessous de sa ceinture, il se prosternera de nouveau. Ainsi gisant, il devra ou se faire ou ne prononcer que ces seuls mots : Je me purifierai de ma faute (Mea culpa ego me emundabo). Qu'aucun autre ne parle, à moins que ce ne soit quelqu'un des prieurs voulant intercéder. La discipline administrée, on aidera le patient à remettre ses habits. Ainsi revêtu, il se tiendra debout et immobile jusqu'à ce que l'abbé lui dise : Va t'asseoir (Ito sessum). Alors, s'inclinant, il regagnera sa place. - Qu'on sache bien qu'un supérieur en ordre ne doit pas être frappé par son inférieur, c.-à-d. un prêtre par un diacre, mais l'égal par l'égal, l'inférieur par le supérieur. » (Glossarium mediae et infimae latinitatis; Paris, 1840-1847, 7 vol. in-4.).L'imagerie' catholique représente parfois saint Jérôme avec une espèce de martinet composé de cinq ou six petites lanières agrémentées de morceaux de fer ou de plomb. Aucun document historique n'autorise cette représentation; la forme même de l'instrument semble indiquer une invention du Moyen Âge ![]() - ![]() Flagellants (Espagne, XVIe s.). Néanmoins,
il serait difficile de produire aucune preuve positive du fait, avant le
XIe siècle. On voit alors la flagellation
fleurir avec Gui, abbé de Pomposa, Popon, abbé de Stavelot,
Pierre Damien et saint Dominique l'Éncuirassé.
Les libri paenitentiales permettaient d'échanger les peines
ecclésiastiques, notamment le jeûne et la récitation
agenouillée des Psaumes Cette doctrine et ces exemples introduisirent dans les couvents la flagellation générale et régulière. Tout moine devait être fouetté chaque vendredi, après sa confession, soit par lui-même, soit par un des frères, en cellule, en chapitre ou dans l'oratoire. Dans le monastère de Saint-Gall, l'instrument était appendu à un pilier de la salle du chapitre. Le vendredi rappelait la mort de Jésus-Christ; le souvenir de la flagellation qu'il avait endurée en sa passion fit attribuer aux étrivières pieusement reçues une signification et une valeur qu'on n'avait point soupçonnées pendant les onze premiers siècles : on les considéra comme une sorte de communion aux souffrances du Sauveur. Parmi les laïques,
beaucoup, hommes et femmes, riches et pauvres, serfs et princes, s'empressèrent
de pratiquer cette dévotion. Il s'établit des confréries
pour répandre sur toute la chrétienté
les grâces qu'elle devait assurer. Un des vitraux de la Sainte-Chapelle
montre saint Louis agenouillé devant deux
moines armés de verges et courbant humblement le dos pour recevoir
leurs coups. En 1260, un dominicain,
Ranieri, persuada les habitants de Pérouse
de conjurer par des flagellations publiques les calamités résultant
des dissensions des guelfes et des gibelins. Des troupes se formèrent,
qui parcoururent les villes et les campagnes, en chantant des cantiques
et en se flagellant. De l'Italie, le mouvement s'étendit dans le
midi de la France, la Souabe Au milieu du siècle
suivant, les ravages causés par la peste noire Ces pénitents
s'appelaient eux-mêmes les dévots et ils proclamaient que
la flagellation est la dévotion par excellence. Ils n'excluaient
point péremptoirement les membres du clergé, mais ils ne
leur permettaient pas d'assister à leurs conseils secrets ni de
parvenir à leurs dignités électives, propter quod
laici sunt clero graviter indignati, dit une vieille chronique. C'était
donc parmi les laïques seulement que chaque confrérie élisait
son maître ou général de la dévotion et son
conseil dirigeant. Pour être admis dans l'association, il fallait,
après avoir reçu les sacrements, renoncer aux passions qui
règnent dans le monde, spécialement à tout sentiment
de haine ou de vengeance et à tout commerce avec les femmes. Les
confrères ne pouvaient accepter ni secours, ni aumônes, ni
même aucune nourriture sans l'autorisation de leur chef. Les règlements
obligeaient les récipiendaires à justifier de leurs moyens
de subsistance pour la durée du pèlerinage Or, avant, entre nous tous frères,Sur la place où ils devaient accomplir leur dévotion, ils se dépouillaient de leurs vêtements jusqu'aux reins, et formaient un grand cercle, au milieu duquel on apportait les malades et les infirmes, dont beaucoup se trouvèrent miraculeusement guéris; ce qui stimula si véhémentement la foi du peuple, qu'à Strasbourg on leur présenta même un enfant mort. La flagellation sacramentelle
était précédée d'une flagellation préparatoire,
pour laquelle tous les pénitents, prosternés à terre
dans des positions diverses, mimaient les péchés qu'ils avaient
à expier. Quand le maître de la dévotion, passant d'un
pécheur à l'autre, avait administré à chacun
un nombre de coups proportionné à ses fautes, tous se levaient
pour la pénitence commune. Les instruments de cette discipline étaient
des fouets armés de pointes de fer; il fallait que le sang coulât
pour que l'expiation fût méritoire. Cette flagellation avait
lieu deux fois par jour; elle devait être renouvelée pendant
trente-trois journées et douze heures, en l'honneur du temps que
Jésus-Christ a passé sur la terre. Cette série s'appelait
une dévotion, un pèlerinage; elle suffisait au salut individuel,
des flagellants; mais la pénitence générale devait
durer trente-trois ans pour l'Europe entière.
En 1389, à
l'époque où les fidèles gémissaient sur le
schisme d'Occident, un pèlerinage de pénitents, surnommés
les bianchi ou les blancs battus, à cause de la couleur de leurs
manteaux, descendit des Alpes dans la Haute-Italie, chantant le Stabat
mater Au commencement de son règne, Henri III rencontra dans les rues d'Avignon des compagnies de flagellants; il s'y enrôla, tant par prédisposition naturelle que par désir de manifester son aversion contre les doctrines protestantes. La cour et les principaux des grosses villes l'imitèrent. Il y eut alors trois ordres de pénitents, portant tous le fouet à la ceinture, mais divers par la couleur et par le patronage : les blancs étaient ceux du roi, les noirs ceux de la reine, les bleus ceux du cardinal d'Armagnac. Parmi tous, les mignons du roi se distinguaient par la superbe élégance du coup avec lequel ils faisaient jaillir le sang de leurs épaules. A la fin du XVIIIe siècle, on rencontrait encore, en Avignon et en Provence, des confréries de pénitents qui se fustigeaient publiquement. La flagellation publique a disparu en France au XIXe siècle; la flagellation intime a subsisté, elle, discrètement cultivée, mais honorée de haute et singulière estime par l'Église catholique, à qui l'expérience séculaire du confessionnal a donné une connaissance si profonde de la nature humaine. Non seulement elle est restée pendant ce siècle comprise dans la règle de plusieurs ordres de religieux et de religieuses, et elle apportait dans les cloîtres un intermède ou plutôt un condiment précieux pour relever, par des sensations d'une âcre mysticité, la monotonie et les langueurs de la vie contemplative; mais elle était spontanément pratiquée par des laïques épris de pénitence ou de sainteté. On la préconisait comme pénitence pour les péchés, comme moyen de mortification et de résistance contre les tentations, mais surtout comme communion aux souffrances de Jésus-Christ. C'est cette dernière considération que les apologistes du XIXe siècle font principalement valoir; elle doit être fort puissante sur les femmes et même sur certains hommes. Le célèbre dominicain et académicien Lacordaire se disciplinait passionnément. Voici ce qu'écrit à ce propos un de ses admirateurs : « Oui, en plein XIXe siècle, au lendemain de la Révolution et quand la cendre ironique de Voltaire était à peine refroidie, cet avocat, ce libéral, cet écrivain, cet homme d'esprit, cet orateur, ce grand homme, le P. Lacordaire, se donnait la discipline tous les jours et plusieurs fois par jour souvent. Il obligeait ses frères, au nom de la sainte obéissance, à l'attacher les épaules nues à un poteau, à le flageller, à lui cracher au visage, à le fouler aux pieds, à le lier sur une croix pendant les trois longues heures que Jésus-Christ son maître était resté vivant et sanglant sur la sienne... Ah ! disait Lacordaire, si le monde connaissait ce qu'il y a de bonheur à se sentir flagellé pour celui qu'on aime ! » (H. Villard, Correspondance inédite du P. Lacordaire, Paris, 1870, p. 120 in-8.).L'importance de la flagellation dans la discipline monastique a fait donner le nom commun de discipline aux divers instruments destinés à l'administrer : corde avec ou sans noeuds, courroie, férule, fouet simple ou armé de pointes de fer, martinet composé de lanières, de cordelettes, de bandes de parchemin tortillées et nouées ou de petites chaînes, bâton, baguette forte, faisceau de petites baguettes ou de branchages. (E.-H. Vollet). |
. |
|
|
|||||||||||||||||||||||||||||||
|